Tchernobâle ou la pollution accidentelle du Rhin par des produits chimiques - article ; n°1 ; vol.33, pg 719-727
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Description

Annuaire français de droit international - Année 1987 - Volume 33 - Numéro 1 - Pages 719-727
9 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié par
Publié le 01 janvier 1987
Nombre de lectures 16
Langue Français

Extrait

M. Alexandre-Charles Kiss
"Tchernobâle" ou la pollution accidentelle du Rhin par des
produits chimiques
In: Annuaire français de droit international, volume 33, 1987. pp. 719-727.
Citer ce document / Cite this document :
Kiss Alexandre-Charles. "Tchernobâle" ou la pollution accidentelle du Rhin par des produits chimiques. In: Annuaire français de
droit international, volume 33, 1987. pp. 719-727.
doi : 10.3406/afdi.1987.2804
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/afdi_0066-3085_1987_num_33_1_2804ANNUAIRE FRANÇAIS DE DROIT INTERNATIONAL
XXXIII - 1987 - Editions du CNRS, Paris.
« TCHERNOBALE » OU LA POLLUTION
ACCIDENTELLE DU RHIN
PAR LES PRODUITS CHIMIQUES
Alexandre KISS
La liste des catastrophes écologiques ne cesse de s'allonger : pollutions
massives de la mer par des « marées noires » causées soit par l'échouement de
pétroliers géants (« Torrey Canyon » en 1967, « Amoco Cadiz » en 1978) soit par
l'éruption de sites de forages en mer (« Ixtoc One » au large du Mexique en 1979),
nuages toxiques de substances chimiques (Seveso en 1976, Bhophal en 1984), nuages
radioactifs (incendie de la centrale nucléaire de Tchernobyl en 1986). Les consé
quences tragiques — on se souviendra des 2 500 morts de Bhopal — de ces
événements secouent l'opinion publique et peuvent, par cela même, produire des
effets positifs sur le développement des règles juridiques protégeant la santé
humaine et l'environnement. Il serait, certes, préférable que ces progrès soient
motivés par la raison humaine et la conviction que tout doit être mis en œuvre pour
éviter de tels dangers. Toutefois, toute réflexion sur la société et en particulier sur
l'organisation de la société internationale montre que la raison risque de s'effacer
devant des intérêts à court terme tant que des événements graves ne poussent pas
à prendre des mesures pour assurer l'avenir.
La dernière illustration de cette série de catastrophes et des réactions que
celles-ci ont déclenchées est ce que l'on a parfois appelé « Tchernobâle », l'accident
survenu aux usines chimiques de Sandoz, le 1er novembre 1986, ayant causé une
pollution massive du Rhin.
Dans la nuit du 30 octobre au 1er novembre 1986, un incendie s'est déclaré dans
l'enceinte de ces usines, à Muttenz, près de Bâle, c'est-à-dire près du Rhin et
la proximité des territoires allemand et français. 1 250 tonnes de pesticides,
c'est-à-dire des herbicides, des fongicides contenant du mercure, des insecticides
organophosphorés ou organochlorés, de colorants et de solvants avaient été stockés
à l'intérieur d'un hall. L'incendie, probablement dû à une cause accidentelle à la
suite d'une négligence fautive, y a couvé pendant plusieurs heures avant d'éclater
avec violence. Il a causé des émissions de substances chimiques dans l'atmosphère,
mais, bien que dans la proximité des lieux, y compris les territoires allemands et
français, on en ait ressenti les effets pendant plusieurs heures, les polluants ont
été dispersés dans l'atmoshère avec une relative rapidité. Les conséquences
majeures de l'accident se sont produites indirectement : les pompiers accourus de
(*) Alexandre KlSS, Directeur de recherche au C.N.R.S.
Nous exprimons notre gratitude à M. Michel Durousseau, chargé de mission au Ministère
de l'Environnement, détaché auprès du Préfet de la Région Alsace pour les informations et
la documentation qu'il a bien voulu nous fournir. :
LA POLLUTION ACCIDENTELLE DU RHIN PAR DES PRODUITS CHIMIQUES 720
toute la région ont déversé 10 000 à 15 000 mètres cubes d'eau pour maîtriser
l'incendie. C'est cette eau qui, à défaut d'un bassin de rétention, a atteint le Rhin
par les canalisations et qui y a entraîné environ 30 tonnes de substances chimiques
toxiques. Les rejets ont duré vingt-huit heures, mais l'alerte n'a été donnée aux pays
voisins qu'avec un retard d'environ 24 heures. On a invoqué à cet égard comme motif
que les dirigeants des usines Sandoz ne pouvaient pas savoir eux-mêmes combien
de produits ont brûlé et combien avaient été lessivés par l'eau des pompiers et, donc,
quelles étaient exactement les substances qui ont atteint le Rhin. Par ailleurs, une
deuxième vague de pollution est intervenue une semaine plus tard, le 7 novembre
1986, par suite d'un incident sur une canalisation d'eau ayant servi à éteindre
l'incendie et chargée des mêmes produits que lors de la première vague. Les
substances polluantes ont été en partie emportées par le courant du fleuve : elles
ont atteint Cologne une semaine plus tard et sont arrivées dans la mer du Nord
au bout de quinze jours environ. Une autre partie de ces substances, et notamment
les métaux lourds, est restée dans la proximité des lieux du déversement ou n'a été
transportée que très lentement pour s'infiltrer dans la vase du lit du Rhin.
Toutes ces circonstances ont leur importance au point de vue des conséquences
de l'accident.
Celles produites sur la vie animale étaient les plus immédiatement perceptibles.
Les anguilles étaient les plus atteintes : dans les heures qui ont suivi l'accident
quelque 190 tonnes ont été ramassées mais les invertébrés étaient également
sévèrement touchés. Des mortalités d'oiseaux piscivores ont également été signalées
et la présence d'un composant organo-phosphoré non soufré a été signalée dans de
nouveaux échantillons de poissons. En tout état de cause, la pêche ne pouvait plus
continuer dans le Rhin pendant un certain nombre de mois. La nappe phréatique
qui suit le cours du Rhin et dont les eaux communiquent avec celles du fleuve a
également montré des traces de substances chimiques si bien que certaines villes
et communes en France ont dû procéder à 600 analyses d'eau potable entre le 2
novembre et le 30 janvier 1987 à raison de 1600 FF l'unité. En Allemagne, deux
communes ont dû remplacer l'alimentation en eau en provenance de la nappe
souterraine par l'approvisionnement apporté par des camions-citernes. A ces
mesures s'ajoutent la surveillance nécessaire, et de coûteuses analyses des eaux
superficielles, des sédiments et des poissons, encore pendant un certain temps. Les
dommages subis comportaient aussi des manques à gagner (pêche professionnelle
et pêche amateur, tourisme fluvial, etc.). Rien que pour la France le dommage subi
a été évalué par un comité d'experts, constitué aussitôt, à presque 260 millions de
francs français (1).
I. — Du point de vue du droit international public on peut estimer qu'il y avait une
violation des obligations internationales de la Suisse à deux points de vue : d'une
part, les mesures devant prévenir l'accident et ses conséquences catastrophiques
n'ont pas été prises et, d'autre part, le devoir d'informer les autres Etats pouvant
être concernés par l'accident n'a pas été dûment respecté.
(1) Voir pour la description des événements M. DUROUSSEAU, La pollution du Rhin consécutive à
l'incendie intervenu aux Etablissements Sandoz, Les cahiers de l'administration, Alsace, p. 17; Le Monde
des 23 et 26 novembre, 20 et 21 décembre 1986; « Les dernières nouvelles d'Alsace » des 12 et 13 décembre
1986; A. REST, The Sandoz Blaze and the Pollution of the Rhine in Regard to Public International Law,
Private International Law and National Liability Issues, Tijdschrift Milieu Aansprakelijkheid, 1987, p. 59. LA POLLUTION ACCIDENTELLE DU RHIN PAR DES PRODUITS CHIMIQUES 721
A) Le principe général devant régir le comportement des autorités helvétiques
est, bien entendu, celui ainsi formulé dans la Déclaration de Stockholm :
«... les Etats... ont le devoir de faire en sorte que les activités exercées dans les limites
de leur juridiction ou sous leur contrôle ne causent pas de dommage à l'environnement
dans d'autres Etats ou dans des régions ne relevant d'aucune juridiction nationale »
(principe 21).
Il a été démontré dans cet Annuaire même que désormais on peut considérer
ce principe, très généralement reconnu par des instruments émanant d'institutions
intern

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