Tous les chemins mènent ailleurs
160 pages
Français

Tous les chemins mènent ailleurs , livre ebook

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160 pages
Français

Description

Douze nouvelles pour suivre à la trace un truand maladroit, un écrivain en vacances, un obèse complexé, un enseignant contestataire, un liquidateur de Fukushima et… la fille du couvent. Il y a l'adepte des carrefours et l'amateur nostalgique des pauses sur les bancs publics. Celui qui s'émerveille, celui qui dézingue tout, celui qui en a marre du superflu, du faux-semblant, de la futilité et de tout ce qui encombre inutilement son chemin de traverse. Et, il y a ceux qui arrivent au bout du voyage...

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 08 octobre 2014
Nombre de lectures 26
EAN13 9782806107268
Langue Français
Poids de l'ouvrage 6 Mo

Informations légales : prix de location à la page 0,0650€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Tous les chemins Bruno Marée
mènent ailleurs
Tous, ils tracent leur chemin : l’obèse complexé, le truand
maladroit, l’écrivain en vacances, le professeur contestataire, le
liquidateur de Fukushima, la fille cachée du couvent…
Il y a l’adepte inconditionnel des carrefours et l’amateur de
pauses nostalgiques sur les bancs publics.
Il y a celui qui s’émerveille à chaque détour et celui qui dézingue
tout sur son passage parce qu’il en a marre du superflu, du
fauxsemblant, de la futilité et de tout ce qui encombre inutilement son
chemin de traverse.
Et puis, il y a ceux qui arrivent au bout du voyage…
Tous les chemins Né à Kinshasa en 1955, Bruno Marée est enseignant, naturaliste, rêveur en forêt,
apiculteur, amateur d’écriture… Il est l’auteur de deux romans, d’un recueil de nouvelles
et d’autres petites histoires sans prétention qu’il prend plaisir à imaginer et à poser sur
le papier. mènent ailleurs
Illustration de couverture : © Hélène Paquay. Nouvelles
ISBN : 978-2-8061-0190-7
16 €
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Bruno Marée
Tous les chemins mènent ailleurs





Tous les chemins
mènent ailleurs
Du même auteur chez un autre éditeur :

- Le sanglier ne pleure pas, roman, Éditions Publibook, Paris,
2009.
- Résistances, L'activiste insoumis, L'insupportable portable, Les
Éditions Chouette Province, Marche-en-Famenne, 2010.
- Du crapaud à l'ours polaire, et autres chroniques alphabétiques du
plat de nouilles, nouvelles, Éditions Memory, Tenneville, 2010.
- Au gré des girouettes, roman, Éditions Memory, Tenneville,
2012.
- « Chambre particulière », nouvelle, Quand on est deux,
Recueil collectif belgo-québecois, Éditions Memory (Belgique) et
Vents d'Ouest (Québec), 2013.
- « Labour, aller-retour », nouvelle, Partir, revenir, Recueil
collectif, Stéphane Batigne Éditeur, Questembert, 2014.

















Tous les chemins
mènent ailleurs


Bruno Marée

NOUVELLES


















D/2014/4910/50 ISBN : 978-2-8061-0190-7
© Academia – L’Harmattan
Grand’Place 29
B-1348 Louvain-la-Neuve
Tous droits de reproduction, d’adaptation ou de traduction, par
quelque procédé que ce soit, réservés pour tous pays sans
l’autorisation de l’auteur ou de ses ayants droit.
www.editions-academia.be La voie compte plus que le but :
le bonheur vient en cheminant.
Frédéric LENOIR
Du bonheur,
un voyage philosophique,
Fayard, 2013.Le carrefour des Trois Chênes
Roger la Toupie est mort. On a retrouvé son corps assis
sous un des grands arbres du carrefour des Trois Chênes, le
dos calé contre le tronc, la nuque appuyée sur la mousse de
l'écorce. Un étrange sourire illuminait son visage ridé. Ses
yeux fixaient encore, et pour toujours, le tracé sinueux du
chemin qui monte vers les crêtes boisées de la région. La
Toupie, ce n'est pas son véritable nom, évidemment.
Certains affirment qu'on l'appelle ainsi parce que, dans la tête
de Roger, ça ne tourne pas rond. C'est inexact ! Ces gens ne
savent rien. Ils n'ont jamais connu Roger. Lorsqu'il était
enfant, dans son cerveau précoce, les idées tournoyaient
parfaitement. Juste, peut-être, un peu trop vite… Roger a dû
échapper à la vigilance du personnel de la maison de retraite
dans laquelle il séjournait depuis peu. On ne sait pas
comment, à son âge, il a réussi à marcher jusqu'au Carrefour
des Trois Chênes. L'accès est malaisé. Loin de tout, isolé en
rase campagne, l'endroit n'est qu'un lieu de passage peu
9fréquenté mais qui, à un moment ou à un autre, rassemble
tous ceux qui sillonnent la contrée pour leur labeur ou pour
leur agrément.
Le marcheur qui se présente au carrefour des Trois
Chênes a le choix entre quelques chemins. Il peut aller tout
droit sans s'inquiéter des alternatives, en se laissant conduire
par la sente principale qui mène sans surprise et sans
arrièrepensée jusqu'au village suivant. C'est le chemin du commun,
du voyageur pressé, du randonneur perplexe en territoire
inconnu et du touriste réticent par manque de curiosité ou
apeuré par niaiserie profonde, ce qui revient plus ou moins
au même. C'est aussi la voie centrale et, vers le couchant
seulement, le sens unique du pèlerin zélé, obnubilé par sa
destination mystique. Celui-là ignore avec superbe les
chemins de traverse. Le sien est tracé et n'admet guère les
égarements.
Pourtant, au milieu de la plaine ouverte, les trois chênes
sont là. Loin avant le carrefour, on les aperçoit déjà et
chacun sait que les grands arbres marquent un nouveau cap à
franchir, une étape possible, un point de non-retour
supplémentaire. L'approche régulière et le regard qui les fixe, droit
devant – usage familier des randonneurs – les font grandir en
conséquence. Dans un fugace moment d'utopie, il n'est pas
rare que le marcheur se demande si les mastodontes de bois
ne se sont pas mis en branle eux-mêmes pour venir à sa
rencontre.
Et la rencontre a lieu…
Le passant passe, évidemment, sans ralentir, mais parfois
il pose son sac pour mieux reprendre son souffle. Quant aux
chênes, hormis par grand vent de tempête, ils ne bronchent
pas. Ils sont profondément ancrés dans la roche. Ils appuient
leur tronc court sur un soubassement massif de racines
tourmentées. Ils étalent vers le ciel le désordre subtil de leurs
branches noires, pour mieux s'y accrocher, pour le soutenir
10ou le griffer… on ne sait pas très bien. Ils invitent à la pause,
à la méditation et, pour les étrangers de passage, à
l'émergence de quelques scrupules anodins ou cruciaux, c'est
selon. Suis-je sur la bonne voie ? Par où poursuivre ma
route ? Quel nouveau chemin prendre ?
Les chênes suscitent l'hésitation.
C'est, du moins, ce qu'appréhende le marcheur à
l'approche des grands arbres. Il craint la perspective du choix,
source fréquente et prévisible d'une erreur de jugement.
Aussi probable que fâcheuse, voire fatale. Mais le
randonneur se fourvoie déjà : les arbres ne sont en rien responsables
du dilemme à venir. Ils sont innocents. S'ils annoncent
clairement le carrefour, ils n'en sont que le signal. Le sujet de
l'émoi réside du côté des chemins, de leur diversité et des
itinéraires méconnus qu'ils suggèrent.
À angle droit de la chaussée principale, un diverticule
mène sans détour à la rivière. Il est tentant pour le
randonneur fatigué, car il descend. C'est une large voie
qu'empruntent sans flâner les troupeaux assoiffés et quelques
pêcheurs attitrés, la gaule sur l'épaule et la bourriche battant
les flancs. Ceux-là, au carrefour des Trois Chênes, rêvent
déjà au brochet en embuscade dans les eaux sombres d'un
méandre profond. Ils ne font que passer, trop pressés par
leur affaire. À la belle saison, attirés par la pente, des
promeneurs du dimanche s'y aventurent aussi – mais c'est rare –
avec, pour les enfants qu'ils gouvernent, la promesse des jeux
d'eau ou des concours de ricochets. Les locaux savent de
quoi il retourne, mais les promeneurs du dimanche
remontent souvent déçus par l'expérience : le cours d'eau est
étroit et les galets absents ; les berges sont raides et d'accès
difficile ; le pont envisagé – comme pour toute rivière qui se
respecte – n'existe pas. Un gué boueux, labouré par le
piétinement des bêtes, permet tout juste, en se mouillant les
pieds, de poursuivre la route qui se perd sur le versant
11opposé. Le ruisseau n'offre pas les divertissements
escomptés et promis. Seul le bétail y étanche sa soif et le pêcheur,
parfois, ses ambitions. Le chemin de la rivière n'est pas le
plus palpitant. Il faut le méconnaître ou guigner de précises
intentions pour s'engager par là.

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