De l influence de la typographie sur le manuscrit. À partir du Dictionnaire des poètes (1753) - article ; n°1 ; vol.145, pg 47-59
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De l'influence de la typographie sur le manuscrit. À partir du Dictionnaire des poètes (1753) - article ; n°1 ; vol.145, pg 47-59

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Description

Communication et langages - Année 2005 - Volume 145 - Numéro 1 - Pages 47-59
À partir de l'exemple d'un manuscrit de 1753, Le Dictionnaire de poètes, Susan Kovacs propose d'étudier l'influence de l'édition imprimée sur la mise en forme des livres manuscrits, qui font de certains de ces volumes une «tentative d'écriture typographique ». Une comparaison entre Le Dictionnaire, ses sources les plus probables, et d'autres exemples de manuscrits copiés à la même époque, permet de dégager les aspects formels qui, s'étant imposés sur la présentation du livre imprimé, se voient émulés par les lecteurs de l'époque. De telles pratiques scripturales, si elles confirment la dominance de la forme imprimée de l'énoncé textuel dans la conception même de l'écrit, nous dirigent vers d'autres interrogations, notamment sur l'interférence d'un support de communication public ou collectif et un type d'écrit destiné à une diffusion restreinte.
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Publié le 01 janvier 2005
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Langue Français
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Extrait

Susan Kovacs
De l'influence de la typographie sur le manuscrit. À partir du
Dictionnaire des poètes (1753)
In: Communication et langages. N°145, 3ème trimestre 2005. pp. 47-59.
Résumé
À partir de l'exemple d'un manuscrit de 1753, Le Dictionnaire de poètes, Susan Kovacs propose d'étudier l'influence de l'édition
imprimée sur la mise en forme des livres manuscrits, qui font de certains de ces volumes une «tentative d'écriture typographique
». Une comparaison entre Le Dictionnaire, ses sources les plus probables, et d'autres exemples de manuscrits copiés à la même
époque, permet de dégager les aspects formels qui, s'étant imposés sur la présentation du livre imprimé, se voient émulés par
les lecteurs de l'époque. De telles pratiques scripturales, si elles confirment la dominance de la forme imprimée de l'énoncé
textuel dans la conception même de l'écrit, nous dirigent vers d'autres interrogations, notamment sur l'interférence d'un support
de communication public ou collectif et un type d'écrit destiné à une diffusion restreinte.
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Kovacs Susan. De l'influence de la typographie sur le manuscrit. À partir du Dictionnaire des poètes (1753). In: Communication
et langages. N°145, 3ème trimestre 2005. pp. 47-59.
doi : 10.3406/colan.2005.3356
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/colan_0336-1500_2005_num_145_1_335647
De l'influence
de la typographie
sur le manuscrit.
À partir du Dictionnaire
des poètes (1753 y
SUSAN K0VACS
À partir de l'exemple d'un manuscrit Ma cause est que encore le copiste plus favorable, des Auteurs parce déjà que Pierre imprimés. je ne Bayle suis
de 1753, Le Dictionnaire de poètes,
Susan Kovacs propose d'étudier
l'influence de l'édition imprimée sur
Introduction la mise en forme des livres manusc
Quelle influence l'édition imprimée a-t-elle exercé sur la rits, qui font de certains de ces
mise en forme du livre manuscrit ? Les historiens du livre volumes une «tentative d'écriture
ont déjà démontré les ressemblances, parfois étonnantes, et typographique ». Une comparaison
souvent recherchées, entre la présentation matérielle du entre Le Dictionnaire, ses sources livre imprimé aux XVe et XVIe siècles et celle du manuscrit.
les plus probables, et d'autres Moins étudiée cependant est la manière dont les spécificités
exemples de manuscrits copiés à la visuelles et graphiques de la page imprimée, une fois
même époque, permet de dégager acquises, se verront à leur tour adoptées par les auteurs du
les aspects formels qui, s'étant livre manuscrit. C'est que la culture de l'imprimé en instau
imposés sur la présentation du livre rant de nouvelles formes d'inscription du texte sur la page,
imprimé, se voient émulés par les modifie le rapport des lecteurs à l'écrit, quelle que soit la
technique (impression, gravure, graphie manuelle) qui le lecteurs de l'époque. De telles prat
produit. Les interférences entre le régime typographique et iques scripturales, si elles confi
la culture du manuscrit ne sont pourtant pas réductibles à rment la dominance de la forme
des spécificités propres à chacune des modalités de produc imprimée de l'énoncé textuel dans
tion et de diffusion des textes. Depuis l'invention de la conception même de l'écrit, nous
l'imprimerie, le manuscrit et l'imprimé, en empruntant des dirigent vers d'autres interrogations,
traits l'un de l'autre, cherchent à investir le livre objet des
notamment sur l'interférence d'un valeurs associées à ces deux systèmes de matérialisation et
support de communication public ou de transmission des savoirs. La pensée typographique se
collectif et un type d'écrit destiné à développe par référence, autant que par opposition, à des
une diffusion restreinte. pratiques culturelles associées au livre manuscrit.
À travers l'exemple d'un manuscrit qui date de 1753, Le
Dictionnaire des poètes-, un répertoire d'auteurs illustres, il
1. Manuscrit M-217, fonds Agache, SCD Lille 3.
communication & langages - n° 145 - Septembre 2005 48
s'agira ici d'étudier les caractéristiques de mise en page et de mise en livre qui
font de certains volumes manuscrits une tentative d'écriture typographique. En
particulier, on essayera de dégager les spécificités de mise en forme (visuelle et
graphique, mais aussi rédactionnelle) du discours biographique, très apprécié au
XVIIIe siècle et très répandu, comme l'attestent les nombreux dictionnaires
biographiques imprimés ayant servi de sources d'information et de modèles de
mise en page pour l'auteur de ce manuscrit. On verra à quel point le code visuel
des notices biographiques est une caractéristique à part entière du discours histo
rique véhiculé par ce type de livre, qu'il soit imprimé ou manuscrit2.
Trajectoires croisées, univers parallèles :
du manuscrit à l'imprimé, de l'imprimé vers le manuscrit
L'évolution du livre, de sa mise en page, de sa présentation matérielle, on le sait,
suivra lentement, progressivement, par tâtonnements, la révolution technologique
que représente l'arrivée de la presse à caractères mobiles au milieu du XVe siècle.
Cette « nouvelle technologie », dans un premier temps, reproduira souvent
d'anciennes formes ; les « manuscrits imprimés », ces belles chimères, sont des
livres de grand format dont les caractères sont calqués sur le modèle de l'écriture
gothique bâtarde de la fin du Moyen Âge et dont le texte, disposé sur deux
colonnes comme son prédécesseur manuscrit, sera soigneusement décoré à la
main afin d'y inscrire les traits (couleurs, lettrines, miniatures, encadrements)
mais aussi et surtout les valeurs (richesse, luxe, singularité) associées au livre
manuscrit enluminé auquel on reste, dans les milieux princiers et aisés, encore
longtemps attaché3.
Pourtant, se détachant progressivement du modèle prestigieux, mais aussi famil
ier, du livre manuscrit, l'imprimé en s'épurant se dote de repères visuels et graphi
ques qui resteront désormais associés à l'objet livre. Cette morphologie renouvelée
et uniformisée instaure de nouvelles modalités de communication avec des lecteurs
potentiels : le livre imprimé s'attache à expliciter et à commenter ses contenus.
Première grande nouveauté, la page de titre, inconnue à l'époque du livre manuscr
it, répond à des exigences de commercialisation, mais marque aussi l'appropria
tion symbolique du processus de production du livre par les libraires-imprimeurs
humanistes qui y apposent sous forme de gravure sur bois ou sur cuivre leur devise
personnelle souvent inspirée d'une iconographie à l'antique. Dans la tendance vers
une épuration de la page, le développement du caractère romain, de forme arrondie
et plus lisible, signale une rupture à la fois esthétique et idéologique avec l'écriture
gothique désormais rejetée, surtout par les humanistes français, comme trait
2. Je tiens à remercier Ghislain Dibie, ingénieur d'études au Pôle Universitaire Européen Nord-Pas-
de-Calais, pour son aide précieuse dans l'identification et l'analyse des sources utilisées pour ce
travail, qui proviennent toutes du fonds ancien des universités de Lille. Clichés PôLiB - SCD Lille 3.
3. Le terme « manuscrits imprimés » est employé par Dominique Coq, « Les incunables : textes
anciens, textes nouveaux », in Histoire de l'édition française, sous la dir. de Roger Chartier and Henri-
Jean Martin, 4 vols, Fayard, Paris, 1989-91, 1, 203-227, p. 219. Sur ces imprimés et leurs destinataires
princiers, voir les travaux de Mary Beth Winn sur l'imprimeur parisien Vérard : Anthoine Vérard
Parisian Publisher 1485-1512: Prologues, Poems, and Presentations, Droz, Geneva, 1997, et « Offerings
for the King : Antoine Vérard's Presentation Manuscripts and Printed Books », Manuscripts in the
Fifty Years after the Invention of Printing, The Warburg Institute, London, 1983, p. 66-74.
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