La Nouvelle-Calédonie et l accord de Nouméa, un processus inédit de décolonisation - article ; n°1 ; vol.44, pg 24-75
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Description

Annuaire français de droit international - Année 1998 - Volume 44 - Numéro 1 - Pages 24-75
52 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié par
Publié le 01 janvier 1998
Nombre de lectures 35
Langue Français
Poids de l'ouvrage 5 Mo

Extrait

Mme le Professeur Valérie
Goesel-Le Bihan
La Nouvelle-Calédonie et l'accord de Nouméa, un processus
inédit de décolonisation
In: Annuaire français de droit international, volume 44, 1998. pp. 24-75.
Citer ce document / Cite this document :
Goesel-Le Bihan Valérie. La Nouvelle-Calédonie et l'accord de Nouméa, un processus inédit de décolonisation. In: Annuaire
français de droit international, volume 44, 1998. pp. 24-75.
doi : 10.3406/afdi.1998.3503
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/afdi_0066-3085_1998_num_44_1_3503ANNUAIRE FRANÇAIS DE DROIT INTERNATIONAL
XLIV - 1998 - CNRS Editions, Paris
LA NOUVELLE-CALÉDONIE ET L'ACCORD
DE NOUMÉA, UN PROCESSUS INÉDIT
DE DÉCOLONISATION
Valérie GOESEL-LE BIHAN
Colonie française de peuplement située dans le Pacifique Sud, la Nou
velle-Calédonie se caractérise par la coexistence difficile d'une population
autochtone mélanésienne (les Kanaks), minoritaire depuis 1958 (44,1 % de
l'ensemble des habitants actuels de l'archipel) et d'une population dont
l'installation est plus récente et l'origine essentiellement européenne (34,1 %),
polynésienne (11,6 %) ou asiatique (5,7 %). La colonisation, qui remonte à
1853, s'est accompagnée, quels que puissent être ses apports sur d'autres
points, d'une spoliation foncière de grande ampleur et du non-respect des
droits élémentaires des Kanaks, qui n'accéderont d'ailleurs dans leur ensemb
le à la citoyenneté française effective et aux droits politiques qui s'y
attachent qu'en 1957 (1).
Territoire d'outre-mer depuis 1946, la Nouvelle-Calédonie dispose en
vertu de l'article 74 de la Constitution du 4 octobre 1958 d'une « organisation
particulière » fixée par un statut législatif tenant compte de ses « intérêts
propres dans l'ensemble des intérêts de la République » et établie après
consultation de l'Assemblée territoriale intéressée. Dès lors qu'elle respecte
certaines limites qui résultent de la Constitution et ont été explicitées par le
Conseil constitutionnel, la décentralisation peut y être très poussée, en
particulier du fait de l'étendue des compétences qui sont susceptibles d'être
transférées au territoire et d'une organisation institutionnelle qui peut em
prunter, sur certains points, à celle d'un Etat (2).
La multiplicité des statuts qui se sont succédé en Nouvelle-Calédonie
depuis 1946, balançant entre l'octroi d'une large autonomie et le retour à une
tutelle renforcée de l'Etat (3), tout autant que la montée en puissance d'un
mouvement indépendantiste et la radicalisation des forces politiques locales
autour de deux pôles, l'un indépendantiste (F.L.N.K.S.) (4), l'autre favorable
au maintien dans la République française (R.P.C.R.) (5), attestent toutefois de
(*) Valérie Goesel-Le Bihan, professeur à l'Université de La Réunion.
(1) Pour des informations d'ordre général sur la Nouvelle-Calédonie, l'on pourra, entre
autres, se reporter à J.L. Mathieu, La Nouvelle-Calédonie, P.U.F., 1989 et à A. Christnacht, La
Nouvelle-Calédonie , La Documentation française, 1987.
(2) Sur les territoires d'outre-mer, v. en particulier J.Y. Faberon, « Les territoires d'outre
mer », Encyclopédie Dalloz Collectivités locales, t. 2, 1997 et la bibliographie citée par cet auteur.
(3) Entre 1946 et 1988, ce ne sont pas moins de dix statuts qui se sont appliqués successive
ment à ce territoire. Cette évolution est retracée par G. Agniel, « L'expérience statutaire de la
Nouvelle-Calédonie ou de l'étude du yo-yo au service de l'évolution institutionnelle d'un territoire
d'outre-mer » in J.Y. Faberon (dir.), L'avenir statutaire de la Nouvelle-Calédonie , N.E.D. n°
5053-54, 1997, p. 41 s.
(4) Front de Libération Nationale Kanak Socialiste.
(5) Rassemblement pour la Calédonie dans la République. LA NOUVELLE-CALÉDONIE ET L'ACCORD DE NOUMÉA 25
la difficulté croissante du droit infra-constitutionnel français de Foutre-mer à
saisir une réalité démographique et historique complexe.
En effet, d'un côté, les indépendantistes qui appartiennent pour l'essent
iel à la communauté mélanésienne, se fondant sur le droit des peuples à
disposer d'eux-mêmes tel qu'il résulte de l'article 1er de la charte de l'ONU et
de la pratique ultérieure de l'organisation, en particulier de la Résolution
1514 (XV) sur l'octroi de l'indépendance aux pays et aux peuples coloniaux
adoptée par l'Assemblée générale le 14 décembre 1960, exigent dès le début
des années 1980 que la Nouvelle-Calédonie accède à l'indépendance après un
scrutin d'autodétermination. Le corps électoral y serait défini de façon restric
tive, excluant les arrivants les plus récents, afin que la réponse au référe
ndum appartienne aux seuls habitants directement concernés par l'avenir de la
Nouvelle-Calédonie et puisse être favorable à l'indépendance (6) ; les indépend
antistes, de minoritaires dans la population, seraient donc assurés de
devenir majoritaires lors du vote. Ils estiment insuffisante l'autonomie renfor
cée accordée au territoire (7) ou à ses subdivisions (8) par certains statuts
adoptés à cette époque par la métropole (9). C'est désormais la question de la
définition du corps électoral et de l'avenir du territoire qui devient centrale et
cristallise le conflit.
D'un autre côté, les statuts successifs octroyés par le Parlement français
avant 1988 visent certes, pour une partie d'entre eux, à approfondir l'autono
mie du territoire et à prévoir une date à laquelle un scrutin d'autodéterminat
ion sera organisé (10). Tel fut d'ailleurs l'objet du référendum local organisé
le 13 septembre 1987 en application de la loi adoptée le 17 juillet 1986
relative à la Nouvelle-Calédonie (11). L'obligation pour le législateur de
respecter la Constitution et la volonté politique de ne pas exclure les commun
autés plus récentes empêchèrent toutefois de réduire le corps électoral au
niveau souhaité par les indépendantistes. Ainsi, puisque la sortie de la
République française n'était pas envisageable en application d'un processus
légal, le F.L.N.K.S. appela au boycott des élections locales et du référendum
d'autodétermination de 1987 (12). Les impasses du droit, la volonté, locale ou
nationale, de s'en tenir pour l'essentiel au fait majoritaire en ignorant les
spécificités calédoniennes, ainsi que les effets de yo-yo dus aux alternances
politiques à Paris sont, dès 1984, à l'origine d'une situation de quasi-guerre
(6) Dans la déclaration adoptée lors de la table ronde de Nainville-Les-Roches qui s'est tenue
en 1983 à l'initiative du Gouvernement, les indépendantistes firent reconnaître au peuple kanak, en
tant que « premier occupant du territoire », « un droit inné et actif à l'indépendance » dont « l'exercice
doit se faire dans le cadre de l'autodétermination (...), autodétermination ouverte également pour des
raisons historiques aux autres ethnies dont la légitimité est reconnue par les représentants du
peuple canaque ».
(7) Tel était surtout le fait de la loi n° 84-821 du 6/9/1984 dite « statut Lemoine », qui, proche
de la loi-cadre Defferre de 1956, instituait un système de type parlementaire et transférait
l'exécutif du territoire à un gouvernement local. Elle devait rester inappliquée en raison de la
montée de la violence.
(8) En ce sens, v. en particulier la loi n° 85-892 du 23/8/1985 (JORF, 24/8/1985, p. 9775), dite
« statut Pisani », qui créait quatre régions et leur allouait certaines compétences antérieurement
exercées par le Territoire.
(9) L'autonomie au profit de subdivisions territoriales dessinées à cet effet permet d'arracher
en partie à la majorité du territoire le monopole de l'exercice du pouvoir.
(10) Le « statut Pisani » prévoyait l'organisation avant le 31/12/1987 d'un référendum « sur
l'accession à l'indépendance du territoire en association avec la

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