Religieux dans les citadelles du politique
182 pages
Français

Religieux dans les citadelles du politique , livre ebook

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182 pages
Français

Description

Voici une analyse d'un discours théologique à travers la méthodologie d'un philosophe. La critique est centrée sur un théologien prédicateur célèbre : Yousouf Al Qaradawi, à travers une méthode en trois étapes : la démarche structuraliste, l'analyse historique et l'approche idéologique. Une telle méthode s'explique par la nature même de ce discours de prédication, avec une forte charge politico-idéologique. Il apparaît que les mécanismes du discours islamique actuel et surtout son projet politico-idéologique ne présentent guère de signes de conciliation avec l'époque moderne.

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Informations

Publié par
Date de parution 01 janvier 2015
Nombre de lectures 28
EAN13 9782336363561
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

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Extrait

Mohamed Ourya
RELIGIEUX DANS LES CITADELLES DU POLITIQUE
Le cas Qaradawi, théologien et prédicateur
Religieux dans les citadelles du Politique
Mohamed Ourya Religieux dans les citadelles du Politique Le cas Qaradawi, théologien et prédicateur
© L'HARMATTAN, 2014 5-7, rue de l'École-Polytechnique ; 75005 Parishttp://www.librairieharmattan.com diffusion.harmattan@wanadoo.fr harmattan1@wanadoo.fr ISBN : 978-2-343-03929-9 EAN : 9782343039299
Introduction
Le sujet de cet ouvrage est la pensée arabo-musulmane actuelle tant par ses déterminants que par ses expressions et ce par le biais d’une analyse du discours d’une théologie sous l’angle méthodologique d’un philosophe. D’emblée, il nous semble que plusieurs ouvrages « occidentaux » s’intéressent plus à la variante radicale et militante du discours islamiste politico-religieux (notamment depuis le 11 septembre 2001). Toutefois, une étude du discours islamique qui se définit lui-même comme modéré (ou wasati), particulièrement à la lumière des acquis de la modernité, s’avère appropriée et même nécessaire, notamment pour le bénéfice de la légitimation des idéaux de la modernité dans la culture islamique. D’autant que la conjoncture actuelle d’un Occident sensible à une communauté musulmane qui est de plus en plus présente et active en son sein et pour laquelle la nécessité d’intérioriser les valeurs de la société occidentale moderne, notamment l’idéal de la liberté, de la justice et de la démocratie, demeure importante. La question de la modernité est centrale dans les débats intellectuels musulmans. En effet, la raison musulmane fait face aux enjeux et aux conséquences de son adoption (ou de son rejet) depuis deux siècles pour le moins. D’ailleurs, le courant islamiste traditionnel et conservateur, ou au moins une partie de ce courant, a posé ce défi dans ses propres termes : 1 « l’islamisation de la modernité ». En d’autres mots, il faut s’efforcer à trouver un référent islamique à la modernité (i.e. le Coran ou la tradition du prophète de l’islam). C’est l’idée même deta’silal-hadatha[La quête des fondements de la modernité en islam]. D’ailleurs, l’actualité de cette pensée moderne se confond aussi avec des thèmes et des expressions qui furent dominants dans le passé médiéval du monde musulman. Dans cette perspective, on peut dire que le point central du discours islamique actuel est imprégné du rêve « passéiste » et traditionnaliste qui veut récupérer un âge d’or révolu en vue d’un avenir meilleur, mais résolument moderne. Cet héritage musulman(Turâth,[tradition]) reste la référence principale de ce discours religieux. C’est ainsi que le discours islamique réitère les mêmes thèses et problématiques élaborées, tels le culte du passé « glorieux », l’universalité de l’Islam, etc., notamment depuis les réformistes en Inde (comme Syed Ahmad Khan (1817-1898)) ou encore les penseurs de laNahda[Renaissance
1  Abdessalam Yassine,Islamiser la modernité, Casablanca, Al Ofok impressions, 1998, 334 pages.
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e arabe] au 19 siècle, et ce, avec un refus sinon une réconciliation difficile des idées occidentales. Pour essayer d’analyser ce courant, nous dirigerons notre attention principalement sur un théologien et prédicateur, Youssef Al Qaradawi et qui est né en Égypte en 1926. Le choix de cefaqihet (théologien juriste) sunnite est justifié par l’importance de son apport substantiel à la pensée musulmane actuelle. Activiste, Qaradawi rejoignit en effet le mouvement égyptien des Frères Musulmans. Ce qui lui valut d’être emprisonné en 1949, puis de nouveau entre 1954 et 1956 et encore en 1962. Il doit également sa renommée à des émissions télévisées hebdomadaires tellesHady Al-IslâmGuidance de l’Islam] par le [La biais de la chaîne nationale du Qatar et surtoutAsh-Sharî`ah Wal-Hayâh[La Législation islamique et la Vie], bref, des émissions suivies par des millions de musulmans arabophones, en particulier sur la chaîne Al Jazeera où il présentesoninterprétation de l’islam. Qaradawi s’est penché particulièrement sur les préoccupations des 2 musulmans qui vivent dans les sociétés occidentales. Ses fatwas sont souvent critiquées par d’autresUlémas de l’islam orthodoxe, 3 notamment de tendance wahhabite . Également, sa quête d’une voie médiane et équilibrée est souvent rejetée par les modernistes musulmans qui le considèrent comme un traditionaliste perpétuant une vision rétrograde. Sans oublier de citer que les principales études faites en langue arabe, sont constituées principalement des articles de 4 journaux ou d’ouvrages apologétiques ou encore qui condamnent la tentative de Qaradawi de concilier sa vision islamique avec certains aspects de la modernité, sans pour autant entamer une critique de ce
2  Avis ou décret juridique autorisé, généralement non contraignant, visant une interprétation particulière de la loi islamique face à une situation inhabituelle ou un fait nouveau qui s’impose. 3 Relatif au Wahhabisme, mouvement fondé dans la péninsule arabique par le prédicateur Mohammad Ibn Abdel-Wahhab (1705-1792) et qui prônait un islam puritain rejetant toutes les innovations (bid’a). Il s’inspirait de l’école théologique d’Ibn Hanbal (780-855) connue par son littéralisme et son rigorisme, ainsi que des écrits d’Ibn Taymiyya (1263-1328) de la même mouvance. Pour plus de détails, voir Sami Aoun,Mots-clés de l’islam, Montréal, Médiaspaul, 2007, pp. 58-59. 4 Par exemple un ouvrage assez récent en deux tomes sur la pensée d’Al Qaradawi et auquel plusieurs penseurs islamistes contemporains ont participé en privilégiant la tendance glorifiante et admirative de l’homme et de ses écrits :Youssef Al Qaradawi : kalimat fi takrimih wa bohout fi fikrih wa fiqhih[Youssef Al Qaradawi, allocutions en son honneur, et études de sa pensée et sa jurisprudence], Le Caire, Dar As-salam, 2004, 1037 pages.
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5 discours . C’est le cas aussi et notamment de certainsUlémas 6 wahhabites de l’Arabie saoudite . Bref, nous serons amenés également à exploiter la littérature concernant notre sujet, à savoir les écrits, les interventions médiatiques et les conférences de Youssef Al Qaradawi. En plus des ouvrages traitant de la modernité dans les mondes musulman et occidental, nous chercherons à mettre en évidence les lacunes et les sujets non traités au cours de cette analyse. Dans cet ouvrage, nous voulons analyser le discours islamique lui-même, en mettant en évidence ses positions envers les défis posés par la modernité, et ce, afin d’essayer de tester sa capacité à se renouveler, comme il le prétend lui-même. Cela dit, une idée principale est à mettre en exergue, soit la réticence ou l’inertie du discours islamique actuel, représenté par Qaradawi face à la modernité et que l’on considère comme une demande de la communauté des croyants, entre autres par la formulation des demandes des fatwas sur les aspects de la vie quotidienne (même les plus insignifiants). Cette emprise des religieux, ou de personnes vivant de la religion, contraint la communauté à vivre dans l’état de minorité intellectuelle incompatible avec l’essence même de la modernité. Dans cette perspective, l’objectif demeure l’analyse du discours islamique contemporain aux prises et sous l’emprise d’un paradigme médiéval et otage du dogmatisme, du littéralisme et de l’approche apologétique. Aussi, nous chercherons à tracer les limites de ce discours dans l’usage de la critique et de l’autocritique, piliers de la rationalité et de la modernité. Aussi, à la lumière de ces considérations, nous tenterons de savoir si le discours de Qaradawi est rebelle ou étanche aux analyses critiques et autocritiques de son corpus religieux et historique (hissé au rang du sacré ou du tabou). Cet ouvrage a donc pour objectif de répondre à ces questions spécifiques et d’offrir une compréhension approfondie des difficultés dont semble souffrir la pensée islamique actuelle.
5 On cite ici l’important ouvrage de Abderezzaq Eid,Youssef al-Qaradawi bayna at-tassamoh wa al-Irhab[Youssef Al Qaradawi entre tolérance et terrorisme], Beyrouth, Dar at-Tali’a, 2005, 264 pages. Il faut dire ici que Eid entame plus une critique de la raison fiqhiste en général et verse plusieurs fois dans l’ironie, voire l’insulte même, quoique son ouvrage demeure intéressant. 6  Voir entre autres Abdallah Ramadan Moussa,ar-rad ‘ala al Qaradawi wa al jadi’ [Réponse à al Qaradawi, Al et al jadi’], Dahouk (Irak), Ed. Al athariya li at-turâth, 2007, 620 pages ; et Abdallah Ramadan Moussa,ar-rad ‘ala al Qaradawi wa al jadi’ wa al ‘alwani[Réponse à Al Qaradawi, Al jadi’ et Al ‘alwani], Dahouk (Irak), Ed. Al athariya li at-turâth, 2009, 1400 pages.
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