La Révolution du droit naturel dans les Révolutions de Paris (juillet 1789-septembre 1790) - article ; n°1 ; vol.285, pg 353-375

Christophe Palierse

Description

Annales historiques de la Révolution française - Année 1991 - Volume 285 - Numéro 1 - Pages 353-375
Christophe Paoerse : La Révolution du droit naturel dans les «Révolutions de Paris», juillet 1789-septembre 1790.
Cet article analyse les traits de l'idéologie reflétée dans le journal des « Révolutions de Paris » durant la séquence qui correspond à l'activité d'Elysée Loustallot. H en fait apparaître l'unité autour du thème du droit naturel, référence constante, tant dans l'analyse du phénomène révolutionnaire que dans renonciation d'un projet de société. La Révolution s'affirme comme revendication de la liberté naturelle de l'homme, sur les ruines du despotisme, rapport illégal de domination religieuse, politique et patriarcale entraînant une corruption généralisée. Elle doit amener le règne de la philosophie en s'imprégnant du principe de liberté naturelle de l'homme. Pour réaliser cette régénération, elle doit s'appuyer sur l'intérêt commun garant du règne de la loi. Ce qui suppose un régime politique soucieux de démocratie communale, de justice sociale, attentif aux empiétements de l'armée et de l'appareil judiciaire, faisant prévaloir la souveraineté du législatif sur l'exécutif, apte enfin à rétablir les mœurs en élevant l'esprit public.
Christophe Paljerse : The Revolution of Natural Law in the « Révolutions de Paris», July 1789-September 1790.
This article studies the characteristics of the ideology reflected in the newspaper Révolutions de Paris during the period that coincided with Elysée Loustallot's work on the paper. The author demonstrates the unity around the theme of natural law which was a constant reference both in the analysis of the revolutionary phenomenon and in the statement of a plan for future society. The Revolution was the result of the demands of man's natural freedom over the ruins of despotism ; the illegal state of religious, political and patriarchal domination led to generalized corruption. Impregnated with the principle of man's natural freedom, the Revolution was to bring about the reign of philosophy. In order to fulfill this project of regeneration, it was to rely on the common interest, the very foundation of the reign of the law. This meant that the political regime had to be concerned with communal democracy, with social justice and should be wary of any encroachments by the army or the judiciary ; in the same way it was to insure that the souvereignty of the legislative prevailed over the executive so that by raising civic spirit it could re-establish high morals.
23 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

• Publié par: ANNALES_HISTORIQUES_DE_LA_REVOLUTION_FRANCAISE
• Publié le: 01 janvier 1991
• Nombre de lectures: 26
• Langue: Français
• Poids de l'ouvrage: 1 Mo

Extrait

Christophe Palierse
La Révolution du droit naturel dans les Révolutions de Paris
(juillet 1789-septembre 1790)
In: Annales historiques de la Révolution française. N°285, 1991. pp. 353-375.
Citer ce document / Cite this document :
Palierse Christophe. La Révolution du droit naturel dans les Révolutions de Paris (juillet 1789-septembre 1790). In: Annales
historiques de la Révolution française. N°285, 1991. pp. 353-375.
doi : 10.3406/ahrf.1991.1443
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/ahrf_0003-4436_1991_num_285_1_1443Résumé
Christophe Paoerse : La Révolution du droit naturel dans les «Révolutions de Paris», juillet 1789-
septembre 1790.
Cet article analyse les traits de l'idéologie reflétée dans le journal des « Révolutions de Paris » durant la
séquence qui correspond à l'activité d'Elysée Loustallot. H en fait apparaître l'unité autour du thème du
droit naturel, référence constante, tant dans l'analyse du phénomène révolutionnaire que dans
renonciation d'un projet de société. La Révolution s'affirme comme revendication de la liberté naturelle
de l'homme, sur les ruines du despotisme, rapport illégal de domination religieuse, politique et
patriarcale entraînant une corruption généralisée. Elle doit amener le règne de la philosophie en
s'imprégnant du principe de liberté naturelle de l'homme. Pour réaliser cette régénération, elle doit
s'appuyer sur l'intérêt commun garant du règne de la loi. Ce qui suppose un régime politique soucieux
de démocratie communale, de justice sociale, attentif aux empiétements de l'armée et de l'appareil
judiciaire, faisant prévaloir la souveraineté du législatif sur l'exécutif, apte enfin à rétablir les mœurs en
élevant l'esprit public.
Abstract
Christophe Paljerse : The Revolution of Natural Law in the « Révolutions de Paris», July 1789-
September 1790.
This article studies the characteristics of the ideology reflected in the newspaper Révolutions de Paris
during the period that coincided with Elysée Loustallot's work on the paper. The author demonstrates
the unity around the theme of natural law which was a constant reference both in the analysis of the
revolutionary phenomenon and in the statement of a plan for future society. The Revolution was the
result of the demands of man's natural freedom over the ruins of despotism ; the illegal state of
religious, political and patriarchal domination led to generalized corruption. Impregnated with the
principle of man's natural freedom, the Revolution was to bring about the reign of philosophy. In order to
fulfill this project of regeneration, it was to rely on the common interest, the very foundation of the reign
of the law. This meant that the political regime had to be concerned with communal democracy, with
social justice and should be wary of any encroachments by the army or the judiciary ; in the same way it
was to insure that the souvereignty of the legislative prevailed over the executive so that by raising civic
spirit it could re-establish high morals.LA RÉVOLUTION DU DROIT NATUREL DANS
LES RÉVOLUTION DE PARIS
JUILLET 1789 - SEPTEMBRE 1790
Les recherches actuelles sur le droit naturel apportent un éclairage
bienvenu sur l'idéologie révolutionnaire. Dans le cadre de cette réflexion, il
nous semble pertinent de reconsidérer la presse révolutionnaire. C'est pour
quoi, nous nous sommes attachés à l'analyse du discours politique des
Révolutions de Paris, entre le 12 juillet 1789, premier jour couvert par le
journal, et le 4 septembre 1790, date marquant la fin de la collaboration
d'Elysée Loustallot à la rédaction du périodique.
Ce champ d'étude, composé des soixante premiers numéros de l'he
bdomadaire, n'est pas arbitrairement circonscrit. Cette délimitation repose
sur la prise en compte d'une problématique axée sur le droit naturel, au
cœur de l'idéologie des Révolutions de Paris. En outre, celle-ci s'évanouit à
la suite du renouvellement de leur rédaction, avec la venue momentanée de
Fabre d'Églantine — jusqu'en janvier 1791 — mais surtout, avec la pré
sence de Sylvain Maréchal de l'automne 1790 à janvier 1793. La participa
tion de Chaumette, qui ne commence qu'en 1791 et s'achève avec le
10 août 1792, ne concerne que très partiellement la rédaction du journal.
D'autre part, l'analyse des papiers de Chaumette nous incite à penser
que sa collaboration intellectuelle, quelle qu'en soit l'étendue, ne peut que
confirmer une tonalité idéologique marquée par l'empreinte de Sylvain
Maréchal (1). En effet, la lecture des Révolutions de Paris nous révèle la
formulation des fondements d'une société patriarcale, porteuse d'un égali-
tarisme agraire, comme caractéristique fondamentale du discours politique
de l'hebdomadaire entre 1791 et 1793. Le périodique affiche les spécificités
de la pensée de « l'homme sans dieu » si magistralement étudiée par Fran-
(1) Papiers de Chaumette, publiés avec une introduction et des notes par F. Braesch, Société de
l'histoire de la Révolution française, 1908, 212 p. 354 CHRISTOPHE PAUERSE
çoise Aubert (2). Incontestablement, la rupture est nette avec ce que l'on
peut considérer comme la première période idéologique du journal.
L'élaboration d'un discours politique véhiculant le droit naturel, entre
juillet 1789 et septembre 1790, s'explique dans une large mesure par l'acti
vité hégémonique d'Elysée Loustallot. Néanmoins, sa maîtrise des ques
tions politiques n'est véritablement certaine qu'à la fin du mois de sep
tembre 1789, d'où une interrogation sur cette continuité intellectuelle
visible lors de la structuration du périodique, au cours de l'été et de l'a
utomne 1789. En fait, la plume d'Antoine Tournon n'est probablement pas
étrangère à la présence de la philosophie du droit naturel dans les tout
premiers numéros des Révolutions de Paris.
Masquée par la dynamique journalistique, cette problématique axée
sur le droit naturel s'apparente à une sorte de puzzle idéologique déstruct
uré. Ses pièces se trouvent dispersées au gré des articles. Une fois sa
reconstitution effectuée, nous découvrons une pensée extrêmement organi
sée et complexe et non pas un agrégat de principes. En témoigne l'intégra
tion d'une problématique des mœurs à ce discours sur le droit naturel.
D'un point de vue global, Les Révolutions de Paris offrent aux lec
teurs une conception particulièrement fine de la révolution et, dès les pre
miers mois de la secousse révolutionnaire. En outre, le journal met simult
anément en exergue un véritable projet de société faisant écho à cette
détermination de la Révolution. Ce implique une vision de l'avenir et
un processus révolutionnaire. Vecteurs du discours politique d'un grand
périodique de la presse révolutionnaire, ces deux entités idéologiques
méritent l'attention des historiens. Dans ce but, nous nous proposons d'en
tracer les grandes lignes.
La définition de la Révolution telle qu'elle nous apparaît dans Les
Révolutions de Paris, repose sur un soubassement intellectuel fondamenta
l, une philosophie de l'histoire. La Révolution est inscrite dans l'histoire
des hommes. Elle est le renversement inéluctable, l'épilogue d'un phéno
mène historique jusqu'alors perpétuel, le développement du despotisme.
L'expression la plus compacte de cette philosophie de l'histoire se
situe en annexe des Révolutions de Paris, dans un texte publié en Janvier
1790, L'introduction à la révolution, servant de préliminaire aux Révolut
ions de Paris, dédiées à la Nation et au disctrict des Petits-Augustins (3).
Ce texte appelé aussi « clef de la révolution de 1789 », en page intérieure, est
annoncé dès septembre 1789, dans le n° 10 du journal (p. 48). Il répond, en
premier lieu, à une demande des lecteurs désireux de connaître les causes
(2) Aubert Françoise, Sylvain Maréchal. Passion et faillite d'un égalitaire. Goliardica-Pise-
Nizet-Paris, 1975, 186 p.
(3) Introduction à la révolution servant de préliminaires aux Révolutions de Paris dédiées à la
nation et au district d