La traduction dans l institution pédagogique - article ; n°28 ; vol.7, pg 8-39
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Description

Langages - Année 1972 - Volume 7 - Numéro 28 - Pages 8-39
32 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1972
Nombre de lectures 47
Langue Français
Poids de l'ouvrage 3 Mo

Extrait

Jean-René Ladmiral
La traduction dans l'institution pédagogique
In: Langages, 7e année, n°28, 1972. pp. 8-39.
Citer ce document / Cite this document :
Ladmiral Jean-René. La traduction dans l'institution pédagogique. In: Langages, 7e année, n°28, 1972. pp. 8-39.
doi : 10.3406/lgge.1972.2095
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/lgge_0458-726X_1972_num_7_28_2095JEAN-RENÉ LADMIRAL
Paris-X, Nanterre
LA TRADUCTION DANS L'INSTITUTION PÉDAGOGIQUE
0.1. Les considérations théoriques qu'on va lire se situent à l'intersection
de deux directions de recherche différentes en « Linguistique appliquée » :
(1.) d'une part, les problèmes de la traduction et (2.) d'autre part, la pro
blématique complexe des rapports entre linguistique et pédagogie des
langues. Il s'agira bien sûr des langues vivantes étrangères; sans être total
ement absente, la référence aux « mortes » ne sera jamais ici thémat
ique et mériterait en outre une étude particulière.
0.2. S'agissant d'un article « théorique », la question terminologique, qui
ne saurait rester sans incidence proprement conceptuelle, est appelée à y
revêtir assez d'importance pour justifier quelques lignes de préliminaires.
Par une ambiguïté courante du français, neutralisant des oppositions qui
correspondent à différents degrés d'abstraction nominale (substantive et
adjective, et plus rarement verbale) au plan du signifié, le mot pédagogique
fonctionne à la fois comme l'adjectivation de deux substantifs différents
enseignement (No) et pédagogie (Nj). Le titre de cette contribution reproduit
cette ambiguïté qu'elle aura à lever. Cette démarche progressive de désam-
biguïsation conceptuelle ne concernera pas seulement le concept de « péda
gogie », que l'interférence docimo-pédagogique (cf. inf.) montre avoir lui-
même un double sens (Ыг et N2), ou le champ morpho-sémantique thème/
version /traduction... Le signifiant norme renvoie à deux signifiés terminolo
giques, l'un pédagogique l'autre linguistique : l'un et l'autre sont en cause
ici et leur coïncidence au plan du signifiant est, plus qu'un obstacle, un
indice.
Enfin, en concordance avec le couple anglo-saxon source language :
target language (en allemand Ausgangsprache : Zielsprache), on a préféré à
l'opposition classique en français entre langue de départ (LD) et langue
d'arrivée (LA) le franglais langue-source : langue-cible, où le deuxième élément
nominal (substantif déterminatif) pourra rester invariable et avoir une
fonction « suffîxale » permettant d'engendrer tout un ensemble de composés
terminologiques apparentés, stylistiquement plus maniables dans un dis
cours déjà marqué par de nombreuses nominalisations que les syntagmes
nominaux à relais prépositionnel (de/ď). C'est proprement la seule proposi
tion terminologique, au demeurant sans audace, que nous ferons. Il semble
en effet que, en linguistique comme ailleurs, la solution des problèmes 9
théoriques ne passe ni ne commence par le dogmatisme subjectif de décrets
terminologiques préalables mais qu'on risque bien plutôt de s'en approcher
par la description et l'approfondissement d'une désambiguïsation des
concepts. C'est peut-être encore plus vrai en matière de didactique, et l'on
n'a pas cru devoir céder aux tentations du volontarisme et de l'« illusion
pédagogique »...
1. Pédagogie des langues et traduction.
1.1. Contre la traduction.
La pédagogie des langues (vivantes étrangères) entretient avec la tra
duction des rapports au moins ambivalents comme en témoigne la vieille
ambition qu'il faille parvenir à « penser en anglais » — à penser directement
en anglais, en allemand, etc., au lieu de traduire en langue-cible une sorte
de brouillon mental français (la pensée étant censée précéder le langage).
Il y a là déjà un discrédit jeté sur les exercices de traduction. Ces derniers
ont pour nature de faire fond sur la compétence en langue maternelle (le
français) 1, de s'y référer constamment par un mouvement de va-et-vient
entre les deux langues de sorte que sont sans cesse mobilisées des connais
sances du français qui jouent un rôle analogue à celui d'un « souvenir-
écran » et développent des résistances 2 réciproques entre les deux sys
tèmes. Le professeur Guberina, théoricien de la méthode audio-visuelle
structuro-globale de Saint-Cloud/Zagreb, a insisté sur l'importance de ces
phénomènes au niveau des systèmes phonologiques 3. Les exercices de tra
duction auraient donc des conséquences pernicieuses, préjudiciables à leur
finalité explicite et spécifique comme élément d'une pédagogie des langues
vivantes et préjudiciables à la finalité globale de l'ensemble pédagogique
où s'insère l'apprentissage d'une langue étrangère. Ces inconvénients
pourront être articulés de la façon suivante.
L'apprentissage delà langue seconde étrangère serait perturbé en raison
des résistances psycho /linguistiques développées par la langue maternelle.
Parallèlement et inversement, mais à un moindre degré, on assisterait à
une relative inhibition des ressources expressives en français. La pratique
de la traduction s'accompagne de l'expérience bien connue d'une perte des
moyens d'expression très frustrante. Finalement, la multiplication des
interférences, dans les deux sens, aboutirait à une détérioration réciproque
des deux systèmes linguistiques. C'est ainsi qu'on a pu rendre le latin (ou
l'allemand...) responsable des lourdeurs stylistiques reprochées à certains
élèves; alors qu'en réalité c'est là pour eux sans doute l'occasion d'un effort
pour tenter de maîtriser une syntaxe plus complexe, et que nous avons un
fallacieux idéal de la phrase courte et paratactique, corrélatif d'une sco-
tomisation des ressources grammaticales et stylistiques de la langue et
d'une inhabileté à en faire usage.
Dans cette perspective, la version et surtout le thème seront considérés
comme des exercices « réactionnaires », rescapés de l'antique méthode,
purement livresque, où il fallait apprendre tout un catalogue rébarbatif
de règles de grammaire et de lecture et autres tableaux de conjugaisons...,
1. Par un parti pris de simplification terminologique, on conviendra de ne pas
problématiser l'équation langue première = langue « maternelle ». De même la question
psycholinguistique du bilinguisme sera mise entre parenthèses, ainsi que les pro
blèmes connexes.
2. En un sens tout à fait comparable à celui des « résistances » de la psychanalyse.
3. L'opposition « phonologie »lphonétique prend ici une valeur polémique. Cf. en
outre les résultats encore incertains mais suggestifs de la pratique audiologique du
docteur Alfred Thomatis. 10
pour se lancer ensuite « à coups de dictionnaire » dans l'entreprise tâton
nante et ânonnante de traduction. A supposer que cette méthode grammaire-
traduction ait convenu en ce qui concerne les langues mortes — et cela n'est
pas certain — il y avait là un lourd héritage dont il convenait absolument
de se débarrasser dès lors que les « langues étrangères » enseignées étaient
aussi des « langues vivantes » 4. Et ce n'est là nullement l'exigence « révolu
tionnaire » d'une extrême-gauche pédagogique : dès le xvie-xvine siècle,
le French Littelton 5, plusieurs fois réédité, se met en devoir d'y satisfaire.
L'ensemble des méthodes actuellement pratiquées dans l'enseignement
secondaire, qu'on n'osera plus appeler « modernes », sont des méthodes dites
actives.
1.2. La méthode directe.
Ce sera le cas, bien sûr, des fameuses « méthodes audio-visuelles »,
mais c'est aussi le cas de celle qui est devenue la méthode traditionnelle et
dominante, la « méthode directe », telle qu'elle est définie par les Instruc
tions officielles 6.
Cette méthode est dite à la fois active et concrète. Elle tourne autour
de l'idée de spo

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