Les trois cavaliers d Arpad
190 pages
Français

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Les trois cavaliers d'Arpad , livre ebook

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190 pages
Français

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Description

Entre deux guerres, c'est une randonnée entre deux mondes. Peter, Ferenc et Laszlo, sont trois jeunes hongrois qui ont la bougeotte et rêvent de liberté. Direction : la mer, une sorte de Far West quand on a vingt ans dans les Carpates. Ils se sentiront longtemps apatrides sans jamais renoncer à leur rêve américain. Ils auront trois enfants, Louis, Marie, Angéla, qui mettront des années à déchiffrer les secrets des Trois cavaliers d'Arpad. Entre la Révolution hongroise et la guerre d'Algérie, il y a la fulgurance de New York, mais aussi les communistes, la Résistance, Mai 68 et ceux qu'on appelait "ces gens-là".

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 01 mai 2011
Nombre de lectures 89
EAN13 9782296461628
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0000€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

LES TROIS CAVALIERS D’ ÁRP­ÁD
 
Jean-pierre FARKAS
 
 
LES TROIS CAVALIERS D’ÁRPÁD
Roman
 
 
 
 
© L’Harmattan, 2011
5-7, rue de l’Ecole-Polytechnique, 75005 Paris
 
Fabrication numérique : Socprest, 2012
Ouvrage numérisé avec le soutien du Centre National du Livre
 
http://www.librairieharmattan.com
diffusion.harmattan@wanadoo.fr
harmattan1@wanadoo.fr
 
ISBN : 978-2-296-54930-2
EAN : 9782296549302
Un village inconnu dans un pays énigmatique : Tövis en Transylvanie, des collines rondes, et, au-delà des arbres, des ruisseaux, des loups et de petits ours, on dit aussi que, là-bas, les hommes sont plutôt rudes. Comme le paysage, qui sait être plus tendre mais seulement au printemps. Ce pays est aujourd’hui roumain, il fut hongrois. Longtemps. Ou pour toujours ?
Sur cette photographie un peu voilée, on distingue mieux un cortège de femmes en blanc et d’hommes en noir, ils chassent devant eux un troupeau d’oies dans la rue du village. C’est probablement un mariage. Ce curieux pays respecte toutes les origines religieuses, les enfants iront dans la religion des parents, les garçons seront protestants et les filles plutôt catholiques. Pendant des années, l’illustre Céaucescu a ainsi gouverné la seule démocratie populaire entretenant des relations avec Israël.
En tête de la fête, il y a un accordéoniste et une violoniste, brune, jolie. Sa joue caresse le violon, elle sourit et regarde sur la droite de la photo. C’est l’église de Tövis, du bon vieux bois plus clair que les autres maisons plutôt grises ou vert pâle.
Applaudissant les mariés, il y a trois garçons qui ont l’air de chanter avec les musiciens. Ils sont adolescents et joyeux. L’un des jeunes porte un chapeau noir et une blouse flottante, comme celle des musiciens. Il se nomme Peter et il a invité dans son village ses deux copains, Ferenc et Laszlo, qui, pour l’occasion, sont habillés comme à la ville, uniforme sombre : longue redingote et petite casquette. Les trois jeunes garçons vont aller danser la « csardas » et échanger des petits verres de palinka avec les villageois. Peter ne lâche pas des yeux la belle violoniste. L’accordéoniste non plus.
Cette photographie date du siècle dernier, elle est franchement sans intérêt artistique, mais c’est le cadeau le plus précieux jamais offert à ceux qui, 20 ans plus tard, deviendront les enfants des trois silhouettes entrevues devant l’église de Tövis.
Marie la fille de Ferenc.
Angela la fille de Laszlo.
Elles sont toutes les deux des enfants de la ville comme leurs pères. Il faudra tout son talent à Louis pour convaincre les deux filles que le silence des Carpates vaut bien le raffut de Budapest ou le tumulte de Paris. Louis est donc le fils de Peter, le campagnard de Tövis, il tient souvent ses deux amies par les épaules, avec le même geste protecteur que son père, au siècle dernier, montrait sur la photo avant d’emmener à la fête Ferenc et Laszlo, ses deux copains de la ville.
Louis est un grand barbu, il est aujourd’hui professeur de Lettres, il sera « l’homme de la vie » de Marie, puis d’Angela. Et sans doute de quelques autres. À cette époque, plus récente, celle de leurs retrouvailles, autour de la photographie de leurs pères, Louis bombe encore le torse, mais ses deux amoureuses vont lui apprendre à vivre autrement. Ou au moins essayer.
Marie est jeune, mince et brune, cheveux courts et frisés, elle est journaliste.
Les trois enfants de ces pères magyars ne s’étaient pas revus depuis longtemps, car Angela habite au Canada où son père, Laszlo, est venu s’installer quand il a décidé de quitter Ferenc et Peter après leur arrivée en France. Angela est une grande blonde, aussi lointaine que son père, mais c’est elle qui a récupéré la fameuse photographie dans le bureau en bois d’érable de son père. Ce document, un peu usé par le temps, leur est précieux, c’est la seule trace matérielle qu’ils aient pu retrouver sur la jeunesse de leurs pères. Pour tenter de mieux comprendre leur origine métissée, avant cette découverte, Angela, Marie et Louis n’avaient pu que se fier aux confidences de leurs pères, ils y avaient relevé quelques erreurs, des contradictions ou des secrets qui ressemblaient à des mensonges. Ainsi, pour leurs enfants, Peter, Ferenc et Laszlo furent longtemps, à leur façon, le seul témoignage sur leurs jeunesses aventurières, leur unique source d’information. Exclusive, exaltante, mais impossible à vérifier.
En regardant bien plus tard tous les détails de ce « Mariage à Tövis », les trois jeunes de la tribu ont choisi, comme si c’était leur aventure à eux, de mieux connaître l’histoire de leurs pères vagabonds, trois émigrés des Balkans, qui allaient devenir LES TROIS CAVALIERS D’ÁRPÁD.
Ou plus exactement Les Trois Motards, trois jeunes magyars, danseurs élégants, bons dragueurs, fous d’aventure et de mécanique. Entre deux guerres, rêvant de l’Ouest et plus loin encore, des Amériques.
Entrée {1}
 
 
ATTILA JÓZSEF, LE PREMIER TEMPS DE LA VALSE
Louis s’appelle en fait Attila József, comme le souhaitait son père, Peter, un hongrois de Transylvanie, mais que, lors de son arrivée en France, sa nouvelle famille bien française et pas trop magyarophile, avait jugé plus convenable d’appeler Pierre, le beau jeune homme étranger, avant de donner plus tard à son fils, un bébé joufflu, le prénom de son grand-père : Louis. Traduction qui leur semblait très naturelle, tout comme on avait décidé, au passage, que son père (en magyar Peter) serait prénommé Pierre. Louis l’avouait en rigolant, il aurait pu tout aussi bien s’appeler Peter ou Pierre, comme son père hongrois.
Mais on ne lui a jamais expliqué pourquoi.
Louis, fils de Pierre, est donc né à Ménilmontant, mais il se sent aussi chez lui à Barcelone ou à Berlin, et surtout à New York, la capitale affective de tous les métèques. Son cœur est plutôt Atlantique, à cause des origines bretonnes de sa mère : pour dire la vérité, mais sans pouvoir l’expliquer, pendant très longtemps, Louis n’a pas vraiment aimé les Magyars. C’était seulement pour lui une moitié biologique de son sang. La première, celle de son père ? Ou l’autre moitié, celle de sa maman ? Cliquez sur le 1, un peu rude, ou sur le 2, vraiment plus tendre.
Marie était donc la fille de Ferenc, le copain de Peter. Elle sera l’Amoureuse. Autant Louis jouait au chef de la tribu, autant Marie se sentait à l’aise dans son personnage de petite souris amoureuse du Grand Chat, mais elle se montrait nettement plus magyare que Louis. Dès sa plus tendre enfance, elle dansait divinement la « csardas », comme si elle était née à Soskut près de Budapest, le pays natal de Ferenc, son père, que sa nouvelle famille avait trouvé aussi plus commode d’appeler François.
Angela, l’aînée, semblait déjà plus distante. Elle sera l’Aventure. La « grande américaine mystérieuse », comme le soupirait Marie, habitait très loin quelque part au Canada avec son père Laszlo, le seul qui avait conservé son prénom hongrois. Il était le troisième motard, mais aussi le plus secret. Angela n’avait jamais connu sa mère, « Pourtant, jurait-elle, c’était une très belle femme, plutôt dans la mode ». Tout le monde était un peu jaloux de la belle Américaine. Surtout la petite Marie.
Le pire, dans les fêtes franco-magyares de leur enfance, c’était lorsque Marie et Louise, sa mère, entreprenaient, en phonétique, de chanter dans une langue bizarre, le hongrois. C’était toujours à la fin du déjeuner du dimanche, Peter et Ferenc essuyaient une petite larme, Marie et sa mère se tenaient par la taille. Louis les trouvait ridicules. Sans pouvoir, lui non plus, comprendre le sens de ces ballades « du pays ». Mais il se serait bien gardé de l’avouer.
Dans le trio, Louis serait l’Homme, et même le Roi. Il l’avait un jour dit à Marie, et écrit à Angela. Toujours, le torse bombé et sans rire.
Peter, Ferenc, Laszlo, c’était après la Grande Guerre, les trois motards arrivaient de Hongrie, trois bons copains qui avaient tout fait ensemble et toujours en même temps: le voyage, l’entretien bichonné de leurs motos, la natation dans le Danube, toujours la valse. Mais à l’envers (le contraire de ce qui se dansait à Vienne). Inspirée par la haine de l’ancien empire austro-hongrois, cette chorégraphie d’inspiration patriotique était aussi une stratégie sportive qui rendait plus facile la cueillette des filles dans les dancings de Budapest. Arrivés à Paris, Peter et Ferenc avaient séduit deux petites Fran&

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