Duel à Biarritz
18 pages
Français

Vous pourrez modifier la taille du texte de cet ouvrage

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Description

En prenant le chemin de Biarritz, le commissaire Langsamer espère bien enfin se reposer. En effet, pas franchement en bons termes avec son ex-collègue basque, il ne devrait pas être sollicité... Pour bien commencer son séjour, il décide donc d'aller faire du surf sur la plage du Miramar. Mais c'est l'accident. Direction la clinique Aguilera. Là, il engage la conversation avec son voisin de chambre, blessé à la tête, dont l'histoire familiale, emplie de trahisons et de tragédies, va le tenir en haleine.





Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 22 août 2013
Nombre de lectures 8
EAN13 9782823810509
Langue Français
Poids de l'ouvrage 3 Mo

Informations légales : prix de location à la page 0,0011€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

couverture
Jean-François Pré

Duel à Biarritz

images

Georges Langsamer n’arrivait pas à se glisser dans la vie d’un flic à la retraite. Il avait beau se dire qu’il avait largement l’âge d’en profiter aux frais de la société pour laquelle il avait très généreusement cotisé, qu’il était en droit d’être payé de retour et que ce repos forcé était un dû, rien n’y faisait. Langsamer ne tenait pas en place, il débordait d’énergie et se demandait pourquoi elle se déversait dans le vide.

Paradoxalement, Georges en avait assez de trouver des cadavres sur le chemin de ses vacances. Comme il ne croyait ni aux malédictions ni à aucune forme de manifestations paranormales, il était bien obligé d’en conclure que ses anciens confrères, restés pour la plupart des amis, le « piégeaient ». Avec le hasard – coquin de sort, comme disait Brassens – pour complice !

Là où l’ego de l’ancien commissaire relevait la tête, la tranquillité du papy retraité faisait les gros yeux. Son subconscient digérait mal ce contraste et son humeur en pâtissait. Plus que jamais, au cours de ce mois d’août, Georges Langsamer ressemblait à un gros plantigrade, bougonnant en son for intérieur.

En débarquant incognito à la gare de Biarritz, l’ancien patron du commissariat de Deauville se dit que, là, au moins, personne ne viendrait l’embêter. Il ne s’était jamais entendu avec le Divisionnaire Etchebest, personnage sombre et atrabilaire, qui faisait régner l’ordre sur la côte basque (enfin… côté français). S’il y avait un meurtre à élucider, Georges serait le dernier sur la liste. Pour en être bien sûr, il jeta furtivement un coup d’œil sur le quai. Quelques uniformes encadrant le flux des voyageurs… mais aucun flic en civil, il en mettait sa main à couper. Le comité d’accueil n’avait pas été convoqué. Il allait (enfin) passer de vraies vacances ! Entre Deauville, Paris Plage et La Baule 1, il avait donné cet été. Beaucoup donné. Le moment était venu de prendre du bon temps.

Langsamer héla un taxi et se fit conduire à l’ Hôtel du Palais. Afin que les vacances fussent vraiment bonnes, il ne rechignerait pas à la dépense. Arrivé dans sa chambre, il se laissa tomber sur le lit avec un soupir jubilatoire. Puis il ouvrit ses valises, rangea quelques affaires en pliant soigneusement ses chemises, réflexe de vieux célibataire, et se planta devant la mer sans plus bouger. Un vent frais balayait la terrasse. D’immenses vagues ridaient la soie indigo de l’océan. Il emplit ses poumons d’air marin. Un moment, sentant sa tête vriller autour d’un kaléidoscope stellaire, il faillit perdre connaissance. Une forte odeur d’iode salé, associée au panorama, le plongea dans de vieux souvenirs. Georges revit quelques parcelles de sa jeunesse quand, svelte et bronzé, il pratiquait le surf sur ces mêmes vagues qui déroulaient leur col blanc devant lui. Aujourd’hui, ça semblait difficile à croire. Mais le surf c’est comme le cheval, le vélo et, en fin de compte, beaucoup de sports pratiqués jeune… ça ne se perd pas. Ainsi germa l’idée folle d’aller, dès le lendemain, à la rencontre de ces lointaines sensations. Même s’il n’avait plus ses jambes de vingt ans, même s’il arborait une jolie brioche de soixante, Georges savait, à travers ses retrouvailles olfactives avec la brise marine, comment expurger ce trop-plein d’énergie qui lui procurait un fourmillement dans tout le corps.

Après un dîner au Bar à huîtres, sous le casino, et une nuit de sommeil ininterrompu, Langsamer se rendit de bon matin à la plage du Miramar, moins exposée aux regards que la Grande Plage. Il loua une planche Firewire pour la journée sous le regard incrédule du plagiste.

— À votre âge, j’ai gagné la Lacanau Pro, mentit Langsamer. Évidemment, vous ne pouvez pas vous en souvenir. Vous n’étiez pas né !

Puis il marcha vers la mer d’un pas décidé, planche sous le bras. Après avoir « fait trempette » tout en exécutant quelques mouvements d’échauffement, il se laissa voguer, à plat ventre, comme sur un canot pneumatique. Il ramait avec les bras, à la manière d’une tortue. À cette heure, les vagues n’étaient pas très violentes. Peu à peu, il retrouva ses sensations. Enfouies dans le passé, elles perçaient l’écume. Georges nagea vers le large et tenta de se faire porter par une vague plus consistante, toujours à plat ventre. Examen réussi. Il revint en arrière, s’éloigna un peu plus de la côte et décida que le moment était venu de monter sur la Firewire. De fait, il éprouva beaucoup plus de peine à s’y hisser, la bedaine faisant contrepoids, qu’à rester debout, une fois en équilibre. Il s’étonnait lui-même de la facilité avec laquelle il amortissait les déclivités, lorsqu’il jouait avec le creux des vagues, pliant les jambes, bras écartés, pour repasser sur la crête et s’y maintenir. Soudain, il reçut comme un coup de massue. Ses dernières perceptions furent un tourbillon bouillonnant, un choc violent, le magma verdâtre puis un trou noir.

*

Lorsque Georges souleva ses lourdes paupières, il vit une image blanche et floue, comme s’il était resté au fond de l’eau. Puis, le prisme de sa vue resserra la netteté des contours, telle une caméra dont l’objectif ferait le point. Il découvrit alors un univers blanc et des formes humaines tourbillonnant autour de lui.

— Il reprend connaissance, dit une forme qui paraissait avoir une voix féminine.

— À la bonne heure, répondit un homme en blouse blanche qui arborait un curieux collier autour du cou.

— Où suis-je ? demanda Langsamer.

— Vous êtes à la polyclinique Aguilera, expliqua l’homme au stéthoscope d’une voix posée et bien timbrée. Au service de chirurgie polyvalente.

— Que s’est-il passé ?

— Vous avez failli mourir noyé. Quand les pompiers vont ont amené ici, vous n’étiez pas beau à voir… mais vous n’aviez que très peu d’eau dans les poumons. En revanche, vous aviez subi un important traumatisme au niveau des cervicales.

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