Enquête sur les Volontaires de 1792 - article ; n°1 ; vol.272, pg 151-170

Jean-Paul Bertaud

Description

Annales historiques de la Révolution française - Année 1988 - Volume 272 - Numéro 1 - Pages 151-170
Cet article présente la synthèse de toute une série d'enquêtes menées et dirigées par l'auteur (mémoires de maîtrises, thèses) pour prolonger l'ouvrage du Commandant Dumont sur l'effort de guerre, dont le propos s'arrête en 1791, en traitant l'immense dossier des Volontaires de 1792. Une masse d'enquêtes monographiques autorisent aujourd'hui une perception à l'échelle nationale des succès et des échecs de la levée, une description (sociologie, comportements, mentalités) des volontaires. Une particulière attention est portée au problème de l'encadrement religieux (les aumôniers militaires).
This article presents a synthesis of a whole series of investigations initiated and supervised by the author (Master's and doctoral theses). Using the vast file on the 1792 volunteers, the aim has been to follow up on Commandant Dumont's work on the war effort which goes no further than 1791. A large number of monographs make it now possible to understand the successes and failures of the levy on the national scale and to describe the sociology, behavior and mentalities of the volunteers. Special attention has also been paid to the question of the part played by military chaplains in religious education and supervision.
20 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

• Publié par: ANNALES_HISTORIQUES_DE_LA_REVOLUTION_FRANCAISE
• Publié le: 01 janvier 1988
• Nombre de lectures: 19
• Langue: Français
• Poids de l'ouvrage: 1 Mo

Extrait

Jean-Paul Bertaud
Enquête sur les Volontaires de 1792
In: Annales historiques de la Révolution française. N°272, 1988. pp. 151-170.
Résumé
Cet article présente la synthèse de toute une série d'enquêtes menées et dirigées par l'auteur (mémoires de maîtrises, thèses)
pour prolonger l'ouvrage du Commandant Dumont sur l'effort de guerre, dont le propos s'arrête en 1791, en traitant l'immense
dossier des Volontaires de 1792. Une masse d'enquêtes monographiques autorisent aujourd'hui une perception à l'échelle
nationale des succès et des échecs de la levée, une description (sociologie, comportements, mentalités) des volontaires. Une
particulière attention est portée au problème de l'encadrement religieux (les aumôniers militaires).
Abstract
This article presents a synthesis of a whole series of investigations initiated and supervised by the author (Master's and doctoral
theses). Using the vast file on the 1792 volunteers, the aim has been to follow up on Commandant Dumont's work on the war
effort which goes no further than 1791. A large number of monographs make it now possible to understand the successes and
failures of the levy on the national scale and to describe the sociology, behavior and mentalities of the volunteers. Special
attention has also been paid to the question of the part played by military chaplains in religious education and supervision.
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Bertaud Jean-Paul. Enquête sur les Volontaires de 1792. In: Annales historiques de la Révolution française. N°272, 1988. pp.
151-170.
doi : 10.3406/ahrf.1988.1205
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/ahrf_0003-4436_1988_num_272_1_1205ENQUÊTE SUR LES VOLONTAIRES DE 1792
Le livre du Commandant Dumont *, est un ouvrage de référence
pour tous ceux qui désirent s'informer de l'effort consenti par les
départements en 1791. L'auteur avait entrepris de poursuivre son
enquête, accumulant pour cela les fiches sur les volontaires de 1792.
La recherche resta incomplète et le travail de l'historien militaire
demeure, inexploité, aux Archives de la Guerre. Nous avons voulu le
reprendre et le compléter avec l'aide d'étudiants de maîtrise et par
fois d'érudits préparant une thèse. Nous servant de la série Xw
des Archives de la Guerre qui contiennent la copie d'archives locales,
menant des « campagnes » complémentaires auprès de certaines de
ces archives, utilisant les registres de contrôle des troupes, les dos
siers des officiers de la série Xb à Vincennes ou de la secrétairie
d'État aux Archives Nationales, nous nous sommes proposés d'établir
un tableau des cadres comportant le plus d'informations, notamment
sur l'état, le métier ou la profession, l'expérience militaire de ces
officiers, de constituer enfin un historique de chacun des bataillons.
Cet historique devait non seulement informer sur les campagnes de
ces bataillons mais aussi sur leur rôle dans la Révolution (participa
tion à la Terreur populaire de septembre 1792) et sur les perma
nences religieuses (existence et action des aumôniers).
L'enquête est en cours. A l'heure actuelle, elle porte sur une tren
taine de départements en dehors de celui bien connu de Paris et il
nous a semblé possible d'en tirer un premier bilan.
I. — Acceptation, réticences et refus
1. De la diversité des levées de 1792.
De mai 1792 à février 1793, la législative puis la Convention ont
demandé aux départements de fournir des hommes pour des tâches
* Bataillons de volontaires nationaux (cadres et historiques), 1791, Paris, 1914. 152 JEAN-PAUL BERTAUD
multiples et de les organiser en des unités diverses quant au nombre
et à l'encadrement. Des unités ont été aussi levées, en dehors des Fédé
rés et des compagnies ou corps francs, par des individus ou des
généraux (Légions). Il est souvent difficile de s'y retrouver tant ces
levées ressemblent à une noria sans cesse en mouvement.
Le 5 mai 1792, Lacuée présentait un rapport sur les volontaires
et, bien avant le décret fameux du 23 août 1793, il envisageait « une
levée en masse » pour une guerre révolutionnaire qui devait avoir
pour devise : « la liberté ou la mort ».
« Faire la guerre avec lenteur, disait-il, est le système de gouver
nement chez les puissances soucieuses du joug des rois. Mais le
peuple qui se bat pour ses droits et pour conserver sa liberté et son
indépendance a nécessairement un système de guerre bien différent.
Il se précipite tout entier sur ses ennemis, les voit dans les combats
au corps à corps, et bientôt il cesse d'être, ou il se place au rang que
ses vertus et son courage lui assignent ».
La création de 31 nouveaux bataillons de volontaires fut décidée.
20 d'entre eux seraient levés dans 10 départements qui n'avaient pas
encore été admis à fournir un contingent en 1791 : le Cantal, l'Avey-
ron, le Tarn, le Lot, le Lot-et-Garonne, l'Ardèche, la Lozère, le Gers,
la Dordogne et la Haute-Loire. Les 11 autres seraient répartis, par
la suite, « dans les départements de l'intérieur du royaume qui ont
offert d'en lever et qui, par leur population, pourront plus aisément
les fournir, sans nuire au commerce et à l'industrie. » La levée diffé
rait donc de celle de 1791, c'était une levée ordonnée par le pouvoir
alors que la précédente avait été précédée, dans quelques départe
ments, d'un mouvement spontané.
Sur cette levée, devaient être pris des hommes qui seraient
incorporés dans les bataillons de 1791 que l'on désirait porter de 570
à 800 hommes. Cette décision embarrasse le chercheur qui ne retrouve
pas ces recrues dans les archives locales, les cherche avec difficulté
toujours, déception parfois dans des registres de contrôles incomplets.
Ces bataillons de 1792 mirent du temps à être levés. A Agde, par
exemple, les archives locales indiquent qu'en juin la plupart des
citoyens ignorent la loi ou les dispositions et les motifs du législateur.
Quand on parvient à saisir la date de formation et celle de la revue,
il apparaît que ces bataillons n'ont été organisés qu'en juillet et
parfois seulement à la fin du mois d'août, alors même que la levée
des Fédérés puis celle qui suivit la proclamation de la Patrie en
danger avaient été ordonnées.
La loi du 11 juillet et les décrets d'application établirent une
levée de 84.500 hommes. 50.000 d'entre eux devaient renforcer l'armée
de Ligne. Le chiffre est considérable et l'incorporation de ces volon- LES VOLONTAIRES DE 1792 153
taires changea, bien avant l'amalgame, l'aspect de ces régiments
royaux. Le reste devait être rassemblé en 42 bataillons de 800 hommes
et plus. Là encore, il est ardu de trouver la trace des uns et des
autres. Les 50.000 volontaires versés dans l'armée de Ligne se confon
dent dans les registres des régiments avec les recrues faites, comme
par le passé, par les officiers et sous-officiers. Quant aux 42 nouveaux
bataillons, ils n'ont pas toujours rédigé de registres ou les ont
fabriqués longtemps après la levée, passant sous silence les disparus.
Une autre décision de la Législative vient compliquer le travail
du chercheur : celle du 25 juillet qui autorisa les généraux à réquisi
tionner la moitié des compagnies de gardes nationales dans les dépar
tements voisins des armées. Ces « volontaires » furent incorporés
dans les régiments ou bien constituèrent de nouvelles unités mais leur
service étant regardé comme occasionnel, tous ne furent pas enre
gistrés.
La levée de ces nouveaux bataillons dura longtemps, on en retrou
ve qui ne furent organisés qu'en janvier et même en février 1793.
Leur mise sur pied vint se confondre ici et là avec des levées ordon
nées par des autorités locales, devant la menace que faisait peser
sur leurs communautés l'avance des coalisés, en septembre 1792.
Pour compliquer le tout, il y eut aussi des volontaires ou des unités
entières qui firent un va-et-vient entre différentes formations : entre
l'armée de Ligne et la garde de la représentation nationale, par
exemple.
C'est dire que la carte que l'on parvient à dresser ne donne qu'une
image de ces levée