La politique extérieure de la Yougoslavie - article ; n°2 ; vol.3, pg 144-155
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Description

Politique étrangère - Année 1938 - Volume 3 - Numéro 2 - Pages 144-155
12 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1938
Nombre de lectures 28
Langue Français

Extrait

D. Yovanovitch
La politique extérieure de la Yougoslavie
In: Politique étrangère N°2 - 1938 - 3e année pp. 144-155.
Citer ce document / Cite this document :
Yovanovitch D. La politique extérieure de la Yougoslavie. In: Politique étrangère N°2 - 1938 - 3e année pp. 144-155.
doi : 10.3406/polit.1938.5620
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/polit_0032-342X_1938_num_3_2_5620LA POLITIQUE EXTÉRIEURE DE LA YOUGOSLAVIE
J'essaierai de vous dire, non seulement mes opinions personnelles,
mais aussi l'opinion des paysans serbes, qui m'ont élu aux élections de
1935, et celle des paysans croates avec lesquels nous collaborons en la
personne de leur chef, le Dr Matchek.
Lorsqu'on parle de la politique de M. Stoyadinovitch, qui risque de
nous jeter dans les bras de l'Allemagne, on croit volontiers qu'elle repré
sente une révolution dans notre politique extérieure, et on est aussi tenté
de lui trouver des excuses, pour ne pas dire des raisons. Il m'est très diffi
cile, en raison de mes sentiments francophiles qui s'appuient sur des
convictions profondes acquises pendant les meilleures années de ma
jeunesse en France, il m'est pénible même, de m'exprimer d'une façon
objective, et c'est pourtant ce que je vais m'efforcer de faire, puisque je
m'adresse non à des partisans mais à des spécialistes.
Politique ébauchée par le roi Alexandre
Je commencerai en constatant d'abord que M. Stoyadinovitch n'a
véritablement pas innové la politique qu'il fait actuellement, et ensuite
qu'il présente des prétextes au lieu de produire des raisons véritables
pour justifier cette politique. Après ces deux constatations que je tâcherai
de prouver, je vous dirai que la politique extérieure de la Yougoslavie, non
seulement depuis la guerre, mais déjà depuis 1926, a été menée en fonction
de notre politique intérieure. Chez nous, le régime intérieur a inspiré les
directives de notre action extérieure. Cela rentre d'ailleurs dans le cadre
de l'histoire générale : n'a-t-on pas dit que « les petits pays n'avaient pas
de politique extérieure ».
Nos gouvernants ont toujours été dominés par une double peur : la
peur du communisme et la peur du séparatisme croate. Ai-je besoin de dire
qu'une politique inspirée par la peur ne peut être une bonne politique.
Le roi Alexandre, qui se considérait comme le fondateur de notre État,
a été en fait le fondateur de notre politique extérieure. Opposé à la Russie LA POLITIQUE EXTÉRIEURE DE LA YOUGOSLAVIE 145
soviétique à cause de ses convictions, il a affirmé cette opposition à la
suite d'un attentat commis contre lui par un communiste, en 1921. Il
était hanté par l'idée que le communisme lui enlèverait non seulement
son trône, mais sa tête. Vous savez que la diplomatie russe a toujours
joué un grand rôle chez nous, pendant le règne du roi Milan Obrénovitch
tout particulièrement. Le roi Alexandre disait souvent : « Vous ne voulez
tout de même pas que je tolère en face de mon palais une ambassade russe
où défileraient tous les jours les chefs de l'opposition? Cela, jamais. »
Son horreur de la Russie soviétique était exploitée soigneusement par
un milieu de Russes blancs qui lui donnaient l'espoir plutôt surprenant,
pour ne pas dire ridicule, de pouvoir un jour, — la famille impériale
venant à disparaître et la monarchie pouvant être restaurée en Russie, —
remplacer la dynastie des Romanoff!!!
Un seul gouvernement yougoslave a fait une déclaration au profit de la
reconnaissance des Soviets. C'était en 1924, M. Marinkovitch était ministre
des Affaires Etrangères dans le cabinet Davidovitch. Le roi Alexandre
laissa passer cette déclaration, sans doute parce qu'il savait que ce gou
vernement serait de courte durée. Il dura en effet cent jours et fut renversé
par le ministre de la Guerre, homme du roi, à la tête de partisans infidèles
au président Davidovitch.
C'est à partir de cette déclaration que furent introduits, dans le budget
des Affaires Étrangères, des crédits pour l'installation d'une légation
Yougoslave en Russie, légation qui n'a jamais été créée. Ajoutons que du
vivant du roi Alexandre, la Yougoslavie a signé la convention sur la défini
tion de l'agresseur.
A part ces quelques faits, on peut dire que notre politique étrangère
a toujours été dirigée contre la Russie soviétique. Je l'explique surtout
par des raisons d'ordre intérieur. Le roi Alexandre avait vu, au premier
parlement, un grand groupe communiste de 68 députés, composé non
pas uniquement de communistes convaincus, mais aussi et surtout de
représentants élus par des minorités nationales : Hongrois, Macédoniens,
Allemands. Un grand nombre de Croates également avaient voté pour le
parti communiste en raison de ses tendances extrémistes. Le roi, national
iste au plus haut point, voyait le danger de cette opposition et disait :
« Pas plus que je ne veux donner le moyen aux chefs de l'opposition de se
promener devant mon Palais pour aller à l'ambassade russe, je ne veux
donner l'occasion aux minorités nationales de voter pour les communi
stes. » On a même parlé, un moment, de certains projets d'attaque contre
la Russie, projets qui expliqueraient peut-être la liaison étroite qui s'est
opérée avec la Roumanie... je ne veux pas insister.
Avec la France, il entretenait des relations étroites. Celle-ci d'ailleurs LA POLITIQUE EXTÉRIEURE DE LA YOUGOSLAVIE 146
avait en lui une confiance totale, elle n'est jamais intervenue dans les
affaires intérieures du pays et a même, dit-on, encouragé le roi à prendre
le pouvoir absolu en 1 929.
Ce qui intéressait l'Etat-Major français c'est surtout l'élément serbe
de l'armée qu'il croyait être la colonne vertébrale de l'État. Il n'avait
pas grande confiance dans les éléments croates, ni dans les éléments
slovènes dont il ne connaissait pas la valeur militaire, ni dans les minor
ités nationales qu'il savait hostiles à l'unité Yougoslave.
Si la France se désintéressait presque entièrement de l'organisation
intérieure du pays, le roi, par contre, en était l'esclave. Il craignait le retour
des Habsbourg : l'aigle noir à Vienne aurait été un point d'attraction pour
les Slaves du sud et surtout pour les minorités du nord de la Yougoslavie,
attirées par l'idée de cette confédération danubienne, dont plusieurs
Etats ont rêvé. C'est surtout pour éviter la résurrection de l'Autriche-
Hongrie qu'il forma, avec la Tchécoslovaquie et la Roumanie, la Petite-
Entente. Il a vu des révolutionnaires macédoniens tourner autour des
bureaux de l'Internationale communiste à Vienne et des séparatistes
croates travailler avec les Macédoniens à Vienne et à Sofia; il a vu ces
mêmes Croates en liaison avec la Hongrie, puis, en 1933, s'installer en
Italie; il a vu paraître à Berlin, tolérées et protégées parle gouvernement
allemand, des revues séparatistes, et il a pris alors des initiatives hardies.
Il est allé à Sofia dire au roi Boris : « Nous pouvons nous entendre,
mais à condition que vous chassiez de Bulgarie les Macédoniens qui
s'attaquent à l'intégrité de la Yougoslavie et à ma vie personnelle. » II
est allé ensuite à Vienne signer un traité de commerce, mais à la condition
qu'on chassât d'Autriche Pavélitch et sa bande. Il avait amorcé des
pourparlers avec l'Italie, où il devait se rendre après son voyage à Paris,
en automne 1934, pour demander au gouvernement italien de chasser
Pavélitch de son territoire ainsi que les « oustachis » qui se massaient
déjà autour de la frontière yougoslave, avec ceux qui venaient d'Istrie et
de Hongrie. Ce « nid de vipères », en Hongrie, installé dans la partie la
plus proche de la Yougoslavie, le roi ne doutait pas qu'il finirait par le
détruire, au besoin par la force.
Tel a été, je crois, l'état d'esprit du roi Alexandre, passionnément
unitariste, centraliste et yougoslave, avec une prédominance serbe. Son
rêve et son but étaient de réaliser l'unité de la Yougoslavie. Son père ava

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