La jeunesse de Camille - article ; n°1 ; vol.104, pg 303-338
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Description

Mélanges de l'Ecole française de Rome. Antiquité - Année 1992 - Volume 104 - Numéro 1 - Pages 303-338
Gérard Capdeville, La jeunesse de Camille, p. 303-338.
Le récit des enfances de Camille, chez Virgile, (Aen., 11, 539-584), contient tous les motifs traditionnels de l'initiation du jeune héros, tels qu'on les trouve par exemple dans la légende des jumeaux romains : expulsion du foyer, ordalie par l'eau, thériotrophie, vie dans la forêt avec des bergers, pratique de la chasse, et finalement, au terme de la période d'apprentissage, accès à la souveraineté.
Ce qui est étonnant ici, c'est que cela concerne une jeune fille : s'agit-il d'une tradition particulière ou d'une création littéraire? Aucun élément extérieur ne vient corroborer l'hypothèse d'une légende volsque ou d'un reflet de pratiques locales. En revanche, divers traits attribués à la jeune femme dans la suite de son histoire ont une origine littéraire claire : ainsi son côté «Amazone» et sa mort, qui évoquent expressément Penthésilée. Quant à son nom, il est chargé de connotations religieuses précises, correspondant à son personnage de vierge consacrée à Diane. On peut donc conclure que c'est Virgile qui l'a entièrement créée, en combinant des données de diverses origines. Et c'est lui qui, pour le récit des enfances, a transposé sur une héroïne des thèmes en principe masculins.
36 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1992
Nombre de lectures 35
Langue Français
Poids de l'ouvrage 2 Mo

Extrait

Gérard Capdeville
La jeunesse de Camille
In: Mélanges de l'Ecole française de Rome. Antiquité T. 104, N°1. 1992. pp. 303-338.
Résumé
Gérard Capdeville, La jeunesse de Camille, p. 303-338.
Le récit des enfances de Camille, chez Virgile, (Aen., 11, 539-584), contient tous les motifs traditionnels de l'initiation du jeune
héros, tels qu'on les trouve par exemple dans la légende des jumeaux romains : expulsion du foyer, ordalie par l'eau,
thériotrophie, vie dans la forêt avec des bergers, pratique de la chasse, et finalement, au terme de la période d'apprentissage,
accès à la souveraineté.
Ce qui est étonnant ici, c'est que cela concerne une jeune fille : s'agit-il d'une tradition particulière ou d'une création littéraire?
Aucun élément extérieur ne vient corroborer l'hypothèse d'une légende volsque ou d'un reflet de pratiques locales. En revanche,
divers traits attribués à la jeune femme dans la suite de son histoire ont une origine littéraire claire : ainsi son côté «Amazone» et
sa mort, qui évoquent expressément Penthésilée. Quant à son nom, il est chargé de connotations religieuses précises,
correspondant à son personnage de vierge consacrée à Diane. On peut donc conclure que c'est Virgile qui l'a entièrement créée,
en combinant des données de diverses origines. Et c'est lui qui, pour le récit des enfances, a transposé sur une héroïne des
thèmes en principe masculins.
Citer ce document / Cite this document :
Capdeville Gérard. La jeunesse de Camille. In: Mélanges de l'Ecole française de Rome. Antiquité T. 104, N°1. 1992. pp. 303-
338.
doi : 10.3406/mefr.1992.1759
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/mefr_0223-5102_1992_num_104_1_1759GERARD CAPDEVILLE
LA JEUNESSE DE CAMILLE
Est et Volscorum egregia de gente Camilla
agmen agens equitum et florentis aere cateruas.
(Virgile, Aen., 11, 432-433)
Parmi les personnages secondaires de l'Enéide, Camille est l'une des
figures les plus fortes et les plus attachantes, bien qu'elle combatte dans
le camp opposé à celui d'Enée, en tant que reine des Volsques et alliée de
Turnus. En effet, c'est une femme guerrière, la seule dans tout le poème :
les autres reines - à commencer par Didon — n'ont qu'un rôle «politique»,
alors que Camille n'exerce ici sa souveraineté que comme chef militai
re1.
De nombreuses études lui ont été consacrées, en général d'ordre psy
chologique ou littéraire2. Beaucoup plus ambitieux, le livre de G. Arrigo-
ni, Camilla, Amazzone e sacerdotessa di Diana (= Testi e documenti per lo
studio dell'antichità, 69), Milan, 19823, essaye de reconstituer, selon le
* La présente étude a fait l'objet d'une communication au Colloque Internatio
nal de Montpellier (11-14 avril 1991) sur L'initiation, dont les Actes (Montpellier
1992) contiennent la version orale (143-156).
1 Sur ce contraste, cf. e.g. E. Carney, Reginae in the Aeneid, dans Athenaeum,
NS 66 [= 76], 1988, 427-455.
2 Cette littérature est aussi abondante que décevante, faite essentiellement
d'analyses sommaires et de comparaisons superficielles. Signalons toutefois - sur
tout parce que c'est le plus récent - l'article de N. Horsfall, Camilla, ο i limiti
dell'invenzione, dans Athenaeum, NS 66 [= 76], 1988, 31-51.
3 Ce livre est utile pour l'importance de la documentation accumulée, mais
inacceptable dans sa méthode et ses conclusions. La partie la plus originale et la
plus intéressante est Γ« Epimetrum : Camilla nella cultura italiana. Mito classico e
alchimia dell'immaginario» (p. 127-160), qui étudie la survivance et les avatars du
personnage dans la littérature et l'art italiens, de Dante au XIXe siècle.
MEFRA - 104 - 1992 - 1, p. 303-338. GÉRARD CAPDE VILLE 304
titre de l'un de ses chapitres4, «Mito 'volsco', versione 'romana', aition e
rito»5.
Mais même G. Arrigoni ne s'est guère intéressée au récit de enfances
de l'héroïne qui, associé précisément à son rôle de femme guerrière, per
met de poser les questions qui nous intéressent ici : Camille représente-
t-elle un type de femme ayant reçu une formation, une initiation de
caractère militaire? et cela signifie-t-il que ce type existait en Italie cent
rale, au moins à titre de tradition plus ou moins légendaire?
Camille apparaît deux fois dans Y Enéide; d'abord au chant VII, dans
le « catalogue » de la coalition italique, où elle est mentionnée en tout der
nier lieu, comme chef du contingent volsque, dans un développement de
quinze vers, qui commence par (7, 803-805) :
Hos super aduenit Volsca de gente Camilla
agmen agens equitum et florentis aere cateruas
bellatrix. . .
et se termine par la description de son équipement (7, 814-818) :
... ut regius ostro
uelet honos leuis umeros, ut fibula crinem
auro internectat, Lyciam ut gerat ipsa pharetram
et pastoralem praefixa cuspide myrtum.
Puis au chant XI, où elle est évoquée par Turnus en deux vers qui repren
nent l'ouverture du passage précédent (11, 432-433)6 et où, surtout, le
récit de ses exploits guerriers occupe ensuite près de la moitié du chant,
jusqu'à sa mort, qui entraîne la retraite de ses troupes et celle de Turnus
lui-même.
C'est en prélude à ce récit que se trouve le développement où sont
évoquées son origine et son enfance, dans un discours que tient Diane à
4 Capitolo V (p. 65-155). Les guillements et l'italique sont de l'auteur.
5 Cf. du même auteur, l'article Camilla, dans Enciclopedia Virgiliana, 1, Rome,
1984, 628-631, qui résume la thèse du livre et fournit une bibliographie complète à
la date de la publication.
6 Cités ici en épigraphe. LA JEUNESSE DE CAMILLE 305
l'une de ses suivantes, Opis7, pour lui annoncer la mort prochaine de l'hé
roïne et la charger de la venger8. Diane justifie son intérêt pour la jeune
fille par le fait que celle-ci lui est consacrée, et elle expose donc les ci
rconstances de cette consécration, qui remonte à sa plus tendre enfance
(11, 537-538):
. . . Neque enim nouos iste Dianae
uenit amor subitaque animum dulcedine mouit.
7Macrobe (Sat., 5, 22, 1-6) remarque avec perspicacité que Virgile donne à
cette compagne un nom qui est attesté comme épithète de la déesse elle-même à
Éphèse, et il cite comme illustration quelques vers d'un hymne écrit en son hon
neur par le poète Alexandre d'Étolie (Μοδσαι, fr. 4 Powell), où le mot apparaît à
l'accusatif τΩπιν (ν. 5; cf. D.-Serv., Aen., 11, 532). L'utilisation de l'épithète est
confirmée par deux passages de l'Hymne à Artemis de Callimaque, où la déesse est
invoquée au vocatif Ουπι άνασσα (w. 204 ; 240), notamment à l'occasion du récit de
la fondation de son sanctuaire par un groupe d'Amazones (cf. Schol. in Callim., H.
Dian., 204 Etym. Magn., s.u. Ούπις, 641, 55). Le contexte des deux poèmes suggère
que l'épithète était en usage officiel dans la liturgie locale ; en revanche, les témoi
gnages tardifs concernant d'autres régions - Thrace (Tzetz., in Lyc, Alex., 936),
Laconie (Palaeph., Arist., 31 [32]), Trézène (Schol. uet. in Ap. Rh., 1, 972) - reposent
peut-être sur des confusions ou des extrapolations abusives - quand il ne s'agit pas
tout simplement d'un contre-sens de moderne, comme pour la Crète, que O. Höfer,
Opis 1, ap. W. Roscher, ML, 3, 1, 1897-1902, 927, a cru trouver dans le premier
passage de Callimaque, qui concerne en fait l'appellatif Dictyna.
8 La longueur de la voyelle initiale, attestée par Alexandre d'Étolie, confirmée
par la (fausse) diphtongue de Callimaque et bien respectée par Virgile, devrait di
ssuader de tout rapprochement de Öpis avec le théonyme latin Ops, gén. Opis - dont
on s'étonne de trouver chez G. Dumézil, Mariages indo-européens, suivi de Quinze
Questions Romaines, Paris, 1979, p. 229-230, un développement particulièrement
aventureux, où la référence à la Mort dans l'Orphée de J. Cocteau n'arrange vra
iment pas les choses ! Plus prudent, P. Pouthier, Ops et la conception divine de
l'abondance dans la religion romaine jusqu'à ta mort d'Auguste (= BÉFAR, 242),
Rome, 1981, p. 21, n. 1, estime que «ici le dessein de Virgile n'est pas décelable et il
n'y a rien à tirer de cette homonymie&

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