Contestataires et compagnons : les formes de l engagement gaulliste - article ; n°1 ; vol.60, pg 71-81
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Vingtième Siècle. Revue d'histoire - Année 1998 - Volume 60 - Numéro 1 - Pages 71-81
Protesters and Companions : The Patterns of Gaullist Involvement, Bernard Lachaise.
Since Free France, commitment to Gaullism means a total and personal belonging, a devotion to the exaltation of the figure of General de Gaulle. But from the adventure of the RPF up to post-de Gaulle Gaullism, Bernard Lachaise shows that the motivations as well as the forms of engagement in Gaullism have varied over time. Companionship was a strong and simple image, but it covers divergences and conflicts as well.
11 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié par
Publié le 01 janvier 1998
Nombre de lectures 25
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

Bernard Lachaise
Contestataires et compagnons : les formes de l'engagement
gaulliste
In: Vingtième Siècle. Revue d'histoire. N°60, octobre-décembre 1998. pp. 71-81.
Abstract
Protesters and Companions : The Patterns of Gaullist Involvement, Bernard Lachaise.
Since Free France, commitment to Gaullism means a total and personal belonging, a devotion to the exaltation of the figure of
General de Gaulle. But from the adventure of the RPF up to post-de Gaulle Gaullism, Bernard Lachaise shows that the
motivations as well as the forms of engagement in Gaullism have varied over time. Companionship was a strong and simple
image, but it covers divergences and conflicts as well.
Citer ce document / Cite this document :
Lachaise Bernard. Contestataires et compagnons : les formes de l'engagement gaulliste. In: Vingtième Siècle. Revue d'histoire.
N°60, octobre-décembre 1998. pp. 71-81.
doi : 10.3406/xxs.1998.2759
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/xxs_0294-1759_1998_num_60_1_2759CONTESTATAIRES ET COMPAGNONS
LES FORMES DE L'ENGAGEMENT
GAULLISTE
Bernard Lachaise
central de l'engagement gaulliste : La voie royale de l'engagement gaull
iste a longtemps été cette forme de se comment l'admettre pour les premiers
rment féodo-vassalique dont on a fait compagnons, ceux de la France Libre, qui
l'emblème du mouvement. Ber ne connaissaient pas de Gaulle lorsqu'ils
nard Lachaise, sans rejeter la figure du franchirent le pas ? Insuffisante est la défi
fameux compagnonnage, développe et nition de la nature du compagnonnage
affine ici l'analyse. Le compagnonnage présenté comme un «lien féodal» entre de
n'était pas un tout unanime ; il eut ses Gaulle et les siens : comment le gaullisme
degrés, ses ratés, ses discordances. aurait-il alors survécu à la disparition du
Général ?
Le gaullisme ne constitue ni une doct De telles questions illustrent l'impossib
rine, ni une organisation, mais similité de réfléchir sur l'engagement gaull
plement une expérience vécue, expé iste si l'on ne tient pas compte de la
rience personnelle du Général d'abord, chronologie. La périodisation utilisée tr
expérience vécue des relations du général aditionnellement dans l'histoire du gaul
de Gaulle avec ses fidèles ensuite : au cent lisme ne paraît pas la plus opportune
re de tout, on trouve la notion de fidélité, pour analyser l'engagement et il est nécess
lien féodal de nature mystique et mythique. aire d'en proposer une autre, plus adapt
Le gaullisme est d'abord un compagnonn ée. Trois dates fondamentales apparaiss
age». C'est ainsi que le journaliste ent. Elles distinguent quatre temps
Pierre Viansson-Ponté analyse, au début différents pour l'engagement gaulliste :
de la Cinquième République, l'engagement 1942 marque le passage du gaullisme
gaulliste 1. Fondée sur les premières «militaire» au gaullisme politique ; 1947
années du gaullisme, cette approche voit la naissance d'une organisation poli
convient-elle toujours plus d'un demi- tique gaulliste, à l'initiative du général
siècle après l'apparition du gaullisme en de Gaulle ; 1970 conduit les gaullistes à
1940 ? La notion de compagnonnage est s'interroger sur la nature de leur enga
mise en avant par les gaullistes eux-mêmes gement après de Gaulle.
et reconnue par les historiens. Plus discu En gardant en mémoire la diversité du
table est le rôle de la fidélité comme facteur contexte et de 1'« offre» correspondant à
chacune des époques ainsi délimitées, il 1. Pierre Viansson-Ponté, Les gaullistes. Rituel et annuaire,
Paris, Le Seuil, 1963, p. 7. faut mener l'étude du compagnonnage
71 BERNARD LACHAISE
sur le long terme, afin d'en montrer les complémentaires. Mais selon les circons
principales caractéristiques et d'en souli tances et les individus, l'une d'entre elles
domine. gner les spécificités. La fidélité et le lien
entre de Gaulle et les siens n'expliquant
pas tout, quelles motivations conduisent Une certaine idée de la France
à l'engagement gaulliste et quelles formes
«Ni système, ni parti, c'était un état celui-ci prend-il ? Le compagnonnage n'a-
d'esprit... Un refus, voilà le gaullisme t-il pas connu des tensions issues des
d'alors, et rien de plus.» C'est ainsi que discordances entre les attentes des gaull
Jacques Soustelle analyse a posteriori istes et les contraintes de l'engagement
l'engagement gaulliste en 1940 1. Ceux qui offert ?
rejoignent de Gaulle refusent, comme lui,
la défaite et souhaitent continuer à se battre O AUX ORIGINES DU COMPAGNONNAGE
aux côtés de l'Angleterre. Selon Phi
Au cours de plus d'un demi-siècle du lippe Barrés, en 1941, le chef de la France
gaullisme, quelques temps forts de l'eng n'expliquait pas autrement les raisons
agement gaulliste se détachent : il s'agit, d'être du gaullisme : «Ce que je veux, c'est
d'abord, de la seconde guerre mondiale l'union des Français pour chasser les All
puis de l'époque du Rassemblement du emands de France et pour les empêcher
peuple français, mais aussi de la fonda d'y revenir. Si c'est ça le "gaullisme", va
pour le "gaullisme" 2». tion de la Cinquième République ou de
la création du RPR. Les circonstances Mais le refus ne se limite pas à 1940 :
apparaissent alors exceptionnelles, mais à chaque grand moment dans l'histoire
suffisent-elles pour comprendre ? En du gaullisme, cet état d'esprit constitue
1940, comme en 1947, 1958 ou 1976 et une des raisons de l'engagement. Ainsi,
plus encore en dehors de ces dates fon en 1947, le rejet des institutions de la
damentales, quelles sont les raisons qui Quatrième République et la peur du
conduisent à adhérer au gaullisme, pour communisme contribuent largement au
un temps ou pour toujours ? L'expliquer succès initial du RPF. En 1958, c'est le
n'est pas chose facile. Les sources four refus de l'impuissance de la Quatrième
nissent des informations d'une inégale République face aux difficultés qui
richesse sur cette question. Les plus illus l'assaillent, en particulier en Algérie, qui
tres compagnons se sont plus exprimés explique de nombreux ralliements au
sur les raisons de leur engagement que gaullisme. Cet état d'esprit pèse encore
la foule des simples adhérents. Les moti en mai 1968, lors de la plus grave crise
vations de la génération des années 1980 que la Cinquième République ait eu à
sont mieux connues par les sondages que affronter. S'engager alors, c'est refuser de
celles des gaullistes de Londres ou même voir les institutions remises en cause. En
du RPF. Sans que l'on puisse ignorer la 1976, c'est ne pas accepter l'idée que le
diversité des parcours qui ont pu conduire gaullisme est fini. Il en est de même au
au gaullisme, il apparaît que l'engagement lendemain de 1981 : la victoire de Fran
gaulliste a trois origines principales : un çois Mitterrand et de la gauche, jugée
état d'esprit motivé par « une certaine idée dangereuse pour la France, constituent,
de la France», l'adhésion à la doctrine pour les cadres du RPR, l'événement le
gaulliste et l'attachement au général plus déterminant pour leur engagement.
de Gaulle. Apparues dans cet ordre, entre
1. Jacques Soustelle, Vingt-huit ans de gaullisme, Paris, La 1940 et 1947, ces motivations se retrou
Table ronde, 1968, p. 10. vent ensuite à tous les âges du gaullisme. 2. Philippe Barrés, Charles de Gaulle, Edimbourgh, The
Elles ne s'excluent pas et sont souvent continental publishers and distributors Ltd, 1941, p. 239-
72 L'ENGAGEMENT GAULLISTE
À l'occasion d'une étape difficile pour 1940, n'avait pas le temps ni le goût d'éla
le gaullisme, de Gaulle avait, en 1952, borer une doctrine...» 3. À partir de
défini à sa manière cet état d'esprit gaull l'expression publique, en 1942, des
iste : «L'avenir est... à ceux qui le mérit convictions politiques du chef de la
ent, même s'il y a des délais, des péri France libre et de la naissance, avec
péties, des obstacles. Il est à ceux qui le Jean Moulin et Pierre Brossolette, d'un
veulent, pourvu qu'ils ne le veuillent pas gaullisme idéologique, le gaullisme
pour eux, mais pour une grande et noble n'attire plus seulement par sa volonté de
cause. Il est à ceux qui savent souffrir lutter contre l'occupant mais parce qu'il
pour t

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