Le caractère relatif de la métaphore - article ; n°1 ; vol.134, pg 21-37
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Description

Langue française - Année 2002 - Volume 134 - Numéro 1 - Pages 21-37
Patricia Schulz : The relativity of the concept of metaphor By observing how native speakers use the word metaphor in a metalinguistic way, the present article tries to show that they refer to the same object referred to by linguists. Furthermore, this concept seems to be characterized by linguists as well as by native speakers through a deep negative aspect, which, according to the author, is due to its scope as a phenomena of deviation, based essentially on the negation of the deep meaning of words, that is of the linguistic or semantic value attached to words. Metaphor is in deed generally described as an improper use of words, where sentence meaning is given up for/replaced by utterance meaning. But, as the author tries to show in a second part, against common believes metaphor is not in itself an object, which would be, so to speak, really present in our languages. It is not, as such, a phenomena, but a fact, i.e. it is depending on an observer and, furthermore, on a theoretical point of view on language. This point of view includes specific hypotheses concerning the nature of this even language, and more concretely, the nature of meaning. If metaphor seems to correspond to a certain degree with reality in ordinary language, this is because of a powerful illusion at the heart of natural language, and of which every speaker seems a victim: the illusion that there is some kind of extra-linguistic reality behind our words and phrases. As a consequence, by avoiding both this referential illusion and this point of view the concept of metaphor is no longer necessary to describe meaning.
17 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié par
Publié le 01 janvier 2002
Nombre de lectures 16
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

Patricia Schulz
Le caractère relatif de la métaphore
In: Langue française. N°134, 2002. pp. 21-37.
Abstract
Patricia Schulz : The relativity of the concept of metaphor
By observing how native speakers use the word metaphor in a metalinguistic way, the present article tries to show that they refer
to the same "object" referred to by linguists. Furthermore, this concept seems to be characterized by linguists as well as by native
speakers through a deep "negative aspect", which, according to the author, is due to its scope as a phenomena of "deviation",
based essentially on the negation of the deep meaning of words, that is of the linguistic or semantic value attached to words.
Metaphor is in deed generally described as an "improper use" of words, where "sentence meaning" is given up for/replaced by
"utterance meaning". But, as the author tries to show in a second part, against common believes metaphor is not in itself an
"object", which would be, so to speak, really present in our languages. It is not, as such, a "phenomena", but a fact, i.e. it is
depending on an observer and, furthermore, on a theoretical point of view on language. This point of view includes specific
hypotheses concerning the nature of this even language, and more concretely, the nature of "meaning". If metaphor seems to
correspond to a certain degree with reality in ordinary language, this is because of a powerful illusion at the heart of natural
language, and of which every speaker seems a victim: the illusion that there is some kind of extra-linguistic reality behind our
words and phrases. As a consequence, by avoiding both this "referential" illusion and this point of view the concept of metaphor
is no longer necessary to describe meaning.
Citer ce document / Cite this document :
Schulz Patricia. Le caractère relatif de la métaphore. In: Langue française. N°134, 2002. pp. 21-37.
doi : 10.3406/lfr.2002.6451
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/lfr_0023-8368_2002_num_134_1_6451Patricia SCHULZ
Célith, EHESS, Paris
LE CARACTERE RELATIF DE LA METAPHORE
— Attention — C'est — Un ! pas J'ai L'aigle peu une le glaive chouette métaphore, va fondre vengeur comme sur — c'est et Fais la métaphore, le une vieille bras pas périphrase. séculier chier buse non l !... ... ? !
— Ça, c'est une métaphore. a
Introduction
Rares sont en linguistique les termes qui, comme la métaphore, bénéficient
d'une telle notoriété au-delà même des sciences du langage. Les sujets par
lants « naïfs » mêmes semblent en effet en faire un usage fréquent. On peut
ainsi observer, dans le dialogue d'Audiard cité en exergue de ce texte, un
emploi métalinguistique du terme « métaphore », emploi qui semble très fr
équent. Mais s'agit-il d'un usage analogue à celui fait par les linguistes ?
Disons, pour l'instant, que tout le monde semble s'accorder quant à l'« objet »
même auquel ce concept renvoie. Or, quel est cet objet ? À quel phénomène la
métaphore nous renvoie-t-elle ? Quel rapport établir entre l'usage linguistique
et l'usage métalinguistique de ce concept ? C'est pour donner une réponse à
ces questions que nous nous proposons de décrire, dans les deux premières
parties de ce travail, d'une part, le sens que les sujets parlants « naïfs »
donnent à ce terme, avant de comparer ce sens, d'autre part, à des descrip
tions proprement linguistiques. Nous essaierons alors de montrer que, de part
et d'autre, ce terme semble doté d'un caractère fondamentalement «négatif».
Or l'examen de ce caractère négatif nous amènera, dans une troisième partie,
à « relativiser » la métaphore : en tant que dédoublement du sens elle est le
produit d'une décision - décision elle-même dépendante d'une hypothèse sur
la nature linguistique du sens. La quatrième partie enfin aura pour objectif
d'esquisser une description du sens des mots qui vise à faire l'économie du
concept de métaphore.
1. Faut pas prendre les enfants du Bon Dieu pour des canards sauvages, film et dialogues de Michel
Audiard (1968), in Audiard, 1995 : 99.
21 1 . La métaphore comme concept métalinguistique
/. /. L'emploi métaphorique vu comme « artifice » :
premier type d'utilisation métalinguistique du terme « métaphore »
Un des sens que ce concept, ou, mieux, l'utilisation du terme de « méta
phore » 2 possède, dans l'usage courant, nous semble être l'idée d'un certain
« beau parler ». Ainsi, dans le dialogue d'Audiard, lorsque l'interlocuteur
répond par un peu chouette comme métaphore, non ?, il utilise ce terme pour
caractériser le discours du locuteur comme étant quelque peu surfait, artificiel
voire trop orné. Selon ce dernier, le locuteur aurait ajouté à son discours, i.e. à
ce qu'il veut communiquer, des guirlandes ou des ornements, c'est-à-dire
quelque chose de gratuit et ressenti comme étant sinon de trop, du moins en
plus. Le locuteur se voit confronté au reproche de «faire du style» comme on
reprocherait à quelqu'un de «faire du zèle ». Dans cette optique, la métaphore
apparaît comme un « artifice », comme un « surplus de sens » - en soi inutile -
qui s'ajouterait à un sens perçu fondamental. En l'occurrence, dans le
dialogue d'Audiard, l'idée de vengeance serait illustrée et surfaite moyennant
des expressions propres à un discours guerrier de l'antiquité.
Or, la description que nous révèle cet usage du terme « métaphore »
contient l'hypothèse que nos pensées - en tant qu'elles constituent les
« objets » de notre communication - peuvent être transmises plus ou moins
directement, plus ou moins adroitement, avec plus ou moins de détours. Mais
cette description véhicule par là même aussi l'idée que, d'une part, ces
pensées - qui au fond sont ce que nous appelons « sens » - précèdent tout
énoncé, et que, d'autre part, le discours a fondamentalement pour objectif
d'exprimer, de transmettre cette pensée. Il s'agit là d'une conception du
sens que Jean-Claude Pariente décrit comme propre à la « théorie
classique » défendue par exemple par Port-Royal. Dans ce contexte,
Pariente cite une réflexion de La Bruyère (1995 : 409) :
Entre toutes les différentes expressions qui peuvent rendre une seule de nos
pensées il n'y en a qu'une qui soit la bonne. On ne la rencontre pas toujours en
parlant ou en écrivant : il est vrai néanmoins qu'elle existe 3.
2. Nous parlerons, par la suite, de deux types d'« emplois de métaphore ». Pour mieux les distin
guer dans notre développement, nous parlerons d'emploi métaphorique (ou encore de Y emploi d'une
métaphore) pour désigner des expressions utilisées métaphoriquement, par opposition à l'utilisation du
terme « métaphore », pour renvoyer à Y usage métalinguistique du terme « métaphore ».
3. Cette même conception se trouve, comme le souligne encore Pariente (ibid., 407), dans la Gram
maire générale et raisonnée de Port-Royal (1660), qui s'ouvre sur la définition suivante : « Parler est
expliquer ses pensées par des signes que les hommes ont inventés à ce dessein ».
22 L'hypothèse fondamentale dans cette approche, c'est que nos « idées » exis
tent, et que notre pensée pourrait donc s'exercer sans le recours aux paroles.
C'est dans cette perspective que la métaphore est vue comme une « parole »
qui surfait un certain « réel », une pensée existante.
Citons à cet endroit la description que donne Alceste du « style figuré »
dans Le Misanthrope (vers 385-388), et qui nous semble bien refléter cette idée :
Ce style figuré dont on fait vanité
Sort du bon caractère et de la vérité.
Ce n'est que jeu de mots, qu'affection pure,
Et ce n'est point ainsi que parle la nature.
La métaphore comme « jeu de mots », comme « affection » qui va contre la
« nature » des choses et qui sort « de la vérité » : Alceste semble - sur un ton
différent certes - avoir la même idée sur la métaphore que notre interlocuteur
d'Audiard.
1.2. L'emploi métaphorique vu comme un manque de précision :
second type d'utilisation métalinguistique du terme «métaphore &

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