Je veux être un homme heureux
196 pages
Français

Je veux être un homme heureux , livre ebook

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196 pages
Français

Description

Ce livre, teinté d'humour et d'autodérision, raconte le profond changement personnel d'Etienne. Une violente crise existentielle et un choc spirituel inattendu l'amèneront du monde de lutte concurrentielle des multinationales américaines à l'enseignement du piano, et lui feront traverser des univers au parfum de mystère, comme la psychanalyse, le zen ou la franc-maçonnerie.

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Informations

Publié par
Date de parution 01 juillet 2012
Nombre de lectures 48
EAN13 9782296499898
Langue Français
Poids de l'ouvrage 2 Mo

Informations légales : prix de location à la page 0,0750€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Je veux être un homme heureux
Stéphane Udovitch Je veux être un homme heureux Récit
© L’Harmattan, 2012 5-7, rue de l’Ecole-Polytechnique, 75005 Paris http://www.librairieharmattan.com diffusion.harmattan@wanadoo.fr harmattan1@wanadoo.fr ISBN : 978-2-296-99595-6 EAN: 9782296995956
À ma compagne, pour sa confiance dans la réussite de ce pari. À mes enfants.
Prologue C’était un vendredi je crois. Vissé sur le siège de la Renault, garé pile en face des Nouvelles Galeries, j'attendais. Bourges, Orléans ? Je ne sais plus. Mon secteur couvrait un grand nombre de départements et je passais l'essentiel de mes journées dans ma voiture. Un moment encore et j'allais devoir quitter le cocon automobile, ravagé par une angoisse devenant paroxystique.
Rien d'effrayant pourtant ne m'attendait à l'intérieur de ce magasin. Une vendeuse, peut-être deux, au pire la responsable du rayon : Comment allez-vous, et vous-même, bien je vous remercie, alors où en sommes-nous ? Les produits vendus, ceux aux rotations plus faibles encore sur les présentoirs. Le catalogue, les échantillons, les nouveautés… Au titre d'attaché commercial, j'officiais pour un grand éditeur américain de cartes postales, papeterie fantaisie, papier-cadeau et autres gadgets. Ma timidité, assortie d'une angoisse permanente me rendait le job difficile, mais jusqu' alors, je m'en sortais… Ce jour-là, c’était différent. La tension était insoutenable. Impossible d'ouvrir la portière, de sortir de la voiture, d'y aller. Impossible de continuer. J'étais paralysé par la souffrance psychique, et perdu depuis des jours dans un questionnement métaphysique. Telle une Cocotte-Minute, j'avais accumulé une considérable pression intérieure et je savais d'instinct que la seule soupape d'évacuation possible était de trouver dare-dare des réponses à ces questions. Je fis alors une expérience si singulière que bien des années plus tard, j'allais me lancer dans une quête effrénée pour tenter de la vivre à nouveau.
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1 Quelques années auparavant, après deux tentatives infructueuses, l'une en prépa Sciences Po, et l'autre en fac de Sciences-Eco, j'avais enterré l'idée de poursuivre des études supérieures. Je rêvais business, création d'entreprise, plutôt dans le textile. Pas de patron, les grosses marges de la confection et du black à gogo. Du gros, du demi-gros… Plus tard, certainement, une boutique, des vendeuses… J’aurais voulu devenir juif, installé dans le sentier, avec tous les attributs de la réussite matérielle. Et le bagout. En phase avec l'histoire familiale. Mon grand-père maternel était un richissime négociant maltais installé dans le Sud tunisien. Lors de l’indépendance du pays, on lui confisqua tous ses biens. Ses terres étaient si vastes qu’il fallait plusieurs jours en voiture pour en faire le tour. — S'ils ne nous avaient pas foutus dehors, vous n'auriez pas eu besoin de travailler mes enfants ! La phrase claquait régulièrement dans la bouche de ma mère, dans un épandage d'amertume. Nous nous regardions en silence, ma sœur cadette et moi. Lui dire qu'on ne se voyait pas passer notre vie à dilapider la fortune familiale ? À quoi bon ? D'ailleurs, la perte de notre splendeur passée stimulait sans doute mon obsession de réussir à mon tour. J’étais inconsciemment programmé par le désir de revanche maternel.
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Mon père, lui, était directeur général d'une célèbre biscuiterie appartenant à un groupe agroalimentaire international. Issu d'une famille d'immigrés yougoslaves, mineur de fond à treize ans, parti à vingt en Tunisie avec les jeunesses ouvrières chrétiennes, il y était devenu employé de librairie, puis vendeur de caisses enregistreuses en porte-à-porte, à la commission. Le mariage avec ma mère, le départ pour Alger, la distribution dans les épiceries locales des produits de la Biscuiterie Lorraine. La dangereuse poursuite de l'activité commerciale malgré le début des "évènements." Le retour précipité, quelques mois plus tard, dans la grisaille métropolitaine. L'embauche comme directeur régional, par l'entreprise reconnaissante. La carrière, le couteau entre les dents. La rage de réussir, la carapace, pour se protéger des mauvais coups. — Les gosses aujourd'hui — nous en fait — on les élève dans du coton ! Alors, malgré des rapports d'incompréhension mutuelle avec mon père, l'atavisme semblait avoir tracé ma voie. Dans le commerce. Exit la sensibilité un peu exacerbée, le tempérament artistique, l'amour des mots, les facilités musicales. Pour devenir un artiste — et j'en avais rêvé — il eut fallu commencer par être un rebelle. Se décharger du poids de l'histoire familiale. Mais pour moi, le temps de la rébellion était vite passé. J'étais rentré dans le rang. Je ramais pour mériter reconnaissance et admiration parentales. Faire mentir l'aphorisme paternel, servi parfois dans une veine d'explications quant à nos relations difficiles :
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— Les fils sont toujours des bons à rien ! Je n'avais même pas le mauvais goût de lui en faire remarquer l'absurdité : mon père avait réussi. Néanmoins, cette réussite était sans éclat, protestante dans sa discrétion. Une grande maison en banlieue parisienne — Est — très agréable, mais d'apparence plutôt quelconque. Une bagnole de blaireau (un véhicule de direction). Le restaurant tous les dimanches, pour un sempiternel couscous dominical en famille, à Belleville. L'argent, ça ne se dépensait pas, ça s'investissait. Peu de temps. Peu d'amis. Ma mère, elle, attendait du flamboyant. Des cocktails, des soirées dansantes. De la décapotable, des billets de cinq cents roulés en liasse épaisse dans la poche italienne du pantalon. Le m'as-tu-vu méditerranéen de son enfance. Ce hiatus, silencieux, pesait lourd. Aussi, par de longues et régulières conversations vespérales, m'avait-elle à son insu formaté pour assurer la relève du grand-père et faire à nouveau scintiller le blason familial. Pour moi, la cause était entendue. J'allais me charger de la mission. Avec un léger handicap cependant : j'étais affecté d'une timidité maladive, relevant carrément de la phobie sociale, et dont la conscience de surcroît m'échappait totalement. J'étais dans le déni.
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