La littérature française devant l opinion italienne - article ; n°1 ; vol.7, pg 113-129
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Description

Cahiers de l'Association internationale des études francaises - Année 1955 - Volume 7 - Numéro 1 - Pages 113-129
17 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1955
Nombre de lectures 95
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

Madame Corrado Rosso
La littérature française devant l'opinion italienne
In: Cahiers de l'Association internationale des études francaises, 1955, N°7. pp. 113-129.
Citer ce document / Cite this document :
Rosso Corrado. La littérature française devant l'opinion italienne. In: Cahiers de l'Association internationale des études
francaises, 1955, N°7. pp. 113-129.
doi : 10.3406/caief.1955.2071
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/caief_0571-5865_1955_num_7_1_2071LA LITTÉRATURE FRANÇAISE
DEVANT L'OPINION ITALIENNE
Communication de M. Corrado ROSSO
au VIe congrès de l'Association, à Paris,
le 24 juillet J955.
Je suis confus d'être le seul Italien présent à cette
réunion : M. Franco Simone, de l'Université de Gênes,
se trouvant extrêmement fatigué, a dû, au tout dernier
moment, renoncer à venir jusqu'ici, et il m'a chargé
de vous exprimer son regret bien vif de ne pas pouvoir
être parmi vous aujourd'hui. Comme ma communicat
ion aurait dû suivre la sienne, qui examinait la présence
de la littérature française en Italie, à partir de la
Renaissance, je ne toucherai qu'à certains aspects tout
à fait actuels du rayonnement des lettres françaises
au delà des Alpes.
Quelle image les Italiens se font-ils aujourd'hui de
la littérature française? Il est toujours difficile de
répondre à des questions d'ordre général, comme c'est
le cas . de celle que l'Association internationale des
Études françaises me fait l'honneur de me poser. Les
« panoramas » ne sont jamais fidèles à leur appellation :
non seulement ils ne tiennent pas compte de toutes
choses — et comment pourraient-ils le faire? — mais
ils envisagent le peu de choses qu'ils voient suivant
l'angle visuel, particulier et déterminé, de celui qui
s'efforce à les esquisser. Il existe aujourd'hui une
science qui serait prête à nous offrir ses services, et
que l'on applique de plus en plus à la connaissance des ЬА LITTÉRATURE FRANÇAISE EN 1ТА1ДЁ 114
choses humaines ; c'est la statistique. Je suis fort loin
de repousser, avec le dédain qui caractérisait certains
humanistes d'une époque désormais révolue, ses offres
à la fois aimables et pressantes. Mais lorsqu'un des
libraires turinois, auquel je me suis adressé, me confirme
que le montant des recettes correspondant à la vente
des ouvrages français est égal, ou presque, à celui
résultant de la vente des ouvrages de langue italienne,
je n'ai qu'un renseignement quantitatif, qui a besoin
d'être éclairci et interprété. Telle est donc la tâche que
je m'assigne dans les modestes limites de cette commun
ication : rendre compte, en me servant des quelques
données que j'ai pu obtenir, du rayonnement toujours
constant et prépondérant, par rapport aux autres
littératures, • de la littérature française en Italie. Je
m'efforcerai, évidemment, de ne pas me laisser tromper
par des aspects purement contingents et passagers de
ce rayonnement.
Il y a en Italie, comme en France d'ailleurs, un goût
tout latin pour l'ironie et le scandale qui favorise la
vente de certains ouvrages. Il y a aussi un intérêt
très vif pour le cinéma, ce qui assure une grande diffusion
à des livres dont on a tiré un film réussi. Il y a, enfin,
un certain snobisme, surtout dans les classes les plus
élevées, — celles qui lisent le français avec une assez
grande aisance — qui les porte à préférer la lecture d'un
livre étranger, surtout français, à celle d'un ouvrage
italien : cela arrive surtout lorsqu'il s'agit d'ouvrages
couronnés par des prix littéraires. Il ne faudrait cepen
dant pas oublier que ce snobisme n'est parfois que la
façade, sous laquelle des raisons historiques profondes
se cachent. I/unité politique italienne est un fait d'hier;
l'Italie est encore une petite Europe, où il y a beaucoup
de petits états, avec beaucoup de petites capitales.
Chaque « capitale » est assez importante pour se consi
dérer comme bien supérieure à la province et presque
égale aux autres grandes villes italiennes : Turin est С. ROSSO II5
une « capitale » historique et industrielle, Milan une
« capitale » commerciale, Florence et Venise sont des
« capitales » artistiques, Bologne est une « capitale »
intellectuelle, etc. Les rapports entre les différentes
« capitales » ne sont donc pas de véritables rapports
complémentaires — comme il pourrait sembler —
puisqu'il se crée une espèce d'équilibre général et
approximatif entre elles. En revanche, ces « pseudo
capitales » se tournent avec un intérêt très vif vers les
grandes capitales étrangères : Rome même, qui est
pourtant la capitale de l'Italie, est trop semblable, à
certains égards, aux autres grandes villes italiennes, pour
exercer le même pouvoir d'attraction intellectuelle
que Paris ou que Londres, par exemple. Il y a donc
dans les cercles intellectuels des villes italiennes une
mentalité fort ouverte vers l'étranger : d'un côté, elle
n'est que l'expression d'une attitude provinciale, mais,
d'un autre côté, elle favorise un extraordinaire pouvoir,
d'assimilation, un intérêt toujours attentivement dirigé
vers tout ce qui se passe au delà des frontières, surtout
au delà des Alpes.
Il ne faudrait pas oublier, en outre, la grande influence
exercée sur les lecteurs par la tcrza pagina : dans presque
tous les quotidiens italiens, il existe une page littéraire,
qui est la troisième, où l'on signale et Ton commente
les dernières nouvelles littéraires; ce qui permet à
toutes catégories de lecteurs, même à ceux qui n'achètent
jamais de revues ou d'hebdomadaires littéraires au
sens strict, de se tenir au courant; et, cela va sans dire,
il est question, fort souvent, dans cette terza pagina,
d'ouvrages français.
En tenant compte de tous ces éléments, et d'autres
encore, qui y sont plus ou moins apparentés, on peut
affirmer, sans crainte de se tromper, que l'intérêt
porté par les Italiens aux lettres françaises ne paraît
pas subir les vicissitudes et les éclipses qui ont carac
térisé et caractérisent le rayonnement des autres LA LITTÉRATURE FRANÇAISE EN 1ТА1ДЕ Il6
littératures étrangères en Italie. On pourrait expliquer
cela — ne serait-ce que partiellement — par l'observa
tion du fait que dans certaines contrées de la péninsule,
c'est-à-dire dans les Vallées Vaudoises, autour de
Pignerol et la Vallée d'Aoste, les habitants sont
bilingues depuis des siècles. Mais l'existence de ces
minorités d'expression française n'explique aucunement
le grand intérêt porté aux lettres françaises par les
autres Italiens, qui ne sont ni valdotains ni vaudois.
Si cet argument tiré de la présence en Italie de minorités
parlant français était valable, à plus forte raison la
littérature allemande devrait jouir d'une plus grande
popularité, puisque les habitants du Haut-Adige sont,
eux aussi, bilingues et beaucoup plus nombreux que
les Valdotains; or, il n'en est rien.
Quant à l'explication qui repose sur la facilité que
l'étude du français offrirait aux Italiens, elle n'est
valable — et dans des limites assez exiguës — que pour
certaines régions d'Italie où les dialectes qui y sont
parlés rendent l'étude du français plus abordable.
Partout ailleurs, la langue espagnole est sans doute
plus proche que le français du génie des Italiens; il
nous faut certainement moins d'effort pour apprendre
l'espagnol que pour pénétrer les mystères de l'ortho
graphe et affronter les hardiesses de la prononciation
française. Mais on ne lit pas ce qui est facile, on lit ce
qui intéresse. S'il y a une catégorie sous laquelle on
devrait placer d'emblée, sans aucune crainte de se
tromper, la littérature française en Italie, c'est la
catégorie de l'intéressant : la littérature allemande peut
paraître en Italie ce qu'elle est sans doute, surtout
philosophique et technique — je ne cite que des réac
tions d'ordre général et empirique;

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