La Célébration du corps féminin dans les Amours de Ronsard : variations sur un répertoire connu - article ; n°1 ; vol.45, pg 7-23
18 pages
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Description

Bulletin de l'Association d'étude sur l'humanisme, la réforme et la renaissance - Année 1997 - Volume 45 - Numéro 1 - Pages 7-23
17 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1997
Nombre de lectures 29
Langue Français

Extrait

Professeur Henri Weber
La Célébration du corps féminin dans les Amours de Ronsard :
variations sur un répertoire connu
In: Bulletin de l'Association d'étude sur l'humanisme, la réforme et la renaissance. N°45, 1997. pp. 7-23.
Citer ce document / Cite this document :
Weber Henri. La Célébration du corps féminin dans les Amours de Ronsard : variations sur un répertoire connu. In: Bulletin de
l'Association d'étude sur l'humanisme, la réforme et la renaissance. N°45, 1997. pp. 7-23.
doi : 10.3406/rhren.1997.2163
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/rhren_0181-6799_1997_num_45_1_2163Célébration du corps féminin dans Les Amours de La
Ronsard :
variations sur un répertoire connu
L'évocation des différentes parties du corps de la femme aimée n'est
pas une simple description, elle est une célébration de sa beauté,
inséparable des effets qu'elle produit sur le poète amoureux, désir,
plaisir, souffrance du désir inassouvi. Elle entraîne l'hyperbole, la
sublimation à laquelle se prête la théorie platonicienne de l'amour ou,
au contraire, l'ivresse sensuelle. Le lyrisme est cet excès même.
Le corps humain, ou plus généralement le buste, est décomposé en
ses éléments : cheveux, front, yeux, joues, bouche, cou, seins. Ce
corps éclaté n'est pas toujours celui d'une statue ou d'une peinture ;
souvent il s'anime d'un sourire, d'un regard, d'un chant, qu'accom
pagne parfois une démarche souple et dansante. Pour chaque élément,
la tradition, qui remonte à l'antiquité latine ou grecque, a été codifiée
en un répertoire d'images par Pétrarque et les pétrarquistes mais cette
fixation permet un certain choix dans la combinaison des images et
dans leur traitement : concentration ou développement en larges com
paraisons. Elle associe ou oppose des images empruntées à des
domaines différents du monde matériel : végétal, minéral, cosmique
(ciel et astres), si bien que, parfois, le corps féminin devient un abrégé
de l'univers, un véritable microcosme. A cela s'ajoutent encore les évo
cations mythologiques, l'archer Amour qui décoche ses flèches depuis
les yeux ou les seins de la femme aimée, Vénus et son cortège de
Grâces qui donnent à la femme un pouvoir égal à celui des dieux. Non
seulement les sonnets ronsardiens empruntent leurs éléments à ce
répertoire mais, souvent, ils imitent la plus grande partie d'un sonnet
de Pétrarque, des vers de l'Arioste ou de l'Anthologie italienne de
Giolito. Toutefois, l'imitation d'un sonnet italien est rarement totale :
le plus souvent, Ronsard greffe sur un sonnet, deux ou trois vers d'un
autre sonnet, ou simplement du répertoire général. C'est ce qu'on ap
pelle l'imitation composite que symbolise l'image de l'abeille allant de
fleur en fleur. De plus, les exigences de la rime et du rythme ne per
mettent jamais une traduction littérale, elles invitent à l'invention. 8 HENRI WEBER
Ces variations ne résident pas seulement dans le traitement de
l'association des images mais aussi dans le choix des vocables, adjectifs,
substantifs ou formes verbales. Au lieu de l'or des cheveux, on aura
« les tresses orines » (XXXVII) ou « les blondz filetz orins » (CCIV) ; au
lieu du sein d'albâtre », « le col albastrin1 ». A l'imitation de Catulle,
Ronsard et ses amis multiplient les diminutifs parce que, à l'origine, ils
sont supposés exprimer la tendresse amoureuse :
Et ces couraulx chastement vermeilletz
Et de ce sein les boutons verdeletz
Et de ces yeulx les astres jumeletz (VI) ^.
Les diminutifs conviennent particulièrement à l'expression
sensuelle :
Et mitirant sa langue fretillarde
Me baisotoyt d'une lèvre mignarde.
L'image fréquente du crêpe pour le plissement des cheveux peut
prendre la forme adjectivale :
D'un riche or crespe ombrageant ses talons (XLII)
ou encore de verbe qui met la chevelure en mouvement :
Soit que son or se crespe lentement (XC).
Ronsard et la Pléiade en général, dans les indications de couleur,
préfèrent, au simple adjectif, un participe présent qui marque une
intensification « blondoyant », « jaunissant », « verdissant ». Ce jeu
aboutit à de véritables créations verbales :
De ses cheveulx la rousoyante Aurore.
Rousoyante signifie : trempée de rosée ou, plus exactement, qui se
pare de rosée. Citons encore cette curieuse association de deux
couleurs : « ô diamants, o Hz pourprez de roses » (LX).
La variation ne s'exprime pas seulement dans le vocabulaire mais
aussi dans un certain nombre de procédés rhétoriques, déjà utilisés
par les pétrarquistes. L'anaphore, par exemple, permet de lier et de
redonner une unité émotionnelle au corps fragmenté par la succession
des images. Ce peut être la reprise du démonstratif :
1. Cf. également : gorge ivoyrine (CXCVII), Mains ivoyrines (XXXVI).
2. Cf. Dans le serain de sa jumelle flamme (III). LA CÉLÉBRATION DU CORPS FÉMININ 9
Ce beau coral, ce marbre qui souspire
Et cest ébénne...
Et cest albastre
Et ces zaphirs... (XXIII).
La reprise du démonstratif se répète pendant les deux quatrains
avec des redoublements. L'anaphore du « ni » permet d'opposer toutes
les beautés du corps à l'esprit dans le dernier tercet :
Ni de son chef le trésor crépelu
Ni de sa joue une et l'autre fossette,
Ni l'embonpoint... (XLEX).
Dans cette reprise, Ronsard ménage encore quelques variations :
« ni » répété au début de chaque vers dans le premier quatrain, ne
l'est plus que tous les deux vers dans le second, ce qui permet la
substitution de la relative au simple complément déterminatif, de là
un ralentissement du rythme qui s'accélérera à nouveau dans le tercet
3. La répétition initiale peut être celle d'un souhait hyperbolique :
Je veux mourir pour tes beautés, Maistresse (XL VII)
qui sera répété au début de chaque quatrain et de chaque tercet, avec
un effet inattendu au dernier tercet :
Je veux mourir es amoureux combas,
Souflant l'amour, qu'au coeur je porte enclose
Toute une nuit, au milieu de tes bras.
La célébration des beautés apparaît bien comme suscitant la
violence du désir charnel.
L'anaphore n'est qu'une forme particulière de la répétition. Au lieu
de se situer au début d'un vers, celle-ci peut se trouver à l'intérieur,
soit dans un même hémistiche, soit d'un hémistiche à l'autre ; elle
traduit alors l'accroissement de l'émotion, crée une sorte d'ivresse qui
naît du jeu phonique. Ronsard en joue souvent avec l'adjectif « mille »
qui est en lui-même un facteur d'intensité :
Si mille œillets, si mille liz j'embrasse (XXIX)
Combien de fois doulcement irrité,
Suis-je ore mort, ore resuscité,
Parmy l'odeur de mille et mille roses ? (CXXVII)
La reprise accentue la sensualité de l'image :
3. Pour d'autres anaphores avec « ni », cf. LXI, LXXVIII et CXXI. HENRI WEBER 10
Bouche sur bouche et le flanc sus le flanc (CLXXXVI).
Ronsard sait cultiver la variation dans la répétition, de là, assez
souvent, la reprise d'un mot par un mot de même racine :
Entre mes bras je rembrasse et retaste
Son ondoyant en cent formes trompeur : (CLXXXV).
Ou encore :
Je me contente en mon contentement (XC).
Le goût de Ronsard évoluant, il supprimera ce redoublement en
1567:
Mon cœur se plaist en son contentement.
Ce qui, à mon avis, affaiblit la poésie.
La reprise par un mot de même racine peut compléter l'anaphore à
la fin du sonnet :
Belle est sa main
Belle est sa bouche...
... Ainsi ma foy surpasse
Le plus parfaict de toutes ses beaultez (CLXXXIII).
Si les procédés rhétoriques permettent à la fois une unification et
une variation dans la structure du sonnet, l'essentiel de la création
poétique demeure le traitement de l'image, la plupart du temps dans
les quatrains.
On peut distinguer les sonnets consacrés à. un seul élément, che
veux, poitrine, yeux, et les qui regroupent en une enumerat
ion lyrique les charmes du corps féminin. Clément Marot, dans l'épi-
gramme du Beau Tétin, en 1535, ava

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