Aiôn et Philippe l Arabe - article ; n°1 ; vol.72, pg 253-272
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Description

Mélanges d'archéologie et d'histoire - Année 1960 - Volume 72 - Numéro 1 - Pages 253-272
20 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1960
Nombre de lectures 21
Langue Français
Poids de l'ouvrage 2 Mo

Extrait

J. Charbonneaux
Aiôn et Philippe l'Arabe
In: Mélanges d'archéologie et d'histoire T. 72, 1960. pp. 253-272.
Citer ce document / Cite this document :
Charbonneaux J. Aiôn et Philippe l'Arabe. In: Mélanges d'archéologie et d'histoire T. 72, 1960. pp. 253-272.
doi : 10.3406/mefr.1960.7469
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/mefr_0223-4874_1960_num_72_1_7469AION ET PHILIPPE L'ARABE
PAR
M. J. Gharbonnkaux
La mosaïque d'Aïon, Gê et Prométhée, découverte à Philippo-
polis en 1952 et publiée par E. Will en 1953 1, présente un tableau
apparemment composite d'une grande richesse de figuration, où
le mythe s'allie à l'allégorie. Les trois thèmes qui s'y trouvent
réunis sont d'autant plus facilement reconnaissables que les
vingt-quatre personnages de cet ensemble sont, à l'exception de
deux, désignés par des inscriptions grecques. A gauche, Aiôn
assis, avec derrière lui les quatre Saisons ; au centre, Gê, assise à
terre, entourée de quatre Karpoi, avec au second plan Georgia2,
personnification nouvelle, et Triptolème conduisant le bœuf de
labour; à droite, Prométhée modelant une figure humaine, le
Protoplastos, avec une figure féminine anonyme à demi nue appuyée
du coude gauche à un pilier et, au-dessus de lui, Hermès tenant
Psyché de son bras droit et ayant à sa gauche, à l'arrière-plan, une
figure voilée anonyme. Enfin, en haut du tableau, aux deux extré-
1 E. Will, Annales archéologiques de Syrie, III, 1953, p. 27-48. Je
remercie très vivement M. Selim Abdul Hak, directeur du Service des
Antiquités de Syrie, qui m'a généreusement fourni la documentation
photographique et les renseignements nécessaires pour l'étude de cette
mosaïque.
2 On remarquera que Geòrgia porte une tunique drapée à la manière
de Triptolème sur la Tasse Farnese (Furtwangler, Ant. Gemmen, III,
pi. 54) ou sur la patere d'Aquileia (J. M. C. Toynbee, Hadrianic School,
pi. 32, 2) : nœud devant l'épaule gauche soutenant un pan de draperie
destiné à contenir la semence. 254 J. CHARBONNEAUX
mités, les quatre vents {Notos et Euros à gauche, Zéphyre et Borée
à droite) et au centre deux petits génies ailés, les Drosoi, versant
sur la terre l'eau de leurs urnes (pi. I).
Il ne semble pas que les trois thèmes — Aiôn, Gê, Prométhée —
aient été réunis dans une autre composition. Gê, placée au centre
de celle-ci, forme évidemment le lien entre les deux autres groupes.
De fait, sur d'autres monuments, on trouve Gê associée à Aiôn l ;
son alliance naturelle avec Triptolème est figurée notamment sur
la patere d'Aquileia2; d'autre part, Gê (ou Tellus), entourée des
Karpoi, apparaît sur l'un, au moins, des sarcophages au Promét
hée, où l'on voit également Hermès tenant Psyché 3.
La façon dont le thème de Prométhée est ici représenté, compar
ée à la version des sarcophages, mérite quelque explication.
Sur les sarcophages on voit, d'une part, Prométhée modelant
une petite figure d'homme imberbe et, d'autre part, un mort
barbu étendu sur le sol ; l'âme apparaît sous trois formes diffé
rentes, au moins sur le sarcophage du Capitole, d'abord comme
une chrysalide de papillon qu'Athéna tient au-dessus de la tête
du petit homme modelé par Prométhée, puis comme Psyché
enlevée par Hermès, enfin sous l'aspect d'une femme voilée où
l'on s'accorde à reconnaître Anima*.
1 Sur la mosaïque de Sentinum (Toynbee, L L, pi. 33, 3) et la patere
de Parabiago (A. Levi, La Patera d'arg. di Parabiago) . La mosaïque de
Sentinum date du ine siècle ; la date de la patere de Parabiago est
discutée (ive siècle?) ; cf. Hanfmann, The Season Sarcophagus, I, p. 181,
et II, p. 82-83.
* Cf. p. 271, n. 5.
8 A. J. Festugière (Revue des arts, 7, 1957, n° 5, p. 195 sqq.), dans son
étude sur la mosaïque de Philippopolis, a brièvement décrit, en rapport
avec le thème de Prométhée, les quatre sarcophages où il figure (celui
du Vatican n'est qu'un fragment).
4 La signification de cette figure et ses rapports avec Psyché ne
sont pas clairs. On a pensé à la distinction entre animus, principe spiri
tuel qui s'échappe du corps, au moment de la mort, et lui survit (Psyché),
et anima, énergie vitale qui s'éteint avec le corps. Cf. C. Robert, Sar- ET PHILIPPE l' ARABE 255 AIÔN
II y a deux différences importantes, dans la composition du
thème de Prométhée, entre les sarcophages et la mosaïque : sur
celle-ci le mort n'apparaît pas et Athéna est remplacée par la
figure de femme à demi nue. Sur le premier point, observons que
l'idée de la mort est suggérée par la présence de Psyché et d'Anima
voilée. Quoi qu'on pense de cette dernière, l'enlèvement de Psyché
par Hermès signifie clairement la séparation de l'âme et du corps :
lès sarcophages, notamment l'un de ceux du Louvre (Ma 355),
l'atteste indubitablement1. Le cycle de la vie humaine, avec son
perpétuel renouvellement, répond donc sur la mosaïque au cycle
de la vie de la nature. L'absence du mort marque sans doute la
différence de destination entre la mosaïque et le décor des sarco
phages. Encore faut-il remarquer que l'imagerie funéraire dans
le monde romain offre rarement la représentation de la mort ; les
thèmes mythiques ou légendaires y sont traités de la même façon
que dans les peintures, les mosaïques ou les reliefs qui ornaient
les maisons ou les édifices publics. Certains de ces thèmes étaient
susceptibles d'une interprétation symbolique en rapport avec la
destinée du défunt 2 ; et l'allusion est évidente lorsqu'elle est sou
lignée par un détail réaliste, selon le goût romain 8. Il est clair que,
sur les sarcophages, le motif du mort étendu est une addition
romaine au thème hellénique : la réalité est mêlée au mythe, dont
la mosaïque nous présente au contraire une version d'esprit pure
ment grec.
Quant à la figure féminine à demi nue, il est probable qu'elle
cophag. Reliefs, III, 3, p. 436, et H. von Schoenebeck, Roem. Mitt., 51,
1936, p. 264.
1 Cf. A. J. Festugière, l. L, p. 199 et flg. 5.
8 Cf. le beau livre de Franz Gumont, le Symbolisme funéraire des
Romains (1942), et le compte rendu critique qu'en a donné A. D. Nock
(A. J. Α., 50, 1946, p. 140 sqq.).
8 Par exemple lorsque le sculpteur donne les traits de la défunte ou
du défunt au héros ou à l'héroïne de la légende représentée (cf. F. Cumont,
l. L, p. 415). 256 J. CHARBONNEAUX
représente Aphrodite1, comme l'indique son type; le regard
d'Aphrodite, tourné vers Prométhée, suggère sans doute une parti
cipation directe de la déesse à l'œuvre du Titan. Nous verrons ce
que peut signifier ce détail propre à la mosaïque.
Quelle était la signification du tableau, indubitablement chargé
d'intentions et d'idées, que nous propose la mosaïque de Philippo-
polis? E. Will, dans l'étude précise et détaillée qu'il lui a consacrée,
estime que le rassemblement de ce « petit monde divin et semi-
divin... révèle une conception d'ensemble raisonnée », mais la
combinaison des différents thèmes se fait par association d'idées...,
ou même simplement par liens iconographiques ; l'ensemble repré
sente « une glorification de la Terre, mère des fruits..., mère des
hommes ». L'imagerie du tableau « révèle un monde d'idées des
plus communes à la date de sa création, un mélange de philosophie
spéculative et pratique, une religiosité d'un genre nouveau dans
laquelle les antiques divinités personnelles cèdent le pas aux
dynameis personnifiées ».
A.-J. Festugière a davantage insisté sur la cohérence de la
composition en partant de l'étude du thème de Prométhée. Cette
composition, dit-il, « représente la vie et la mort de l'homme, en
connexion avec Aiôn, le temps éternel, dans lequel tout naît,
croît, parvient à maturité, décline et meurt, pour naître à nou

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