Les nouvelles orientations de l Egypte après les récents traités - article ; n°5 ; vol.2, pg 456-465
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Les nouvelles orientations de l'Egypte après les récents traités - article ; n°5 ; vol.2, pg 456-465

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Description

Politique étrangère - Année 1937 - Volume 2 - Numéro 5 - Pages 456-465
10 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié par
Publié le 01 janvier 1937
Nombre de lectures 11
Langue Français

Extrait

P. Dubois-Richard
Les nouvelles orientations de l'Egypte après les récents traités
In: Politique étrangère N°5 - 1937 - 2e année pp. 456-465.
Citer ce document / Cite this document :
Dubois-Richard P. Les nouvelles orientations de l'Egypte après les récents traités. In: Politique étrangère N°5 - 1937 - 2e année
pp. 456-465.
doi : 10.3406/polit.1937.6321
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/polit_0032-342X_1937_num_2_5_6321LES NOUVELLES ORIENTATIONS DE L'EGYPTE
APRÈS LES RÉCENTS TRAITÉS
Mon intention n'est pas de vous présenter une analyse du traité anglo-
égyptien du 26 août 1936 et des accords de Montreux; je voudrais bien
plutôt essayer de définir les conséquences psychologiques de ces importantes
conventions sur l'état d'esprit, les tendances des Egyptiens de 1937, spécia
lement de ceux qui gravitent autour de l'Université Egyptienne. Ceci fait,
peut-être pourrons-nous apercevoir plus clairement les moyens par lesquels
il serait possible de maintenir la situation intellectuelle éminente qui nous
est reconnue dans ce pays depuis que Bonaparte et les savants de son expédi
tion ont préparé la rénovation réalisée par Mohamed Ali et les princes de
sa dynastie.
Seulement, pour apercevoir le présent, et surtout l'avenir, il faut prendre
un peu de recul. C'est par comparaison avec l'Egypte de 1883 que nous
pourrons comprendre l'Egypte d'aujourd'hui, l'état d'esprit actuel résulte
d'une opposition. Je dois donc, d'abord, rappeler les événements essentiels
qui se sont produits depuis 1882-1883, date de l'occupation du Caire
par les troupes anglaises ainsi que les réactions provoquées par ces événe
ments, afin de bien comprendre les qui résultent des événements
d'aujourd'hui.
Le point de départ vers l'indépendance
L'année 1882 marque le point le plus bas de la ligne qui représenterait
l'évolution de l'Egypte depuis Mohamed Ali. C'est le 13 septembre 1882
que se produisit la défaite d'Erabi Pacha à Tell el Kebir. C'était le dénoue
ment du drame d'argent du règne d'Ismaïl le Magnifique. Ce prince qui
croyait, avec raison d'ailleurs, à la grandeur de son pays, à ses possibilités
immenses, avait résolu de tout réaliser et de réaliser sans attendre. On lui
avait offert de l'argent, beaucoup d'argent, il l'avait accepté, mais les LES NOUVELLES ORIENTATIONS DE L'EGYPTE 457
échéances s'étaient précipitées, les gages exigés avaient été de plus en plus
nombreux, et, comme à ce moment il n'existait point de budget ordinaire,
pas d'impôts susceptibles de faire face à ces obligations, Ismail se trouva
dans l'impossibilité de régler et, même, de reporter ses engagements.
Ne pouvant trouver d'argent, ni à l'intérieur ni à l'étranger, il fut
obligé d'accepter une série de sujétions, conditions de nouveaux crédits :
ce fut tout d'abord la Caisse de la Dette, ce fut ensuite le contrôle financier,
et enfin l'introduction dans le ministère égyptien de deux ministres étran
gers, l'un anglais, l'autre français; ceux-ci, se considérant avant tout comme
mandataires des créanciers, établirent ce que nous appellerions aujour
d'hui un régime de déflation extrêmement énergique. Mais cette déflation
qui lésait les intérêts des officiers et des fonctionnaires égyptiens produisit
une réaction particulièrement violente qui provoqua la révolte d'Erabi Pacha,
avec ses excès inévitables. C'est alors que, les troubles publics s'ajoutant à
la défaillîance financière, l'Europe intervint : l'Europe, c'est-à-dire l'An
gleterre, car la France, toujours favorable à l'Egypte et gênée vis-à-vis de
l'Angleterre par sa défaite encore récente, observa une politique de
réserve et d'abstention. L'Angleterre fit donc débarquer ses troupes, et
c'est à partir de ce moment qu'il y eut, en Egypte, ce qu'on appela le
protectorat déguisé.
Je n'ai rappelé ces faits que pour montrer la situation de l'Egypte il y
y a 55 ans, car je veux la comparer à celle d'aujourd'hui.
Plaçons-nous à l'arrivée au Caire de Sir Evelyn Baring, le futur
Lord Cromer, et analysons la série de sujétions qui pesaient alors sur
le pays.
Tout d'abord, l'Egypte était vassale de la Turquie, et ce n'était pas un vain
mot. Cette vassalité comportait le paiement d'un tribut; de plus, le Sultan,
poussé par l'Europe, avait pu prononcer, quelque temps auparavant, la
déchéance d'Ismaïl.
Ensuite, il y avait les sujétions capitulaires. L'Egypte ne possédait plus
sa liberté de législation, ni sa liberté de juridiction, ni sa liberté de police,
ni sa liberté de finances. Pendant des siècles, on n'avait point souffert de
ce régime, en parfaite concordance avec les conceptions musulmanes
du droit public. Mais, à mesure que le nombre des étrangers, en particulier
des hommes d'affaires, s'était accru, que les intérêts s'étaient développés, les
défauts de ce régime — et, disons-le, son mauvais fonctionnement — se
firent beaucoup plus lourdement sentir que sous le régime de Mohamed
Ali et de ses successeurs immédiats.
Spécialement en matière de finances, il n'y avait pas que le droit de taxer
qui se trouvait sous le contrôle étranger, mais aussi la gestion des deniers
publics qui relevait de la Caisse de la Dette et du conseiller financier. Par LES NOUVELLES ORIENTATIONS DE UÉGYPTE 458
conséquent, à aucun degré les Égyptiens n'étaient maîtres de leurs finances.
Ils n'étaient pas maîtres, non plus, de leur gouvernement et de leur
administration. C'est ici qu'intervenait ce protectorat déguisé, institué
par Lord Cromer et dont il importe de dire un mot pour montrer la distance
parcourue.
Ce protectorat déguisé consistait, non pas à supprimer les fonctionnaires
égyptiens — on laissait les ministres et les agents principaux en place • —
mais à les doubler, au moins dans les postes importants, de conseillers
anglais. Il serait faux de croire que ces conseillers se substituaient en toutes
choses aux fonctionnaires locaux : pour les affaires courantes, l'Egyptien
était maître; pour celles qui avaient une certaine importance, mais une
importance uniquement égyptienne, l'anglais donnait son avis, en accep
tant qu'on agit différemment; mais dès que les intérêts britanniques
étaient en jeu, le conseil donné était d'une nature toute spéciale : Lord Gran-
ville, dans une lettre au représentant de Sa Majesté Britannique en Egypte,
s'est donné la peine de le préciser : « II est bien évident — dit-il, à peu près
— que quand vous donnez, après y avoir mûrement réfléchi, un conseil à
un ministre égyptien, celui-ci ne peut que le suivre ou que se démettre. »
Et c'est par le moyen de ces conseils nuancés que le gouvernement de
Sa Majesté a exercé, sur la vallée du Nil, un protectorat déguisé, tempor
aire, mais décisif.
Vassalité, entraves capitulaires, dépendance financière, protectorat
déguisé et, en cas de révolte, répression militaire énergique, telle était
à cette époque, la situation de l'Egypte. Il est donc bien évident que l'Égyp
tien de 1883, et même encore celui de 1900, ne pouvait avoir, en aucune
manière, le sentiment de la liberté.
Avant d'indiquer toutes les libérations qui résultent des accords
de 1936-1937, il faut noter trois dates qui marquent des étapes vers l'ind
épendance.
Ces trois dates sont celles de 1875 : la création des tribunaux mixtes;
de 1914 : la libération vis-à-vis de la Turquie; enfin de 1922 : la décla
ration unilatérale d'indépendance de l'Egypte.
L'année 1875 est marquée par la création très importante des tribunaux
mixtes. Il s'agit, ici, d'une réforme excellente, d'une réforme qui pouvait,
pour longtemps, résoudre la question des rapports des étrangers avec les
Égyptiens. Il est pénible de devoir rappeler ce que fut la résistance des
puissances capitulaires, celle de la France en particulier, à cet indiscutable

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