Réception offerte le 6 septembre 1636 à Essonnes à la reine Christine de Suède - article ; n°1 ; vol.9, pg 22-43
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Réception offerte le 6 septembre 1636 à Essonnes à la reine Christine de Suède - article ; n°1 ; vol.9, pg 22-43

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Description

Cahiers de l'Association internationale des études francaises - Année 1957 - Volume 9 - Numéro 1 - Pages 22-43
22 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1957
Nombre de lectures 41
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

Marie-Françoise Christout
Réception offerte le 6 septembre 1636 à Essonnes à la reine
Christine de Suède
In: Cahiers de l'Association internationale des études francaises, 1957, N°9. pp. 22-43.
Citer ce document / Cite this document :
Christout Marie-Françoise. Réception offerte le 6 septembre 1636 à Essonnes à la reine Christine de Suède. In: Cahiers de
l'Association internationale des études francaises, 1957, N°9. pp. 22-43.
doi : 10.3406/caief.1957.2097
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/caief_0571-5865_1957_num_9_1_2097RÉCEPTION OFFERTE
LE 6 SEPTEMBRE 1636 A ESSONNES
A LA REINE CHRISTINE DE SUÈDE
Communication de Mlle M.-F. CHRISTOUT
(CN.fl.S.)
au VIIIe Congrès de l'Association, le 3 septembre 1956
Voici trois cents ans, le 6 septembre 1656, le Sieur Hesselin
accueillait dans sa belle demeure de Chantemesle, près d'Essonnes,
la reine Christine de Suède, et lui offrait, sur l'ordre du roi,
le divertissement d'une fête nocturne aussi rare que galante, dont
les annales du temps louèrent les fastes trop oubliés depuis. Dans
quel climat social, politique et artistique, celle-ci se déroula-t-elle ?
quelles circonstances la suscitèrent ?
Pacifiée, la France s'efforce d'oublier les désordres de la Fronde.
Sous la direction vigilante de Mazarin, le jeune pouvoir rcyal
s'affirme de jour en jour. Comme il sied à son âge, à son rang,
à ses goûts enfin et à ceux de sa cour, Louis XIV se plaît à
multiplier spectacles, bals et collations (1). Déjà l'on peut pres
sentir alentour les artistes qui vont former l'esthétique du Grand
Siècle, les amateurs de qualité qui la diffuseront. Tandis que
1. Depuis sa première apparition en 1651 dans le ballet de Cas'
sandre, Louis XIV manifeste constamment des dons réels pour la danse
qui fait alors partie, auprès de l'escrime, de l'équitation, de toute édu
cation aristocratique. Le jeune roi, qui a hérité du goût chorégraphique
de Henri IV et de Louis XIII, satisfait de la sorte un désir juvénile
d'expansion physique et sa soif d'adulation, car il sait ainsi mettre
en valeur la noblesse de sa haute taille (louée par l'ambassadeur véni
tien Alvise), l'élégance svelte de son port dégagé, le charme encore
spontané de son âge. Ses commensaux en ce divertissement de choix
sont donc assurés de jouir de sa faveur. M.-F. CHRISTOUT 23
l'Italie apparaît divisée, que l'Espagne commence à se replier
sur elle-même, que l'Angleterre enfin s'épuise en luttes fratri
cides, la France unifiée est prête à assumer la suprématie diplo
matique, voire culturelle. Quelle meilleure démonstration trou
verait-elle que de recevoir triomphalement une invitée telle que
Christine de Suède ?
Fille du célèbre Gustave-Adolphe, Christine jouit en effet
d'une réputation européenne. On l'appelle la Minerve chrétienne.
Dès l'âge de sept ans, elle a porté le titre de «Très puissante
Princesse et Demoiselle Christine, Reine de Suède, des Goths
et des Veudes, Grande Duchesse de Finlande et Duchesse d'Es-
thonie et de Caritie, Demoiselle d'Ingrie». Sur l'ordre de son
père, elle a reçu une éducation virile. Attirée par la littérature
ancienne, par la philosophie et les lettres, elle parle plusieurs
langues, appelle auprès d'elle Descartes, correspond régulièrement
avec Pascal, Ménage, Gassendi, Tristan l'Hermite, Benserade et
Madeleine de Scudéry, qui la décrira dans Le Grand Cyrus sous
les traits de Cléobuline, reine de Corinthe. Elle rêve de la France,
de l'Italie et se convertit secrètement au catholicisme. Séduite par
l'ambiance intellectuelle méridionale, elle cède à cette incompatib
ilité d'humeur irréductible qu'elle ressent à l'égard de sa patrie
et abdique volontairement le 16 juin 1654 en faveur de son cous
in, décision qui la rend plus remarquable encore aux regards
étrangers. Son abjuration officielle lui vaut la sympathie du pape
Alexandre VIII auprès duquel elle s'installe à Rome. Par son
désordre financier, son goût du pouvoir, elle lasse bientôt ses
protecteurs et intrigue auprès de Mazarin afin d'obtenir grâce à
son appui la couronne de Naples, cessible aux Bourbons après
sa mort. Sous un prétexte, elle quitte les Etats pontificaux menacés
par la peste et sollicite l'autorisation de traverser la France.
Louis XIV ordonne aussitôt qu'elle soit reçue avec les honneurs
qui sont dus à son rang, et, en vérité, il faut remonter au pas
sage de Charles-Quint se rendant en Flandres, pour trouver une
visite princière de cette importance.
Lorsque Christine débarque de la galère pontificale « Padrona »
le 29 juillet à Marseille, un envoyé spécial du roi, Hubert de
Lionne, seigneur de Leissens, l'attend auprès des représentants de
la municipalité genoux à terre. Dès lors commence pour elle un 24 M.-F. CHRISTOUT
voyage triomphal qui la conduira de fête en fête à la capitale
en passant par Aix-en-Provence, Avignon, Montélimar, Valence,
Vienne, Lyon — où elle trouve une escorte venue à sa rencontre :
Henri de Lorraine, duc de Guise, grand chambellan du roi,
célèbre pour son luxe, ses succès féminins et ses dons de dan
seur (2), le comte de Comminges, chambellan de la reine, Nicolas
Faure de Beslize, introducteur des ambassades... A Auxerre, plu
sieurs officiers de la maison du roi dont M. de Sainctot, maître
des cérémonies, l'attendent avec les carrosses royaux. Sa suite per
sonnelle très modeste, composée de quelques femmes assez ordi
naires et d'officiers italiens — Monaldeschi, Santinelli... — de
Gilbert et Davisson, ses secrétaires français et suédois, est
éclipsée par cette brillante compagnie. Cependant c'est sa personne
même que viennent contempler sur son passage d'innombrables
curieux, avides de confronter, au bruit des salves et des Te Deum,
la réalité et la légende.
Le 4 septembre, Christine arrive à Fontainebleau où son retour,
l'année suivante, laissera de si tragiques souvenirs. Le château royal
est vide, la Cour se trouvant alors à Compiègne où elle compte
recevoir la souveraine nordique. En l'absence du roi, l'étiquette
interdit de donner des spectacles. Or les préparatifs imposants,
ordonnés tant à Paris qu'à Compiègne, ne sont pas achevés et
l'entrée solennelle dans la capitale est fixée au 8 septembre. Il ne
convient cependant pas de faire attendre la souveraine. Heureu
sement une solution opportune s'offre pour résoudre ce problème
délicat.
2. Si les nombreux rôles qu'il tient dans les ballets de la cour
attestent sa qualité de danseur émérite, la description qu'il fait de
Christine dénote chez Henri de Guise un sens de l'observation
subtil : « Elle n'est pas grande, écrit-il à Madame de Motteville,
mais elle a la taille fournie, la croupe large ; le bras beau, la main
blanche et bien faicte, mais plus d'homme que de femme ; une épaule
plus haute dont elle cache si bien le défaut par la bizarrerie de son
habit, sa démarche et ses actions qu'on en pourrait faire des gageures.
Le visage est grand sans être défectueux, tous les traits de même et
fort marqués ; le nez aquilin ; la bouche assez grande mais pas dés
agréable, les dents passables ; les yeux fort beaux et pleins de feu ;
le teint nonobstant quelques marques de petite vérole, assez vif et
assez beau ; le tour du visage assez raisonnable, accompagné d'une
coiffure fort bizarre ». M.-F. CHRISTOUT 25
D'ordre et aux frais du roi, le Sieur Hesselin — Louis Cau-
chon, seigneur de Condé — reçoit la reine le 6 septembre en
sa résidence de Chantemesle ou Chantemerle, sise à Essonnes
près de Corbeil, soit à mi-chemin entre Fontainebleau et Paris.
Quelles raisons motivent ce choix ? et quelles sont les titres de
cet hôte et de cette demeure ?
Maître de la Chambre aux deniers, Louis Cauchon est plus
connu sous le nom de sa grand-mère maternelle — Hesselin —
qu'il reprend par lettres patentes de décembre 1626 afin d'hériter
d'une importante fortune de son oncle maternel Denis Hesselin,
fortune qu'il dissipera au cours de sa vie très mondaine (3).
Collectionneur averti, selon le Père Nicéron, homme de plaisir
aux goû

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