Le problème de l inerrance prophétique dans la théologie juive au Moyen-Âge - article ; n°2 ; vol.174, pg 169-187
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Le problème de l'inerrance prophétique dans la théologie juive au Moyen-Âge - article ; n°2 ; vol.174, pg 169-187

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Description

Revue de l'histoire des religions - Année 1968 - Volume 174 - Numéro 2 - Pages 169-187
19 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié par
Publié le 01 janvier 1968
Nombre de lectures 14
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

Charles Touati
Le problème de l'inerrance prophétique dans la théologie juive
au Moyen-Âge
In: Revue de l'histoire des religions, tome 174 n°2, 1968. pp. 169-187.
Citer ce document / Cite this document :
Touati Charles. Le problème de l'inerrance prophétique dans la théologie juive au Moyen-Âge. In: Revue de l'histoire des
religions, tome 174 n°2, 1968. pp. 169-187.
doi : 10.3406/rhr.1968.9242
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/rhr_0035-1423_1968_num_174_2_9242■
J
Le problème de Finerrance prophétique
dans la théologie juive du Moyen Age
Le fidèle, appelé à lire un passage des prophètes à la syna
gogue, bénit Dieu d'avoir choisi des de vérité et
d'avoir agréé leurs paroles prononeées en conformité avec
la vérité1. Pour le judaïsme, comme pour l'Église, il est bien
évident que les prophètes ne peuvent pas proférer d'erreurs.
L'inspiration divine, sous l'action de laquelle ils parlent, leur
accorde ce que les théologiens appellent le privilège d'iner-
rance : ils ne peuvent pas se tromper2. Mais ce est-il
absolu, illimité ? L'inspiration garantit-elle toutes les asser
tions, quelles qu'elles soient, de l'écrivain sacré ? Ou bien
prémunit-elle contre les risques d'erreur uniquement les ense
ignements qui relèvent de la foi et des mœurs, par exemple ?
Voilà un problème que les théologiens catholiques ont beau
coup discuté jusqu'à nos jours3.
Faute de documents extra-bibliques, on ne pouvait certa
inement pas se douter, à l'époque talmudique et au Moyen
Age, des diiïicultés que soulèvent certains récits historiques
de la Bible. Mais, chez les Juifs, le problème posé par la non-
réalisation de certaines prophéties a été souvent abordé : il
1) Le, texte des deux bénédictions est cité pour la premiere fois dans le traité
post-talmudique, Massekhei Sôferlm, chap. 13, halâkhâ 9.
'i) Faisons observer que, le terme d'inerrance n'a pas d'équivalent en hébreu.
3) Sur ce problème voir, entre autres, l'étude de (i. C.ourtade sur Inspiration
et Inerrance, dans le Dictionnaire de la Bible, Supplément, t.. IV, Paris, 1949,
col. 4^2-Г>59 .exposé très complet de la buestionl, le chapitre sur « L'inspiration »
par P. Benoit, dans A. Roisert et A. Tricot, Inilialion biblique, 3e éd., Paris,
1954, pp. 6-45 ; le chapitre sur « I/inerrance des livres inspirés » par A. Baruco et
IL Cazelles, dans Introduction à la Bible, sous la direction de A. Robert et
A. Feuillet, s. 1. s. d. Paris, 1957;, t. I, pp. Г>8-6К, et P. (îrei.ot, La Bible parole
de Dieu, Paris, 19bT>, pp. 96-134 'dans la n. 1 de la p. 96, on trouvera la bibliogra
phie récente;. 170 REVUE DE L'HISTOIRE DES RELIGIONS
était facile à résoudre, et nous allons montrer comment il
Га été. Par contre, le problème des erreurs d'ordre scientifique
commises par des prophètes était autrement plus délicat, et il
faudra attendre* le xive siècle pour qu'il soit soulevé. Nous
essaierons d'expliquer dans ce travail les raisons pour le
squelles il n'a pu se poser qu'à ce moment-là précisément, nous
citerons les textes bibliques qui l'ont suscité, puis nous expo
serons les diverses solutions qui ont été proposées.
I. — Événements prédits et non réalisés
Nous savons aujourd'hui que la conquête de Tyr par
Nabuchodonosor, prophétisée par Ézéchiel, chapitres XXVI-
XXVIII, n'a pas eu lieu1, que Cyrus, lorsqu'il a pris Babylone
en Г>38, n'a pas traité cette cité maudite avec la rigueur
qu'avaient prédite Isaïe, chapitres XIII et XLVII, et Jérémie,
chapitres L et LI, etc. Les docteurs du Talmud, les exégètes
et les théologiens juifs du Moyen Age l'ignoraient. Mais ils
savaient que certaines prophéties ne se sont pas réalisées.
Au chapitre XI, verset 23 de Jérémie, Dieu annonce qu'il
va faire fondre le malheur sur les habitants de la ville de
'Anatot et qu'il n'y aura aucun reste parmi eux : u-she'erït
lu lihyé luhem. Or, dans Néhémie, VII. 27, on compte cent
vingt-huit citoyens de 'Anatot qui sont revenus de la captivité
de Babylone. Les rabbins se sont aperçus de la contradiction
entre ces deux textes et ils l'ont éliminée en expliquant que,
les habitants de 'Anatot ayant fait pénitence, le décret qui
avait été pris contre eux a été abrogé2.
Une théorie générale a été élaborée par Maïmonide
! 1135-1204), dans l'Introduction à son Commentaire sur la
1) Ézéchiel lui-même l'a reconnu seize ans après au chap. XXIX, verset 18,
mais les exégètes juifs du Moyen Age n'ont pas su interpréter correctement ce
verset (voir par exemple les commentaires de David Qimhi et (I'Abrabanel, a. L).
2) Voir Pesïqtâ de-Rab Kahanu, éd. S. Buber, pp. 160 6-161 a, et le comment
aire de David Qimhi sur Jérémie, XI, 23, qui écrit : « Bien qu'un décret ait été
pris contre eux, aux termes duquel il n'y aurait aucun reste parmi eux, au moment
où le décret allait s'accomplir lorsque les ennemis prirent la ville, ils firent péni
tence, et il y eut parmi eux des survivants. » ;
.
,
:


PROBLÈME DE: l'iNERRANCE PROPHÉTIQUE 171? LE
Mishna1: Elle est fondée sur les deux textes de ; base que les
théologiens juifs du'Moyen Age ne cesseront de commenter :
le premier/ est la .fameuse- réponse; de Jérémie- à Hananyâ i
ben : f Azzur (Jérémie,. XXVIII; 8-9) : « Les prophètes i qui :
furent avant moi et avant toi depuis toujours ont prophétisé
à de : nombreux pays et à? de grands royaumes- la -guerre, le
malheur, et la peste. Le prophète qui prophétise la' paix, c'est
quand; arrive • la prédiction de ce prophète qu'il : est reconnu
second' prophète véritablement envoyé par. Dieu* » ; le est
l'assertion talmudique : « Pour toute ; prédiction ■•: de bonheur,
qui sort de la bouche du \ Saint, béni ; soit-Il, même si elle est
suspendue à ■-, une condition, Dieu me se ravise pas : » ( Talmud »
Bablïj. Berâkhôt, 7 a). D'après Maïmonide, une; prophétie de
bonheur, adressée - à un > prophète et le concernant lui-même
peut ne pas s'accomplir, ses péchés pouvant en ; empêcher la .
réalisation ; mais une- prophétie- de bonheur' communiquée
par un prophète à » un tiers se réalise toujours, sinon comment
reconnaîtrait-on* le prophète authentique ? Quant à Ла pro
phétie de malheur, elle peut ne pas se réaliser, soit que les
hommes . visés par cette prédiction ; aient fait; pénitence; soit
que -Dieu- diffère leur châtiment, soit qu'il leur accorde soir
pardon en raison » des bonnes œuvres qu'ils auraient aupara
vant ; accomplies. .
Lévi ben Gerson? (Gersonide) (1288-1344) accepte Ia-; doc
trine traditionnelle sur la' prophétie de malheur qui? peut ne
pas se réaliser, mais il fait observer, contre Maïmonide, que ^
certaines prophéties de -bonheur, communiquées auxhommes
par les prophètes peuvent; elles aussi, ne pas se réaliser, ce qui'
l'amène à poser une nouvelle distinction entre les prophéties
de bonheur. Les hommes peuvent recevoir un ■• bien soit delà:
conjoncture- astrale, qui -, ne prends jamais en- considération
leurs: mérites, soit de la- providence divine, lorsqu'ils sont:
arrivés à un. certain «niveau de perfection. L'annonce par le
1) Mishna s 'im përûsh • Rabhênû Môshé hen "Maïmon, texte arabe et trad,
hébraïque par Joseph Каран, Seller Zerâ'ïm, Jerusalem, 1У63, pp. 10-11. REVUE DE L'HISTOIRE DES RELIGIONS 172
prophète d'un événement heureux déterminé par les astres
doit toujours se réaliser. Il n'en est pas de même quand le
prophète prédit un bonheur accordé par la providence parti
culière car, les hommes étant toujours faillibles, ils peuvent
avoir rompu les liens spéciaux qui les rattachaient à Dieu et
se retrouver alors soumis à la loi commune du déterminisme
astral. C'est ainsi que certaines promesses faites au peuple
d'Isra

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