La fabrique des assistés
230 pages
Français

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La fabrique des assistés , livre ebook

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230 pages
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Description

L'ouvrage vise à inscrire la dynamique interne des institutions d'assistance aux plus démunis dans la logique de la modernité. D'un côté, il y a une amélioration significative des conditions économiques pour l'ensemble de la société, de l'autre on assiste à une incapacité des institutions à résoudre les difficultés des assistés. Une réflexion approfondie sur l'action médicosociale et sur une méthodologie altenative des accompagnements éducatifs.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 01 avril 2012
Nombre de lectures 19
EAN13 9782296486966
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,1000€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

LA FABRIQUE DES ASSISTÉS
L’action sociale et médicosociale dans la modernité
Collection
Institut de la Ville et du Développement « IVD »
Sciences humaines et sociales
dirigée par Béatrice Muller

Cette collection est créée pour donner la parole aux acteurs et intervenants des politiques publiques et sociales. Elle s’appuie sur un partenariat fort d’acteurs du champ politique, social et économique et sur le réseau des anciens du DESS Développement social urbain (création 1992) aujourd’hui Master de sociologie « Développement social urbain ». L’IVD partant d’une définition très large de la ville, comme champ d’appréciation des rapports sociaux et des relations sociales de l’action publique et sociale, il se fixe par cette collection trois objectifs :

– Créer un espace de diffusion des manifestations (colloques, journées d’études thématiques, conférences débats), contributions pluridisciplinaires, publications où se répondent savoir et savoir-faire.
– Valoriser des travaux de recherche d’étudiants de master 2 et thèses Valoriser sur des problèmes actuels ; cette production se centrera sur l’articulation entre un travail théorique et empirique.
– Favoriser une dynamique ; l’objectif de cette collection « Institut de la Ville et du Développement » est de proposer un espace de diffusion de travaux, de réflexions de recherches ouvert aux chercheurs, aux professionnels et aux acteurs des politiques publiques et sociales travaillant et réfléchissant sur ce qui est et/ou défait le tissu urbain.
Lionel Boutet - Civalleri
LA FABRIQUE DES ASSISTÉS
L’action sociale et médicosociale dans la modernité
L’HARMATTAN
© L’HARMATTAN, 2012
5-7, rue de l’École – Polytechnique ; 75005 Paris

http ://www.librairieharmattan.com
diffusion.harmattan@wanadoo.fr
harmattan1@wanadoo.fr

ISBN : 978-2-296-96601-7
EAN : 9782296966017
Remerciements :
Je tiens à exprimer toute ma reconnaissance à Monsieur Frederik Mispelblom-Beyer pour l’attention, le soutien et les commentaires qu’il m’a apportés tout au long du processus d’écriture.

Toute ma gratitude à Madame Béatrice Muller et à Madame Frédérique Bocquentin pour les conseils et le soutien sans faille qu’elles m’ont témoignés et qui ont permis la publication de ce travail.

Un très grand merci à Madame Sylvie Célérier pour m’avoir donné l’envie d’observer et de comprendre l’arrière-scène des théâtres d’ombres.

Je remercie également les professionnels et bénévoles que j’ai eu l’occasion de croiser (trop rapidement), pour leur confiance et la richesse de leur travail.

Une infinie reconnaissance à ma famille, à mes proches et à Maya pour leur patience, leur écoute et leurs conseils.
Introduction
« Si toutefois je l’ai fait, sachez que j’aurais désiré ne pas vous avoir regardé. Le regard se promène et se pose et croit être en terrain neutre et libre […] Mais que faire de son regard ? Regarder vers le ciel me rend nostalgique et fixer le sol m’attriste […]
Alors il faut bien regarder devant soi à sa hauteur […]
Bernard Maria Koltès
On finit toujours fatalement par tomber sur quelqu’un… »
Dans la solitude des champs de coton
Minuit, 1986, p. 22
Controverse autour des assistés
Dans Race et histoire 1 , Claude Lévi-Strauss relate une anecdote qui montre à quel point la difficulté à saisir et à comprendre l’étrangeté est présente chez tous les hommes. Ainsi, dans le même temps où les Espagnols mettaient en place des commissions d’enquêtes afin de déterminer si les Indiens avaient une âme, ces derniers laissaient pourrir dans l’eau le corps des prisonniers pour vérifier qu’ils étaient de chair et s’assurer de cette façon qu’ils n’étaient pas des fantômes.
Chez la plupart des peuples, l’humanité s’est ainsi historiquement arrêtée « aux frontières de la tribu, du groupe linguistique, parfois même du village ». En leur sein, se trouvaient les hommes, les bons, les excellents, les complets. Ceux qui avaient légitimement une place dans la société. Au-delà de ces frontières à l’inverse, vivaient ceux qui ne participaient pas des vertus -ou même de la nature -humaines. Ceux qu’on a pu désigner comme les mauvais, les méchants, les singes de terre ou les œufs de pou 2 . Tout au long de son cheminement, l’histoire humaine s’est construite sur cette distinction malléable entre les hommes et les autres . Deux notions aux contenus d’ailleurs fort différents d’une époque à l’autre et d’un lieu à l’autre, du fait du rapport intime existant « entre une morale et le ciel sous lequel elle a été élaborée » 3 .

Aujourd’hui toutefois, à l’heure d’une certaine mondialisation et d’un certain village planétaire , zénith de la connaissance globale où les espaces se sont apparemment affranchis des frontières 4 , ces questionnements sur la nature de l’autre semblent avoir disparu, officiellement du moins 5 . Outre certaines incompréhensions prenant pour prétexte la religion ou la persistance d’idéologies fascisantes, la nature humaine est désormais reconnue comme socle commun à toute l’humanité. La déclaration des droits de l’homme, qu’elle soit établie au niveau national ou international, venant garantir et renforcer cette reconnaissance universelle. La modernité, orientée par le processus révolutionnaire de 1749 6 , a ainsi fait de l’homme le centre symbolique et politique du monde en faisant de lui l’incarnation de l’humanité toute entière 7 . « La personne humaine est devenue la chose à laquelle la conscience sociale des peuples européens s’est attachée plus qu’à toute autre, du coup, elle a acquis une valeur incomparable » 8 . Successeur du divin banni de la cité, figure intouchable de la nature, elle fut alors sacralisée 9 .
De la désacralisation de l’homme…
Notre société française contemporaine serait-elle devenue dès lors le sanctuaire d’une humanité inviolable ? Si cela ne fait aucun doute lorsqu’on se situe au niveau des textes législatifs et des différentes dimensions symboliques et politiques, l’analyse des rapports quotidiens qu’entretiennent les hommes entre eux, amène, il est vrai, à plus de relativisme puisque cette dernière témoigne que la nature humaine ne sous-entend pas toujours ce que l’on pourrait croire de prime abord. Le tableau peignant la société peut effectivement se noircir très rapidement au détour d’une simple promenade dans les ruelles d’une grande ville. Là, allongés à même le sol, sur le béton souillé par des mégots de cigarettes et des emballages de produits de grande consommation, s’amassent des ombres d’hommes et de femmes, recroquevillées sur elles-mêmes, dans des postures physiques et psychologiques rompant avec les cadres normatifs habituels.
« Ils puent. Ils puent la crasse, les pieds, le tabac et le mauvais alcool. Ils puent la haine, les rancœurs et l’envie. Ils se volent entre eux. Terrorisent les plus faibles et les infirmes. Guettent comme des rats, le sommeil des autres pour les dérober des misères : bouteilles à moitié vides, sacs immondes follement bourrés de chiffons souillés et de journaux déchirés » 10 .
L’attitude des personnes qui croisent leurs chemins, acteurs involontaires de rencontres qui peuvent paraître inexistantes 11 mais qui sont en réalité loin de l’être, amène même certains observateurs à déclarer – de manière plus ou moins heureuse – qu’ils ont pratiquement atteint le dernier niveau de réalité en devenant des sortes de fantômes du social.
« Le froid est à l’intérieur de nous. S’il pleut, tout est mouillé, tout se dégrade, les vêtements, la peau, les cheveux. L’homme est transformé en chiffon, en serpillière humide, comme un papier mouillé dans le caniveau. Cinq heures : la grille du métro est toujours fermée et la ville aveugle passe sans voir ces somnambules, ombres enveloppées de chiffons, corps gisants au-delà de la torpeur et qui mettront la journée à extirper cette petite mort en eux » 12 .
Ces étrangers de l’ère de l’information et de la globalisation sont ceux que l’on appelle couramment les exclus, les sans domiciles fixes, les désaffiliés, membres malgré eux, dit-on généralment, d’une vague de paupérisation qui les a transformés en nouvelles créatures énigmatiques de la cité. Certaines parties de la société 13 n’ont eu alors de cesse de s’interroger sur ce phénomène qui, bien qu’étant des plus ancien contrairement à ce qui est couramment avancé, semble prendre depuis quelques décennies des aspects relativement inquiétants, du moins si l’on en croit la plupart des instituts de sondages 14 . Exemple frappant de ces craintes collectives, l’étude BVA pour l’association Emmaüs-La V

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