Distributionnalisme et structuralisme - article ; n°29 ; vol.8, pg 6-42
38 pages
Français

Découvre YouScribe en t'inscrivant gratuitement

Je m'inscris

Distributionnalisme et structuralisme - article ; n°29 ; vol.8, pg 6-42

-

Découvre YouScribe en t'inscrivant gratuitement

Je m'inscris
Obtenez un accès à la bibliothèque pour le consulter en ligne
En savoir plus
38 pages
Français
Obtenez un accès à la bibliothèque pour le consulter en ligne
En savoir plus

Description

Langages - Année 1973 - Volume 8 - Numéro 29 - Pages 6-42
37 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1973
Nombre de lectures 1 161
Langue Français
Poids de l'ouvrage 3 Mo

Extrait

MME Danielle Leeman
Distributionnalisme et structuralisme
In: Langages, 8e année, n°29, 1973. pp. 6-42.
Citer ce document / Cite this document :
Leeman Danielle. Distributionnalisme et structuralisme. In: Langages, 8e année, n°29, 1973. pp. 6-42.
doi : 10.3406/lgge.1973.2219
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/lgge_0458-726X_1973_num_8_29_2219D. LEEMAN
Paris-X, Nanterre
DISTRIBUTIONNALISME ET STRUCTURALISME
L'on assimile généralement les procédures de Harris — tout en lui
reconnaissant une rigueur exceptionnelle — à la théorie structuraliste. Et
simultanément, dans le but pédagogique ou polémique de présenter le
structuralisme comme un phénomène homogène, on mêle les vues et les
méthodes de linguistes différents, Harris y compris, à partir de similitudes
apparentes qu'il aurait fallu replacer dans leur contexte.
Ainsi Lyons opère, dans son Introduction à la Linguistique générale
(trad. Larousse 1970) une présentation de la linguistique structurale en
partant de Ferdinand de Saussure (p. 32) et en passant par les notions
de « primauté de la langue parlée » (p. 32), de « primauté de la description
synchronique » (p. 37), de « langue et parole » (p. 41), de « double articula
tion du langage » (p. 44), de « substance et forme » (p. 45), d'où il tire les
notions de « caractère discret des éléments d'expression » (p. 54), et de
« distribution » (p. 56). Or, chez Harris, et d'ailleurs plus généralement
dans la linguistique américaine qui n'avait pas à se dégager des méthodes
diachroniques, la description synchronique va de soi, et il n'est explicit
ement pas question des distinctions entre substance et forme, entre langue
et parole ou de double articulation. En dehors du fait que cette présentation
serait acceptable du point de vue pédagogique si son schématisme ne
menait à des incompatibilités — on voit mal par exemple comment un
pédagogue, s'inspirant de Lyons, pourra concilier opposition fonctionnelle
et distribution sinon en faussant l'une et l'autre théories, elle n'en n'est pas
moins critiquable d'un point de vue scientifique, dans la mesure où cet
amalgame aboutit à des conclusions complètement erronées. C'est ainsi
qu'on peut lire page 58 :
Comme nous l'avons vu, deux éléments d'expression sont en
opposition si l'on obtient un mot différent ou une phrase différente
en remplaçant l'un par l'autre dans le même contexte; si on n'obtient
f>as ce résultat, ils sont en variation libre. Mais on peut envisager
es mots, ainsi que les autres unités grammaticales, dans deux pers
pectives différentes. Ce n'est que par rapport à la fonction grammat
icale des mots — en gros, noms, verbes, adjectifs, etc. — que les
notions d'opposition et de variation libre peuvent se traduire par
des équivalences distributionnelles; et ceci parce qu'il y a un rapport
direct entre la fonction grammaticale et la distribution.
Dans la mesure où Lyons se situe explicitement dans une perspective dis-
tributionnelle, cette dernière phrase est fausse puisque la relation est en fait
inverse : les catégories, aussi bien grammaticales que sémantiques, sont
dérivées des caractéristiques distributionnelles. a donc paru utile, en dehors de la nécessité première de situer le proIl
blème de la paraphrase lui-même dans l'œuvre de Harris, de présenter ses
postulats, ses concepts, ses procédures, qui ne sont aucunement semblables
à ceux des « Européens » ni même à ceux de Bloomfield.
I. Postulats, définitions et méthodes.
1-1. La définition préalable des concepts linguistiques n'est pas
la même.
1. 1.1. La de l'objet.
Harris ne se pose pas explicitement le problème de la définition de
l'objet de la linguistique par rapport à tout ce qui ne serait pas exclusiv
ement du domaine de cette linguistique, comme le fait Saussure 1 par
exemple qui cherche à différencier la linguistique de l'ethnologie, de la
sociologie, de la psychologie (CLG, p. 21) et essaie de lui attribuer un objet
propre (CLG, p. 25 et suivantes) ou comme le fait A. Martinet dans les
premières pages de ses Éléments de Linguistique générale. Harris spécifie
simplement qu'il ne s'agit pas de décrire le comportement verbal humain
dans son ensemble, mais des régularités de traits de parole constituant le
stock d'énoncés, ou corpus, sur lesquels on fonde l'analyse. Les linguistes
européens se donnent pour objet la langue, définie comme un système
mental n'ayant de réalité que par la communication. Ce que l'on doit découv
rir est spécifié avant même le début de la recherche.
L'objet tel qu'il est défini par les uns et par l'autre va conditionner
deux types de méthodes radicalement différents. Le fait de voir dans la
langue un phénomène mental présuppose en effet une certaine conception
du rapport langue /pensée ou pensée /langue; ce rapport est, en l'occurrence,
plus ou moins explicitement défini par le fait que la pensée précède la
langue. A. Martinet écrit par exemple dans LLS page 4 :
Le langage sert à ordonner ou clarifier notre pensée, ou à s'expri
mer, ou à communiquer.
Le fait de dire qu'un élément est linguistique s'il dépend du choix du
locuteur va dans ce sens et implique un processus de type : 1. Pensée;
2. ensemble de mots; 3. choix; 4. parole.
Certaines réflexions de Jakobson laissent supposer le même type
de postulat; il écrit par exemple (Essais, p. 94) :
En gros, le processus d'encodage va du sens au son, et du niveau
lexico-grammatical au niveau phonologique (...)
Du point de vue de la méthode linguistique, cela entraîne un certain nombre
de conséquences; sans aller jusqu'à décrire les phénomènes linguistiques en
fonction de processus mentaux comme le fait Saussure (cf. par exemple
CLG, p. 178) :
(...) il existe dans le subconscient une ou plusieurs séries associa
tives comprenant des unités qui ont un élément commun avec le
syntagme, par exemple :
1. On se sert ici uniquement, et donc peut-être à tort, du Cours de Linguistique
générale. — faire — dé
décoller faire
déplacer refaire
découdre contrefaire
etc. etc.
les éléments linguistiques sont supposés immédiatement connus et ne
sont donc pas véritablement découverts par l'analyse linguistique (cf. 1.2).
La deuxième différence avec Harris, c'est l'insistance dans la défini
tion de l'objet sur le fait qu'il est social, qu'il n'existe que par la communic
ation 2; ainsi pour Jakobson (Essais, p. 27) :
(...) le langage et la culture s'impliquent mutuellement (...) le
langage doit être conçu comme une partie intégrante de la vie
sociale (...)
Je pense que la réalité fondamentale à laquelle le linguiste a
affaire, c'est l'interlocution — l'échange de messages entre émetteur
et receveur, destinateur et destinataire, encodeur et décodeur (Essais,
p. 32).
On peut lire, de même, dans CLG : « II faut une masse parlante pour
qu'il y ait une langue » (p. 112). Cette solidarité existentielle entre langue
et information à transmettre implique, aussi bien pour A. Martinet, que
pour Jakobson ou Troubetzkoy, que le sens est indissociable de la forme,
et que par conséquent l'analyse linguistique ne peut se concevoir sans réfé
rence au sens. Évidemment, cette implication paraître contradictoire
avec le postulat de l'arbitraire du signe, selon lequel le signifiant n'ayant
aucun lien objectif avec le signifié ou avec la chose signifiée, le système
formel de la langue constitue la seule référence possible.
C'est qu'en fait l'arbitraire du signe se définit par rapport au réel et
non par rapport à la pensée ou par rapport à la vision par l'homme de ce
réel si bien que pensée et signifié sont identiques. La différenciation opérée
par F. de Saussure oppose le concept — ou signifié — à l'image acous
tique — ou signifiant; son explication se termine néanmoins de façon
ambiguë :
Nous voulons dire qu'il (le signe) est immotivé, c'est-à-dire arbi
traire par rapport au signifié, avec lequel il n'a aucune attache natur
elle dans la réalité (CLG, p. 101).
L'explicat

  • Univers Univers
  • Ebooks Ebooks
  • Livres audio Livres audio
  • Presse Presse
  • Podcasts Podcasts
  • BD BD
  • Documents Documents