La guerre du Chatt al-Arab : les raisons de l Irak - article ; n°4 ; vol.45, pg 867-879
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Description

Politique étrangère - Année 1980 - Volume 45 - Numéro 4 - Pages 867-879
La guerre du Chatt al-Arab : les raisons de l'Irak, par Philippe Rondot
La guerre du Chatt al-Arab déclenchée, le 22 septembre 1980, par l'Irak contre l'Iran, ne traduit pas seulement la rivalité séculaire de deux civilisations, l'une arabe et l'autre persane, mais répond aussi à plusieurs objectifs de Hussein plus ou moins clairement exprimés. Le premier, le plus légitime semble-t-il, concerne la revendication de quelques territoires arabes usurpés qui auraient dû être restitués par l'Iran selon les termes de l'accord d'Alger de mars 1975, et la révision de ce même accord à propos du partage des eaux du Chatt al-Arab sur lesquelles l'Irak entend exercer une pleine souveraineté. La recherche d'un nouveau statut (annexion, indépendance ou autonomie) pour la province iranienne du Khouzistan (ou Arabistan) ne serait pas, d'autre part, à écarter, à moins que Bagdad ne cherche, par son occupation militaire, à acquérir les meilleurs gages pour convaincre les Iraniens de négocier. A ces deux raisons s'ajoute vraisemblablement la nécessité dans laquelle se trouvait le régime baassiste de neutraliser la source potentielle extérieure de troubles confessionnels au sein de la communauté chiite irakienne, et peut-être même chez les minorités chiites des autres pays arabes du Golfe également convaincus de ce risque de déstabilisation, en provoquant la chute de l'ayatollah Khomeiny et de sa République islamique. Enfin, ce conflit paraît conforme aux ambitions du président Hussein de donner à sa personne et à son pays un rôle et des responsabilités dans le Golfe, le reste du monde arabe et au sein des pays non-alignés.
The Chatt al-Arab war: Iraq's point of view, by Philippe Rondot
The Chatt al-Arab war launched, on September 22 1980, by Iraq against Iran, does not only express the secular rivalry between two civilizations, the one Arab and the other Persian, but it also responds to seve ral of president Hussein's objectives more or less clearly outlined. The first, the most justifiable it seems, refers to the claim of some usurped Arab territories which should have been restored to Iran according to the Alger Agreement of March 1975, and to the revision of this Agreement concerning the division of the Chatt al-Arab waters upon which Iraq wants to have full supremacy. Moreover, the search for a new status (annexation, independence or autonomy) for the Iranian province of Khuzikstan (or Arabistan) should not be neglected unless Baghdad tries, by its military occupation, to obtain the best pledges to convince the Iranians to negotiate. These two reasons are probably combined with the necessity for the Ba'thist regime to neutralize the potential external source of religious turmoil among the Iraqi Shi'i community and even, may be, among the Shi'i minorities of the other Arab countries of the Gulf who are also convinced of this risk of destabilization by instigating the Ayatollah Khomeiny's fall together with that of his Islamic Republic. Finally, this conflict seems to correspond to president Hussein's ambitions to give himself and his own country a role and responsibilities in the Gulf, in the rest of the world and also among the non-aligned countries.
13 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1980
Nombre de lectures 94
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

Général Philippe Rondot
La guerre du Chatt al-Arab : les raisons de l'Irak
In: Politique étrangère N°4 - 1980 - 45e année pp. 867-879.
Citer ce document / Cite this document :
Rondot Philippe. La guerre du Chatt al-Arab : les raisons de l'Irak. In: Politique étrangère N°4 - 1980 - 45e année pp. 867-879.
doi : 10.3406/polit.1980.3004
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/polit_0032-342X_1980_num_45_4_3004Résumé
La guerre du Chatt al-Arab : les raisons de l'Irak, par Philippe Rondot
La guerre du Chatt al-Arab déclenchée, le 22 septembre 1980, par l'Irak contre l'Iran, ne traduit pas
seulement la rivalité séculaire de deux civilisations, l'une arabe et l'autre persane, mais répond aussi à
plusieurs objectifs de Hussein plus ou moins clairement exprimés. Le premier, le plus légitime semble-t-
il, concerne la revendication de quelques territoires arabes "usurpés" qui auraient dû être restitués par
l'Iran selon les termes de l'accord d'Alger de mars 1975, et la révision de ce même accord à propos du
partage des eaux du Chatt al-Arab sur lesquelles l'Irak entend exercer une pleine souveraineté. La
recherche d'un nouveau statut (annexion, indépendance ou autonomie) pour la province iranienne du
Khouzistan (ou Arabistan) ne serait pas, d'autre part, à écarter, à moins que Bagdad ne cherche, par
son occupation militaire, à acquérir les meilleurs gages pour convaincre les Iraniens de négocier. A ces
deux raisons s'ajoute vraisemblablement la nécessité dans laquelle se trouvait le régime baassiste de
neutraliser la source potentielle extérieure de troubles confessionnels au sein de la communauté chiite
irakienne, et peut-être même chez les minorités chiites des autres pays arabes du Golfe également
convaincus de ce risque de déstabilisation, en provoquant la chute de l'ayatollah Khomeiny et de sa
République islamique. Enfin, ce conflit paraît conforme aux ambitions du président Hussein de donner à
sa personne et à son pays un rôle et des responsabilités dans le Golfe, le reste du monde arabe et au
sein des pays non-alignés.
Abstract
The Chatt al-Arab war: Iraq's point of view, by Philippe Rondot
The Chatt al-Arab war launched, on September 22 1980, by Iraq against Iran, does not only express the
secular rivalry between two civilizations, the one Arab and the other Persian, but it also responds to
seve ral of president Hussein's objectives more or less clearly outlined. The first, the most justifiable it
seems, refers to the claim of some "usurped" Arab territories which should have been restored to Iran
according to the Alger Agreement of March 1975, and to the revision of this Agreement concerning the
division of the Chatt al-Arab waters upon which Iraq wants to have full supremacy. Moreover, the search
for a new status (annexation, independence or autonomy) for the Iranian province of Khuzikstan (or
Arabistan) should not be neglected unless Baghdad tries, by its military occupation, to obtain the best
pledges to convince the Iranians to negotiate. These two reasons are probably combined with the
necessity for the Ba'thist regime to neutralize the potential external source of religious turmoil among
the Iraqi Shi'i community and even, may be, among the Shi'i minorities of the other Arab countries of the
Gulf who are also convinced of this risk of destabilization by instigating the Ayatollah Khomeiny's fall
together with that of his Islamic Republic. Finally, this conflict seems to correspond to president
Hussein's ambitions to give himself and his own country a role and responsibilities in the Gulf, in the rest
of the world and also among the non-aligned countries.POLITIQUE ÉTRANGÈRE I 867
LA GUERRE
Philippe RONDOT DU CHATT AL-ARAB :
LES RAISONS DE L'IRAK
Le 22 septembre 1980, après une longue série d'incidents frontaliers
de gravité croissante qui avaient motivé la dénonciation par Bag
dad, le 17 septembre, de l'accord d'Alger de mars 1975, le Conseil
de Commandement de la Révolution (CCR) irakien ordonne à l'armée
de « porter des coups dissuasifs aux objectifs militaires iraniens ». Ainsi
commença la guerre du Chatt al-Arab, que le président Saddam Hussein
aurait voulu courte et décisive, mais qui, rapidement, s'enlisa dans les
combats douteux d'une guerre d'usure dont on pouvait craindre, à cha
que instant, qu'elle embrasa le Golfe entier. Ce conflit est exemplaire
non pas seulement parce qu'il traduit l'antagonisme millénaire de deux
civilisations, l'une perse, d'origine indo-européenne, l'autre, arabe,
d'essence sémitique, mais surtout parce qu'il symbolise l'affrontement
de deux mythes également mobilisateurs : le premier, laïc, d'une nation
arabe unifiée suivant les principes du Baas, le second, religieux, d'un
Islam épuré et régénéré par la stricte observance de la doctrine chiite.
Que cette rivalité, exacerbée par les tensions internes propres à chacun
des deux pays antagonistes, ait pu prendre la dimension d'un conflit
armé sans que les super-Grands en aient été, pour une fois, les inspi
rateurs et sans qu'ils aient, ensuite, pu ou voulu en contrôler le cours,
suggère qu'il est peut-être né, dans cette partie convoitée du Golfe, un
nouveau type de guerre propre aux pays en voie de développement.
Pour trouver des raisons à cette crise, on a parlé [1] d'une « ambition
impériale irakienne », succédant, sous un habillage différent bien sûr,
à celle du Shah, et qui s'inscrirait dans la tradition historique de l'a
ncienne Mésopotamie, citée d'ailleurs abondamment en exemple dès le
début des hostilités '. Tant que les armes n'auront pas rendu leur verdict
* Chargé de mission au Centre des hautes études sur l'Afrique et l'Asie modernes
(CHEAAM), conseiller auprès du directeur de l'IFRI.
1. La lecture du communiqué, du CCR, en date du 22 septembre 1980. ainsi que celle
de la presse irakienne sont, à cet égard, révélatrices. Dans cette dernière, en particulier,
le président Saddam Hussein y est présenté comme l'héritier de Salah Edin (Saladin)
et la guerre est comparée à la bataille célèbre de Qaddisiah (633) au cours de laquelle
les Musulmans l'emportèrent sur l'Empire perse des Sassanides. 868 / POLITIQUE ÉTRANGÈRE
et qu'un cessez-le-feu ne sera pas intervenu, débouchant sur des négo
ciations que Ton peut prévoir déjà difficiles, il est prématuré de livrer
des conclusions sur le déroulement de la guerre du Chatt al-Arab et
ses conséquences régionales ou internationales. Mais puisque l'Irak a
été qualifié d'agresseur, il n'est pas inintéressant de rechercher quels
ont pu être les mobiles d'une telle initiative.
±lJ
URSS
Mossoul
TEHERAN m Hamadan Kirkouk*
Kermanchah Kom Grand Desert
Salé
Ahwaz
Abadan
ARABIE SAOUDITE
(iOLFE PERS1QUL PAKISTAN
Détroit d'Onmiz km BAHREÏN
Le recouvrement de droits historiques usurpés
En courant le risque de se soumettre à l'épreuve d'une guerre, dont il
refusait de porter la responsabilité2, l'Irak avait posé trois conditions
préalables pour que fut mis un terme au conflit avec l'Iran. Ces condi
tions sont les raisons avouées, initialement, par le président Saddam
Hussein pour justifier son entreprise :
— les autorités iraniennes devaient respecter la souveraineté irakienne
sur les limites territoriales bordant l'Iran :
2. Dans son discours prononcé, le 3 octobre 1980, à la session de l'Assemblée génér
ale des Nations-Unies, M. Saadoun Hammadi, ministre irakien des Affaires étrangères
a souligné que, de juin à septembre 1980, l'Iran avait commis 187 violations et actions
militaires à travers la frontière. L'opération la plus violente eut lieu le 4 septembre
lorsque l'artillerie iranienne bombarda à partir de la région de Zein al-Kaouss, terri
toire « usurpé » par l'Iran, les villes irakiennes de Khanaquin et de Mendéli. C'est à
cette date du 4 septembre que le président Saddam Hussein fait remonter l'origine de
la guerre (conférence de presse du 10 novembre 1980). GUERRE DU CHATT AL- ARAB I 869 LA
— la souveraineté et les droits légitimes de l'Irak sur le Chatt al-Arab
devaient également être respectés et reconnus ;
— les trois îles proches du détroit d'Ormuz, Abou Moussa, Tomb al-
Koubra et Tomb al-Soughra, devaient être restitu

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