Le montage d une grammaire seconde - article ; n°39 ; vol.9, pg 31-50
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Description

Langages - Année 1975 - Volume 9 - Numéro 39 - Pages 31-50
20 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1975
Nombre de lectures 33
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

Henri Adamczewski
Le montage d'une grammaire seconde
In: Langages, 9e année, n°39, 1975. pp. 31-50.
Citer ce document / Cite this document :
Adamczewski Henri. Le montage d'une grammaire seconde. In: Langages, 9e année, n°39, 1975. pp. 31-50.
doi : 10.3406/lgge.1975.2290
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/lgge_0458-726X_1975_num_9_39_2290Henri Adamczewski
Paris III.
LE MONTAGE D'UNE GRAMMAIRE SECONDE
Depuis une quinzaine d'années la recherche linguistique joue un rôle
de plus en plus important dans la pédagogie des langues qu'elle ne cesse
de renouveler, et ce n'est pas le moindre mérite de la que d'avoir
fait prendre conscience aux pédagogues des problèmes délicats que pose
la mise en place, le montage, d'une grammaire seconde dans le cerveau de
l'élève. Des choses que l'on croyait simples et sans malice — par exemple
la construction de nos énoncés le plus banalement quotidiens — se révèlent
soudain d'une complexité étonnante dans les modèles du linguiste. La pas
sionnante aventure de la grammaire transformationnelle, dans sa quête des
règles d'engendrement de nos énoncés, aura démontré de façon quasi pal
pable l'extraordinaire complexité des lois qui gouvernent toute grammaire
humaine. On sait aujourd'hui qu'enseigner une langue seconde signifie aider
l'élève à construire pierre après pierre une grammaire interne de L2 capable,
tout comme la grammaire interne de Ll, de produire et de comprendre
(entre autres) un nombre indéfini d'énoncés. J'ai souligné à dessein les
verbes aider et construire. On accepte aujourd'hui plus facilement qu'il soit
impossible d'enseigner une langue à quelqu'un, que tout au plus peut-on
l'aider à se forger une grammaire efficace. Humboldt x soutenait cette
idée il y a cent cinquante ans lorsqu'il disait que l'enseignant ne pouvait
que « donner le fil » à l'élève : « Die Sprache lâsst sich (...) nicht eigentlich
lehren (...) ; man kann (...) nur den Faden hingeben an dem sie sich von
selbst entwickelt ». Ce qui me paraît tout aussi important, c'est le fait
qu'on sache mieux que jamais, de façon plus explicite pourrait-on dire,
qu'il y a quelque chose à construire, un système à monter et pas seulement
des règles à juxtaposer ou à additionner de semaine en semaine et d'année
en année. On s'est rendu compte, ne serait-ce que confusément, qu'une
grammaire était quelque chose de hautement organisé, de rigoureusement
structuré et que certains « déclics » devaient nécessairement se produire,
que certains éléments devaient se mettre en place, avant que l'on puisse
espérer un fonctionnement de GR2 comparable à celui de GR1. Soit dit en
passant, on voit tout ce que la nouvelle conception de la mise en place de
1. W. von Humboldt, cité par N. Chomsky dans Current Issues in Linguistic
Theory, Mouton, 1964, p. 19.
31 doit aux travaux des linguistes et des psycho -linguistes sur Ll. Qu'il GR2
me suffise de rappeler le titre programmatique de cet article fameux de
Me Neill : The Creation of language 2 où il traite de la façon dont l'enfant
ré-invente la grammaire de sa Ll.
En L2, l'élève doit donc se fabriquer une grammaire-frj's qui ait les
mêmes propriétés que GR1. On comprend pourquoi, dans ces conditions, les
projecteurs sont aujourd'hui braqués en priorité sur l'apprenant et sur
l'apprentissage et que l'enseignant et l'enseignement ne jouent plus que les
deuxièmes violons. Un ouvrage de psycho -linguistique qui vient de paraître
aux U. S. A. résume bien la position actuelle : Focus on the Learner 3 (Prio
rité à l'élève). Cette « révision déchirante » des canons pédagogiques ne
signifie pas à mon sens que l'enseignant doive assister passivement à l'émer
gence d'une grammaire dans la matière grise de ses élèves, bien au contraire.
Le vrai problème se trouve enfin posé : comment aider Vélève à monter sa
grammaire ? Il ne saurait être question, devant une question aussi cruciale,
de se contenter de répéter l'histoire de la linguistique ou de la psycho-lin
guistique des dix ou quinze dernières années, comme cela se fait dans les
trop nombreux ouvrages consacrés à la pédagogie des langues parus ces
derniers temps. On ne saurait admettre non plus que la réponse à ce véri
table défi pédagogique se limite à la façon d'introduire les énoncés, d'emb
aller le produit fini en quelque sorte, je veux parler de l'audio-visuel tel
qu'il se pratique aujourd'hui.
L'intervention de l'enseignant dans le processus de construction de
GR2 chez l'élève pourra prendre des formes variées. Elle se manifestera en
premier lieu dans la progression grammaticale proposée et dans le type et la
quantité de « guidage » (Pit Corder 1964) 4 pédagogique dispensé aux
élèves. Ceci exige de la part de l'enseignant une compétence (au sens cou
rant, non-chomskien du terme !) et un savoir-faire nouveaux. Je dirai
brièvement que d'une part l'enseignant-guide devra être initié aux pro
blèmes fondamentaux d'acquisition, de fonctionnement et d'analyse des
langues et que d'autre part il aura acquis suffisamment d'autonomie péda
gogique pour déceler et traiter les blocages et autres incidents de parcours
pouvant survenir au cours du montage de GR2 chez ses élèves. Je ne dirai
rien ici sur les paramètres divers et variés de l'activité pédagogique du pro
fesseur de langue. Je veux me concentrer sur le problème central et fonda
mental que j'ai posé dès le début de cet article, à savoir de quelle façon on
peut faciliter la tâche de l'élève aux prises avec une grammaire 2. Encore ne
me sera-t-il possible de toucher ici qu'à deux problèmes très précis : le rôle
de GR1 dans l'entreprise « apprentissage de GR2 » et le problème de l'ad
équation de la description de GR2. En clair je m'attacherai dans un premier
2. D. Me Neill, « The Creation of Language » dans Language, Oldfleld et Mars
hall eds, Penguin, 1968, pp. 21-31.
3. John Oller et Jack Richards, ed. Newbury House, 1974.
4. « Pedagogical Grammars or the Pedagogy of Grammar ? » dans Linguistic
Insights in Applied Linguistics, S. P. Corder et E. Roulet, AIMAY/Bruxelles et
Didier/Paris, 1974, pp. 167-173.
32 temps à montrer qu'une prise de conscience précoce (au niveau du primaire)
du fonctionnement du langage à travers Ll permettrait d'aborder en pleine
lumière l'étude d'une deuxième langue au niveau de la sixième (ou à tout
autre moment). Dans un point, je me propose d'attirer l'attention
sur le rôle négatif qu'une description inadéquate de GR2 ne peut manquer
de jouer dans le processus d'appropriation de L2. A propos du premier
point, c'est bien évidemment le français qui retiendra notre attention. Dans
le second, c'est de la grammaire de 1' 'anglais qu'il sera presque exclusivement
question. Dans l'un et l'autre cas je m'appuierai principalement sur ma
recherche personnelle en linguistique.
1. Le rôle de GR1 dans l'appropriation de GR2.
La soi-disant « méthode directe » prônée officiellement dans l'ense
ignement des langues vivantes pendant plusieurs décades a eu pour effet
désastreux de couper totalement l'enseignement des langues étrangères
de celui du français langue maternelle (avec les conséquences que l'on sait
sur le plan de la formation des maîtres de langues). Ce fut le triomphe de
l'empirisme ou plutôt l'empirisme érigé en méthode d'enseignement. Cette
politique aurait dû logiquement aboutir au transfert saisonnier de populat
ions car, de toute évidence, qui peut se targuer de mieux posséder une
langue que le locuteur natif ? On n'en est pas arrivé là mais la croyance
selon laquelle il suffisait de « bien » parler une langue pour la transmettre (?)
à d'autres est encore fort enracinée et savamment entretenue par la public
ité. Etant donné l'ignorance quasi-totale du grand public sur tout ce qui
touche au langage on peut encore en ce domaine se permettre de dire à peu
près n'importe quoi.
L'une des grandes leçons de la linguistique contemporaine a été de
démontrer que les langues du m

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