Langage et connaissance de l Absolu chez Çamkara - article ; n°33 ; vol.52, pg 31-74
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Revue Philosophique de Louvain - Année 1954 - Volume 52 - Numéro 33 - Pages 31-74
44 pages

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Publié le 01 janvier 1954
Nombre de lectures 13
Langue Français
Poids de l'ouvrage 2 Mo

Extrait

Richard de Smet
Langage et connaissance de l'Absolu chez Çamkara
In: Revue Philosophique de Louvain. Troisième série, Tome 52, N°33, 1954. pp. 31-74.
Citer ce document / Cite this document :
de Smet Richard. Langage et connaissance de l'Absolu chez Çamkara. In: Revue Philosophique de Louvain. Troisième série,
Tome 52, N°33, 1954. pp. 31-74.
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/phlou_0035-3841_1954_num_52_33_4478Langage et connaissance de l'Absolu
chez Çamkara
Introduction
Vers la fin du règne de l'hérésie bouddhique (1), Çamkara (788-
820 ou 826 ap. J. C.) opéra une réforme doctrinale qui le fait appar
aître dans l'histoire de la pensée indienne comme le plus import
ant et le plus génial des restaurateurs de l'orthodoxie brahmanique.
Ses commentaires des principales Upanisad, de la Bhagavadgïtâ
et du Vedântasûtra (manuel de base des Mïmâmsaka ou Exégètes
ritualistes) formèrent un corpus qui est resté jusqu'à nos jours, pour
ses adeptes, la plus haute autorité après les Ecritures védiques et,
pour ses adversaires, un modèle idéal d'exégèse en même temps
qu'un bloc doctrinal irritant par sa logique altière et sa consistance
monolithique.
Quant à la doctrine du Non-Dualisme (Advaita) à laquelle
Çamkara réduisit tout l'enseignement de la Tradition sacrée {Çruti),
elle acquit aussitôt une telle prépondérance que, bon gré mal gré,
tous les théologiens postérieurs du brahmanisme durent situer et
différencier leurs systèmes par rapport à elle et que même les
éléments non-védiques qui contribuèrent à former l'hindouisme ne
purent s'y intégrer que dans la perspective non-dualiste.
Cependant cette doctrine est déconcertante. Le paradoxe de
son acosmisme la rend inhumaine et presque irrationnelle. Et les
(1) Le bouddhisme, né dans l'Inde vers 500 av. J. C, y atteint son apogée
sous le roi Kaniska entre 78 et 102 ap. J. C, puis s'affaiblit et tombe en déca
dence k partir du VIe siècle pour disparaître presque complètement entre 800 et
1000. Cependant, il y survit sporadiquement jusqu'au XIIe siècle, et plus tard
même dans l'ancien Bengale, où une forme bâtarde du bouddhisme, le Tantrayâna,
connaît la faveur populaire sous la dynastie des rois Pâla. 32 Richard De Smet
exposés les plus autorisés qu'on en a faits depuis un siècle n'ont
guère atténué le scandale qu'elle présente. Le néo-védantisme si
courant de nos jours, bien plus qu'il n'aide à la comprendre, la
dénature en un panthéisme inassimilable et superficiel. En croyant
la vulgariser il la frelate et la déconsidère aux yeux des penseurs
sérieux.
Pour la retrouver dans son intégrité originelle il nous faut re
tourner au Maître, nous soumettre à sa perspective propre et re
trouver son intention première en étudiant le but, la méthode et
les moyens de son oeuvre.
C'est ce que nous avons tenté de faire dans un travail récent
intitulé : « The theological Method of Compara » (2).
Çamkara nous y est apparu comme un théologien védique au
sens le plus technique du terme. La base de son enseignement est
la foi qu'il accorde sans réserve au témoignage considéré comme
non-humain {apauruseya) et infaillible de cet ensemble d'écrits que
la tradition brahmanique appelle Veda ou Savoir sacré et qui com
prend essentiellement les quatre veda, les Brâhmana, les Aranya\a
et quatorze au moins des Upanisad. Cette foi, dont il est parvenu
pour son propre compte à faire l'expérience complète jusqu'à l'i
ntuition suprême inclue, il se propose de l'affermir chez son disciple
et de l'y élever également jusqu'à directe et plénière
du Savoir absolu. Son entreprise théologique (Brahmajijfiâsâ) cons
iste à faire adhérer le disciple à ce Savoir salvifique par l'élim
ination de tous les obstacles qui en empêchent la claire vision
jusqu'à ce que la vérité révélée rayonne seule et illumine l'esprit
jusque dans son tréfonds.
Cette élimination procède normalement par étapes successives
et intégrantes. D'abord vient une propédeutique destinée à calmer
les passions et à mettre l'aspirant dans une telle disposition spiri
tuelle qu'aucune sollicitation mondaine ne puisse pervertir l'élan
de sa fides quaerens intellectum. Une fois cette disposition obtenue,
le maître (guru) lui fait entendre les Ecritures et l'amène par une
pédagogie appropriée à en saisir le message essentiel. Il emploie
à cette fin les méthodes éprouvées de l'exégèse classique (pûrva
trûmâmsâ), adaptées cependant à son but particulier. Dès que le
mystère central de l'enseignement sacré a ainsi été révélé, l'exégèse
W Présenté à la Faculté de Philosophie de l'Université Pontificale Grégo
rienne pour l'obtention du diplôme de Docteur en Philosophie (juin 1953). Connaissance de l'Absolu chez Cam.ka.ra 33
se poursuit et confirme cette révélation par une démonstration syst
ématique de l'accord (samanvaya) que ce mystère et lui seul confère
à tous les textes védiques. Cette harmonie satisfait la foi qui se
devrait évidemment de rejeter toute exégèse qui s'avérerait i
ncapable de l'établir, car elle ne peut accepter la contradiction au
sein du témoignage infailliblement véridique. Mais l'homme n'est
pas que foi, il est intelligence, et, après que la foi a été rassurée
et convaincue que le mystère qu'on lui propose comme essentiel
est vraiment révélé et appuyé par tous les textes qu'elle tient pour
infaillibles, il reste à persuader l'intelligence que ce mystère est
en parfaite conformité avec ses propres évidences. C'est le rôle de
l'étape suivante où sont examinées et réfutées toutes les objections
que l'on a faites ou que l'on pourrait opposer à la vérité du
mystère primordial. Cette défense de la foi se sert de deux sortes
d'arguments: des arguments scripturaires dont l'élément décisif est
un recours aux textes sacrés ou aux vérités et principes qui en
dérivent, et des proprement rationnels qui détruisent
l'objection par un recours aux lois propres de la raison, et spé
cialement au principe de non-contradiction.
Ainsi l'exégèse révélatrice détermine l'objet propre de la foi,
l'exégèse harmonisatrice en établit la cohérence intrinsèque, et la
défense rationnelle en assure la cohérence extrinsèque et le rend
inaccessible au doute et à l'objection. Dès lors le champ est libre
pour l'effort de recueillement qui doit faire passer le disciple du
stade de l'adhésion notionnelle à celui de l'expérience vécue et
de l'illumination directe. Cet effort s'accomplit par la pratique
yogique de la concentration de l'attention sur la formule (mantra)
du mystère révélé et de la contemplation continue et homogène
de sa vérité.
Par lui-même ce yoga peut bien préparer l'esprit à l'intuition
directe (sâksâtkâra) mais il ne peut proprement la causer. Son
effet propre est de détruire les derniers vestiges de complexité qui
s'opposent encore à la vision de la simplicité suprême ; mais cette
vision est aussi hétérogène à tout ce qui la précède que l'éveil
l'est au monde du sommeil et du rêve ; elle n'est en fait rien
d'autre que la conscience parfaitement éveillée à sa réalité onto
logique et, pas plus que cette réalité n'est le résultat d'une création
humaine, elle ne peut elle-même être l'effet de l'effort théologique.
Toute relation directe de cause à effet étant ainsi niée entre
l'enquête théologique, et son aboutissement, on doit se demander 34 Richard De Smet
à quelle valeur peut prétendre une discipline aussi radicalement
impuissante. Outre cette difficulté la doctrine même du non-dualisme
çamkarien force celui qui l'élucide à pousser plus loin cette cr
itique et à s'interroger sur la na

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