Saint Paul et les Evangiles
286 pages
Français

Saint Paul et les Evangiles , livre ebook

-

286 pages
Français

Description

Les Évangiles canoniques ont été rédigés vers la fin du premier siècle, entre 70 (Marc) et 100 (Jean). Dans L'évangile de Jérusalem, l'auteur a montré que ces textes résultaient de trois couches rédactionnelles successives séparées par deux événements majeurs : l'un linguistique (passage de l'araméen au grec), l'autre théologique. Ces événements étant largement antérieurs à la compilation finale des Évangiles, il était tentant de relire les lettres de Paul, comme témoin de l'évolution linguistique et théologique des Évangiles.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 01 septembre 2011
Nombre de lectures 92
EAN13 9782296468573
Langue Français
Poids de l'ouvrage 3 Mo

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Extrait












Saint Paul et les Évangiles














































© L’Harmattan, 2011
5-7, rue de l’Ecole polytechnique ; 75005 Paris

http://www.librairieharmattan.com
diffusion.harmattan@wanadoo.fr
harmattan1@wanadoo.fr

ISBN : 978-2-296-56461-9
EAN : 9782296564619
Francis LAPIERRE











Saint Paul et les Évangiles












L’Harmattan








1

Des Évangiles aux couches rédactionnelles
successives



1. - Généralités sur la rédaction des Évangiles

L’étude des Évangiles synoptiques (Marc, Matthieu, Luc) met en évidence
des rédactions successives, liées à l’évolution socio-culturelle des premières
communautés, ce qui entraîna une catéchèse à adapter aux nouveaux convertis.
Il n’est donc pas inutile de résumer ce que ces Évangiles nous ont appris sur
leur propre cheminement, l’Évangile de Jean étant examiné séparément.

L’analyse et la récurrence des formes verbales ainsi qu’un vocabulaire
spécifique nous ont amenés à proposer que Matthieu, Marc et Luc avaient en
commun un canevas sémitique de 250 versets, formant un récit simple mais
cohérent et dont la pièce la plus ancienne est un récit primitif de la Passion,
1particulièrement sémitisant.

Chez Marc, le récit de la Passion (Mc. 14,1-16,8) est précédé par un récit
apocalyptique, annonçant la fin des temps, sous la forme d’un long discours de
Jésus (chapitre 13). Il n’est pas absurde de penser que ce discours ait
représenté, un temps, le préambule au récit primitif de la Passion, premier texte
écrit des Évangiles, vu l’unité littéraire et la cohérence des procédés de
rédaction montrés par les chapitres 13 à 15, chez Marc.

Outre la Passion du Rabbi Jésus, ce canevas commun comprend
notamment : le baptême de Jésus, une prédication en Galilée autour de cinq
guérisons accompagnant la parabole du semeur, une multiplication des pains
– toujours en Galilée – la transfiguration, un enseignement dans le Temple de
Jérusalem, puis le Dernier Repas, la Passion et enfin la résurrection signifiée
aux femmes devant un tombeau vide.
L’ensemble ainsi énoncé constitue le kérygme – la proclamation primitive –
révélant une progression en trois étapes : un cycle de la semence, don originel
de Dieu, puis un cycle du pain partagé, où l’homme est associé à l’œuvre de

1 . Francis Lapierre, L’évangile de Jérusalem, L’Harmattan, 2006.

Dieu : la Création, un cycle de l’eucharistie enfin, où Dieu se fait chair, pour
diviniser l’humanité à son image.

Cette première couche littéraire, que nous proposons d’appeler le canevas
des Évangiles, paraît correspondre à une proclamation destinée à la
communauté de Jacques à Jérusalem. Jésus y est présenté comme un maître et
un guérisseur, tourné vers les siens. Un réformateur juif donc, souhaitant
comme Ésaïe, que toute oreille entende son message. Nul appel à la conversion
dans ce canevas, si ce n’est celle du cœur.

Au plan des rites eucharistiques, cette première communauté ne connaît du
Dernier Repas que la bénédiction sur la nourriture. Le récit d’Emmaüs de Luc
ne parle ainsi que de la fraction du pain, tout comme les multiplications des
pains en Galilée – reflets du rite eucharistique pratiqué dans la communauté de
l’évangéliste au moment où il rédige – ne rapportent qu’une bénédiction sur
cinq pains, ayant généré douze couffins de restes.

La réforme du judaïsme promue par Jésus aurait pu évoluer lentement,
comme toute secte juive spécifique à l’intérieur des différents courants de
pensée qui parcouraient Israël au premier siècle : esséniens, pharisiens,
sadducéens… chacun intégrant, à sa manière, les contraintes
socioéconomiques liées à l’occupation romaine.
C’était compter sans les gentils, les païens, que l’enseignement libérateur
du christianisme naissant enthousiasma. Très vite, ils demandèrent un
enseignement traduit dans la langue véhiculaire de l’époque : le grec,
revendication que partagèrent également quelques Juifs convertis vivant en
diaspora, plus à l’aise dans la lecture du grec de la Septante que dans celle de
l’hébreu des rouleaux du Temple.

Deux problèmes majeurs se posèrent alors aux premiers rédacteurs des
Évangiles :

- Une simple traduction se révéla impuissante à transmettre un enseignement
aussi savoureux que l’original, à des gens peu formés à l’interprétation de
la Torah et ignorants de l’histoire d’Israël. Il fallut donc, non traduire mais
transposer, trouver des équivalences, qui tiennent compte de
l’enracinement culturel des nouveaux convertis.
- Au plan du rite eucharistique, il fallut construire une théologie du Royaume
de Dieu souverain du temps et de l’espace, invitant les païens à s’associer
au Dernier Repas, dont l’histoire les avait privés, avec pour contrepartie,
une coresponsabilité morale dans les événements de la Passion, auxquels
ils étaient tout aussi étrangers.

6Les textes qui nous sont parvenus montrent donc la trace d’une couche
littéraire grecque secondaire, commentant paragraphe par paragraphe, sous
forme d’inclusions successives, le canevas sémitique originel.

L’ordre des paragraphes : Le Juif d’abord, puis le Grec rappelle sans
ambiguïté le développement de Paul dans la Lettre aux Romains, datée de 58.
Le texte grec complète et universalise le message destiné aux Juifs en
reprenant les mêmes concepts, mais avec des glissements de vocabulaire
systématiques, particulièrement visibles chez Marc, le plus précocement
terminé des Évangiles :

JUIF GREC

Maître ou Rabbi Seigneur, roi des Juifs,
Le Satan Le démon
Les souffles impurs Les démoniaques
Rabrouer Enjoindre
Guérir Sauver
Toucher (le malade) Imposer les mains
Les Douze Les disciples
Proclamer (kérygme) Enseigner
Se dresser (résurrection) S’éveiller (résurrection)
Retire-toi en paix Ta foi t’a sauvé.
Le soleil, la lune, les puissances L’enseignement du figuier,
des cieux, les anges (signes). l’été est proche (signes).
Sanhédrins, synagogues (autorités) Frère, père, parents, enfants (famille)

Une bénédiction Deux actions de grâce
Cinq pains brisés Sept pains rompus
Douze couffins Sept corbeilles


L’ordre immuable du binôme : le juif d’abord, puis le grec – chaque
inclusion grecque étant encadrée par deux versets parallèles : un introductif et
un conclusif, composés des mêmes mots-clés – indique une construction
littéraire appliquant dans les faits les orientations de l’épître aux Romains de
Paul :

- Les Juifs d’abord (primum), les Grecs ensuite
Lettre aux Romains (1,16 / 2,9-10).

Les doublets grecs représentent un fonds de deux cent quarante versets
environ, communs aux trois Évangiles synoptiques. Ces textes témoignent
d’une profonde évolution théologique. À la proclamation ouverte à tous ceux
qui ont des oreilles succède un enseignement à la maison, ou dans un endroit
7désert, réservé aux seuls disciples. De même, le sens des paraboles n’est révélé
qu’aux enseignés, afin d’éviter que ceux du dehors, pour qui tout est énigme,
ne se retournent et qu’il leur soi

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