La lutte internationale contre le blanchiment des capitaux d origine illicite et le financement du terrorisme - article ; n°1 ; vol.49, pg 542-562
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Description

Annuaire français de droit international - Année 2003 - Volume 49 - Numéro 1 - Pages 542-562
21 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié par
Publié le 01 janvier 2003
Nombre de lectures 44
Langue Français
Poids de l'ouvrage 2 Mo

Extrait

M. le Professeur Jean Chappez
La lutte internationale contre le blanchiment des capitaux
d'origine illicite et le financement du terrorisme
In: Annuaire français de droit international, volume 49, 2003. pp. 542-562.
Citer ce document / Cite this document :
Chappez Jean. La lutte internationale contre le blanchiment des capitaux d'origine illicite et le financement du terrorisme. In:
Annuaire français de droit international, volume 49, 2003. pp. 542-562.
doi : 10.3406/afdi.2003.3765
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/afdi_0066-3085_2003_num_49_1_3765ANNUAIRE FRANÇAIS DE DROIT INTERNATIONAL
XLK - 2003 - CNRS Éditions, Paris
DROIT INTERNATIONAL ÉCONOMIQUE
LA LUTTE INTERNATIONALE CONTRE LE
BLANCHIMENT DES CAPITAUX D'ORIGINE
ILLICITE ET LE FINANCEMENT DU TERRORISME
Jean CHAPPEZ
Le blanchiment est défini par le Dictionnaire de droit international public
comme « l'opération consistant à donner une apparence licite à un bien d'origine
illicite, qu'il soit corporel ou incorporel, par des opérations de transfert ou de
conversion de ce bien auprès d'institutions financières ou de crédit. Le blanchi
ment peut être le fait soit de l'auteur de l'infraction principale qui lui a permis de
se procurer ce bien, soit d'un complice de l'auteur, soit d'une personne qui n'a pris
aucune part dans l'infraction principale mais qui apporte en connaissance de
cause son concours à la conversion ou au transfert du bien pour en cacher
l'origine illicite » 1. Cette longue définition s'explique parce que le blanchiment est
un délit d'intermédiaire intentionnel, ou une infraction de conséquence, impli
quant souvent de nombreux complices.
Les délinquants doivent très vite dissimuler l'origine illicite des fonds car la
disposition entre leurs mains d'importantes sommes d'argent apparaîtrait
suspecte et permettrait de remonter assez facilement aux marchés illégaux 2. Le
blanchiment va s'efforcer de donner une apparence légale aux produits de l'activité
délictuelle ou criminelle. Il comprend généralement trois étapes : le placement, qui
consiste à se débarrasser du numéraire, notamment des petites coupures ; vient
ensuite l'empilage, qui a pour but de brouiller les pistes en multipliant les transac
tions entre plusieurs pays ce qui permet de jouer sur les différences de
réglementations entre les États et d'échapper largement aux poursuites judi
ciaires. La dernière phase est l'intégration qui permet de donner une apparence
licite à l'argent sale, les fonds pouvant alors s'investir dans l'économie légale 3.
(*) Jean CHAPPEZ, professeur à l'Université de Bourgogne.
1. Dictionnaire de droit international public, sous la direction de J. SALMON, Bruylant, Bruxelles,
2001, p. 130.
2. J.CARTIER-BRESSON, « États, marchés, réseaux et organisations criminelles entrepreneuriales »,
Criminalité organisée et ordre dans la société, Presses Universitaires d'Aix-Marseille, 1997, p. 67. Éga
lement Ph. WILLIAMS, « Organizing Transnational Crime : Networks, Markets and Hierarchies », Revue
Transnational Organized Crime, Frank Cass, Londres, volume 4, n° 3 et 4, 1998, p. 57-87.
3. Bien qu'encore utilisée couramment par les experts et le GAFI lui-même, cette analyse du phéno
mène est souvent présentée comme une approche classique qui serait aujourd'hui dépassée compte-tenu
du recours indispensable aux marchés financiers, voir Chantai CUTAJAR, « La description du processus
de blanchiment », dans Le blanchiment des profits illicites, Textes réunis par Chantai CUTAJAR, Presses
Universitaires de Strasbourg, 2000, p. 18. En réalité, la complexité croissante des circuits de blanchiment
ne permet plus de distinguer ces trois phases aussi nettement qu'il était possible de le faire auparavant. BLANCHIMENT DES CAPITAUX ET TERRORISME 543
Le blanchiment d'argent sale est sans doute aussi vieux que les délits et les
crimes commis dans le but de se procurer d'importantes sommes d'argent, car il
fallait déjà dissimuler très vite l'origine illicite des fonds, mais les méthodes utilisées
alors étaient plus simples que celles auxquelles recourent aujourd'hui les blanchis
seurs de capitaux illicites. Si le blanchiment a été et reste toujours très utilisé pour
l'argent issu du trafic de la drogue, il a sans doute aussi été employé pour blanchir venant des jeux illégaux et de la contrebande, notamment la contrebande
d'alcool à l'époque de la prohibition aux États-Unis de 1919 à 1933 4. Aujourd'hui, le
blanchiment a pris une ampleur considérable : il s'étend à l'échelle mondiale et met
en jeu des organisations criminelles très structurées dont l'activité illicite est
devenue polyvalente. L'argent sale qu'il faut blanchir vient toujours aujourd'hui du
trafic de la drogue et de la contrebande, mais aussi des ventes illégales d'armes, des
jeux illégaux, des réseaux de prostitution, de l'escroquerie, des délits d'initiés, de la
corruption, de la fraude informatique... L'ampleur du phénomène, qui s'est accru et
a été facilité par la globalisation et la dérégulation de l'économie, a fait prendre
conscience aux États des risques de déstabilisation encourus et de la nécessité d'une
action urgente et organisée à l'échelle mondiale 5. Les risques sont considérables et
menacent à la fois le système financier international, les banques et les entreprises
comme certaines affaires de blanchiment, plus ou moins médiatisées, l'ont montré :
affaire de la Pizza Connection, affaire de la Bank of Credit and Commerce Interna
tional (BCCI), affaire Jurado, dite « du Sentier », affaire de YEuropean Union
Bank 6. La réaction des États a été sans doute trop tardive. C'est en effet seulement à
la fin des années 1980 qu'une véritable stratégie internationale de lutte contre le
blanchiment des capitaux illicites a été décidée par les États. L'économie illicite et
4. Al Capone a cependant été confondu pour fraude fiscale.
5. Il est difficile de chiffrer l'ampleur du phénomène, car le blanchiment, par sa nature même, est en
dehors du champ couvert par les statistiques économiques. On estime que l'économie criminelle repré
sente un produit brut d'au moins 1000 milliards de dollars. L. FRANÇOIS, P. CHAIGNEAU et M. CHESNEY,
Criminalité financière, Comment le blanchiment de l'argent sale et le financement du terrorisme sont deve
nus une menace pour les entreprises et les marchés financiers, Éditions d'Organisation, Paris, 2002, p. 1.
6. Des milliers de pizzeria situées aux États-Unis furent utilisées par la mafia sicilienne pour recy
cler des fonds provenant de la vente d'héroïne sur le marché nord-américain. Le réseau reposait sur de
très nombreuses sociétés de façade. Voir R. BLUMENTHAL, Last Days of the Sicilians, The FBI Assault on
the Pizza Connection, Times Book, 1988, et T. SHAWCROSS, The War against the Mafia, Paperbacks,
1994. Cité par L. FRANÇOIS, P. CHAIGNEAU et M. CHESNEY, op.cit., p. 34. La BCCI a consacré pendant
plusieurs années l'ensemble de ses ressources à blanchir de l'argent illicite, en particulier celui de la dro
gue. Fondée en 1972 par l'Emirat d'Abu Dhabi et un banquier pakistanais, elle était liée à une fondation
et à une cascade de sociétés écran. Sa faillite, en 1991, fit apparaître un trou de près de 10 milliards de
dollars. Les liquidateurs ont eu la surprise de constater que plus de 28000 déposants sur les 100000 ne
s'étaient pas manifestés pour réclamer leur dû. Voir J.L. HerrensCHMIDT, Le blanchiment dans les cir
cuits financiers mondiaux, dans L'illicite dans le commerce international, sous la direction de Ph. KAHN
et de C. KESSEDJAN, Université de Bourgogne-CNRS, Travaux du CREDIMI, Litec, 1996. Franklin
Jurado a été arrêté en 1990 au Luxembourg après avoir blanchi plusieurs milliards de dollars pour le
compte du cartel de Cali à partir de 270 comptes dans 120 banques aux États-Unis, en Europe et à
Panama. Il utilisait Paris comme base stratégique. Il était aidé dans ses opérations par un couple âgé,
les époux Castro, ex-beaux-parents de José Santa Cruz Londono, l'un des principaux narcotrafiquants
colombiens. Lors de son interpellation, F. JURADO portait sur lui un carnet qui expliquait les différentes
phases de son mé

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