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Nos diverses cités
193
La ville invisible : réalité ou fiction ?
Imaginez une ville canadienne où vivraient
370 000 personnes. Une ville de cette taille se
classerait au 14
e
rang des plus grandes villes
du Canada, avec tout juste 2 000 habitants de
moins qu’Halifax. Cette ville imaginaire serait plus
grande que la moitié des capitales provinciales du
Canada – elle ferait deux fois la taille de Regina et
elle serait quatre fois plus grande que St. John’s.
Le temps serait aussi du côté de cette ville
puisqu’il s’agirait de la communauté bénéficiant
de la croissance la plus rapide au Canada.
Cette ville semble un merveilleux endroit
où vivre – dynamique et riche de possibilités.
Cependant, ne vous attendez surtout pas à
avoir votre mot à dire sur la façon dont elle est
administrée. Vous voyez, personne n’y a le droit
de vote.
Vous serez peut-être surpris d’apprendre
qu’une telle ville existe aussi dans la réalité.
Cette ville, c’est Toronto et, dans une moindre
mesure, chaque municipalité de l’Ontario, chaque
fois qu’il y a des élections municipales. À Toronto,
à la veille des élections de 2006, les noms
de 246 924 personnes ont été supprimés de
la liste des électeurs admissibles parce qu’il
était impossible de confirmer leur citoyenneté
canadienne. Les non-citoyens représentent
16,2 % de la population de Toronto.
Ces gens privés de leur droit de vote vivent à
Toronto, la plupart travaillent et paient des impôts
fonciers à Toronto, mais ils ne peuvent pas
voter lors des élections municipales, provinciales
ou fédérales. Ils ont tous une autre chose en
commun : ce sont tous des immigrants. Leur seul
crime est de ne pas être des citoyens canadiens.
Afin de pouvoir voter lors d’élections municipales
tenues en Ontario, tous doivent satisfaire aux
critères suivants : a) être âgé de 18 ans ou plus;
b) être un citoyen du Canada; c) résider dans
la municipalité où ont lieu les élections ou y
payer des impôts fonciers, que ce soit à titre de
propriétaire ou de locataire non-résidant.
Le nombre de personnes sommairement privées
de leur droit de vote à Toronto – près d’un quart
de million – explique pourquoi la ville que nous
avons imaginée au départ possède une population
totale de 370 000 habitants. Le Recensement de
2001 (qui constitue à ce jour la plus récente source
de données statistiques en matière d’immigration)
indiquait que 66,8 % des immigrants de Toronto
étaient âgés de 18 ans ou plus. Si nous ajoutons
ce tiers de membres de familles d’immigrants
d’âge mineur au groupe d’immigrants qui ne
peuvent pas voter, on obtient une « ville invisible »
de 370 000 personnes sans droit de vote, au sein
de Toronto.
Toronto compte, et de loin, la plus grande « ville
invisible » de résidants urbains privés de leur droit
de vote. Mais il existe aussi d’autres villes
invisibles un peu partout en Ontario. En 2001,
26,8 % de la population ontarienne, qui totalise
11,4 millions d’habitants, était composée de
personnes nées à l’étranger. En supposant que sur
les 3 030 075 immigrants que comptait l’Ontario
en 2001, le pourcentage d’immigrants qui ne
détenaient pas la citoyenneté canadienne était
égal au pourcentage d’immigrants de Toronto
dont les noms ont été rayés de la liste électorale
en 2006, le nombre total d’immigrants qui n’ont
pas le droit de vote en Ontario serait supérieur
à 615 000 ! Comme nous l’avons mentionné
Une ville invisible : les immigrants
sans droit de vote en Ontario urbain
MYER SIEMIATYCKI
Ryerson University
À Toronto, à la veille des élections de 2006, les noms de 246 924 personnes ont été supprimés
de la liste des électeurs admissibles parce qu’il était impossible de confirmer leur citoyenneté
canadienne. Les non-citoyens représentent 16,2 % de la population de Toronto.
précédemment, 40 % de ces immigrants vivent à
Toronto. Les autres sont répartis partout dans la
province et sont particulièrement nombreux dans
les grands centres d’immigration comme Ottawa,
Hamilton, Windsor, Kitchener et les municipalités
de la région de Toronto comme Mississauga,
Brampton, Markham et Richmond Hill.
Qui sont les immigrants privés
du droit de vote ?
Dans une autre publication, nous avons traité des
trois catégories d’immigrants n’ayant pas le droit
de vote (Siemiatycki, 2006). En nous fondant sur
une analyse des données relatives aux élections de
2003 de la Ville de Toronto, nous avions conclu
qu’à cette époque, 263 000 personnes habitant de
façon permanente à Toronto et âgés de 18 ans ou
plus s’étaient vu refuser le droit de vote parce
qu’ils n’étaient pas citoyens canadiens. Le plus
grand sous-groupe (49 %) de ces personnes
était composé d’immigrants ayant résidé au
Canada depuis plus de trois ans qui n’avaient pas
demandé à être naturalisés citoyens canadiens.
Comme l’indiquaient les résultats du Recensement
de 2001, tandis que la grande majorité des
immigrants deviennent des citoyens canadiens,
16 % des immigrants qui satisfont aux critères
pour obtenir la citoyenneté n’avaient pas
demandé à être naturalisés. Le deuxième
plus grand sous-groupe (38 %) était composé
d’immigrants qui se trouvaient au Canada
depuis moins de trois ans et qui n’étaient
pas encore admissibles à la citoyenneté. Les
autres immigrants privés du droit de vote
(13 %) étaient des immigrants sans statut qui
vivaient à Toronto.
Les immigrants appartenant au deuxième et au
troisième sous-groupe ne sont pas admissibles à la
citoyenneté canadienne. En effet, les immigrants
du deuxième sous-groupe n’ont pas passé
suffisamment de temps au pays et les immigrants
du troisième ne sont pas en règle au Canada,
situation qui ne peut mener à la citoyenneté.
Le plus important sous-groupe, qui représente
environ la moitié des 263 000 électeurs privés
du droit de vote, réunit des immigrants qui ont
choisi de ne pas exercer leur droit de devenir des
citoyens canadiens.
Il existe un vaste éventail de raisons qui font
en sorte que des immigrants choisissent de ne
pas devenir des citoyens canadiens. Certains
proviennent d’un pays qui n’accepte pas la double
citoyenneté, et le fait d’en perdre la citoyenneté
pourrait mettre en péril leur droit de propriété et
rendre difficile leurs visites dans ce pays. Certains
immigrants hésitent à devenir des citoyens
canadiens car une fois le statut de citoyen obtenu,
il n’est plus admissible à un éventail de services
gouvernementaux d’aide à l’établissement.
D’autres considèrent que les « avantages » liés à
la citoyenneté ne valent pas les coûts ou les
tracasseries administratives liées au processus de
naturalisation. Enfin, certains immigrants sont
mal à l’aise avec le fait d’abandonner une identité
qui a été la leur durant toute leur vie et qui est liée
à leur lieu de naissance.
Fait intéressant, de tous les immigrants au
Canada, ce sont les Américains qui affichent le
plus faible taux de naturalisation. En 2001, 32 %
des immigrants américains qui étaient admissibles
à la naturalisation n’avaient pas demandé la
citoyenneté canadienne, comparativement à 16 %
dans l’ensemble de la population immigrante
au Canada (Tran et coll., 2005). De façon plus
générale, les résultats du Recensement de 2001
ont révélé que les immigrants provenant d’Afrique
et d’Asie sont beaucoup plus enclins à devenir des
citoyens canadiens que les immigrants d’Europe et
des États-Unis.
Il est peu probable de voir diminuer dans un
futur prochain le nombre d’immigrants n’ayant
pas le droit de vote en Ontario. De fait, les chances
sont que ce nombre augmente au fil du temps.
Les taux annuels de nouveaux immigrants
demeureront les mêmes, s’ils n’augmentent
pas, et l’Ontario continuera de représenter une
destination de choix. Ainsi, chaque fois que
de nouvelles élections auront lieu, de grands
nombres d’immigrants ne seront pas encore
admissibles à la citoyenneté canadienne. Par
ailleurs, le Canada admet de plus en plus
d’immigrants de façon temporaire – c’est-à-dire
qu’ils n’ont pas accès la citoyenneté canadienne –,
de sorte que le nombre d’habitants privés droit
de vote dans nos villes continuera de croître.
Un résidant, une voix :
la nouvelle citoyenneté urbaine
Une campagne a été lancée à Toronto afin
d’étendre le droit de vote à tous les habitants
permanents de la ville, quelle que soit leur
citoyenneté. Cette campagne est l’œuvre d’un
réseau d’organisations communautaires venant en
aide aux immigrants et de groupes de défense des
droits des immigrants. Plusieurs fonctionnaires
municipaux, dont le maire de Toronto, David
Miller, se sont prononcés en faveur de la
proposition. En vertu de la constitution
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Nos diverses cités
Nos diverses cités
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canadienne, il incombe toutefois à la province
d’établir les règles relatives aux élections
municipales. La campagne « One Resident, One
Vote » vise donc à obtenir du gouvernement de
l’Ontario qu’il modifie la
Loi sur les élections
municipales afin d’accorder le droit de vote à
toutes les personnes âgées de 18 ans ou plus qui
ont élu domicile dans une municipalité.
Il s’agit là d’une revendication politique radicale
qui nous oblige à repenser et à revoir quelques-
uns de nos plus principes les plus anciens et les
plus fondamentaux relativement à l’organisation
de notre société. Cela dit, les migrations actuelles
à l’échelle mondiale font en sorte que de telles
transformations soient nécessaires.
Les personnes qui s’opposent à l’élargissement
du droit de vote à tous les résidants de la ville sans
égard à leur citoyenneté défendent généralement
leur point de vue en affirmant que le droit de vote
doit être mérité. Or, à leurs yeux, un seul critère
de mérite est acceptable et c’est la preuve de
citoyenneté canadienne. Nous énonçons dans ce
qui suit cinq arguments démontrant qu’une telle
perception des choses va à l’encontre de l’intérêt
de nos villes et de notre société canadienne.
Cette formule a déjà été
adoptée par d’autres pays
À l’heure actuelle, au moins 26 pays accordent
certains droits de vote à leurs résidants non-
citoyens. Plus de la moitié de ces pays se trouvent
en Europe, une poignée se trouvent en Amérique
du Sud et les autres sont éparpillés dans le monde
(Earnest, 2003). Dans la plupart des cas, le droit de
vote est accordé à tous les résidants qui n’ont pas
le statut de citoyen et ce, sans égard à leur
pays d’origine. Les droits de vote accordés aux
non-citoyens sont habituellement limités aux
élections locales ou municipales et ne permettent
pas aux personnes concernées de voter lors des
élections nationales.
La Nouvelle-Zélande a mis en œuvre le régime
de vote par les non-citoyens le plus permissif au
monde. Depuis 1975, tous les immigrants peuvent
voter aux élections municipales et nationales,
pour peu qu’ils soient au pays depuis au moins
un an. En d’autres mots, bon nombre de pays
ont adopté une formule plus inclusive que celle
du Canada en matière de participation politique
des immigrants.
Les droits relatifs aux élections
municipales sont différents
La campagne relative au droit de vote des non-
citoyens concerne les élections municipales. La
grande majorité des immigrants habitent dans les
villes. Le fait d’accorder le droit de vote aux non-
citoyens permet d’éviter toute controverse quant à
l’exercice, par des non-Canadiens, d’une influence
exagérée sur des compétences fédérales comme
la politique étrangère. Les élections municipales
portent sur des questions communautaires. Or, les
non-citoyens font partie des communautés et
contribuent à la vie communautaire.
Au Canada, le droit de vote aux élections
municipales a toujours été fondé sur des
principes qui ne sont pas les mêmes que pour
le droit de vote aux élections provinciales
ou nationales. Comme mentionné plus haut,
les non-résidants peuvent légalement voter aux
élections municipales. Cela n’est pas le cas lors
des élections provinciales et nationales, ce qui
témoigne de l’existence d’un principe de
partie
prenante
qui définit le droit de vote municipal.
Une personne qui possède ou qui loue une
propriété dans une municipalité a le droit d’y
voter (de même que son conjoint) même si
elle n’habite pas la municipalité. Puisque les
propriétaires et les locataires paient des impôts
fonciers, ils contribuent au financement de
l’administration locale et l’on estime qu’ils ont
leur mot à dire sur la façon dont la municipalité
dépense l’argent des contribuables. On retrouve
par ailleurs dans les municipalités de grande taille
plusieurs milliers d’électeurs non-résidants.
Le même droit devrait donc être accordé aux non-
citoyens
résidants
qui paient des impôts fonciers.
La nouvelle charte municipale de la Ville
de Toronto, qui vient d’être approuvée par la
province, reflète ce principe. La
City of Toronto
Act
de 2005 définit la ville comme une personne
morale « formée des habitants de sa région
Dans de nombreuses villes, les immigrants récents s’établissent en grand nombre dans des
quartiers précis. Les nouveaux arrivants sont généralement attirés vers des quartiers où d’autres
personnes originaires de leur pays vivent déjà, ce qui est tout à fait naturel. Cela signifie que les
non-citoyens ne sont pas répartis de manière égale ou au hasard dans les quartiers urbains.
géographique ». À souligner : l’accent est mis sur
les habitants et non sur les citoyens.
Pas d’imposition sans représentation
Toute personne qui habite une ville, qui finance
une administration municipale et qui compte sur
les services de cette administration devrait avoir
son mot à dire sur le choix de la personne qui en
sera à la tête.
Quartiers sans droit de vote et sans voix
Dans de nombreuses villes, les immigrants récents
s’établissent en grand nombre dans des quartiers
précis. Les nouveaux arrivants sont généralement
attirés vers des quartiers où d’autres personnes
originaires de leur pays vivent déjà, ce qui est
tout à fait naturel. Cela signifie que les non-
citoyens ne sont pas répartis de manière égale ou
au hasard dans les quartiers urbains.
Toronto constitue un exemple frappant de la
façon dont certains quartiers se retrouvent sans
droit de vote et sans voix, sur le plan politique, au
moment des élections municipales. Toronto est
officiellement divisée en 140 quartiers. Or, dans
certains quartiers, plus de 30 % des habitants ne
sont pas des citoyens du Canada. Cette exclusion
politique systématique fait en sorte qu’il est
difficile de répondre aux questions et aux besoins
des habitants des quartiers en question, malgré le
fait qu’ils paient tous des impôts fonciers, que ce
soit à titre de propriétaire ou de locataire.
Ce n’est pas un hasard si les quartiers de
Toronto officiellement reconnus comme étant « à
risque » se trouvent dans des secteurs où nombre
de non-citoyens habitent.
Vers une nouvelle citoyenneté urbaine
Le fait d’accorder aux résidants non-citoyens
le droit de vote aux élections municipales
aura pour effet de renforcer la démocratie,
l’inclusion sociale et la citoyenneté au Canada.
Ironiquement, en mettant autant l’accent sur
l’exigence du statut officiel de citoyen pour
voter, nous marginalisons un grand nombre
d’immigrants et nous les empêchons d’acquérir un
véritable sentiment d’appartenance à nos villes.
Favoriser la participation est l’essence même de
la citoyenneté, et cela renforce l’intégration des
nouveaux arrivants.
Cet argument a été exprimé de façon éloquente
par le maire de Dublin, en Irlande, lorsqu’il a
décrit les sentiments des immigrants de ce pays
quant au fait de pouvoir voter aux élections
municipales avant même de devenir des citoyens
irlandais. Le maire Michael Conaghan a déclaré
« Ils aiment l’idée qu’on leur demande de voter.
Ils ressentent ainsi qu’ils font partie de la ville et
je crois que cela est important […] J’imagine
qu’ils ont l’impression de ne pas être mis de côté ».
(Young, 2005)
Les administrations municipales ont longtemps
été perçues comme des berceaux de la démocratie.
C’est à l’échelle municipale que les gens peuvent
participer le plus pleinement possible aux prises
de décision collectives et à une souveraineté
partagée. Et, bien entendu, c’est dans les villes que
les immigrants s’établissent.
À une époque de migration mondiale sans
précédent, il n’est ni dans l’intérêt des nouveaux
arrivants ni dans l’intérêt de nos villes de
pratiquer l’exclusion politique des nouveaux
arrivants. Et puis qui sait, peut-être qu’à force
de diffuser le message que tous les résidants
d’une ville devraient pouvoir voter aux élections
municipales, le taux habituellement peu élevé
de participation électorale augmentera enfin. La
création d’une culture de participation politique
est un projet que nous avons tous en commun.
À propos de l’auteur
Myer Siemiatycki est directeur du programme d’études
supérieures Immigration and Settlement Studies à la
Ryerson University.
Références
Earnest, D. 2003. « Noncitizen Voting Rights: A Survey
of an Emerging Democratic Norm », communication
présentée à la convention annuelle de l’American Political
Science Association.
Siemiatycki, M. 2006. « The Municipal Franchise
and Social Inclusion in Toronto: Policy and Practice »,
Inclusive Cities Canada
.
Tran, K., S. Kustec, et T. Chui. 2005. « Becoming Canadian:
Intent, process and outcome »,
Tendances sociales
canadiennes
/
Canadian Social Trends
(printemps).
Young, C. 2005. « If You Live in Dublin, You Can Vote
There »,
The Toronto Star
(10 avril), p. D10.
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