Le régime parlementaire d Allemagne occidentale après six ans d application - article ; n°3 ; vol.5, pg 572-593
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Description

Revue française de science politique - Année 1955 - Volume 5 - Numéro 3 - Pages 572-593
22 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1955
Nombre de lectures 19
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

Monsieur Jacques Morizet
Le régime parlementaire d'Allemagne occidentale après six ans
d'application
In: Revue française de science politique, 5e année, n°3, 1955. pp. 572-593.
Citer ce document / Cite this document :
Morizet Jacques. Le régime parlementaire d'Allemagne occidentale après six ans d'application. In: Revue française de science
politique, 5e année, n°3, 1955. pp. 572-593.
doi : 10.3406/rfsp.1955.402624
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/rfsp_0035-2950_1955_num_5_3_402624Régime Parlementaire Le
d'Allemagne Occidentale
après six Ans d'Application
JACQUES MORIZET
LE régime parlementaire allemand n'est pas de ceux qui
passionnent les foules. Les problèmes constitutionnels, outre-
Rhin, restent affaire de spécialistes et laissent l'opinion
publique assez indifférente. La procédure parlementaire est trop
compliquée, trop longue pour susciter de l'intérêt. De nombreux
Allemands, comme l'a montré un récent sondage de l'Institut de
Démoscopie, ignorent jusqu'aux données les plus élémentaires de
la vie publique. « Qui fait les lois ? » « Qu'est-ce que le Bun-
desrat ? » « Quelle est la contribution des commissions parlement
aires ? »... paraît à l'homme de la rue une question déplacée et
d'ailleurs tout à fait superfétatoire.
L'indifférence, à l'étranger et en France en particulier, est tout
aussi grande. Le qualificatif de parlementaire, appliqué à la conduite
des affaires publiques de l'ancien Reich, fait sourire ou du moins
éveille le scepticisme. Pour la masse, la politique allemande, repla
cée dans son cadre historique, s'identifie à un seul homme.
Autrefois, on parlait du Reich bismarckien et wilhelminien, du
Reich hitlérien, et si l'on mentionnait le parlementarisme de Wei-
mar, ce n'était que pour souligner sa sclérose et pour montrer qu'il
avait mené à l'ingérence des factions dans l'Etat et à la paralysie
des institutions. Aujourd'hui, nombreux sont ceux qui dénoncent
le gouvernement personnel du Dr Adenauer, minimisant ainsi l'i
nfluence du Bundestag et du Bundesrat, réduisant le président Heuss
au rôle falot de maître des cérémonies, ignorant volontairement la
fonction arbitrale de la Cour de Karlsruhe.
L'erreur est légitime et ne peut être imputable au seul chauvi
nisme. Il est de fait que les Allemands n'ont guère fait de publicité
autour de leurs institutions et n'ont jamais cherché à les rendre
plus familières à eux-mêmes comme à l'étranger. Si les articles
juridiques sont assez nombreux, les ouvrages généraux sur l'his
toire constitutionnelle allemande, sur le rôle des partis dans l'Etat,
sur la vie parlementaire sont rares, ou s'ils existent, sont démodés.
572 Le Régime Parlementaire d'Allemagne Occidentale
Au cours de ces dernières années, un effort, sans doute, a été
tenté. Encore n'est-il pas purement allemand puisque la première
œuvre de vulgarisation parue depuis la fin de la guerre est due
à deux Anglais 1.
Du côté français, le problème n'a été abordé que par les jour
naux, et encore la plupart du temps d'une manière si systématique
que les faits finissent par être déformés, que le lecteur — pour
peu qu'il ait l'esprit critique — demeure insatisfait.
L'Allemand de l'Ouest croit-il en ses institutions ? Que vaut le
Parlement de Bonn ? Est-ce un Parlement fantôme, imposé par
l'occupant ? Est-ce au contraire un organisme qui a contribué à la
formation d'un état d'esprit démocratique ? Que valent les parle
mentaires allemands ? Faut-il leur reconnaître une part importante
dans le redressement allemand des années 1950-1955 ? Quelles sont
les chances de survie du régime actuel ? Ce sont pourtant là des
questions qui revêtiront une importance particulière au cours de
l'année actuelle : le 24 mai 1955, la Loi fondamentale pour la Répub
lique fédérale d'Allemagne est entrée dans sa septième année
d'application. L'événement a une tout autre signification que celle
d'un simple anniversaire. Il coïncide avec l'entrée en vigueur des
accords de Paris, avec l'admission d'une Allemagne occidentale
pratiquement indépendante et souveraine dans le bloc atlantique.
Le régime d'occupation a vécu — et avec lui la tâche, assumée
par les alliés, de redonner à la vie politique allemande une allure
démocratique, d'exterminer les éléments nazis, de rééduquer le
peuple allemand « corrompu par dix années de dictature ».
L'Allemagne — officiellement proclamée « définitivement guér
ie » de son penchant pour les idéologies totalitaires — est rede
venue libre de son destin, et la Démocratie, article d'importation,
ramenée dans les bagages de l'occupation, est abandonnée au bon
vouloir des Allemands. Qu'en feront-ils ? Assistera-t-on à un gli
ssement progressif vers la droite, au retour massif des extrémistes ?
Le régime issu de la Loi fondamentale, déjà fortement teinté de
personnalisme, ouvrira-t-il la porte à la dictature militaire ? Ou
bien, au contraire, les mesures destinées à renforcer la contribution
des parties à la formation de la volonté populaire auront-elles porté
leurs fruits en laissant derrière elles une vie parlementaire large
ment développée ?
1. Sir Stephen King-Hall, Richard K. Ullmann, German Parliaments.
A Study of the Development of Representative Institutions in Germany, London,
The Hansard Society, 1954 ; in-12, iv-162 p.
573 Jacques Morizet
Les lignes qui suivent n'ont nullement la prétention de répondre
à tous ces points d'interrogation. Elles ne visent plus modestement
qu'à être une série de libres propos sur le régime parlementaire
allemand, qu'à dresser un bilan hâtif d'une expérience qui méri-
terait une enquête systématique, approfondie, impartiale et plus, en
tout cas, que le coup de pied de l'âne auquel se complaisent ordi'
nairement des journalistes trop intransigeants.
Que la Loi fondamentale ait fortement contribué à la consoli
dation de la République fédérale sur le plan intérieur et extérieur,
une simple comparaison entre 1949 et 1955 suffit pour le prouver.
L'Allemagne de 1 949 vivait encore sous le régime de l'occu
pation intégrale. Depuis quatre ans, l'autorité suprême était exercée
par les commandants en chef. Le pays, par le jeu et le cloisonne
ment des zones d'occupation, se trouvait morcelé, la vie politique
réduite au cadre régional. Les députés aux Assemblées des Laender
n'étaient que des politiciens mineurs et ne pouvaient passer pour
des parlementaires. La situation économique restait sérieuse, le
chômage considérable. Le paupérisme sévissait dans de nombreuses
villes. La Loi fondamentale venait de donner un cadre à l'Etat :
une diète fédérale, élue au suffrage direct pour quatre ans, un cons
eil fédéral, composé des représentants des Etats et chargé d'assu
rer la coopération des Laender pour l'ensemble de la République
fédérale, dans les domaines législatifs et administratifs. La direction
du gouvernement était confiée à un chancelier, élu pour cinq ans
par les Assemblées réunies en congrès fédéral. L'arbitrage, en cas
de conflit entre le Bund et les Etats, devait être assuré par une
Haute Cour constitutionnelle. Si le cadre était posé, il n'en était
pas moins vide. Les organismes créés, en raison même de leur
nouveauté, ne représentaient rien aux yeux de l'opinion publique,
les députés, pour la plupart, étaient inconnus. Le nouveau statut,
d'ailleurs, était essentiellement provisoire. Sa seule ambition, à l'ori
gine, était de « donner à la vie étatique allemande une organi-
satioi nouvelle pour une période de transition ». La scission de
l'ancien Reich n'apparaissait pas encore irrémédiable et il restait
entendu que la Loi fondamentale ferait place, dès que les circons
tances le permettraient, à une Constitution sur laquelle le peuple
allemand serait appelé à se prononcer en pleine liberté.
En 1955,

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