L arrêt Banco nacional de Cuba c/ Sabbatino - article ; n°1 ; vol.11, pg 205-229
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Annuaire français de droit international - Année 1965 - Volume 11 - Numéro 1 - Pages 205-229
25 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié par
Publié le 01 janvier 1965
Nombre de lectures 28
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

M. le Professeur Patrick Juillard
L'arrêt Banco nacional de Cuba c/ Sabbatino
In: Annuaire français de droit international, volume 11, 1965. pp. 205-229.
Citer ce document / Cite this document :
Juillard Patrick. L'arrêt Banco nacional de Cuba c/ Sabbatino. In: Annuaire français de droit international, volume 11, 1965. pp.
205-229.
doi : 10.3406/afdi.1965.1815
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/afdi_0066-3085_1965_num_11_1_1815L'ARRÊT BANCO NACIONAL DE CUBA C/ SABBATINO
P. JUILLARD
1. — D'après une jurisprudence constante de la Cour Suprême des Etats-
Unis, il n'appartient pas aux tribunaux américains de statuer sur la validité
des actes accomplis par un Etat étranger (ou par les personnes physiques et
morales agissant en son nom) sur son propre territoire, dans l'exercice de
ses compétences de droit public (1).
En vertu de ce principe, la Cour Suprême a toujours refusé dans le passé,
de se prononcer sur les mesures de nationalisation édictées par l'Etat étranger,
que leur portée ait été purement interne, ou que l'on ait revendiqué à leur
profit un effet extraterritorial. Dans ce dernier cas, le transfert de propriété
qu'elles réalisent produit toutes conséquences de droit aux Etats-Unis, sans
être soumis au contrôle juridictionnel.
Pour justifier son abstention, la Cour utilise la fin de non-recevoir tirée
de la nature de l'acte attaqué, connue sous le nom d' « Act of State doc
trine » (2) .
(*) P. Juillard, Assistant à la Faculté de Droit et des Sciences Economiques de
Paris, Master of Comparative Law (Columbia University).
(1) On comparera, sur ce point, avec la solution qui prévaut dans notre pays. Le juge
français n'étant pas investi du pouvoir de contrôler la constitutionnalité des lois, ne saurait
prononcer l'invalidité d'une mesure étrangère avant que celle-ci ait été déclarée dans l'Etat
d'origine. (Voir cependant, Contra, Maury, R.C.A.D.I., 1936, tome III, p. 667 : c II s'agit de
préciser ce qu'est dans le pays considéré une loi valable, ce qui est de la compétence de
l'ordre dont la loi fait partie : un juge américain ne pourrait, par exemple, refuser d'appli
quer une loi française parce qu'inconstitutionnelle; la loi française vaut en France quoique
contraire aux dispositions de la Constitution; ... par contre, et pour des raisons du même
ordre, la loi américaine pourra être arguée d'inconstitutionnalité devant un tribunal fran
çais») .
Le juge français peut toutefois écarter l'application de la loi étrangère en raison de sa
non-conformité à l'ordre public interne. Il dispose donc, à cet égard, d'un pouvoir d'appré
ciation qui n'appartient pas au juge américain.
(2) Sur la théorie de 1' c Act of State », consulter : Committee on International Law,
Association of the Bar of the City of New York, a reconsideration of the Act of State doctrine
in United States Courts (1959); Metzger, The Act of State Doctrine and foreign relations,
23 University of Pittsburgh Law Review, p. 881 (1962); Reeves, At of State doctrine and the
Rule of Law, 54 American Journal of International Laio, p. 141 (1960); Zander, The Act of
State doctrine, 53 of Law, p. 826 (1959) . Egalement le comment
aire (non signé) : The Act of State doctrine and its relation to private and public international 206 l'arrêt sabbatino
2. — La théorie de 1' « Act of State », admet-on généralement, découle des
dispositions de la constitution fédérale (3) : c'est celle-ci, en effet, qui confie
au Président des Etats-Unis la conduite des relations extérieures de la Fédé
ration (4), en collaboration, éventuellement, avec le Congrès (5).
Et, dès l'origine, on a pensé que cette attribution de compétence implique,
dans une certaine mesure, dessaisissement du pouvoir judiciaire, ou, tout au
moins, limitation de son rôle créateur de droit : la fonction normative est
dévolue au Président, et la Cour Suprême se borne à appliquer les règles par
lui définies (6) , tout en se gardant d'interférer avec son action. '"
Mais si le pouvoir exécutif doit seul concevoir et appliquer la politique
de la nation en matière internationale, encore convient-il de déterminer
l'étendue de cette exclusivité. Aussi la Cour Suprême a-t-elle clairement ;
délimité la portée de la théorie de « l'Act of State ». L'absention du pou- \
voir judiciaire n'a lieu d'être que si l'acte soumis à son contrôle — natio- i
nalisation par exemple — émane d'un gouvernement étranger et reconnu, |
de facto ou de jure, par les Etats-Unis : la non-reconnaissance, ou le \
retrait de reconnaissance suffisent à faire rentrer ledit acte dans la sphère |
du contrôle juridictionnel (7) . En outre il est nécessaire que la mesure étran- |
gère ait été prise par un Etat agissant dans l'exercice de sa capacité gouver- *
nementale, et non pas accomplissant un acte quelconque de gestion privée (8) .
Lorsque ces conditions se trouvent rassemblées, les tribunaux doivent se j
déclarer incompétents pour contrôler la validité de l'acte attaqué. Les person- s
nés privées qu'il a pu léser n'ont alors d'autre ressource que de demander
réparation par la voie diplomatique, ou de se pourvoir devant les juridictions
de l'Etat qui l'a promulgué.
law, 62 Columbia Law Review, p. 1278 (1962) et les articles qui s'y trouvent cités. La
théorie de l'Act of State, utilisée pour la première fois par la Cour Suprême dans l'affaire
Underhill c. Hernandez, 168 US 250 (1897) n'a servi, depuis, de base légale qu'aux décisions
American Banana Co c. United Fruit, 213 US 347; Oetjen c. Central Leather Co, 246 US 297;
Ricaud c. American Metal, 246 US 304; Shapleigh c. Mier, 299 US 468; United States c. Belmont,
301 US 324; United States c. Pink, 315 US 203.
(3) On a proposé d'autres fondements pour la théorie de 1' « Act of State », dont les
notions d'auto-limitation judiciaire ou de courtoisie internationale. La majorité de la doc
trine — et la Cour dans le présent arrêt — voient cependant dans la séparation des pouvoirs
sa raison d'être.
(4) Cf., article II,, § 2 de la Constitution.
(5)II, § 2 de la
(6) Cf., l'opinion du Chief Justice Marshall dans l'affaire Schooner Exchange c. Mac
F addon, 1803, F. Cranch 116; que l'on peut considérer comme posant les fondements de la
théorie — encore que de façon implicite.
(7) Cf., commentaire : « The Act of State doctrine. Its relation to private and public
international law », 62 Columbia Law Review, p. 1278 ss., novembre 1962.
(8) La distinction entre actes de puissance publique et actes de gestion privée apparaît
difficile à tracer. Le « Restatement on Foreign Relations Law of the United States » (Article
28 du projet de 1960) définit l'acte de publique comme l'acte inspiré de mobiles
politiques, en opposition aux mobiles d'intérêt privé. Le Département d'Etat « State Letter,
26 Department of State Bulletin, p. 904 (1952) > a dans une certaine mesure donné un contenu
à la notion d'acte de gestion privée (la flotte de commerce d'un Etat reconnu est réputée
gérée par celui-ci dans les conditions du droit commun). l'arrêt sabbatino 207
3. — Les récentes nationalisations cubaines viennent, semble- t-il, jeter
un doute sur la solidité de ces solutions jurisprudentielles : telle est la leçon
de l'affaire Banco National de Cuba C. Sabbatino (9) qui vient de trouver son
épilogue devant le Congrès des Etats-Unis.
On sait que les relations entre Cuba et les Etats-Unis se sont rapidement
détériorées dès la chute de régime Batista et l'avènement du gouvernement
Castro. La révolution cubaine, désireuse de mettre en application son pr
ogramme économique d'inspiration collectiviste, s'est en effet attaquée d'emblée
aux grandes entreprises privées détentrices des moyens de production — qui
se trouvaient être, pour la plupart, sous contrôle américain (10) . On a assisté
alors au développement du triptyque connu : en premier lieu, intervention
des autorités locales dans la gestion des sociétés sous contrôle américain ayant
à Cuba un établissement permanent (11) ; en second lieu, promulgation d'une
nouvelle réglementation restreignant consid

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