Mégalithisme et façonnage des roches destinées à être plantées. Concepts, terminologie et chronologie - article ; n°2 ; vol.99, pg 331-356

François Delanfranchi

Description

Bulletin de la Société préhistorique française - Année 2002 - Volume 99 - Numéro 2 - Pages 331-356
Le matériau minéral utilisé par les sculpteurs de statues protohistoriques a rarement fait l'objet d'une étude approfondie. Lorsque le processus du façonnage de la roche est abordé, il ne l'est que de façon sommaire. Pourtant, l'approche des techniques des créateurs de statues préhistoriques venant en complément d'études chrono stratigraphiques, archéographiques, ethnoarchéologiques, peut contribuer au renouvellement de nos connaissances. Les nouvelles orientations de la recherche posent les problèmes de la dénomination actuelle des pierres dressées. L'attente d'un vocabulaire approprié fondé sur la technique pourrait traduire le résultat du travail réalisé sur la roche par le sculpteur, créateur de l'œuvre mégalithique. La présente communication se veut donc une réflexion sur une approche de la statuaire insulaire fondée sur une vision anthropologique systémique et conceptuelle de techniques, chaînes opératoires, mais également une contribution au nécessaire renouvellement de la dénomination des œuvres.
The mineral material used by the sculptors of late prehistoric statues has rarely been the subject of detailed study. When the sculpting process has been addressed, it has only been in a cursory manner. However, approaching the techniques used by creators of prehistoric statues, as a complement to chronostratigraphic, archaeographic and ethnoarchaeological studies, can contribute to improving our knowledge. The new research orientations highlight the incoherence of present designations of standing stones. An appropriate vocabulary based on techniques could perhaps translate the result of the work carried out on the stone by the sculptor, the creator of the megalithic work of art. This paper is thus intended as a reflection on a systematic approach to insular statuary based on a systematic and conceptual anthropological vision of techniques, chaînes opératoires, and also a contribution to the necessary renewal of the designations of these works of art.
26 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

• Publié par: BULLETIN_DE_LA_SOCIETE_PREHISTORIQUE_FRANCAISE
• Publié le: 01 janvier 2002
• Nombre de lectures: 16
• Langue: Français
• Poids de l'ouvrage: 4 Mo

Extrait

François de Lanfranchi
Mégalithisme et façonnage des roches destinées à être
plantées. Concepts, terminologie et chronologie
In: Bulletin de la Société préhistorique française. 2002, tome 99, N. 2. pp. 331-356.
Résumé
Le matériau minéral utilisé par les sculpteurs de statues protohistoriques a rarement fait l'objet d'une étude approfondie. Lorsque
le processus du façonnage de la roche est abordé, il ne l'est que de façon sommaire. Pourtant, l'approche des techniques des
créateurs de statues préhistoriques venant en complément d'études chrono stratigraphiques, archéographiques,
ethnoarchéologiques, peut contribuer au renouvellement de nos connaissances. Les nouvelles orientations de la recherche
posent les problèmes de la dénomination actuelle des pierres dressées. L'attente d'un vocabulaire approprié fondé sur la
technique pourrait traduire le résultat du travail réalisé sur la roche par le sculpteur, créateur de l'œuvre mégalithique. La
présente communication se veut donc une réflexion sur une approche de la statuaire insulaire fondée sur une vision
anthropologique systémique et conceptuelle de techniques, chaînes opératoires, mais également une contribution au nécessaire
renouvellement de la dénomination des œuvres.
Abstract
The mineral material used by the sculptors of late prehistoric statues has rarely been the subject of detailed study. When the
sculpting process has been addressed, it has only been in a cursory manner. However, approaching the techniques used by
creators of prehistoric statues, as a complement to chronostratigraphic, archaeographic and ethnoarchaeological studies, can
contribute to improving our knowledge. The new research orientations highlight the incoherence of present designations of
standing stones. An appropriate vocabulary based on techniques could perhaps translate the result of the work carried out on the
stone by the sculptor, the creator of the megalithic work of art. This paper is thus intended as a reflection on a systematic
approach to insular statuary based on a systematic and conceptual anthropological vision of techniques, chaînes opératoires,
and also a contribution to the necessary renewal of the designations of these works of art.
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de Lanfranchi François. Mégalithisme et façonnage des roches destinées à être plantées. Concepts, terminologie et
chronologie. In: Bulletin de la Société préhistorique française. 2002, tome 99, N. 2. pp. 331-356.
doi : 10.3406/bspf.2002.12661
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/bspf_0249-7638_2002_num_99_2_12661Mégalithisme et façonnage
des roches destinées
à être plantées.
Concepts, terminologie
François de LANFRANCHI et chronologie
façonnage Résumé Le a rarement matériau de fait minéral la l'objet roche utilisé est d'une abordé, par étude les il sculpteurs approfondie. ne l'est que de Lorsque statues façon protohistoriques sommaire. le processus Pourtdu
ant, l'approche des techniques des créateurs de statues préhistoriques
venant en complément d'études chrono strati graphique s, archéographiques,
ethnoarchéologiques, peut contribuer au renouvellement de nos connais
sances. Les nouvelles orientations de la recherche posent les problèmes de
la dénomination actuelle des pierres dressées. L'attente d'un vocabulaire
approprié fondé sur la technique pourrait traduire le résultat du travail
réalisé sur la roche par le sculpteur, créateur de l'œuvre mégalithique. La
présente communication se veut donc une réflexion sur une approche de la
statuaire insulaire fondée sur une vision anthropologique systémique et
conceptuelle de techniques, chaînes opératoires, mais également une contri
bution au nécessaire renouvellement de la dénomination des œuvres.
Abstract
The mineral material used by the sculptors of late prehistoric statues has
rarely been the subject of detailed study. When the sculpting process has
been addressed, it has only been in a cursory manner. However, approa
ching the techniques used by creators of prehistoric statues, as a comple
ment to chronostratigraphic, archaeographic and ethnoarchaeological stu
dies, can contribute to improving our knowledge. The new research
orientations highlight the incoherence of present designations of standing
stones. An appropriate vocabulary based on techniques could perhaps trans
late the result of the work carried out on the stone by the sculptor, the
creator of the megalithic work of art. This paper is thus intended as a
reflection on a systematic approach to insular statuary based on a systemat
ic and conceptual anthropological vision of techniques, chaînes opératoir
es, and also a contribution to the necessary renewal of the designations of
these works of art.
statuaire de l'île. De 1955 à 1976. R. Grosjean (1966. INTRODUCTION
1967, 1968. 1971 et 1972) amorça l'étude la plus suivie
Après Prosper Mérimée en 1839 (Mérimée. 1840). de et la plus complète sur le sujet. Il inventoria plus de cent
très nombreux chercheurs se sont penchés sur la menhirs et quatre-vingts statues (Grosjean. 1971).
Bulletin de la Société Préhistorique Française 2002. tome 99. n° 2. p. 331-356 :
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Un " menhir " couché au sud du coffre mesure 2,30 m La présence de pierres dressées dans un contexte fu
stèle tronquée " fut de long. Une pierre en forme de " néraire fut démontrée lors des fouilles conduites sur
le site des Bancali de Portivechju et de Tivulaghju trouvée à l'est du coffre. Elle mesure 1,55 m de long.
Un "menhir" au nord mesure 2,85 m de long. Huit (Grosjean et Liégeois, 1964). Le fait trouva sa confi
fragments de "stèles " ou de "menhirs " sont dissrmation lors de travaux réalisés sur d'autres sites (H. de
Lanfranchi, 1986; Léandri, 2000). Ces études plus éminés aux alentours. La distinction entre ces deux
récentes permettent aujourd'hui de dater les produc noms n'est pas explicitée.
tions du Néolithique moyen. Les fouilles anciennes L'importance de la contribution des auteurs réside dans
(Grosjean et Liégeois, 1964, p. 527-548) révélèrent que la mise en adéquation des pierres façonnées à des
" de nombreuses pierres, taillées en forme de menhirs, structures funéraires néolithiques, autrement dit, d'une
sont éparses en surface, soit à l'intérieur, soit à côté sculpture à une architecture. Quant à la terminologie
des coffres " {id. 1964, p. 532). en usage, elle est à tout le moins subjective et très
Trois remarques s'imposent à la suite de ce texte. La variable.
première relative au constat que les pierres dressées
étaient des "pierres taillées ", autrement dit façon STATUES ET SCULPTURE nées. Nous donnons aux pierres façonnées le nom
statue (au sens des sculpteurs et du nôtre). La Approche épistémologique
seconde concerne l'emploi du mot "menhir". La
tournure " en forme de menhir ", invite à comprend Pour son développement, l'archéologie a emprunté à
re que sur le plan conceptuel, il est un substantif une autre science, l'anthropologie, ses concepts de
concret auquel on attribue un sens "morphologique". technique, de chaîne opératoire et de système technique
Enfin la situation de ces œuvres, soit à l'intérieur, soit de l'exploitation des ressources minérales. Il en résulte
à proximité immédiate de la tombe, confirme que ces des informations socio-économiques, cognitives et
pierres plantées s'inscrivent dans le cadre d'une culturelles (Cresswell, 1983;Balfet, 1991).
sculpture architecturale, liée à une construction en Les représentations schématiques du sous-système
pierre sèche. technique de l'exploitation des matières minérales en
vue de l'obtention de monolithes destinés à être dressés
Pour la clarté de notre propos, reprenons quelques ob sont en interactivité avec d'autres sous-systèmes, sym
servations faites en 1964 par R. Grosjean et J. Liégeois bolique et socio-économique, par exemple (selon un
sur le site de Vasculacciu (la mise en italique de cer modèle de J.-D. Vigne, 1998, p. 27), illustrent (fig. 1)
tains noms est de notre fait). cette démarche.
• Coffre A : la hauteur du "menhir " situé à l'intérieur L'archéologie systémique qui "considère les soci