Pourquoi les Métamorphoses ? A travers les âges, à travers les cultures l’homme s’est métamorphosé en animal, en minéral, en végétal … Par attrait du pouvoir, pour se protéger, pour vivre, pour mourir …
Le Cahier du Baratin
Revue des contes et des légendes
d’hier et d’aujourd’hui
d’ici et d’ailleurs
La tradition orale se vit, se partage, se transmet.
Nul ne la possède, nul n’en est le dépositaire
Nous ne sommes que les passeurs
Des récits retranscrits par des conteurs
Des illustrations
Des poèmes
Des adages
Les Métamorphoses – juin 2010 1
Oyez, oyez
A tous les jongleurs de mots,
A tous les manieurs de pinceaux,
A tous les cliqueurs de regards
...
Pourquoi les Métamorphoses ?
A travers les âges, à travers les cultures l’homme s’est métamorphosé en animal, en
minéral, en végétal …
Par attrait du pouvoir, pour se protéger, pour vivre, pour mourir …
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SOMMAIRE
Les textes
PREFACE : MAGIE DU CONTE ET HISTOIRES DES SOINS Page 4
UN TRUC CONTRE LE TRAC : LE TROC (Daniel MARY) Page 6
UN COUPLE INFERNAL (Marcel Zang) Page 7
ANASTASIS (Franck Lefebvre-Billiez) Page 14
LE MARAIS (Philippe Deniard) Page 17
SAINT RABBONI (Daniel Le Roux) Page 20
DEUX DOIGTS DE METEMPSYCOSE (Jean-Michel Levenard) Page 22
CONTE A CHRONOSCITY OU AUTANT EN EMPORTE LE TEMPS (Jean-Luc Schietecatte) Page 23
LA MACHINE ACTONE VII A GAZOUILLER DES MOTS D’ENCRE SUR PAPIER FOISONNANT DE Page 24
MUSIQUE ULTRA COLOREE (Jean-Luc Schietecatte)
UN ACTEUR QUI S’EST MIS AU VERT ! (Jean-Luc Schietecatte) Page 27
REQUIEM LEZARD (Jean-Luc Schietecatte) Page 27
LE JOUR OU J’AI REMARQUE QUE J’ETAIS DEVENU L’ENNEMI DE LA NATURE (Jean-Luc Page 28
Schietecatte)
SCARABOC, LE CREPUSCULE DE LA METAMORPHOSE (Jean-Luc Schietecatte) Page 29
DIE BRÜCKE (Nicolas Fleurot) Page 32
LA VIE ET MORT DES CIGALES (Jean-Pierre Planque) Page 36
AYOGA (Krystin Vesterälen) Page 37
L’HOMME-LEOPARD (Krystin Vesterälen) Page 38
INCORPORE(E) (Florent Martin) Page 40
L’AIGLE DU MISSOURI (Manuel Ruiz) Page 45
PORTRAIT DE L’ARTISTE EN NARCISSE (Thomas Spok) Page 48
BIEN APRES L’AUBE (Erwan QUEFFELEC) P ag e 4 9
D’UN MONDE À L’AUTRE (atelier d’écriture) Page 53
Les illustrations
L’HOMME-ARBRE AU PAYS DES BAMBOUS (Janine Laval) Page 5
HOMME-ANIMAL (Fontana Antonietta Gonsalus) Page 13
LA METAMORPHOSE DE NARCISSE (Salvador Dali -1937) P a g e 1 6
CROQUIS DE LOUPS-GAROUS Page 19
THESEE ET LE MINOTAURE (Antoine-louis Barye) Page 26
(Nicolas Fleurot) Page 31
D’UN MONDE À L’AUTRE (atelier d’écriture) Page 52
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PREFACE
MAGIE DU CONTE ET HISTOIRES DES SOINS
Chantal Denis, Psychothérapeute - Conteuse
Jean-Michel Coq, Psychologue Clinicien, Maître de Conférences des Universités
Depuis le vingtième siècle, des chercheurs ont tenté de dégager des éléments universels, communs à tous les contes à
travers le monde. Les contes sont généralement collectés dans la tradition orale et ont été remaniés au fil du temps.
Quand l’enfant s’endort et suce son pouce, les contes satisfont un plaisir tranquillisant, ainsi avant de s’endormir, l’enfant
adore écouter l’histoire de la grand-mère engloutie par le loup, le loup étripé et le ventre rempli de briques, la femme
décapitée de Barbe Bleue etc …
Le conte est utilisé dans les pratiques de soins psychologiques et d’éducation spécialisée, plus souvent destinées aux
enfants en difficulté mais aussi parfois aux adultes en souffrance psychique. Il a d’ailleurs aussi investi les lieux d’accueil de
l’enfance comme les haltes-garderies, les écoles maternelles et primaires, les bibliothèques jeunesse, mais il est aussi rentré
dans le monde des adultes et du grand âge.
La parution du livre de Bruno Bettelheim en 1976 a joué un rôle non négligeable dans l’utilisation des contes à des fins
pédagogiques et thérapeutiques, cet ouvrage mettant en évidence leurs dimensions maturatives et structurantes dans le
développement de la personnalité de l’enfant.
Le conte met ainsi en scène les conflits et les angoisses que l’enfant rencontre au fur et à mesure qu’il grandit, il lui ouvre un
espace imaginaire dont il va pouvoir s’emparer pour construire sa propre histoire et trouver sa place dans sa famille. La
parole du conte exprime les cheminements des désirs de chacun, entremêlés les uns aux autres et chargés d’émotions
aussi violentes que contradictoires. Ainsi le conte permet à l’enfant de mettre en forme son vécu intérieur, de donner sens à
ses émotions et de prendre plaisir à entendre et réentendre ce récit particulier qui a la particularité de bien se terminer. Ainsi
grandir constitue pour l’enfant un parcours semé d’embûches, mais tel le Petit Poucet face à l’ogre, des solutions peuvent
être trouvées, une issue constructive est à même de se dégager.
Les enfants confrontés à des graves angoisses, freinés dans leur développement pour diverses raisons, trouvent alors dans
le conte un récit qui vient faire écho à leur propre histoire, leur offre des voies de traverse, des sentiers imaginaires et les
amène à mobiliser leur propre créativité.
C’est souvent avec beaucoup d’enthousiasme que les soignants, qu’ils soient psychologues, éducateurs spécialisés,
pédopsychiatres, ergothérapeutes ou orthophonistes, ont mis en place dans les hôpitaux et les institutions spécialisées, des
ateliers contes. Adoptant souvent un dispositif de groupe, ces derniers content ou lisent à partir d’un ouvrage parfois illustré,
un conte que les enfants pourront ensuite commenter, dessiner, parfois jouer. Le professionnel soutient l’enfant dans les
associations et les liaisons qu’il peut effectuer entre le récit qu’il vient d’écouter et la manière dont il résonne dans son
univers intérieur. Il peut alors donner forme à ses souffrances, ses tensions, ses peurs, par la construction d’un scénario qui
croise et entrecroise celui du récit du conte et lui permet ainsi de prendre une certaine distance à l’égard de son
propre vécu.
Proposer aux enfants d’écouter un conte à l’intérieur d’un groupe, c’est aussi renouer avec la tradition collective des
contages d’autrefois, bien que ceux-ci aient été destinés aux adultes. Le groupe en effet permet aux enfants de confronter
leurs réactions face à la parole du conte, constituant alors pour eux un lieu d’échange et d’expression s’enrichissant
réciproquement de l’expérience de chacun d’entre eux.
Le conte fait naître entre les enfants et les soignants, l’expérience d’un plaisir partagé autour de son récit, créant entre eux
un espace commun à même de faciliter chez les enfants le soulagement de leurs difficultés.
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Janine Laval - Ribaute les Tavernes (France)
5
UN TRUC CONTRE LE TRAC : LE TROC
Daniel MARY
M. Truc avait le trac
Un truc horrible
Un jour, il tomba
Et son trac sortit tout en vrac
Patatrac !
D'abord il fut tout destructuré
Tous ces chocs et tous ces tocs
Tous ces tics et...Tac
En un rien de temps...
Il troqua le noir contre le rose
Il prit l'éthique et le chic
Et cela le restructura
Le transforma
Une vraie métamorphose.
6
UN COUPLE INFERNAL
Marcel Zang – Nantes (France)
Les Anciens rapportent qu’avant le commencement des temps, et bien avant la venue des hommes et des
femmes, et des plantes et des bêtes, il y eut l’Identité. Elle était une et divisible et immortelle, et toujours
semblable à elle-même. Son pouvoir s’étendait jusqu’aux confins de l’univers, à tout l’univers ; et autant qu’on
s’en souvienne, ce fut une époque heureuse, une époque de prospérité et de contentement permanent ; un
règne qui semblait ne devoir jamais prendre fin, dans un monde exact, méticuleux, un monde de clones, de
sécurité, d’ordre, de plénitude et de pureté. Puis, contre toute attente, il advint qu’à force de tourner, de se
répéter, l’Identité fut prise de vertige, de déraillement, et se mit soudain à dépérir, atteinte d’un trouble
mystérieux. Tous les sages de l’univers furent consultés ; puis les sages se consultèrent les uns les autres. Mais
comme ils partageaient tous le même avis, une pensée unique et aucune imagination, et n’ayant point trouvé
d’explication à ce phénomène sans précédent, encore moins le moyen d’y faire face, ils cessèrent de se
consulter et se résignèrent à regarder l’Identité courir à sa perte. A certains signes, l’on sut cependant que
quelque chose d’inhabituel se préparait. Ce fut d’abord cette sensation d’agitation, d’inconfort, qui s’emparait
des esprits, puis la possibilité même de concevoir l’anormal, l’intrusion d’un facteur inconnu et la perspective
d’un futur, par conséquent d’un passé, choses tout à fait nouvelles et guère rassurantes dans cet univers pur,
étale et sans ombres. L'on se mit à scruter le lointain, à pousser des soupirs, à éprouver des envies, à voir
l’univers bouger, la matière s’ouvrir, comme sous la poigne d’un marcheur invisible. Nul ne se douta que c’était
le temps qui faisait ainsi son entrée. Le temps et le vide. Alors la résignation fit place à la colère et à une
farouche détermination d’échapper à ce sort funeste. Continuer à vivre coûte que coûte, tel fut le mot d’ordre.
Et c’est sur ces entrefaites que survint un miracle – du moins est-ce ainsi qu’il fut interprété par la suite –, où
l’on vit apparaître le sexe, comme surgi du néant, qu’accompagnait comme son ombre un inconnu, un être
étrange et distordu, dont personne n’eût soupçonné l’existence et qui paraissait aussi puissant que l’Identité
elle-même. Le premier moment de s