L oral dans l écrit politique - article ; n°1 ; vol.89, pg 72-85
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L'oral dans l'écrit politique - article ; n°1 ; vol.89, pg 72-85

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Description

Langue française - Année 1991 - Volume 89 - Numéro 1 - Pages 72-85
14 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1991
Nombre de lectures 9
Langue Français

Extrait

Geneviève Petiot
L'oral dans l'écrit politique
In: Langue française. N°89, 1991. pp. 72-85.
Citer ce document / Cite this document :
Petiot Geneviève. L'oral dans l'écrit politique. In: Langue française. N°89, 1991. pp. 72-85.
doi : 10.3406/lfr.1991.5764
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/lfr_0023-8368_1991_num_89_1_5764G. Petiot
Paris III-Sorbonne Nouvelle
L'ORAL DANS L'ÉCRIT POLITIQUE
Le masquage de l'hétérogénéité
Le corpus constitué pour cette étude se présente comme hétérogène, puisqu'il
regroupe textes de congrès, tracts, affiches, livres, slogans, ...émanant des organisa
tions syndicale et politiques CFDT, PSU et PS durant la période 1968-1990, mais
aussi des allocutions prononcées par F. Mitterrand, M. Rocard, L. Jospin et J.-
P. Chevènement, ainsi que quelques fragments de déclarations télévisées, et enfin des
comptes rendus écrits de débats parlementaires. Il s'agit donc de « corpus hétérogènes
et asymétriques » (Conein, Guilhaumou, Maldidier, 1984).
Mais plusieurs facteurs, tant linguistiques que pragmatiques, contribuent à leur
apparente homogénéisation ; tout d'abord, leur présentation graphique, qui coule les
textes dans le moule linéaire de la norme scripturale et en fait des écrits à Ure. Leur
mode de production combine étroitement l'oral et l'écrit, alors même que le « produit
fini » semble ne s'inscrire que dans le second. De plus, « la pratique spécifique de
l'analyse de discours » (Pêcheux, 1984) autorise leur réunion en ensemble discursif.
Les lacunes de « l'archivage » (on ne dispose pas des stades intermédiaires
d'élaboration orale et écrite du corpus, pas plus que de l'enregistrement magnétoscope
de la mise en œuvre orale) imposent les limites de l'étude. On se limitera à rechercher
des marques d'oralité sous le masquage dû à la conformité aux règles sémiotiques et
linguistiques de l'écrit, et à s'interroger sur le type d'oral ainsi décelé.
Le brouillage de l'oral et de l'écrit
Dane la production textuelle
II intervient dès la genèse du corpus. Si le texte produit se présente sous la forme
habituelle du support papier, sa production en revanche est doublement hybride pour
ce qui concerne les déclarations officielles d'organisations : orale et écrite, individuelle
et collective.
Ainsi les rapports adoptés aux Congrès, puis édités pour une diffusion interne et
externe, se présentent bien sous la forme écrite. Mais ce sont les discussions collectives
orales qui président à une première rédaction provisoire par le responsable chargé de
consigner les accords (analyses-propositions, le plus souvent désignées par les termes
spécifiques de « bilans-perspectives ») manifestés oralement. Ce premier écrit est
ensuite repris, rediscuté oralement dans une véritable cascade d'instances : des
commissions executives nationales jusqu'aux sections de base locales ; chaque
désaccord et/ou correction faisant alors l'objet de rédaction d'amendements émanant
du débat oral. L'écriture intervient donc, à chaque étape, comme fixation-notation
d'un accord conceptuel d'une assemblée sur un point donné, sur laquelle se forme une
72 majorité. Dans ce va-et-vient constant de l'oral et de l'écrit, tour à tour donnée
première et résultat de débats, se marque aussi lexicalement l'accord obtenu par le
recours aux termes « patentés », témoins des « acquis » conceptuels historiques, et des
spécificités théoriques de l'organisation.
La lecture des textes intermédiaires fait apparaître une surcharge lexicale. La
phase ultime, avant l'édition-diffusion des textes définitivement adoptés, consiste en
un « toilettage » de l'ensemble ; il s'agit d'un véritable re-writage, négociant les
effacements des redondances notamment par l'anaphorisation et le passage de la
parataxe à Fhypotaxe. Paradoxalement ce travail de conformité à l'écrit norme relève
du « technique », non du politique, et ne fait guère l'objet de discussions. On peut Ure
dans cette pratique un effet de la soumission de l'oral à l'écrit, et de l'intériorisation
par les locuteurs-scripteurs de la normativité grammaticale, ainsi que de l'application
des règles de lisibilité.
À un degré moindre d'élaboration collective, tracts et affiches sont le produit de
cette inter-action.
Les livres faits d'interviews de dirigeants sont eux aussi soumis à cette
relecture-réecriture : corrections, effacements, reformulations, ... ; le texte transcri
vant les enregistrements subit le même travail que les textes rédigés directement sur
papier.
Dane la réception-lecture
L'ensemble du corpus discursif est transcrit de façon lisible pour tous, c'est-à-dire
qu'il se présente comme un texte écrit.
Les textes oraux-écrits, tels que les allocutions ou discours prononcés par les
hommes politiques, par exemple, qui relèvent de la même production que le reste du
corpus, n'ont donc rien dans leur présentation qui signale leur mise en œuvre orale et,
bien sûr, les éventuelles improvisations les modifiant.
Rien ne note donc les hésitations, reprises, suspensions effectives. Et rien ne
permet de proposer une re-transcription conforme aux modes de description de l'oral
élaborés par les équipes de chercheurs. On ne peut, semble-t-il, qu'adhérer à ce
jugement : « L'insupportable et l'illisible viennent en particulier que se présente
comme de l'écrit ce qui n'en est pas. » (Gadet, Mazière, 1986).
De même, les principaux mots d'ordre, criés par les manifestants, figurent sur les
banderoles, procédant ainsi d'un double fonctionnement, oral pour être crié et
entendu, écrit pour être lu et photographié. Leur organisation tient donc compte de
cette double exigence, rythmique, centrée sur la fonction poétique, mais aussi
référentiellement cohérente à la situation et à la « doctrine » de l'organisation, par la
reprise de ses termes spécifiques.
On peut se demander si les conditions de production pragmatiques et linguisti
ques ne sont pas partiellement responsables de l'effet « langue de bois » couramment
dénoncé. Les vocables spécifiques et les syntagmes figés de l'organisation constituent
en effet le bien commun des militants et adhérents, ce sur quoi se fait l'accord
majoritaire et ce qui témoigne de l'histoire commune.
Si renonciation historique caractérise les premiers types de textes, en revanche
les autres peuvent combiner les deux types d'énonciation dégagés par Benveniste,
créant ainsi un cadre d'interlocution que nous examinerons plus loin. Cette même
combinaison se retrouve dans les articles et livres signés par des individus, le plus
souvent porte-parole patentés de l'organisation, où le JE rappelant le rôle officiel
recourt aussi au NOUS du collectif (Petiot, 1985).
73 Dans ces conditions notre première recherche s'attachera à détecter dans la mise
en page et la ponctuation des traces de l'oralité.
La mise en page et la ponctuation comme marquage de Forai
La mise en page
Le Journal Officiel de la République française présente l'archivage écrit in
extenso des débats parlementaires (Assemblée Nationale) ; pour ce qui nous concerne,
ce sont les journées du 21 au 24 mai 1984 qui sont retenues, au cours desquelles les
députés ont examiné le projet de loi « relatif aux rapports entre l'État, les communes,
les départements, les régions et les établissements d'enseignement privé » (Petiot,
1990b). La disposition des prises et tours de parole et leur notation permet ainsi
d'analyser plusieurs types d'oraux qui s'entrecroisent.
Les comptes rendus (CR) se présentent avec titres, sous-titres, chaque prise de
parole étant marquée par un retour à la ligne, le parleur étant nommé en petits
caractères gras, sous les formes régulières : M. le président, M. Jacques Chirac, les
italiques indiquant la fonction officielle : M. Pierre Mauroy, Premier ministre, lorsqu'il
s'agit de la première prise de parole au cours de la séance enregistrée. Les reprises

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