Stratégies syndicales et types d organisation - article ; n°5 ; vol.16, pg 845-868
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Description

Revue française de science politique - Année 1966 - Volume 16 - Numéro 5 - Pages 845-868
24 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1966
Nombre de lectures 21
Langue Français
Poids de l'ouvrage 2 Mo

Extrait

Monsieur Gérard Adam
Stratégies syndicales et types d'organisation
In: Revue française de science politique, 16e année, n°5, 1966. pp. 845-868.
Citer ce document / Cite this document :
Adam Gérard. Stratégies syndicales et types d'organisation. In: Revue française de science politique, 16e année, n°5, 1966. pp.
845-868.
doi : 10.3406/rfsp.1966.392960
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/rfsp_0035-2950_1966_num_16_5_392960Stratégies Syndicales
et Types d'Organisation
GERARD ADAM
L'action syndicale peut s'apprécier en termes d'affrontements
avec le Pouvoir : pouvoir du patronat, mais surtout et en
définitive pouvoir de l'Etat.
Dans la ligne de la pensée proudhonienne, le syndicalisme
français a établi une distinction entre l'Etat et la société : défiance
à l'égard de l'Etat (auquel pourtant on recourt en permanence),
mais confiance en une société capable de s'équilibrer et de fonc
tionner de manière autonome. Telle était la conception socialiste,
antiétatiste de Proudhon : conception libérale si on ne définit pas
le libéralisme par l'individualisme économique, mais par un effort
pour rabaisser le rôle de l'Etat et par l'affirmation d'une opposit
ion entre lui et la société.
Ce dualisme se prolonge, pour les syndicats, par la vision de
deux conceptions de la démocratie et donc de deux types de
Pouvoir : une démocratie « par le haut », qui, dans la tradition
jacobine et républicaine de 1789, gravite dans l'orbite du pouvoir
d'Etat ; une « par le bas », où le Pouvoir naît de la
base avec des groupes au contact immédiat des citoyens, des tra
vailleurs qui prétendent qu'au fond c'est à eux qu'appartient le
Pouvoir. Ce « pouvoir social », qui ne fait qu'exprimer les forces
vives de la société, se dégage de l'organisation même de cette
société et ne s'applique qu'autant que ceux qui le subissent le
veulent bien.
L'utopie politique moderne des « forces vives », de la « France
souterraine », du « pays réel » s'apparente à cette même volonté
d'une démocratie vivante, car au contact immédiat des « product
eurs » au sens saint-simonien du terme. Gérard Adam
Cette dichotomie est au cœur de la problématique syndicale
française. Confusément le mouvement syndical français ne se
satisfaisant pas de la démocratie d'Etat a cherché à concevoir une
organisation politico-sociale fondée sur un nouveau type de Pouv
oir. Au fond toute l'ambition de la réflexion syndicale est d'avoir
cherché à sortir de la logique un peu formelle de la démocratie
d'Etat pour trouver une autre démocratie à la fois politique, éco
nomique et sociale 1.
Cette conception qu'un Maurice Hauriou estimait liée à la
notion même d'Etat a-t-elle encore un sens pour les syndicalistes
d'aujourd'hui ? En effet, que la société se révèle incapable d'un
ordre spontané, que le Pouvoir doive au contraire intervenir pour
en modifier la structure, on passe alors dans une tout autre pers
pective : celle d'une démocratie « sociale » (au sens faible du mot)
où c'est une tâche de la politique que de transformer la société,
ce qui interdit de séparer celle-ci de l'Etat et donne à ce dernier
un rôle majeur, éminemment positif. Cette interpénétration — au
moins partielle — constitue un défi pour le mouvement ouvrier qui
recourt en permanence à un Etat dont il ne cesse de se méfier.
Gardant la nostalgie de la vision proudhonienne, le syndica
lisme continue à s'en inspirer encore pour une part. Mais il ne
s'agit là que d'une sensibilité diffuse imprégnant les deux concept
ions du Pouvoir qui s'affrontent actuellement au sein du mouve
ment ouvrier :
— la conception marxiste, qui est pour un pouvoir d'Etat qu'on
voudrait bien «soviétique» mais qu'on accepte en définitive, bon
gré mal gré, comme un pouvoir « bolchevique ». Certes, dans le
contexte historique, bolchevisme et soviétisme sont difficilement dis
sociables. Mais le mouvement ouvrier français a surtout vu, dans
la Révolution russe, la république des soviets, c'est-à-dire ce qui
avait un relent de pouvoir social ; ce n'est que peu à peu qu'il
s'est rallié au centralisme démocratique inhérent à la conception
bolchevique du Pouvoir, qui repose, elle aussi, sur un pouvoir
d'Etat différent du précédent puisqu'il a cessé d'être bourgeois,
mais qui n'en subsiste pas moins ;
1. C'est pendant la Commune de Paris que cette tentative fut poussée le
plus loin : à côté des républicains simplement décentralisateurs ou des obsédés
de la Grande Révolution se développa un courant fixant comme but à la
Commune « l'abolition de l'Etat et de tout l'organisme politique dont il est
l'incarnation suprême » (déclaration d'Arnauld, un des membres de la Comm
une). .
Syndicales Stratégies
— la conception social-démocrate, qui est le ralliement à la
démocratie parlementaire, mais avec le souci de la voir s'enrichir
dune dimension économique et sociale. Ce qui revient à vouloir
enlever, à l'intérieur d'un pouvoir d'Etat, une part de leur toute-
puissance aux employeurs en suscitant une nouvelle dimension du
Pouvoir : le pouvoir syndical. Beaucoup plus qu'une contestation
globale des structures établies, il s'agit de provoquer la recon
naissance de l'existence collective de la classe ouvrière en face du
pouvoir patronal, aux divers niveaux où il se manifeste. Le syndi
calisme chrétien, sans avoir pris position en ce domaine, s'est
toujours situé dans ce cadre d'un pouvoir d'Etat de type démoc
ratique, rendu aussi « social » que possible.
STRATEGIES ET TYPES D'ACTION SYNDICALE
La contestation semble, par essence, la fonction permanente
des organisations syndicales, celle sans laquelle toute participation
qu' - — même limitée — aux processus décisionnels n'est « intégra
tion ». Indépendamment d'une référence idéologique ou d'une pers
pective d'amélioration des conditions de vie, la contestation assure
une fonction sociale. Dans une société politique dominée par des
systèmes d'organisation bureaucratique où les pouvoirs sont médiat
isés, elle canalise les mécontentements diffus et les tensions, tout
autant qu'elle exprime les besoins « objectifs » des travailleurs :
les grèves de « chats sauvages », expression des sursauts de la
révolté ouvrière, montrent bien le rôle de nécessaire soupape de
sûreté des mouvements protestataires même — et surtout — là
où les fondements de l'ordre économique sont les moins contestés
et là où le niveau de vie progresse à un rythme rapide. Leur objet
est, en effet, moins une revendication précise qu'une contestation
inconsciente, spontanée et anarchique contre les contraintes impo
sées par l'entreprise comme par « l'organisation » syndicale 2.
2. En Allemagne, où le taux de syndicalisation est élevé, la « grève
sauvage » est un phénomène relativement fréquent. Par exemple, les grèves
de 1955 dans les chantiers navals de Hambourg et au port de Brème, et
surtout en 1956 la grève de quatre mois dans la métallurgie du Schleswig-
Holstein furent lancées spontanément avec des objectifs mineurs : augmentations
minimes de salaires ou, dans le cas du Schleswig-Holstein, suppression du
délai de trois jours francs avant la prise en charge par l'organisme de
sécurité sociale en cas de maladie. Bien vite les mouvements se révélèrent être
dirigés contre « la bureaucratie syndicale ». Gérard Adam
En France, où de tels soulèvements sont rares, on est tenté
d'en déduire une absence d'intégration du syndicalisme à la société
industrielle. Soit en raison de sa tradition d'indépendance et de
« contre-société », soit parce que la France n'est pas encore une
véritable société industrielle, le syndicalisme français n'a pas accepté
le conformisme social que développe la société de consommation
des pays occidentaux. Sans do

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