La Diomédée
212 pages
Français

La Diomédée , livre ebook

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212 pages
Français

Description

La Guerre de Troie touche à sa fin... Dans une Grèce vidée d'hommes, livrée aux intrigues de palais, le jeune Diomède s'efforce de rester fidèle aux idéaux héroïques de son enfance. Brûlant de rejoindre son père sous les murs d'Ilion, il embarque avec ses compagnons pour une quête qui le mènera aux trois continents que borde la Méditerranée. A la recherche de son père mais aussi de lui-même, loin des chants des aèdes, il se confronte à un monde vaste et dur où l'empire des siens est sans cesse contesté.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 01 juin 2009
Nombre de lectures 66
EAN13 9782296234109
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Informations légales : prix de location à la page 0,0800€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Prologue

Au sud de laGrèce, lapéninsule duPéloponnèse découpée
comme une feuille de figuier, trempe ses promontoires dans les
eauxbleues de la Méditerranée. Entre les deuxcaps les plus
orientaux,aucours de l’Âge des héros, nichait le royaume
d’Argos riche enchevaux.
Adixkilomètres descôtes, sur unecollineabrupte, les rocs
cyclopéens ducastroLarissadressaient leurs formes imposantes
au milieu de la vallée. Elles jetaient une ombre protectrice sur les
champs et les pâtures dece richevallon et annonçaient
auxnavires quicroisaient dans les parages qu’enArgos régnait un
souverain puissant. Pourtant,celafaisait presque dixans que le
puissantDiomède, fils deTydée, roi d’Argos,avaitfait voilevers
Troie, menant quatre-vingtsvaisseauxauxcôtés desAtrides.
Aveclui étaitpartie l’élite desguerriersd’Argos,ceux qui étaient
seigneurscomme lesfils surnumérairesdes travailleursde la
terre.
Cependantlafécondeterre d’Argosn’enavaitpas souffert.
Leschampsn’étaientpasmoinslabouréset unbétail nombreux
engraissaitauxpâtures.Hameauxetcheminsétaientbientenus
et unspectateurauraitpu trouveraupanoramaune douceur
féminine, épanouieaudoux soleil deGrèce.
C’étaiten effetlerègne desfemmes, desmères surtout.
Certainesdéjàornéesd’un deuil éternelau reçudesnouvelles,
parfoisencore encombréesd’unvieillard longàmourir, elles
régnaient sanspartage.Plusfortes que leursmules
sousleschargesde pierres, ellesmirentàl’entretien des terrasses une énergie
que leshommesn’avaientjamais trouvée en eux.Ellesavaient
reconstruit toutleversant sud de lavallée, doublantles récoltes
d’olivesetderaisin.
Comme ellesbuvaientmoins que leurschersabsents, le
sombrevin d’ArgosavaitétévendudansleNord jusqu’au-delà
duDanube, oùles seigneursbarbares, dédaignantl’aleamère,

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donnaientpourcebreuvage lestoisonsdes brebisetlespierres
jaunesde leurs rivières.
Libérésde laterrible prédationque faisaitpeser sureuxles
banquetsde guerriers, lestroupeauxd’Argos s’étaientmultipliés,
àtel point qu’ilavaitfalluleurdéfricherde nouveauxpâturages.
Quelques barbes blanchesdu Conseils’yétaientopposées car
c’étaientlesterresdechasse de lanoblessequi étaientmenacées.
Le plus véhémentdes barbonspartitchasserpardéfi,
malgréses soixante-quatorze hivers chenus. Il poursuivit uncerfqui
lui échappa, puisil leva unsuperbesanglier sousles sabotsde
soncheval. Il futassezheureuxpourleblesserd’un lourdcoup
de pique etla bêteseterra.Faisantfi des conseilsde prudence,
il mitpiedàterre, l’épéeàlamain etlatraquadans son hallier.
Levieuxmâlechargealevieuxmâlequi l’embrochaproprement
audéfautde l’épaule.
Levieuxconseiller ramenatriomphalementsontrophéeau
château, établissantclairementlecaractère inviolable de laforêt,
pérorantetsuggérant que par unréexamen des rationsde
viande, onrésolve en mêmetempsle problème etsa solution.
«Gavez-lesdeviandecesenfants, qu’ils deviennentdevrais
hommesd’Argos!Maismoivivant,vousnetoucherezpasànos
terresdechasse !»Lesoiril mangea às’en faire péterlapanse et
souilladevin la blancheurdesa barbe.Il fallut trois serviteurs
pourleconduireàsa chambre.
Le lendemain, il ne putse levertantsoncorpsétaitfaitde
douleurs.Rhumatismes,courbatures, lumbago, indigestion,coup
de froid etgueule deboisletinrent alitétrois semaines.Il en
restasouffreteuxetne passapasl’hiver, maisilavaitentendule
chocdescognées surlestroncsavecuneaigreurteintée d’une
sombresatisfaction.
Etlesenfantsd’Argosn’avaientjamaisétéaussibien
nourris: Marmailleremuante, éclatante devie,courantnueausoleil,
dévalantlescollinesàl’âge desépéesdebois.Beaucoup l’étaient
encore, progéniture plantée dansleventre desépousespeuavant
le départ. Maislespetitsgarçons quiavaientserré lespoings
pour retenirleurslarmes souslebaiserd’adieudupèrearrivaient

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à l’âge d’homme, grandissantcomme de jeunes arbres. Ilsétaient
unebrèche dans ce monderégi parlesfemmes, desfils
belliqueuxde l’union desdieuxetdesmortelles quicommençaientà
humerlevent. Une nouvelle générationquiavaitentendul’appel
de lamerets’apprêtait ày répondre.
Encestemps si lointains que lamémoires’yperd, même le
mytheaperdu le souvenirdebien deshéros.Puissentlesmuses
du vieuxtempsinspirermonrécit afin deretrouverla trace des
pasde l’un desplusaventureux.

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ChapitreI :«L’appel de lamer.»

Lechantiernaval était vide decarène, maisdeuxhommes
tournaientautourd’une immense poutre dequille non encore
dégrossie. L’un d’eux avaitles cheveuxgrisetsesmains calleuses
étaientd’uncharpentieren fin decarrière.Soncompagnon était
un jeune hommebien découplé,auxbouclesfauvesetauxyeux
vertd’eau.Ses sandalesetsatuniquetoutes simples semblaient
pourtantde meilleure facturequecellesdu charpentier.Il
pouvaitavoirseizeans,avecl’assurance d’un filsderoi
etlaprestance d’un filsde dieu. Sa rondeurenfantinecédaitlaplaceàla
perfection d’unebeautévigoureuse etclassique,aunezdroitet
aumentonrond.
«AinsiDeuthéros,àpartirdecette poutre,tupourrasme faire
un navire detrente mètresde long?» demanda-t-il.
–Detrente et un mètresencomptantl’éperon, pour une largeur
dequatre mètres vingt, princeDiomède.Maisnousn’auront
jamais assezdebronze.»
Deuxdécadesplustôt,un navire illyrien deconception
nou1
velle,une dièreàdeux rangéesderameurs, ornée d’un éperon
debronzeavaitfaitescaleauportd’Argosetle jeuneDiomède,
filsdeDiomèderoi d’Argos, n’avaitpasmanqué de l’admireret
de l’étudier.Maintenant, il prévoyait,avecle maîtrecharpentier
Deuthérosdese faireconstruire le meilleurnavire de laflotte
achéenne.
Latutelle d’Aegilaé,samère, lui pesaitetilsouffraitdevoir
qu’elle ne manifestaitpaslamême dévotionque luià
sonseigneur absent.On n’avaiteu que deraresnouvellesenArgosdes
prodiges quesonroiaccomplissait.Ilavait,avec soncompère
Ulysse,volé leschevauxdeRhéosainsique lePalladionsacré et
conduit uneambassadeauprèsdePhiloctèteà Lemnos.Seize
roisétaientmortsdesamain etle
jeuneDiomèdebouillaitd’im

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Lespremières représentationsde dière datentde - 800maison
peutimaginer qu’ellesétaientdéjàenservice depuis un moment.

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patience de lerejoindre pourprendre partauxcombats etau sac
deTroie. On murmurait que depuis queDiomèdeavaitblessé
Aphroditequis’étaitinterposéesurlechamp debataille, la
déesse, par vengeance, détournaitsafemme de lui.
«Si nousle faisonsenboisdur,recouvertdebronzesur un
pouce, deux surletranchant, nousenaurons assez. Etcesera
moinslourd. Il fautle façonnerpour qu’ilsoitfacileàressortir
aprèsl’éperonnage,regarde !»
Etsurlesable de laplage, l’adolescentetl’artisan
dessinèrentdifférentesfigures, discutantles avantagesdes unesetdes
autres. Maisl’après-midiavançaitetle jeuneDiomède dut
rentrerauchâteau.Il pritcongé ducharpentieretgagnalataverne
duportoù Pylas, filsdeLycos,sonaurige, désaltéraitles chevaux
ainsiquesapersonne. Luiaussirêvaitderetrouverson père,qui
combattaitauxcôtésdu roi. Ilse levalorsqueDiomède filsparut
dansl’encadrementde laporte etilsuivisonami etson prince,
jusqu’àl’écurie.
Lesdeux chevaux blancsd’Argospiaffèrenten les apercevant
etfurent vite harnachésetattelés au char.Un momentplustard,
l’attelage laissaitderrière lui les quelquesbâtimentsduportet
suivaitla routequi mèneàla cité d’Argos.Lespaysans quirevenaient
dumarchése garaient respectueusement. Depuis que leroi etses
guerriersétaientpartisà Troie, il nerestaitplus quecinqdeces
charsàdeux rouesdanslaprovince etilsannonçaient unseigneur.
Le peuple étaitprospère etfidèleàladynastie.DameAegilaé
entretenaitleroyaume mieux que l’honneurdeson époux.Pylas
interrogeasoncompagnon:«Alors, levieuxDeuthérospeut te
faireun navirequi puisse emporterleschevauxetlechar ?
–Oui etleboisdéjàséché ne manque pas, maisil

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