Khidlir est proche, Dieu est loin - article ; n°1 ; vol.15, pg 85-94
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Description

Archipel - Année 1978 - Volume 15 - Numéro 1 - Pages 85-94
10 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1978
Nombre de lectures 19
Langue Français

Extrait

Siti Chamamah Soeratno
Khidlir est proche, Dieu est loin
In: Archipel. Volume 15, 1978. pp. 85-94.
Citer ce document / Cite this document :
Chamamah Soeratno Siti. Khidlir est proche, Dieu est loin. In: Archipel. Volume 15, 1978. pp. 85-94.
doi : 10.3406/arch.1978.1382
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/arch_0044-8613_1978_num_15_1_138285
KHIDLIR EST PROCHE, DIEU EST LOIN
par Siti CHAMAMAH SOERATNO
traduit par M. BONNEFF
Khidlir, l'omniprésent
Khidlir est la terre, il est la mer, il est le ciel, il est bien autre
chose encore. Le personnage multiple et complexe dont nous allons
parler est une figure populaire des contes et des légendes de tout
l'Orient. Al-Khidlir (qu'on appelle quelquefois Khadhir), "le Vert",
est le nom ou le titre d'un saint musulman encore vivant dans l'ima
gination des peuples de l'Islam.
Les versions orientales du Roman d'Alexandre et le Coran l'ont
popularisé. Les Arabes connaissent surtout le récit du voyage de
Moïse et de sa rencontre avec Khidlir, tel qu'il est rapporté dans la
sourate XVIII : un jour, Moïse partit avec son serviteur pour le
Confluent des Deux Mers (majma' al bahrain). Parvenus à destination,,
tous deux s'aperçurent que le poisson qu'ils avaient emporté avait
repris miraculeusement le chemin de la mer ; c'était le signe que
Moïse attendait. Ils revinrent sur leurs pas et rencontrèrent un "ser
viteur de Dieu", de qui Moïse voulut apprendre ce qu'il savait en
matière de rectitude. Le serviteur de Dieu lui dit qu'il ne devrait
pas s'étonner de ses actes, ni même le questionner : c'est à cette seule
condition que l'inconnu acceptait de le guider. Ils se mirent en route et,
chemin faisant, le serviteur de Dieu accomplit une série d'actes en
apparence incohérents, qui firent perdre patience à Moïse; celui-ci ne
put s'empêcher de demander des explications. Le serviteur de Dieu
lui répondit : "Ne t'ai-je point prédit que tu manquerais de patience",
et il donna congé à son compagnon, sans lui avoir expliqué toutefois 86
la fin dernière de ses actes.
Les personnage en scène dans le récit coranique sont :
1- le valet de Moïse qui rappelle le personnage d' Andréas, le cuisinier
d'Alexandre, dans le récit du pseudo-Callisthène.
2- Moïse en qui, après quelques hésitations, les exégètes musulmans
reconnaissent le prophète hébreu ; son rôle évoque à la fois celui de
Gilgamesh et celui d'Alexandre dans le Roman de ce nom, ainsi que
celui de Josua bin Levi dans la légende rabbinique.
3- Un personnage anonyme désigné comme "un serviteur parmi nos
serviteurs" ('abdan min'ibadina) et en qui les commentateurs ont recon
nu le célèbre Khidlir si vivant dans le folklore populaire (*).
Dans les versions orientales du Roman d'Alexandre, Khidlir devient
le conseiller d'Iskandar Zulkarnain, Alexandre "le bicornu". C'est
lui qui avertit Iskandar de ses erreurs, grâce à sa science de l'invisible
et son pouvoir de divination. Comme le prophète Sulaiman, il parle
toutes les langues. Il lui incombe d'accompagner dans ses voyages I
skandar à qui il offre sa tutelle morale et prodigue ses connaissances
des régions visitées. Bien qu'Iskandar soit le héros de ces aventures,
son rôle est couvent éclipsé par celui de Khidlir. C'est ce dernier qui
a l'initiative, lui qui prend les décisions, lui enfin qui découvre la source
d'immortalité et en bénéficie.
Le personnage de Khidlir se trouve dans de nombreuses oeuvres
d'origine arabe. Il y est évoqué en conformité avec ce que dit de lui
le Coran. Le hadiih de al-Bukhari fait de lui un prophète, un rasul
ou bien un saint (2). Le nom du héros vient du mot arabe qui veut
dire "le vert". Le dictionnaire islamique de Ahmad 'Aliyatullah
l'appelle "Balya bin Malkan" et le considère comme un descendant
d'Israël (3). At-Tabari remonte dans sa généalogie et lui donne le
nom de "Balya bin Malkan bin Falagh bin Abir bin Shalikh bin Arrakh-
syad bin Sam bin Nuh". Son père est un grand roi ; il croit à Abraham
Khalilullah et suit sa foi. Dieu l'a envoyé comme prophète, après lui
avoir enseigné des centaines de "sciences abstraites" (4). Certains
affirment que Khidlir a vécu à l'époque d'Abraham et qu'il est parti de
Babylone avec celui-ci. Puisqu'il a bu à la Source d'Immortalité, il est
encore présent parmi nous (5).
(x) R. Blachère, Islam d'hier et d'aujourd'hui, Maisonneuve, Paris 1949, p 340.
(2> As Sahih al Bukhari, vol. IV, Le Caire, 1314 H. p. 91.
(3) Ahmad 'Aliyatullah, al Kamus al Islamî, vol. II, Le Caire, 1386 H. (1966),
p. 248.
(4) al Farid al Wajdî, at Tafsir al Coran, p. 390.
(5) Abu Ja'far Muhammad bin Jabir at Tabarî, Tarikh at Tabarî, vol. I, 1960, p. 376, 87
Les sufi l'ont vu et disent qu'on peut encore le rencontrer dans
certains lieux sacrés, comme à la Mecque et à Jérusalem (c).
Plutôt qu'à l'époque d'Abraham, des auteurs le situent à l'époque
d'Afridun ; d'autres disent qu'il aurait vécu jusqu'à l'époque de Moïse.
On voit également en lui un contemporain d'Alexandre, à moins qu'on
ne le fasse naître à l'époque de Nashiya bin Amur (7).
Selon les musulmans, il y avait deux mers: l'une la "mer des
sciences abstraites" concrètes" attribuée attribuée à Khidlir. à Moïse C'est en et se l'autre plongeant la "mer dans des la sciences Source
de Vie que Khidlir aurait acquis sa couleur verte ; mais il est aussi
"le Vert" parce que, partout où il mettait le pied ou s'asseyait, la terre
verdissait (8).
Bien qu'il ait trouvé l'immortalité, dans la tradition musulmane
authentique, Khidlir n'en connaît pas moins la défaite ; il est même
tué par le Dajjal (l'Antéchrist) , lequel est tué à son tour par Jésus ;
mais Khidlir ressuscite ensuite. Selon d'autres versions, Jésus ne fait
qu'aider le Màhdi à triompher du Dajjal (9).
Pour les Arabes, Khidlir relève de l'ordre végétal. D'après al
Diyar Bakri, le manteau sur lequel il était assis n'était autre que la
terre, lorsqu'elle germe et devient verte après la sécheresse (10).
Ath Tha'labi dit qu'il prit résidence dans une île où il se mit au
service de Dieu (n). Aussi est-il souvent invoqué par les marins dans
la tempête. Le Khidlir "maritime" est attesté clairement par l'existence
de sanctuaires musulmans placés sous son vocable, nombreux tout au
long de la côte syrienne. Les matelots arabes viennent y faire spécial
ement leurs dévotions. De même que les marins syriens, les marins
arabes de Beyrouth en appellent à sa protection à l'approche des
tempêtes et crient son nom : "ya Khidlir". Aussi Khidlir est le gardien
des mers : il recueille les noyés, lave leurs corps et prononce sur eux
les prières obligatoires (12),
(6) Th. P. Hughes, A Dictionary of Islam (being an encyclopaedia of doctrines, rites,
ceremonies and customs together with the technical and theological terms of
the Mohammedan religion) W.H. Allen & Co, London, 1885, p. 272.
(7) Ibn Hajar, Isaba, p. 886, cité par M. Th. Houtsma et A.J. Wensinck Encyclopédie
de l'Islam, vol. II, 1927, p. 912.
(8) At Tafsir al Badawî, Le Caire, 1344 H. (1925) 2 éd. p. 293.
(9) Friedlânder, Die Chadhir légende und der Alexander roman, Leipzig, 191 3,p. 145.
(!0) Al Diyar Bakri, Tarikh al Khamis, vol. I, p. 106.
(") Ath Tha'labî, al Kisas al Anbiya, p. 197.
(12) Ch. Clermont-Ganneau, "Horus et Saint Georges, d'après un bas-relief inédit
du Louvre", Revue Archéologique, Didier, Paris, 1877, Vol. 32-34, p. 33-34. 88
En Perse, on souligne l'immortalité de Khidlir. On prétend qu'il
fut, à une époque reculée, le vizir du roi Kaykobad, c'est-à-dire Alex
andre (13).
Khidlir apparut pour la première fois dans la version syrienne
du Roman d'Alexandre qui servit de modèle à la arabe. En
raison de sa découverte de la Source de Vie, il ne mourra qu'à l'heure
où sonneront les trompettes du jugement dernier.
Dans la mythologie turque, Khidlir passe également pour être
immortel. A partir de son nom, on a forgé le mot hyzyrlyk qui
signifie "secourable" ou

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