Signes iconiques, signes linguistiques - article ; n°1 ; vol.24, pg 27-54
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Description

Langue française - Année 1974 - Volume 24 - Numéro 1 - Pages 27-54
28 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1974
Nombre de lectures 26
Langue Français
Poids de l'ouvrage 2 Mo

Extrait

M. Henri Besse
Signes iconiques, signes linguistiques
In: Langue française. N°24, 1974. pp. 27-54.
Citer ce document / Cite this document :
Besse Henri. Signes iconiques, signes linguistiques. In: Langue française. N°24, 1974. pp. 27-54.
doi : 10.3406/lfr.1974.5692
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/lfr_0023-8368_1974_num_24_1_5692Henri Besse, CREDIF-ENS de Saint-Cloud.
SIGNES ICONIQUES, SIGNES LINGUISTIQUES
1. Les images comme signes.
1.1. Les images, dans les cours audio- visuels pour débutants S sont uti
lisées pour simuler artificiellement en classe certaines composantes d'actes
de communication en langue étrangère.
Le magnétophone, ou la voix du professeur, restitue l'aspect phonique
des énoncés étrangers ; les images (de films fixes, le plus souvent) restituent
les composantes non-linguistiques de renonciation et, dans certains cours,
essaient de donner un équivalent visuel compréhensible du contenu sémant
ique des énoncés. Ces images sont groupées en séquences et les spectateurs-
élèves interprètent les indications discontinues des mouvements et des gestes
pour en reconstituer mentalement la continuité ; ils parviennent ainsi à
imaginer les rapports que ces composantes entretiennent entre elles.
Les actes de communication simulés relèvent presque toujours d'un
type d'énonciation particulier : le dialogue, que ce dialogue soit de situa
tion (quand les énoncés ont un rapport direct avec les circonstances d'énonc
iation) ou ne soit pas de situation (quand les énoncés ne s'y rattachent
que par la présence du locuteur). Quand l'énoncé est de situation, on ne
le visualise que dans certains cours ; quand il n'est pas de on a
presque toujours recours au procédé du « ballon » des bandes dessinées :
une scénette ou une suite de dessins évoquent alors le contenu sémantique
de l'énoncé.
1.2. Tenant lieu d'autre chose qu'elles-mêmes, les images des cours
audio-visuels sont considérées comme des signes, si l'on admet pour signe
tout objet perceptible répondant à la définition suivante : « Un objet dont
la perception sensible évoque chez le récepteur la pensée d'un autre
que lui-même » 2.
1. Pour une description de ce type de cours, voir dans le présent numéro l'article de
Rémy Porquier et Robert Vives.
2. Wallis (M.), « On iconic signs » in Recherches sur les systèmes signifiants,
La Haye, Mouton, 1971, p. 484 (notre traduction).
27 Une image n'est pas toujours un signe, bien qu'elle représente toujours
quelque chose d'autre qu'elle-même. On peut s'intéresser aux couleurs, aux
lignes qui la composent, à sa texture, à son mode de production, etc., sans se
référer aux réalités qu'elle est supposée dénoter. Une image est un objet
ayant sa propre valeur économique, esthétique, utilitaire, indépendamment
de ce qu'elle représente. Une image ne devient signe qu'en vertu de la
volonté de celui qui la regarde ou du mutuel consentement de ceux qui la
déchiffrent.
Mais une telle définition ne tient pas compte de la manière dont cet
objet perçu évoque la pensée d'un autre objet : un troisième terme est
nécessaire pour comprendre le fonctionnement du signe. Peirce, dans la défi
nition sans cesse reprise qu'il en donne, le caractérise ainsi : « Un signe,
ou representamen, est quelque chose qui, pour quelqu'un, tient lieu d'autre
chose, à certains égards et dans une certaine mesure. Il s'adresse à quelqu'un,
c'est-à-dire qu'il crée dans l'esprit de cette personne un signe équivalent ou
un signe plus développé. Ce signe qu'il crée, je l'appelle l'interprétant du pre
mier signe. Le signe tient lieu de quelque chose d'autre que lui-même, son
objet. Il tient lieu de cet objet, non à tous égards, mais en référence à une
sorte d'idée que j'ai quelquefois appelée le fond (the ground) du representa
men. » 2 Cette définition très générale peut s'appliquer aux signes linguist
iques comme aux images interprétées comme signes. Son originalité réside
dans le troisième terme, l'interprétant, qui est lui-même un signe, ou plu
tôt une série de signes, chacun représentant et interprétant celui qui le
précède 4.
Pour Peirce, toute image peut devenir signe ; elle entre alors dans la
catégorie de l'icône qui se caractérise par un rapport particulier entre le
representamen (ou signe) et l'objet représenté, ce est décrit comme
une ressemblance. « N'importe quel objet... est une icône d'un autre objet, dès
lors qu'il ressemble à cet autre objet et qu'il en est utilisé comme le signe. »
L'icône, quel que soit son support sensible, se définit donc par sa similitude,
son analogie, sa ressemblance perceptive globale avec l'objet qu'elle dénote :
« Ses qualités ressemblent à celles de son objet et excitent dans l'esprit des
sensations analogues » s. Un bruit peut devenir une icône, tel ce vrombisse
ment qui m'indique la présence d'un avion que je ne vois pas ; une onomat
opée est une icône ; un schéma, un plan, sont généralement utilisés comme
des icônes, et toute image ou dessin, si conventionnel que soit son mode
de représentation, peut être considéré comme une icône.
Le degré de similitude, de ressemblance, entre l'icône et l'objet dont
elle est le signe, peut évidemment varier considérablement, surtout dans les
icônes visuelles. Il suffit de quelques taches ou de quelques lignes pour qu'un
peintre japonais évoque un paysage. Un même objet sera représenté di
fféremment par un dessin d'enfant, une photographie, une peinture « réaliste »,
une coupe en perspective cavalière, un tableau cubique ou abstrait. Et cepen
dant, il sera possible à un observateur, habitué à ces différents modes de
3. Peirce (Ch. S.), Collected papers II. Ed. Haarthorne and Weiss. Harvard University
Press, Cambridge, 1965, p. 135 (notre traduction).
4. Besse (H.) (pour une discussion sur ce point), « Problèmes de sens dans l'enseign
ement d'une langue étrangère » in Langue française, n° 8, 1970, pp. 68-69, Paris, Larousse.
5. Peirce (Ch. S.), op. cit., II, pp. 143 et 168.
28 d'interpréter ces différentes icônes comme renvoyant à un représentations,
seul dénoté. Mais la ressemblance peut devenir incertaine au point qu'il soit
impossible d'assigner une identité précise à l'objet représenté. L'icône perd-
elle alors son « iconicité » et devient-elle un signe arbitraire comme les
signes linguistiques ? Certes, comme l'affirme Wallis, en vertu d'une coutume
ou d'une convention, des signes iconiques, en particulier les schémas, peuvent
fonctionner, dans un contexte donné, comme des signes conventionnels 6 en
perdant leur ressemblance, ainsi en serait-il des idéogrammes chinois. Mais
les professeurs chinois et japonais, dans leur pédagogie, tiennent compte
d'une ressemblance allusive qui, pour eux, subsiste, afin de faciliter la
mémorisation de ces idéogrammes. Et lorsque l'image devient « abstraite »,
au point qu'il ne soit plus possible de reconnaître dans ce qu'elle représente
un objet auquel l'expérience nous a accoutumés, elle n'en représente pas moins
quelque chose. Ce qui pose problème, ce n'est pas la ressemblance mais le
statut de ce quelque chose représenté. Le signe iconiquè « peut seulement
représenter l'objet et le décrire. Il ne peut provoquer la connaissance ou la
reconnaissance de cet objet » 7. Le signe iconiquè ne peut perdre son « iconi
cité », sa transparence à l'égard de ce qu'il représente, quel que soit le
statut de l'objet représenté : abstraction, objet usuel, fantaisies formelles...
Dans les cours audio-visuels, les images contiennent parfois des signes
iconiques renvoyant à des objets qui n'existent pas dans certaines cultures ;
les élèves partageant ces cultures cherchent alors à décrypter le signe en rap
prochant l'objet inconnu représenté d'objets familiers offrant une apparence
sensiblement identique, et la pompe à essence peut alors devenir un totem.
Il y a certes erreur dans l'identification de l'objet, mais ce qui est e

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