Tous les chemins mènent à l autre
228 pages
Français

Vous pourrez modifier la taille du texte de cet ouvrage

Tous les chemins mènent à l'autre , livre ebook

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228 pages
Français

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Description

Tous les chemins mènent à l'autre tente avec sensibilité de réunir deux pôles, deux visions sur le handicap : celle du parent et celle du professionnel. De l'intime aux institutions ; du courage à la lassitude ; du rire à la fatigue, cet essai est autant de questions ouvertes aux réponses humaines. Social, médical, psychologique, philanthrope, ce livre vous parle de vous peut-être plus encore que du handicap. Ne faut-il pas alors marcher ensemble pour comprendre autrement ? Loin de tout jugement, c'est un dialogue qui ne saurait nous laisser indifférent.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 01 mars 2015
Nombre de lectures 78
EAN13 9782336371436
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0800€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Couverture
4e de couverture
Titre
Jocelyne L E R OLLAND








Tous les chemins mènent à l’autre
Auprès de la personne handicapée
Copyright


Enfants, adolescents et jeunes adultes polyhandicapés, ce livre est le vôtre, il porte votre parole échangée dans tous les axes de la vie quotidienne,
Parents de personnes polyhandicapées, ce livre est également le vôtre, il témoigne de votre parole dans les échanges formels et informels,
Professionnels, ce livre est aussi le vôtre dans le partage de l’accompagnement au quotidien.







© L’Harmattan, 2015
5-7, rue de l’Ecole-Polytechnique, 75005 Paris
http://www.harmattan.fr
diffusion.harmattan@wanadoo.fr
EAN Epub : 978-2-336-72154-5
Prologue
Pourquoi me suis-je décidée, ce dimanche à chausser les baskets qui traînaient dans le garage depuis Noël ? Il est huit heures, je marche sans but précis, sans itinéraire sur ce chemin de terre bordé de fossés boueux. Ma progression est difficile. Par endroits, des gravats perforent la sente laissant saillir des tuiles, des restes de béton ou de briques. Quelques ornières creusées par les pluies récentes forment des sillons fangeux. Je suis concentrée, je cherche les meilleurs endroits pour poser mes pieds. Ma marche n’est pas rapide, pour l’instant, je déambule davantage que je ne marche.
À trop chercher à m’éloigner des repères habituels, au point de quitter les chemins tracés, mon errance en rase campagne devient doucement déprimante. Je marche seule. Même si je n’ai croisé qu’une unique personne depuis mon départ, je n’espère personne. Un effluve de liberté m’envahit suivi par une crainte de m’égarer. Rapidement, je quitte la traversée des terres boisées, des prés herbeux et verdoyants pour revenir aux sentes façonnées par les pas de nombreux flâneurs.
Subitement le ciel s’assombrit et la pluie commence à tomber. C’est un peu singulier de marcher sous la pluie. Par réflexe, j’essaie de m’abriter, sans succès. Je ne vais quand même pas m’arrêter pour quelques gouttes. J’oublie finalement que je suis mouillée. Protégée par une capuche que la pluie traverse, des baskets qui prennent légèrement l’eau, subtilement la musique de la pluie m’enivre. Le cliquetis des gouttes sur les feuilles, le bruissement de l’herbe mouillée sous mes pas, le chuintement de l’eau qui s’écoule dans les fondrières, le clapotis dans les flaques dérangées par mes pieds composent une symphonie dont je suis à la fois la seule soliste et auditrice. L’air se refroidit et le ciel se couvre de nuages. Autour de moi, les environs alternent entre entretien et abandon.
Mon regard se pose au gré des propositions que me fait la nature. C’est d’abord un étang qui attire mon attention. Il est étroit, envahi par les herbes, bordé d’arbres qui se sont développés sans contrainte, certaines de leurs branches épousent le sol au point parfois de le pénétrer. Cet espace sauvage est cependant contenu. Un grillage l’entoure et limite son accès. Ma curiosité est attisée, j’ai envie de m’aventurer plus près, mais comment m’approcher ? Je longe le grillage. Un rire m’échappe, devant moi une porte de placard dressée au milieu de cette nature sauvage. Que fait-elle au milieu de nulle part, placée en sentinelle comme si elle contenait un éventuel débordement d’une nature prolifique ? Elle remplit sans doute un autre rôle puisqu’elle m’interdit de pénétrer dans l’espace qu’elle protège, je continue mon chemin.
Voilà déjà une demi-heure que je me promène. Le rythme est lent, il m’invite à songer. Je sens mon esprit en marche autant que mes pieds, la pensée s’approche, elle n’est pas encore révélée, pour l’instant elle musarde. Je devine sa présence. Ma marche s’accélère, le pas se fait plus marqué, plus lourd, mon corps entier me pèse, mes bras opèrent un balancement vigoureux, irrégulier. Le corps complet semble résister à la pensée. Ce sont les images qui arrivent d’abord, puis les paroles, enfin les situations prennent toutes leurs places. Elles sont là, difficiles, qui s’imposent.
CHAPITRE I Être accueillie
Je me rappelle. C’est l’été.
Un tilleul imposant d’une quinzaine de mètres, au tronc régulier recouvert d’une écorce grisâtre, épaisse, occupe le centre d’une cour intérieure autour de laquelle sont installés quelques préfabriqués. J’avance lentement vers l’un deux. Il fait beau. La porte est béante.
À l’intérieur d’une pièce assez grande, des personnes installent des matelas directement sur le sol, d’autres sortent des jeux. Toutes s’affairent, elles parlent de leurs vacances. Je les entends.
Un homme vient à ma rencontre, je me présente.
« Je suis Madame Emma Gauthier, je commence aujourd’hui.
– Suivez-moi », me lance-t-il après quelques hésitations.
Il me conduit devant le préfabriqué qui fait face à celui que je viens de découvrir et m’indique le secrétariat. Je pénètre dans cette pièce au moment où le directeur sort de son bureau. C’est le premier visage connu.
Nous nous sommes déjà vus au mois de juillet. Notre rencontre a été des plus insolites. Sans emploi fixe après un licenciement économique, mon amie Éva, orthophoniste 1 dans une école pour enfants handicapés, me contacte pour me proposer de faire des remplacements. Rendez-vous est pris avec le directeur. Mais au mois de juillet, période de fermeture scolaire, il n’y a aucun enfant handicapé, aucun professionnel, la visite des locaux se limite à son bureau.
« Êtes-vous libre le 27 août ? m’interroge-t-il sans ambages.
– Oui et non, lui répondis-je, je travaille actuellement en intérim et ma mission n’est pas terminée. Mais ne faut-il pas des diplômes ? ajoutai-je.
Non, merétorqua-t-il, dansunpremiertempsvouspouvezcommencer comme remplaçante, ensuite vous pourrez faire une formation d’Aide Médico-Psychologique 2 .
– Ce serait pour travailler où ? m’inquiétai-je, car je ne conduis pas.
– Auprès des enfants, à l’école du Jardin, près de l’Église Sainte Croix.
– C’est difficile de vous donner une réponse sans avoir vu, ni les enfants, ni les professionnels, ni les lieux.
– Oui, acquiesça-t-il fermement, mais une des professionnelles s’est désistée, je dois organiser la rentrée. Il faut vous décider, vous pouvez sans doute voir avec votre employeur actuel pour partir avant la fin de votre contrat. Je vous propose un contrat à durée indéterminée qu’il ne faut peut-être pas laisser passer. »
C’est pourquoi, aujourd’hui 27 août 1980, je suis là.
Le directeur m’invite à sortir du secrétariat.
« Je vais vous présenter le groupe où vous allez travailler », me dit-il.
En traversant la cour centrale, il me parle de groupe, de transport, de professionnels, d’organisations, de repas, de changes, d’arrivée, de départ. Au moment où nous entrons dans ce qu’il a appelé un groupe, le flot d’informations me cogne contre les tempes. Qu’ai-je retenu ?
Parmi les personnes présentes, l’une vient à ma rencontre et me propose une visite des lieux. Jouxtant la salle principale, je découvre une salle de bains équipée d’une table, recouverte d’une sorte de protection plastique.
« Voilà la pièce où nous changeons les enfants, me dit-elle, où nous faisons aussi les soins et parfois leur donnons un bain. »
Dans la salle principale que je n’ai pas encore visitée, une discussion s’est engagée entre les professionnels et le directeur. Ils semblent mécontents sans que je comprenne, même s’ils parlent assez fort, la source de leur contrariété. Nous restons un moment dans cette salle de bains dont nous avons pourtant fait le tour. Je sens mon accompagnatrice ennuyée. Hésitante à passer le pas de la porte qui sépare les deux pièces, elle finit par pénétrer dans la grande salle. Je la suis.
Sans trouver une juste place, ni trop loin, ni trop près, du rassemblement des personnes au centre de la pièce, j’assiste à une échauffourée dont je ne comprends pas tout de suite l’objet.
« Mais Jean Marc, nous te l’avons déjà dit, les enfants grandissent et deviennent lourds, rappelle une femme assez irritée.
– Nous voulons garder un homme pour la prise en ch

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