La gémellité dans l imaginaire occidental
218 pages
Français

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La gémellité dans l'imaginaire occidental , livre ebook

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Description

Les connaissances scientifiques n'ont pas totalement aboli la part de mystère que recèle le phénomène gémellaire. Ce "caprice de la nature" suscite encore aujourd'hui fascination, mais aussi crainte parmi la population des "singuliers" - ceux qui naissent seuls -, diront les jumeaux. L'imaginaire occidental de la gémellité et l'épanouissement individuel des jumeaux sont ici étudiés au travers de récits mythiques, d'œuvres littéraires, de productions théâtrales et cinématographiques.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 01 mars 2011
Nombre de lectures 34
EAN13 9782296802438
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0850€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

La gémellité dans l’imaginaire occidental
Ouverture philosophique
Collection dirigée par Aline Caillet, Dominique Chateau, Jean-Marc Lachaud et Bruno Péquignot
Une collection d’ouvrages qui se propose d’accueillir des travaux originaux sans exclusive d’écoles ou de thématiques.
Il s’agit de favoriser la confrontation de recherches et des réflexions qu’elles soient le fait de philosophes “professionnels” ou non. On n’y confondra donc pas la philosophie avec une discipline académique ; elle est réputée être le fait de tous ceux qu’habite la passion de penser, qu’ils soient professeurs de philosophie, spécialistes des sciences humaines, sociales ou naturelles, ou… polisseurs de verres de lunettes astronomiques.
Dernières parutions
Fatma Abdallah AL-OUHIBI, L’ombre, ses mythes et ses portée s épistémologiques et créatrices , 2011.
Dominique BERTHET, Une esthétique de la rencontre , 2011.
Gérald ANTONI, Rendre raison de la foi ?, 2011.
Stelio ZEPPI, Les origines de l’athéisme antique , 2011.
Lucien R. KARHAUSEN, Les flux de la philosophie de la scienc e au 20 e siècle , 2011.
Gérald ANTONI, Rendre raison de la foi ?, 2011.
Pascal GAUDET, L’anthropologie transcendantale de Kant , 2011.
Camilla BEVILACQUA, L’espace intermédiaire ou le rêv e cinématographique , 2011.
Lydie DECOBERT, On n’y entend rien. Essai sur la musicalit é dans la peinture , 2010.
Jean-Paul CHARRIER, La construction des arrière-mondes. L a Philosophie Captive 1 , 2010.
Antoine MARCEL, Le taoïsme fengliu, une voie de spiritualité e n Extrême-Orient , 2010.
Susanna LINDBERG, Entre Heidegger et Hegel , 2010.
Albert OGOUGBE, Modernité et Christianisme. La questio n théologico-politique chez Karl Löwith, Carl Schmitt et Han s Blumenberg , 2010.
Hervé LE BAUT, Présence de Maurice Merleau-Ponty , 2010.
Sylvie MULLIE-CHATARD
La gémellité dans l’imaginaire occidental
Regards sur les jumeaux
L’Harmattan
© L’Harmattan, 2011
5-7, rue de l’Ecole-Polytechnique, 75005 Paris
http://www.librairieharmattan.com
diffusion.harmattan@wanadoo.fr
harmattan1@wanadoo.fr
ISBN : 978-2-296-54303-4
EAN : 9782296543034
Pour Eva et Roxane
INTRODUCTION
De la biologie à l’anthropologie en passant par la médecine, le droit, la psychologie, l’ethnologie et la mythologie, nombreuses sont les spécialités intéressées par le fait gémellaire. Et pourtant, au regard des connaissances acquises – qui n’ont véritablement commencé à se développer qu’à partir de la seconde moitié du 20 e siècle – force est de constater que la gémellité garde encore sa part de mystère. L’imaginaire a, quant à lui, investi le terrain depuis fort longtemps déjà. Dans la plupart des sociétés ce « caprice de la nature » suscite depuis toujours une certaine fascination, qui n’exclut pas la crainte, parmi la population très majoritaire des « singuliers » – ceux qui sont venus au monde seuls vous diront les jumeaux. Nombre de croyances profondément ancrées dans la conscience collective sont attachées au phénomène gémellaire. Par ailleurs qui n’a pas, au moins une fois, songé à ce que représenterait pour lui le fait d’avoir un frère jumeau ou une sœur jumelle ?
L’épisode des retrouvailles entre Ulrich et Agathe, les personnages musiliens de L’homme sans qualités inaugure une réflexion de l’auteur autour d’une gémellité idéelle et idéale. Précision importante : Ulrich et Agathe ne sont pas jumeaux. Ils sont « simplement » frère et sœur. Cinq années séparent leur naissance. A celles-ci s’ajoutent d’autres nombreuses années durant lesquelles ils ont vécu loin l’un de l’autre, leur père les ayant confiés à des institutions éducatives différentes à la mort de leur mère. De retour dans la ville de son enfance, où il doit assister aux funérailles de son père, Ulrich s’apprête à revoir Agathe qui a maintenant vingt-sept ans et qui, pour lui, est « presque une inconnue » 1 . Robert Musil décrit en ces termes leurs retrouvailles : « [Ulrich] voulut se changer et l’idée lui vint de passer une sorte de pyjama d’intérieur qui lui tomba dans les mains comme il défaisait ses valises. « Elle aurait pu au moins m’accueillir dans l’appartement ! » pensa-t-il. Il y avait dans le choix négligent de ce vêtement comme un vague désir de faire la leçon à sa sœur (…). C’était un grand pyjama de laine moelleuse, une sorte de costume de Pierrot, carrelé de gris et de noir, noué aux poignets et aux chevilles comme à la ceinture ; il l’aimait pour son confort, confort qu’une nuit d’insomnie et un long voyage lui firent ressentir avec plaisir comme il descendait l’escalier. Mais lorsqu’il pénétra dans la chambre où l’attendait sa sœur, il s’émerveilla de s’être ainsi vêtu. Par une mystérieuse disposition du hasard, il se trouva en effet devant un grand Pierrot blond, enveloppé de rayures et de carreaux d’un gris et d’un rouille subtils, qui, au premier coup d’œil, paraissait tout semblable à lui. “Je ne savais pas que nous fussions jumeaux !” dit Agathe, et son visage s’éclaira de gaieté. » 2
L’appréhension de la rencontre inévitablement suscitée par l’inexpérience de « l’autre », autre- frère , autre- sœur , que seuls réunissent les liens du sang, cède immédiatement devant l’émergence du « même » qui suscite émerveillement chez l’un et gaieté chez l’autre. La remarque d’Agathe constatant la similitude des tenues vestimentaires renvoie à une essence gémellaire qui procède de la réunion des « mêmes » : ceux qui se ressemblent se retrouvent… et se retrouvent car ils se ressemblent. Pourtant si l’on y prend garde, leurs tenues sont loin d’être identiques. Mais ce n’est là qu’un moindre détail car Ulrich voit en Agathe son alter ego, son autre moi. C’est en cela qu’ils apparaissent « jumeaux », c’est-à-dire à la fois identiques et différents, et en cela complémentaires. Ils deviennent l’un pour l’autre l’être essentiel en l’absence duquel leur existence ne peut accéder à la plénitude tant recherchée. Ainsi une simple affinité des dispositions concernant leurs choix vestimentaires donne aux deux personnages l’impression réjouissante d’être parfaitement assortis. Assortiment qui évoluera jusqu’à son paroxysme vers la constitution du couple idéal tel que le frère et la sœur l’envisagent, puisque ces derniers transgresseront le tabou de l’inceste. A travers cet acte, ils comptent accéder à une forme supérieure d’unité qu’ils croient trouver dans l’autre Moi, l’alter ego. La gémellité est ici présentée comme le paradigme de l’unité du Soi. Mais, comme on l’a précisé plus haut, il ne s’agit là que d’une gémellité imaginaire dans laquelle le frère et la sœur tentent de retrouver chez l’autre ce qui manque à leur être pour atteindre la complétude. Ils tentent d’instaurer une relation d’autosuffisance conforme à l’idée qu’ils se font du couple gémellaire, c’est-à-dire conforme aux images qui lui sont associées dans la pensée collective.
C’est à l’analyse de représentations de l’imaginaire de la gémellité en Occident, dont certaines remontent à l’époque classique, que sera consacrée cette étude. Mais avant d’en présenter les orientations et les grandes lignes, il convient de préciser dès maintenant ce que recouvre le terme d’ imaginaire .
Gilbert Durand appelle « imaginaire » « l’ensemble des images et des relations d’images qui constitue le capital de pensée de l’ homo sapiens » 3 . L’image quant à elle est ce qui apparaît à la conscience lorsqu’elle se représente le monde qui l’entoure. Cette représentation, nous dit G. Durand, peut s’effectuer de deux manières : soit directe (on se représente une chose, c’est-à-dire un objet ou une personne existant réellement) ou au contraire indirecte « lorsque, pour une raison ou pour une autre, la chose ne peut se présenter "en chair et en os" à la sensibilité, comme par exemple dans le souvenir de notre enfance, dans l’imagination des paysages de la planète Mars, dans l’intelligence de la ronde des électrons autour du noyau atomique ou dans la représentation d’un au-delà de la mort. Dans tous ces cas de conscience indirecte, l’objet absent est re-présenté à la conscience par une image , au sens très large de ce terme » 4 . Il nous faut convenir à partir de là que, loin de se limiter à un contenu mnésique de la perception, l’image est également élaboration. Effectivement, la pensée ne peut s’exercer sans recours aux images. L’image en tant qu’ analogon , pour reprendre les termes de G. Durand, est donc également un symbole car elle permet d’accéder au non-sensible. Cette définition permet d’éviter de restreindre les processus et contenu de l’imaginaire aux seuls domaines de

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