Les colons et l agriculture à Tahiti dans la seconde moitié du XIXème siècle - article ; n°74 ; vol.38, pg 213-224
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Les colons et l'agriculture à Tahiti dans la seconde moitié du XIXème siècle - article ; n°74 ; vol.38, pg 213-224

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Description

Journal de la Société des océanistes - Année 1982 - Volume 38 - Numéro 74 - Pages 213-224
12 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1982
Nombre de lectures 32
Langue Français

Extrait

Pierre-Yves Toullelan
Les colons et l'agriculture à Tahiti dans la seconde moitié du
XIXème siècle
In: Journal de la Société des océanistes. N°74-75, Tome 38, 1982. pp. 213-224.
Citer ce document / Cite this document :
Toullelan Pierre-Yves. Les colons et l'agriculture à Tahiti dans la seconde moitié du XIXème siècle. In: Journal de la Société des
océanistes. N°74-75, Tome 38, 1982. pp. 213-224.
doi : 10.3406/jso.1982.2516
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/jso_0300-953X_1982_num_38_74_2516colons et l'agriculture à Tahiti Les
dans la seconde moitié du XIXème siècle
par
Pierre-Yves TOULLELAN
"Le gouvernement français, en s'emparant des Marquises et en acceptant le Protec
torat de Tahiti, eut un double but : il espéra créer là un centre de production qui donn
erait. à sa marine marchande un aliment, et assurer en même temps dans ces parages
lointains un appui à sa force navale. "0) Cependant, durant de longues années, "on a
fondé toutes les espérances de l'avenir dans la fréquentation (du port de Papeete) par
les navires qui se livrent à la pêche à la baleine. Mais ce gage de prospérité s'évanouit
de jour en jour. Il faut (donc) bien reconnaître que le commerce de Tahiti ainsi limité
(...) se trouve dès lors directement subordonné à sa production. "(2)
Mais que peut produire Tahiti ? Vincendon-Dumoulin estime en 1845 que "les pro
duits du sol forment la richesse fondamentale du pays". (3) C'est pourquoi, d'entrée de
jeu, la France manifeste, par ses gouverneurs, sa volonté de transformer Tahiti en une
colonie agricole.
Rien n'est plus facile, semble-t-il. Tous ceux qui viennent à Tahiti dans cette seconde
moitié du XIXe ne manquent pas de souligner l'extrême fertilité de l'île. Ainsi Levacon
voit "d'immenses terres qui peuvent compter parmi les plus richement fertiles de
monde entier". (4) Gamier, pourtant peu favorable à la colonisation de Tahiti, écrit :
"Et comment ne pourrait-on obtenir de beaux résultats en travaillant sur cette terre,
lorsque, sans recevoir de soins, elle fournit déjà, spontanément, aux indigènes la plus
grande partie de leur nourriture ?"(5) Du côté officiel, on note le même état d'esprit :
(1) "Rapport du gouverneur Page, note sur la valeur des Etablissements français de l'Oceanie", 1855, Archi
ves de la Marine.
(2) "Rapport sur la situation de l'Etablissement et les moyens a prendre pour développer la colonisation par
Mr. l'Ordonnateur", 7 octobre 1861, Archives Oceanic.
(3) "Tahiti ", Vincendon-Dumoulin, Desgraz, 1844, p.XXDC
(4) "Chez les Maoris", 1912, p. 48, Levacon.
(5) "Oceanic". Gamier, 1871, p. 333.
213 SOCIÉTÉ DES OCÉANISTES
"Si une main intelligente et expérimentée venait à tirer parti de ce sol si fertile...,
Tahiti deviendrait une des colonies les plus riches du monde. (6)
Seule manque cette "main intelligente", car il est entendu partout qu'il ne faut pas
compter sur les Tahitiens. Dans les meilleurs des cas, on les juge "paresseux et indo
lents", sinon "dégénérés et en voie de disparition rapide". En fait, ce que souhaitent
vivement les gouverneurs de Tahiti, c'est l'établissement d'une main-d'œuvre blanche.
Cet article se propose de montrer les diverses tentatives d'établissement de colons
agricoles en cette seconde moitié du XIXe siècle.
Jusqu'en 1846, il n'existe pratiquement pas de colons à Tahiti. Nous pouvons appli
quer aux quelques Européens qui s'y trouvent la définition qu'en donne Hué, parlant
des Marquises en 1844 : "On trouve... une race désignée sous le nom de "colons", elle
a été fournie par des déserteurs de navires baleiniers, qui se sont alliés aux femmes
canaques. Ces gens abonnés à l'ivrognerie et à tous les vices y ont ajouté les plus mauv
aises habitudes canaques et constituent pour les îles un véritable fléau. Paresseux, ils
ne travaillent que pour subvenir à leurs besoins... et ils abusent de la générosité des
indigènes et vivent à peu près à leurs dépens". (7)
En résumé, il s'agit de quelques aventuriers sans scrupules, déserteurs de baleiniers
ou évadés des bagnes autraliens, venus se réfugier dans ces îles et ayant adopté le mode
de vie des indigènes. Les plus courageux s'essaient à tous les métiers : charpentiers,
débitants de bois, marchands-colporteurs...
Se sont-ils intéressés à l'agriculture ? Oui, d'une certaine façon. Il s'est développé,
dès le début du XIXe, tout un commerce d'exportation. Quelques chefs indigènes
surent tirer profit du passage des navires en organisant un commerce du porc et de
produits vivriers. Des marchands des Nouvelles Galles du Sud, puis de Valparaiso élar
girent encore ce négoce. De 1805 à 1826, la vente du porc salé fut le secteur le plus
important du commerce tahitien(8) Puis les oranges et l'huile de coco firent l'objet
d'un échange important. On exporta ainsi quelques produits traditionnels. On passa
alors d'une économie de cueillette vivrière à une économie de cueillette marchande,
de traite. L'agriculture tahitienne subit donc, dès cette époque, une première transfor
mation.
Mais qu'en fut-il de la mise en valeurs des terres si riches ? On peut affirmer
qu'aucune tentative sérieuse ne fut entreprise, du moins avant 1846. Pourtant, comme
l'a souligné Barrau, tous les Européens explorateurs eurent des préoccupations agricol
es. W De multiples essais pour acclimater des végétaux nouveaux furent effectués. Ce
furent d'abord des tentatives scientifiques. Puis les missionnaires anglais prirent le
relais : pour améliorer le sort des indigènes, ils voulurent les initier aux techniques
européennes. Les motifs sont parfois moins nobles : pour subvenir à ses dépenses, la
Mission de Londres se fit payer par ses fidèles en huile de coprah. A partir de 1815,
quelques grands chefs et un très petit nombre d'Européens furent ainsi d'importants
producteurs de coprah.
En 1818, la L.M.S. envoya un nommé Gyles qui, fort d'une expérience aux Antilles,
se proposait de monter une plantation de cannes à sucre. Pour de nombreuses raisons,
sa tentative échoua et il dut repartir deux ans plus tard. A nouveau les missionnaires
tentèrent une nouvelle expérience, à Huahine, concernant cette fois le coton. Puis ils
(6) "Eut de l'île Tâîti pendant les années 1847, 1848", Ribourt, p. 20.
(7) "Les îles Marquises", Hué, dans "Nos petite colonies", 1884, p. 326.
(8) "The Tahitian pork trade 1800-1830", Maude, J.S.O., 1959.
(9) "L'agriculture tahitienne au contact des Européens", Barrau, J.S.O., 1959
214 COLONS ET L'AGRICULTURE A TAHITI LES
montèrent à Moorea, toute une installation pour la fabrication du calicot. Autant de
nouveaux échecs. Les missionnaires catholiques firent eux aussi quelques tentatives
comme celle du père Laval à Mangareva, toujours à partir du coton. Ils ne furent pas
plus heureux.
En définitive, rien n'est fait avant 1846. Vincendon-Dumoulin peut écrire : "La cul
ture des terres a-t-elle fait quelques progrès ? Non, en fait d'industrie, la seule chose
qu'aient apprise ces nouveaux chrétiens, c'est à tailler des pierres, à construire des
églises monumentales". 0°)
IL LES COLONS MILITAIRES (1845-1853)
1845 marque la première tentative sérieuse d'établissement de colons agriculteurs.
Cette année-là, le gouverneur Bruat, par l'arrêté numéro 68 du 22 octobre "fixe les
conditions d'admission et de séjour des colons militaires dans les îles de la Société".
Considérant qu'il importe "de faciliter l'état, dans les îles de la Société, d'une popul
ation laborieuse qui exploite le sol", Bruat autorise des militaires libérés de leur ser
vice à se fixer dans le Protectorat et leur offre quelques facilités : des terrains doman
iaux leur seront concédés gratuitement pendant trois ans, au terme desquels ils pour
ront devenir propriétaires, le lot leur étant vendu au prix acheté par l'administration.
Une aide matérielle est prévue : 2 pioches, 2 pelles et une hache, 5 mois de vivres, de
plus les frais d'hôpitaux seront gratuits (sauf po

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