Le retour du mort
92 pages
Français

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Le retour du mort , livre ebook

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Description

Ce roman a pour cadre Madagascar, pays enchanteur marqué par ses coutumes. Félix, un jeune paysan sans histoires, se sent contraint d'enfreindre les dernières volontés de Vavat, son père défunt. Ce dernier a décidé de revenir sur terre pour protéger les habitants de son village, menacés par un homme sans scrupules. Cette décision va entraîner Félix dans des aventures qui le libéreront d'une dépendance psychologique.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 01 novembre 2005
Nombre de lectures 237
EAN13 9782336275758
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0450€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Lettres de l’océan indien
Collection dirigée par Maguy Albet
Déjà parus
CALLY J. William, Kapali.La légende du Chien des cannes et autres nouvelles fantastiques créoles, 2005.
ARIA Jacqueline, L’île de Zaïmouna, 2004.
TURGIS Patrick, Tanahéli — chroniques mahoraises, 2003.
TURGIS Patrick, Maoré, 2001.
FOURRIER Janine et Jean-Claude, Un M’zoungou à Mamoudzou, 2001.
HATUBOU Salim, L’odeur du béton , 1999.
BALCOU Maryvette, Entrée libre , 1999.
FIDJI Nadine, Case en tôle, 1999.
COMTE Jean-Maurice, Les rizières du bon Dieu, 1998.
DEVI Ananda, L’ Arbre-fouet, 1997.
DAMBREVILLE Danielle, L’Ilette-Solitude, 1997.
MUSSARD Firmin, De lave et d’écume , 1997.
TALL Marie-Andrée, La vie en loques, 1996.
BECKETT Carole, Anthologie d’introduction à la poésie comorienne d’expression française, 1995.
DAMBREVILLE Danielle, L’écho du silence, 1995.
BLANCHARD-GLASS Pascale, Correspondance du Nouveau Monde, 1995.
SOILHABOUD Hamza, Un coin de voile sur les Comores, 1994.
GUENEAU Agnès, Le chant des Kayanms, 1993.
RAFENOMANJATO Charlotte-Arrisoa, Le Cinquième Sceau , 1993.
AGENOR Monique, L’aïeule de l’isle Bourbon, 1993.
BOYER Monique, Métisse , 1992.
Le retour du mort

Tchito Roukhadze
www.librairieharmattan.com Harmattan1@wanadoo.fr diffusion.harmattan@wanadoo.fr
© L’Harmattan, 2005
9782747595193
EAN : 9782747595193
Sommaire
Lettres de l’océan indien - Collection dirigée par Maguy Albet Page de titre Page de Copyright I - ECHO DES VIVANTS II - VISITE INATTENDUE III - UNE FAIM DE CROCODILE IV - A CONTRE COEUR V - UN PAYSAN A LA VILLE VI - TRACE PERDUE VII - MAUVAISE GRAINE VIII - A QUI SE VOUER ? IX - FAIBLESSE ET TENTATION X - LE BONHEUR C’EST DE L’ATTENDRE XI - HASARD ET AMITIE XII - BRAVER L’INTERDIT XIII - LE PIEGE SE TRAME XIV - DEUX MONDES INCOMPATIBLES XV - TOUT EST DANS LA TETE XVI - LE TERRAIN SE DEBLAIE XVII - SAVOIR INTRANSMISSIBLE
I
ECHO DES VIVANTS
Quand Vavat apprit que son meurtrier était sorti de prison, il se retourna violemment et déchira le dernier lambeau de son linceul. «Même mon repos éternel est troublé par cet individu ! », pensa-t-il, révolté par l’incohérence de la justice terrestre.
L’esprit de Vavat n’avait pas encore eu le temps de se détacher de Tampuko, son village natal, situé sur les Hauts Plateaux. Cette libération qui allait certainement causer de grands troubles, l’inquiétait. La plupart des villageois avaient probablement oublié Philibert, cet homme sans foi ni loi, dont toute la morale se résumait dans ce proverbe : « Les paroles sont comme la toile d’araignée : pour l’homme habile elles sont une stratégie et pour le maladroit un piège. »
Philibert était un excellent orateur et il avait été un homme puissant. Personne ne lui avait donné autant de fil à retordre que Vavat, et il n’était pas prêt à lui pardonner les années perdues dans la réclusion et la mauvaise compagnie. De pots-de-vin en révisions de procès, le jugement avait été cassé. Mais sa soif de vengeance n’en était que plus exacerbée. En se refermant derrière lui, le portail de la prison tranchait dix années infécondes qu’il gommait de sa mémoire. Il allait reprendre ses activités là où elles s’étaient arrêtées. Pour commencer il ferait le tour de ses alliés et remettrait de l’ordre dans ses affaires. Ensuite, il s’attaquerait à la réalisation de son projet si malencontreusement contrecarré par Vavat.
Ce dernier connaissait trop bien Philibert pour ne pas deviner ses intentions, aussi lui fallait-il revenir au village sans plus tarder.
II
VISITE INATTENDUE
Vavat s’étira. Ses articulations, immobilisées par un repos qu’elles avaient cru éternel, craquèrent effroyablement. Le bruit fit fuir tous les rats habituellement en sécurité dans ce lieu peu fréquenté. Il soupira, plia ses genoux pour poser la plante de ses pieds près de ses fesses tannées et décharnées. Il ramena ses bras anguleux sous sa nuque, retrouvant la familiarité de sa position terrestre favorite propice à la réflexion. Un homme retombe vite dans ses habitudes. Vavat eut envie de fumer. La fumée l’isolait du tourbillon des pensées parasites. Il se frotta les lèvres, se gratta la poitrine et sentit sa nudité. Jamais il ne pourrait se présenter au village ainsi ! Mais comment se procurer des vêtements ? Par le retournement ? Ah non ! Lui, l’adversaire acharné de cette coutume qui obligeait les vivants à changer périodiquement le linceul des morts, ne pouvait y recourir. Combien de fois n’avait-il mis son fils en garde contre ces charlatans qui répètent de génération en génération, que les morts ont froid et qu’ils s’en plaignent à leurs descendants par l’intermédiaire des rêves. Il suffisait qu’un pauvre bougre raconte avoir rêvé d’un parent défunt pour qu’un conseil de famille se réunisse. Ensuite, on allait consulter le sorcier qui déterminait, selon les astres, le jour et l’heure les plus favorables pour procéder au famadihana 1 . « Un vivant mettrait une vie pour user une soie de la qualité d’un lambamena, d’ailleurs spécialement tissé pour l’éternité, alors vous n’allez pas me faire croire qu’un mort qui ne fait rien de ses dix doigts parvienne à percer son linceul ! Les voilà devenus bien exigeants ces morts ! ricanait Vavat, eux qui toute leur vie, comme vous d’ailleurs, se sont contentés d’un seul pantalon et de deux ou trois rectangles de tissu, parce qu’ils n’étaient pas assez riches pour s’acheter d’autres vêtements ! Croyez-vous vraiment que vous devez perdre le peu que vous possédez pour couvrir un mort qui n’en a cure, et nourrir, à cette occasion, le village pendant trois jours ? »
Vavat s’agita si fort à se remémorer sa lutte contre ceux qu’il traitait d’usuriers et d’exploiteurs de la crédulité humaine, qu’il sentit son sang bouillir, bien qu’il n’en ait plus une goutte dans les veines. Il est vrai que le rappel d’émotions profondes rend instantanément la vie à des sentiments apparemment évanouis. Vavat retrouvait sa combativité.
- Outre le linceul, il faudra payer le devin pour ses bons services, sacrifier plusieurs zébus et inviter tout le village à ripailler à ma prospérité éternelle. Comment éviter à mon fils de telles dépenses, comment lui faire comprendre que mes convictions étaient et restent inébranlables ? Avoir l’air de me dédire est un vrai châtiment.
Il se souvint avec amertume du dernier retournement auquel il avait assisté. Il en éprouvait encore une tristesse mêlée de rage et d’impuissance, parce que l’ordonnateur de cette cérémonie était le plus cher de ses amis d’enfance. Un homme charmant et courageux, mais esclave de la tradition. Il était venu timidement l’inviter au retournement de son oncle, mort sans descendance. Vavat avait accepté, par amitié, alors qu’il quittait ostensiblement le village lors de pareilles cérémonies. La fête avait été magnifique. Elle avait laissé dans toutes les mémoires un souvenir inoubliable. Pendant trois jours le toaka-gazy 2 avait coulé à flot. La plupart des invités avaient mis près d’une semaine pour se dégriser. L’odeur des boeufs rôtis en plein air et du rhum accompagnait encore les plats de riz le lendemain de la fermeture du tombeau. Les musiciens avaient joué jusqu’à l’épuisement.
Le pauvre amphitryon avait autant fait pour son oncle que pour son père. Il avait voulu prouver sa piété, son respect des anciens et sa générosité. Sa ruine fut définitive et il se réfugia dans une réserve distante dont ses voisins ne furent pas dupes. Il n’était pas le premier à avoir tout perdu pour obéir aux coutumes. On le réconfortait en rappelant la fête magnifique dont on parlerait encore dans deux ou trois générations. Cependant, personne ne pouvait l’aider. Ils vivaient tous au jour le jour.
- J’espère que mes ancêtres auront la sagesse de ne plus rien me demander jusqu’à ma mort, car je ne pourrai rien faire. Je n’ai rien, mais je suis heureux. Je peux vivre et mourir en paix. J’ai fait mon devoir. J’ai honoré royalement mon oncle aux yeux de tous, se consolait le malheureux quand la faim le tenaillait trop fort.
- Pauvre innocent ! soupira Vavat en songeant à son ami. Il le revoyait à la tête de la délégation familiale et des invités, arrivant devant

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