Madame la comtesse de Maure et mademoiselle de Vandy (deuxième article). - article ; n°1 ; vol.15, pg 313-340
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Description

Bibliothèque de l'école des chartes - Année 1854 - Volume 15 - Numéro 1 - Pages 313-340
28 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1854
Nombre de lectures 18
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

Victor Cousin
Madame la comtesse de Maure et mademoiselle de Vandy
(deuxième article).
In: Bibliothèque de l'école des chartes. 1854, tome 15. pp. 313-340.
Citer ce document / Cite this document :
Cousin Victor. Madame la comtesse de Maure et mademoiselle de Vandy (deuxième article). In: Bibliothèque de l'école des
chartes. 1854, tome 15. pp. 313-340.
doi : 10.3406/bec.1854.461844
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/bec_0373-6237_1854_num_15_1_461844o Ti-
MMF
LA COMTESSE DE MAURE
ET
MLE
DE VANDY.
( Deuxième article '. )
Nous avons laissé le comte et la comtesse de Maure, après la
Fronde, à la fin de 1653 , assez mal d'abord avec la cour, puis
peu à peu se réconciliant sans être jamais en faveur, faisant tout
leur emploi de cultiver leur esprit et de passer agréablement
leur vie. Tls demeuraient , ainsi que nous l'avons dit, à la place
Royale, qui était alors le quartier à la mode, où Corneille
avait placé la scène d'une de ses comédies 2, qui avait été le
témoin de tant de duels célèbres, de celui qui sous Richelieu
avait fait décapiter Montmorency-Bouteville, et de celui encore,
cjui , en 1644 , coûta la vie au comte de Coligny, dans la
querelle de madame de Montbazon et de madame de Longueville.
La place Royale n'a pas un hôtel qui n'ait été le séjour de per
sonnes de la première distinction, et auquel ne soient attachés
de charmants ou de glorieux souvenirs 3. Dans un de ces hôtels,
on ne sait lequel, madame de Maure tenait un de ces salons qui
avaient succédé à l'hôtel de Rambouillet, fermé ou éclipsé en
1648. Elle y recevait la meilleure compagnie , et avec des gens
1 . Voyez plus haut, p. 109.
2. La Place Royale, en 1637-
3. Voyez la Jeunesse de madame de Longueville, note de la page 262 sur
l' Histoire de la place Royale.
V. (Troisième série.) 22 3 1 4
de la plus haute naissance des académiciens eldes beaux esprits,
lels que Chapelain, Conrart, Pélisson , mademoiselle de Scu-
déry. N'ayant pas d'enfants, elle avait pris depuis longtemps
avec elle sa nièce, mademoiselle d'Atry, dont la destinée a élé
fort obscure , et une autre de ses parentes, d'assez grande qual
ité, mais sans fortune, de Vandy, de la maison
d'Aspremont, sœur de M. de Vandy, qui avait épousé une nièce
du maréchal deMarillac4. Mademoiselle de Vandy était assez
jolie ou du moins fort agréable ; elle avait de l'esprit et de l'in
struction ; elle savait , comme madame de Maure, les deux la
ngues alors en vogue, l'italien et l'espagnol. Elle s'était nourrie
dans sa jeunesse de la lecture des romans du temps, et s'était fait,
comme la marquise de Sablé , un idéal de galanterie à l'espagnole
dont elle n'avait jamais consenti à descendre. Trop pauvre pour
prétendre à de grands partis, trop fière pour s'abaisser à des par
tis médiocres et au-dessous de sa naissance, elle ne s'était pas
mariée et vivait avec la comtesse de Maure comme sa fille ou
plutôt comme sa sœur. Elle avait un certain nom comme fille
d'esprit , et comme étant ou voulant être étrangère à toute in
trigue galante; c'est-à-dire qu'elle était précieuse et prude, deux
choses que Molière n'avait pas encore décriées. On trouve dans
le fonds de Clérambault à la Bibliothèque nationale, Mélanges,
n° 261, p. 405, une pièce de vers intitulée : Portraits de la cour
en contre-vérité, pour l'année 1659, où nous lisons ces deux
vers :
La Suze J est justement prude comme Vandy:
Pour lui parler d'amour, il faudrait être hardy.
Un Recueil de chansons historiques notées de la bibliothèque de
l'Arsenal donne, au n° GCXVII, le couplet suivant :
Brusque Vandy, vous estes un peu fière,
De vous fascher pour un madrigalet
Qui n'a rien dit de votre corselet,
De votre esprit , vos beautés, vos lumières,
Et qui n'a pas passé votre jartière.
Le Recueil de Maurepas, t. II, p. 295, contient une complainte
1. Voy. Tallemant, article Vandy, tom. V, pag. 103 — Mademoiselle parle souvent
de ce Vandy à propos de sa sœur, particulièrement tom. Ill, pag. 193.
2. Henriette de Colign', moite en 1673. Sur sa vie et ses aventures, voyez Tall
emant, t. Ш. 315
burlesque assez longue sur les rigueurs des dames que madem
oiselle de Vandy prétendait mettre à la mode. Nous en donne
rons les passages les moins insipides.
Ne vous plus voir si ce n'est en peinture,
Pie vous parler sinon en escriture,
Gente Vandy, scaurai bien me garder,
Puisqu'à votre huys il se faut poignarder,
Et par amour vous immoler sa vie.
Doresnavant auprès des Longueviiles,
Près des Vigeans, Beuvrons et Boutevilles,
On ne verra que poignards et couteaux
Trancher gallans par pièces et morceaux.
Près des Rohans, Rocheposais, d'Espesses,
On n'entendra que meurtres et détresses.
Aslres Lorains et soleils de Nevers
S'empourpreront d'homicides divers.
Près Rambouillet, Saint-Simon, Lesdiguières,
De fines dagues issiront des rivières;
Près des Lavais, des Sullis et des Pons,
Besoin sera de barques et pontons :
Et Saint-Megrin, la pucelle mutine
Qui se défend trop mieux que Graveline,
( Car conquérants Graveline prise ont
Qui Saint-Megrin possible ne prendront )
Verra couler sang de si grand lignage
Que de Jupin moins noble est le parage (1).
Voici maintenant un portrait fort détaillé, physique et moral,
de mademoiselle de Vandy, écrit par Mademoiselle en 1658 (2) :
« Pour faire votre
portrait tout de votre haut, c'est ce qui tiendra le moins de temps et
de place, comme Dieu vous a faite des plus petites, toutefois fort bien
proportionnée, et cela s'appelle une jolie taille. Quoique vous souhaitiez
d'être grasse, je vous dirai en amie que la maigreur sied bien.
(1) On trouve ici rassemblés les noms de toutes les beautés de la cour de la Régente,
vers 1645, certainement avant 1647, qui est le temps où mademoiselle du Vigean
entra aux carmélites. — Voyez la Jeunesse de madame de Longueville, passim.
{•).) Voyez les Divers Portraits, 1659
22. 316
Vos cheveux sont blonds, et par conséquent vos yeux bleus et beaux :
la bouche grande, mais pas désagréable; enfin à tout prendre, vous
êtes bien faite, et vous avez aussi bonne mine que peut avoir une petite
personne. Pour de l'esprit, vous en avez naturellement, et cela ne me
surprend pas : vous êtes d'une race dont tout ce que je connais en a
infiniment , et j'ai ouï dire la même chose de tout ce que je n'ai pas
connu. Comme vous l'avez fort vif, et que ces sortes d'esprit demeur
ent rarement sans agir, j'ai su que les premières années de votre vie
que vous avez passées aux champs ont été employées à la lecture de
tout ce qu'il y a jamais eu de romans en notre langue, en italien, en
espagnol ; car il est bon que l'on sache que vous possédez ces deux
langues. Cette lecture, pour l'ordinaire, porte volontiers à aimer la
galanterie ; les jeunes personnes y sont assez souvent conduites par ce
chemin-là, et la province n'y nuit pas; mais cette galanterie n'est pas
d'un bon tour, non plus que les lumières que ces livres donnent,
si tout cela n'est corrigé par quelques années de Paris ou de la Cour,
ou de tous les deux ensemble; et quelquefois ne devient-on pas
plus habile par là; mais quand tout cela prend ce bon tour, que j'ai
dit être nécessaire, cette lecture n'est pas absolument inutile. Vous
avez été à la Cour en arrivant à Paris, et vous y êtes descendue chez
la personne du monde la p!us propre à faire les gens, pour les faire fort
aimables. Mais d'entreprendre le portrait de Me la comtesse de Maure
avec le vôtre, ce serait une grande hardiesse , et cela est au-dessus de
mes forces
Vous êtes fière au dernier point et quelquefois glorieuse; et j'ai dé
couvert que cette fierté et cette gloire vous sont naturelles, et que ce
sont des maladies de race; car comme votre maison est venue d'All
emagne, quand vous vous souvenez que vous y êtes princesse , vous
oubliez que les chimères des autres vous donnent sujet de raillerie, et
vous seriez toute prête à en donner aux autres. Votre vertu est irr
épréhensible, et cette haute prudence que vous professez intérieurement
et extérieurement (cette explication est bonne en ce temps, sans en
dire davantage, car en vous disant

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