Le retour de Chine ou les « horizons indépassables » d un genre politico-littéraire - article ; n°1 ; vol.29, pg 71-89
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Le retour de Chine ou les « horizons indépassables » d'un genre politico-littéraire - article ; n°1 ; vol.29, pg 71-89

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Description

Mots - Année 1991 - Volume 29 - Numéro 1 - Pages 71-89
LE RETOUR DE CHINE OU LES « HORIZONS INDEPASSABLES » D'UN GENRE POLITICO-LITTERAIRE Genre politico-littéraire, le retour de Chine recèle un certain nombre de caractères stéréotypés. Par-delà leur diversité, tous les récits de voyage se fixent un triple impératif : faire voir, faire vivre, faire vrai. La réalisation de cet objectif est essentielle dans l'économie générale du récit ; elle oblige le voyageur-narrateur à mettre en œuvre de multiples procédés qui tous convergent vers l'authentification des représentations.
THE RETURN FROM CHINA OR THE «IMPASSABLE HORIZONS » OF A POLITICOLITERARY GENRE A politico-literary genre, the return from China conceals a certain number of stereotyped features. For all their diversity, all travel-stories share a threefold purpose : to reveal, to breathe life and reality into their subjects. To achieve this goal, the travel-writer has to bring into play numerous techniques, all of which lead towards authenticating these representations.
EL REGRESO DE CHINA О LOS «HORIZONTES INFRANQUEABLES » DE UN GENERO POLITICO-LITERARIO Género político-literario, el regreso de China contiene varios caracteres estereotipados. Allende su diversidad, todos los relatos de viaje se fijan un triple imperative : hacer ver una realidad, hacerla vivir, hacerla auténtica. La realización de este objetivo es esencial para la economia general del relato ; obliga al viajero-narrador a poner en obra una multitud de procedimientos, todos convergentes hacia la autentificatión de las representaciones.
19 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1991
Nombre de lectures 34
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

François Hourmant
Le retour de Chine ou les « horizons indépassables » d'un genre
politico-littéraire
In: Mots, décembre 1991, N°29. pp. 71-89.
Resumen
EL REGRESO DE CHINA О LOS «HORIZONTES INFRANQUEABLES » DE UN GENERO POLITICO-LITERARIO Género
político-literario, el regreso de China contiene varios caracteres estereotipados. Allende su diversidad, todos los relatos de viaje
se fijan un triple imperative : hacer ver una realidad, hacerla vivir, hacerla auténtica. La realización de este objetivo es esencial
para la economia general del relato ; obliga al viajero-narrador a poner en obra una multitud de procedimientos, todos
convergentes hacia la autentificatión de las representaciones.
Abstract
THE RETURN FROM CHINA OR THE «IMPASSABLE HORIZONS » OF A POLITICOLITERARY GENRE A politico-literary
genre, the return from China conceals a certain number of stereotyped features. For all their diversity, all travel-stories share a
threefold purpose : to reveal, to breathe life and reality into their subjects. To achieve this goal, the travel-writer has to bring into
play numerous techniques, all of which lead towards authenticating these representations.
Résumé
LE RETOUR DE CHINE OU LES « HORIZONS INDEPASSABLES » D'UN GENRE POLITICO-LITTERAIRE Genre politico-
littéraire, le retour de Chine recèle un certain nombre de caractères stéréotypés. Par-delà leur diversité, tous les récits de voyage
se fixent un triple impératif : faire voir, faire vivre, faire vrai. La réalisation de cet objectif est essentielle dans l'économie générale
du récit ; elle oblige le voyageur-narrateur à mettre en œuvre de multiples procédés qui tous convergent vers l'authentification
des représentations.
Citer ce document / Cite this document :
Hourmant François. Le retour de Chine ou les « horizons indépassables » d'un genre politico-littéraire. In: Mots, décembre
1991, N°29. pp. 71-89.
doi : 10.3406/mots.1991.1650
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/mots_0243-6450_1991_num_29_1_1650HOURMANT François
Centre de recherches administratives
et politiques, Université Rennes I
Le retour de Chine
ou les « horizons indépassables »
d'un genre politico-littéraire
Que se passe-t-il de l'autre côté ? Cette question anodine
s'inscrit au fronton de tout récit de voyage. Concentration du
sens dans une extrême simplicité, elle suppose l'incertitude et
fonde le mystère. Interrogation péremptoire, elle appelle une
réponse : elle est invitation au voyage.
En elle se résume aussi le tropisme qui frappe l'intelligentsia
occidentale au début des années 1970 : après Moscou ou La
Havane, Pékin. La Révolution culturelle est terminée ; la Chine
reçoit. Mais comme l'URSS des années 1930, elle n'ouvre pas ses
frontières au tout-venant1. Les premiers voyageurs, amis patentés,
y entrent sur invitation. Ils sont pris en charge par la Luxingshe,
agence chinoise de voyage, pendant exact de la célèbre Intourist,
qui aplanit pour eux toutes les difficultés mais règle l'itinéraire à
son gré2. Pour ces voyageurs, pendant quelques semaines, une
société imaginaire et conforme à une idéologie leur est donnée à
voir et à vivre. Ce circuit immuable ponctué de visites d'usines,
d'hôpitaux, d'écoles du « 7 mai », de communes populaires
modèles, devient pour le régime maoïste l'occasion de se montrer
idéalement sur le mode oxymorique d'une fastueuse simplicité.
L'imaginaire officiel masque la réalité, il en produit la métamorp
hose. L'effet et le reflet tendent à éclipser l'information. La
1. Cf. C. Cadart, « Comment connaissons-nous la Chine ? », dans Regards
froids sur la Chine, Paris, Le Seuil, 1976, p. 26 (coll. « Point Politique »).
2. Cf. L. Bianco, « Voyage dans un bocal », dans Regards froids sur la Chine,
op. cit., p. 59.
71 sur le détail et l'accessoire occulte le silence sur l'essentiel. prolixité
Il y a pour tous les voyageurs mise en scène de la vie collective
et simulation où s'investit l'imaginaire1.
Vivant symbole de la circulation intellectuelle internationale,
Maria- Antonietta Macciochi suit de près son compatriote Alberto
Moravia au pays de la Grande Muraille. En 1971, elle fixe avec
son De la Chine les canons d'un genre et détermine à son tour
une série de pèlerinages. Philippe Sollers, le grand timonier de
Tel Quel, y entraîne Julia Kristeva, Marcelin Pleynet, Roland
Barthes, François Wahl. Alain Peyrefitte, Roger Massip, Alfred
Max, Michelle Loi, René Duchet, Colette Modiano, Gaston
Martineau, Claudie Broyelle se métamorphosent à leur tour en
voyageurs de bonne volonté.
A ce temps des voyages médiatiques, réactivation d'une certaine
forme de tourisme idéologique très en vogue dans les années
1930, correspond donc un genre politico-littéraire : le retour de
Chine. Rares sont en effet les voyageurs qui ne s'y égarent pas.
Au retour d'un périple bien organisé, ces voyageurs bien inten
tionnés témoignent. De 1971 à 1977, le retour de Chine connaît
ainsi en France une intense floraison : d'un bout à l'autre du
spectre idéologique se développe une sorte de « maoïsme mond
ain » qui touche ministre et militants, journalistes et intellectuels.
Symptômes d'une étrange fascination pour la Chine de Mao, tous
ces récits de voyage constituent un genre fortement codé dont il
s'agit de circonscrire les « horizons indépassables » à partir d'un
faisceau de constantes typiques.
Au-delà de cet objet précis et indépendamment des variables
politiques, la perspective choisie entend analyser le mode de
fonctionnement et de légitimation du discours et de l'énonciateur,
et, à terme, montrer comment le retour de Chine se joue
fondamentalement la comédie de l'objectivité.
Par-delà leur multiplicité, tous les récits de voyage s'agencent
de manière similaire et reposent sur un schéma spatialement et
narrativement circulaire. Us offrent aux lecteurs une inévitable
structure ternaire qui singe celle du périple proprement dit (départ/
découverte, exploration et description/voyage de retour et renvoi
au point de départ). Cette trajectoire, présente dans tous les
textes, distribue le récit en un certain nombre de séquences-types
1. Cf. S. Leys, Ombres chinoises, Paris, R. Laffont, 1978, p. 19-ЗО (Ire éd.,
1974).
72 aisément repérables : une profession de foi liminaire précède le
départ ; puis vient le carnet de route ; enfin, au terme de
l'expédition, l'heure des bilans.
La profession de foi
Le récit de voyage débute généralement par une déclaration
d'intention où l'auteur définit sa tâche et son ambition tout en
s'attachant à expliciter sa situation et son rôle. Cette confession
répond à une double exigence qui vise à la légitimation du
témoignage comme à celle de Pénonciateur.
La rhétorique du mystère chinois constitue le premier temps
fort de la profession de foi : « II faut se rendre sur place pour
mesurer à quel point le public occidental est affligé d'une myopie
faite de préjugés, de passions idéologiques et surtout d'igno
rance » \
«Terra incognita», la Chine des «mille mystères»2 est un
« monde clos et secret dont la vérité ne peut être atteinte — et
elle ne l'est pas toujours — que par une exploration minutieuse » 3.
Face à ce « pays le plus mystérieux du monde » 4, Maria-
Antonietta Macciochi, accompagnée de son mari Alberto Jaco-
viello, identifie sa démarche à celle des « premiers explorateurs » 5.
Sur cette Chine qui « fait trembler tant de gens /.../ qui suscite
tant d'espoirs au cœur de tant d'autres » 6, « où est donc la vérité
au milieu de tant d'informations contradictoires ? »7.
Le récit de voyage affirme une certitude : la Chine est un
mystère. L'énonciation de ce leitmotiv est essentielle dans l'éc
onomie générale du retour de Chine : l'affirmation du mystère
fonde la légitimité du voyage et participe activement à la tentative
d'élucidation (le mystère fait table rase et secrète le dévoilement) ;
1. A. Peyrefitte, Quand la Chine s'éveillera ... le monde trembl

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