Injustique
160 pages
Français

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Injustique , livre ebook

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160 pages
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Description

Les yeux fixés sur le mur, ... il était plongé dans un univers imaginaire qui l'emportait loin de tout, loin de nous. Oh, mon Dieu ! Depuis quand est-il enfermé dans ce cachot pour devenir aussi maigre ? Suite à une altercation avec un homme dont il ignorait l'identité, Michel fut incarcéré dans une prison où on attendait la mort qui était plus probable que tout autre issue. Une mort dont il réussit à s'échapper pour chercher refuge en France ; mais ce passé le rattrape. Parviendra-t-il à retrouver une vie normale ?

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 01 septembre 2009
Nombre de lectures 228
EAN13 9782296677890
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0600€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Injustique
 
 
© L'Harmattan, 2009
5·7, rue de l'Ecole polytechnique, 75005 Paris
 
Fabrication numérique : Socprest, 2012
Ouvrage numérisé avec le soutien du Centre National du Livre
 
http://www.librairieharmattan.com
diffusion.harmattan@Wanadoo.fr
harmattan1 @Wanadoo.fr
 
ISBN : 978-2-296-09045-3
EAN : 9782296090453
 
Georges Holassey
 
Injustique
 
Roman
 
L’Harmattan
 
1
 
N ous étions trois dans la cellule : le Taureau, le Ninja et moi. Le sort du Ninja était scellé quelques heures avant mon arrivée. Il allait être exécuté ; mais il ne pleurait ni ne gémissait, il n’ouvrait pas la bouche.
Il n’avait pas tort. Rien ne pouvait attendrir ceux qui l’avaient condamné à mort ; aucune larme, aucun gémissement ne pouvait changer son sort. C’était irrévocable.
Au fait, nous étions quatre dans la cellule. Le quatrième était considéré comme déjà mort. Il n’avait presque plus de corps, ni d’esprit non plus ; il avait perdu la raison. Seuls ses yeux clignaient encore. Le cou tendu en arrière, nul ne pouvait savoir ce qui trottait dans sa tête jetée contre le mur. Personne ne voulait d’ailleurs pénétrer sa souffrance. La nôtre nous endiguait dans une indifférence qui nous rendait insensibles à son état. Je jetais de temps en temps un coup d’œil sur son abdomen pour voir s’il respirait encore. Le Taureau disait que nous serions amenés à creuser sa tombe lorsque son souffle s’éteindrait et il paraît que ce n’est pas une tâche facile. Cela nous faisait peur.
 
Cette prison était une incarnation de l’enfer imaginaire. Ses murs vétustes jamais refaits, dégoûtants au regard, portaient par endroits des traces de sang et d’autres choses plus répugnantes encore. On s’y adossait quand même pour s’asseoir un peu plus confortablement. C’était aussi la meilleure position pour dormir quand la nuit venait à tomber. On attendait la liberté, la fin ; on attendait la mort qui devenait plus probable que toute autre issue. On attendait quoi d’autre encore ? La punition, la torture ; et un peu de ragoût à manger.
 
 
Ce matin, mon esprit demeure figé sur mon premier jour passé en prison, là-bas, dans mon pays.
Il y a des jours comme ça qui vous assiègent l’esprit pour toujours. Ces jours-là, la vie semble faire une pause sur des événements ou des gens qui reviendront vous hanter sans cesse.
Les souvenirs insupportables de la geôle reviennent pour gouverner ma pensée et je les porte comme un fardeau trop lourd pour ma tête épuisée. Je reste enfermé dans ma chambre. J’ai peur de ces hommes qui torturent sans pitié, ces forts qui tuent sans remords. Oui, ils le savent ; ils ont appris que je suis venu en France pour chercher refuge et ils me recherchent, je le sais.
 
Je suis de plus en plus harcelé par des cauchemars qui ne me laissent plus la tête tranquille pour le repos nocturne. Des rêves effrayants qui m’arrachent du sommeil, avec des tressaillements et une sueur qui me court sur tout le corps. Je m’en vais m’asseoir sur la chaise, supportant le poids de l’insomnie pour ne plus exposer ma tête à ces souffrances, ces peurs provoquées par des images infernales qui m’envahissent l’esprit quand je m’endors.
Mon âme n’arrive plus à garder le silence face aux supplices générés par ces images qui s’emparent de mon esprit éreinté. Je me réveille avec des hurlements et des cris d’appel au secours qui réveillent mes voisins. Ils sont venus une ou deux fois à mon secours, mais sont repartis, pliés en deux par un rire moqueur lorsqu’ils ont su que c’était un cauchemar. « Il est fou ce Michel », se disaient-ils entre eux. Ils en ont parlé à madame Martin la concierge et lui ont demandé de trouver une solution pour mon cas. Ils lui ont dit que je suis dangereux, surtout pour leurs enfants avec qui je m’amuse sur l’aire de jeux quand le temps et mon esprit le permettent.
Je m’en veux d’être devenu indésirable. Je m’en veux de laisser s’échapper ces cris qui s’en vont les perturber dans leur sommeil. Que puis-je faire pour les retenir ? Je ne peux contrôler mon esprit quand je dors, cet esprit qui m’échappe de plus en plus et me ramène d’affreux souvenirs que j’ai essayé d’enfouir pour ne plus en souffrir.
Toujours le même cauchemar. Des hommes armés, aux pieds chaussés de bottes lourdes, aux visages impitoyables, me tenaillent et me traînent par terre pour m’amener sur une colline rouge qu’ils ont baptisée du célèbre nom de Golgotha. Je lutte de toutes mes forces, je crie au secours.
Je m’en veux vraiment d’être devenu insupportable pour mes voisins, mais je n’ai rien fait pour mériter l’exécution. Je ne me reconnais pas dans la peau de Christ ni de Barrabas ; je crie à la pitié pour échapper à la mort. Où est mon tort ?
Je me réveille toujours lorsqu’ils essaient de m’attacher au poteau pour me fusiller. Le corps tremblant de peur, je m’arrache du lit, m’en vais boire un verre d’eau pour me rafraîchir le cœur, pour reprendre vie. Et je m’assois sur la chaise. J’attends.
Je ne sais plus comment faire pour me débarrasser de ce passé qui me poursuit inlassablement, ce souvenir qui resurgit et me hante comme un fantôme. Oh, mon Dieu, qu’est-ce qu’il me torture l’esprit quand il sillonne mon être endormi ! Ce fantôme est bien réel, je l’ai dans ma tête, c’est mon histoire, c’est un épisode de ma vie. Il revient me menacer, il revient me hanter comme un démon.
Je lutte contre le sommeil pour ne plus tomber dans le piège de ces cauchemars qui me rendent abject. Je veux reconquérir l’estime de mes voisins, je veux être normal.
Mais ce fantôme revient me hanter le jour depuis que j’ai cessé de dormir pour ne plus le revoir. Il n’attend plus la nuit, il n’attend plus que je m’endorme. Il n’attend plus du tout. J’entends leurs pas dans le couloir, les bruits de bottes de ces hommes qui me recherchent, ces bourreaux qui veulent m’emmener loin de toutes mains secourables, là-bas sur Golgotha, pour m’exécuter comme un condamné ou une bête de sacrifice.
 
 
Je ressens par moments un vertige qui me prive de ma lucidité. Et lorsque le trouble s’éloigne, j’ai l’impression de n’être plus moi-même, d’être ailleurs que chez moi, étranger dans mon corps. J’ouvre précipitamment la fenêtre pour regarder dehors et m’assurer que je suis vraiment dans ma chambre. Les deux peupliers sont toujours là, les enfants s’amusent sur l’aire de jeu, les tours HLM se voient au loin. La nature n’a pas changé autour de moi, je suis bien dans ma chambre, tout est normal. Je bois un verre d’eau, je reprends mon souffle. Et j’attends.
 
 
Ils sont vraiment au courant. J’en suis certain ; ils savent que je suis dans cette banlieue parisienne, dans cet immeuble où sont logés quelques demandeurs d’asile, dans cet appartement numéro 143. Je plonge sous le lit quand j’entends leurs pas dans le couloir. Je retiens ma respiration et attends qu’ils s’en aillent loin de ma chambre pour me rasseoir sur la chaise ; attentif aux bruits de dehors.
Soudain, j’entends sonner à ma porte. Ils insistent pendant un moment, puis commencent à la défoncer. Je crie au secours, je hurle pour appeler à l’aide. Ils sont là ! Ils vont me tuer ! Sauvez-moi, s’il vous plaît ! Mais aucun secours ne vient.
Ils m’ont retrouvé sous le lit, avec la complicité de madame Martin. Ces hommes n’ont pas d’armes à la main et ils n’ont pas l’air méchant. Ils veulent m’amener ailleurs pour me mettre à l’abri, disent-ils ; et j’accepte volontiers de les suivre.
 
2
 
J e suis conduit dans un centre dont le bâtiment principal offre au regard ses briques épaisses, vestiges d’une ancienne époque. Un bâtiment qui semble avoir traversé poliment le temps sans une couche de peinture ; comme ces châteaux qu’on retrouve parfois dans les bourgs dépeuplés qui attirent les touristes nostalgiques des temps anciens, ces âmes désenchantées par les subtilités de l’architecture moderne.
Escorté par trois hommes jusqu’au deuxième étage, je suis accueilli comme si l’on m’att

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