L'Organisation des États américains - article ; n°2 ; vol.21, pg 339-361

Jean-Paul Hubert

Description

Revue française de science politique - Année 1971 - Volume 21 - Numéro 2 - Pages 339-361
L'organisation des états Américains, par Jean-Paul Hubert La plus ancienne des organisations à compétence régionale, l'O.E.A., a été structurée entre 1945 et 1948, au moment même où s'organisaient les Nations Unies. Le traité de Rio, sans contrevenir aux dispositions de la Charte de 1'O.N.U., assure au continent américain un système de sécurité collective. Mis à l'épreuve, ce système s'est révélé efficace aussi longtemps qu'il s'est agi de régler des conflits proprement interaméricains ; mais dans les cas où les intérêts opposés des grandes puissances se trouvaient mis en jeu, comme une conséquence de la guerre froide, il n'a pas dispensé de recourir aux Nations Unies, elles- mêmes paralysées par l'existence du droit de veto. Du moins le système interaméricain peut-il servir de modérateur de la prépondérance détenue par les Etats-Unis. [Revue française de science politique XXI (2), avril 1971, pp. 339-361]
The organisation of the American states, by Jean-Paul Hubert The oldest organisation having a regional competence, the Organisation of the American States, came into being between 1945 and 1948 at the very time when the United Nations was becoming organized. The Rio treaty, without going against the United Nations charter gave the American continent a system of collective security. Put to the test, this system worked as long as it was a question of settling inter-American conflicts; but when, as a result of the cold war the conflicting interests of the great powers were involved, it was still necessary to have recourse to U.N.O. - which was in any case paralysed by the right to veto. The inter-American system does however moderate the preponderance of the United States. [Revue française de science politique XXI (2), avril 1971, pp. 339-361]
23 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

• Publié par: REVUE_FRANCAISE_DE_SCIENCE_POLITIQUE0
• Publié le: 01 janvier 1971
• Nombre de lectures: 18
• Langue: Français
• Poids de l'ouvrage: 1 Mo

Extrait

Monsieur Jean-Paul Hubert
L'Organisation des États américains
In: Revue française de science politique, 21e année, n°2, 1971. pp. 339-361.
Résumé
L'organisation des états Américains, par Jean-Paul Hubert
La plus ancienne des organisations à compétence régionale, l'O.E.A., a été structurée entre 1945 et 1948, au moment même où
s'organisaient les Nations Unies. Le traité de Rio, sans contrevenir aux dispositions de la Charte de 1'O.N.U., assure au
continent américain un système de sécurité collective. Mis à l'épreuve, ce système s'est révélé efficace aussi longtemps qu'il
s'est agi de régler des conflits proprement interaméricains ; mais dans les cas où les intérêts opposés des grandes puissances
se trouvaient mis en jeu, comme une conséquence de la "guerre froide", il n'a pas dispensé de recourir aux Nations Unies, elles-
mêmes paralysées par l'existence du droit de veto. Du moins le système interaméricain peut-il servir de modérateur de la
prépondérance détenue par les Etats-Unis.
[Revue française de science politique XXI (2), avril 1971, pp. 339-361]
Abstract
The organisation of the American states, by Jean-Paul Hubert
The oldest organisation having a regional competence, the Organisation of the American States, came into being between 1945
and 1948 at the very time when the United Nations was becoming organized. The Rio treaty, without going against the United
Nations charter gave the American continent a system of collective security. Put to the test, this system worked as long as it was
a question of settling inter-American conflicts; but when, as a result of the cold war the conflicting interests of the great powers
were involved, it was still necessary to have recourse to U.N.O. - which was in any case paralysed by the right to veto. The inter-
American system does however moderate the preponderance of the United States.
Citer ce document / Cite this document :
Hubert Jean-Paul. L'Organisation des États américains. In: Revue française de science politique, 21e année, n°2, 1971. pp.
339-361.
doi : 10.3406/rfsp.1971.418053
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/rfsp_0035-2950_1971_num_21_2_418053LE ROLE DES ORGANISATIONS RÉGIONALES
DANS LES CONFLITS ENTRE LEURS MEMBRES
L'ORGANISATION DES ÉTATS AMÉRICAINS
JEAN-PAUL HUBERT
Les années qui ont immédiatement suivi la fin de la seconde guerre
mondiale ont vu prévaloir, après l'échec de la S.D.N., un concept
nouveau, celui de l'indivisibilité de la paix, dont on fait la base
sur laquelle on s'efforce de bâtir une nouvelle organisation mondiale.
Dans le même temps, on assiste au renforcement du régionalisme,
qui tend à se donner des formes institutionnelles plus solides. Pendant
que les Nations Unies se donnent une Charte, plusieurs organisations ré
gionales se créent ou se renouvellent. Dans le cas des Etats américains,
c'est entre 1945 et 1948 qu'un système régional se structure. La Confé
rence interaméricaine sur les problèmes de la guerre et de la paix, tenue
à Mexico en 1945, constitue la première réponse concertée des Latino-
Américains aux propositions universalistes faites à Dumbarton Oaks en
vue d'une nouvelle organisation internationale. En 1948, la neuvième
Conférence internationale des Etats américains se réunit à Bogota, et
c'est alors qu'est signée la Charte de l'Organisation des Etats américains.
Dès lors est nécessairement posé le problème des rapports entre les deux
organisations en matière de maintien de la paix et de solution pacifique
des conflits.
Dans le cas de l'Amérique latine, cette situation a des antécédents
déjà anciens. On situe généralement la naissance du système inte
raméricain à la première Conférence internationale des Etats américains,
qui se tint à Washington à partir de 1889. Mais elle-même faisait suite
à une série de conférences hispano-américaines, sinon vraiment inte
raméricaines, qui s'étaient tenues depuis le fameux Congrès de Panama
de 1826 1. Il est vrai que ces réunions n'avaient permis aux nations
1. Après le Congrès de Panama, ce furent le premier Congrès de Lima (1847-
1848), le Congrès continental de Santiago du Chili (1856), et le deuxième Congrès
de Lima (1864-1865).
339 .
Les conflits internationaux
latino-américaines ni de s'unir contre les menaces externes à leur indé
pendance, ni de créer des mécanismes pour assurer la solution pacifique
de leurs conflits internes. C'est seulement après 1880 que les Etats-Unis,
devenus une grande puissance économique et résolus à s'assurer une
place prépondérante dans le commerce avec les Etats latino-américains,
entreprirent de construire des mécanismes devant assurer la paix à
l'échelle du continent, condition nécessaire au développement des activi
tés commerciales.
Dès 1881, l'invitation à tenir une conférence en vue de rétablir la
paix et de prévenir des guerres futures dans les Amériques 2 était lancée
par l'administration du président Garfield. La Conférence ne put avoir
lieu qu'en 1889, et n'aboutit pas à la signature d'un traité assurant le
règlement pacifique des conflits interaméricains. Le « plan d'arbitrage »
qui y fut approuvé n'obtint pas ensuite suffisamment de ratifications
pour entrer en vigueur. Il en fut de même pour la Convention
obligatoire signée par neuf des participants à la deuxième Conférence
internationale des Etats américains, à Mexico, en octobre 1901. La
troisième et la quatrième Conférences interaméricaines furent également
impuissantes sur ce plan. Lorsqu'éclata le premier conflit mondial, l'Or
ganisation panaméricaine n'avait encore fait aucun progrès vers la mise
en place d'un mécanisme effectif pour la solution pacifique des conflits
entre ses membres.
Même entre les deux guerres mondiales, les progrès accomplis dans
ce sens sont lents. Il est vrai que le « Traité pour éviter ou prévenir
les conflits entre les Etats américains», plus connu sous le nom de
« Traité Gondra », signé à Santiago du Chili pendant la cinquième
Conférence internationale des Etats américains en mai 1923, est parfois
considéré comme la première pierre de l'édifice actuel 3. Il s'y ajoute
une « Convention générale de conciliation interaméricaine », signée par
tous les Etats américains à Washington en 1928, et encore un « Protocole
additionnel » (Montevideo, 1933). Mais de toute évidence ces instr
uments ne suffisent pas, et leurs signataires sont impuissants à mettre
fin à la guerre du Chaco. Aussi le président Roosevelt provoque-t-il en
décembre 1956 la réunion d'une Conférence interaméricaine pour le
maintien de la paix. Cinq nouveaux traités ou conventions y sont encore
signés, parmi lesquels une « Convention pour coordonner, étendre et
garantir l'application des traités existants entre les Etats américains » :
2. Voir Lockey (Joseph Byrne), Essays in Pan-Americanism, Berkeley, Uni
versity of California Press, 1939, pp. 52-53.
3. Connell-Smith (Gordon), The Inter-American System, London, Oxford Univers
ity Press, 1966, pp. 60-61, le désigne comme «a first, though limited, step towards
setting-up effective inter- American peace machinery ».
340 des Etats américains Organisation
mais cette multiplication des textes ne suffit pas à assurer leur ratifica
tion ni à les rendre efficaces. Une seule fois ils jouèrent positivement,
pour permettre d'apaiser un conflit entre Haïti et la République Domin
icaine en 1937-1938. Ce bilan n'est guère impressionnant.
Du moins est-ce dans cette période que se pose pour la première fois
le problème des relations entre l'Organisation mondiale et le système
interaméricain en tant qu'entité régionale distincte4. Le Pacte de la
S.D.N. précise, dans son article 21, que « les engagements internationaux
tels les traités d'arbitrage, les ententes régionales, comme la doctrine
Monroe, qui assurent le maintien de la paix », ne sont incompatibles avec
aucune de ses propres dispositions. Cet article est généralement interprété
comme un engagement pris par les membres de la S.D.N., pour complaire
aux Etats-Unis,