Du projet de zonage aux mesures T. Conceptions divergentes de gestion territoriale des loups dans l arc alpin - article ; n°4 ; vol.94, pg 111-118
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Revue de géographie alpine - Année 2006 - Volume 94 - Numéro 4 - Pages 111-118
Concomitamment à l'arrivée de loups italiens en France, un projet de zonage est lancé. Nous examinerons la logique inhérente à ce projet, les enjeux qui le sous-tendent et les positions des différents acteurs concernés. A quelle conception de l'occupation territoriale ce projet de zonage (dans ses différentes versions) répond- il ? Ces différentes versions du projet relèvent d'une vision écocentrée, fondée sur des notions écologiques (seuil de viabilité, capacité d'accueil) incluant la sélection des territoires d'exclusion pour les loups. La « mesure T » qui lui a récemment succédé relève plutôt d'une vision socio- centrée : loin de mettre uniquement l'accent sur un découpage territorial par ailleurs existant, elle tend à inscrire les modalités de protection et de gestion des troupeaux dans une politique de responsabilisation des professionnels de l'élevage.
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Publié le 01 janvier 2006
Nombre de lectures 14
Langue Français

Extrait

Melle Sophie Bobbé
Du projet de zonage aux mesures T. Conceptions divergentes
de gestion territoriale des loups dans l'arc alpin
In: Revue de géographie alpine. 2006, Tome 94 N°4. pp. 111-118.
Résumé
Concomitamment à l'arrivée de loups italiens en France, un projet de zonage est lancé. Nous examinerons la logique inhérente à
ce projet, les enjeux qui le sous-tendent et les positions des différents acteurs concernés. A quelle conception de l'occupation
territoriale ce projet de zonage (dans ses différentes versions) répond- il ? Ces différentes versions du projet relèvent d'une vision
écocentrée, fondée sur des notions écologiques (seuil de viabilité, capacité d'accueil) incluant la sélection des territoires
d'exclusion pour les loups. La « mesure T » qui lui a récemment succédé relève plutôt d'une vision socio- centrée : loin de mettre
uniquement l'accent sur un découpage territorial par ailleurs existant, elle tend à inscrire les modalités de protection et de gestion
des troupeaux dans une politique de responsabilisation des professionnels de l'élevage.
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Bobbé Sophie. Du projet de zonage aux mesures T. Conceptions divergentes de gestion territoriale des loups dans l'arc alpin.
In: Revue de géographie alpine. 2006, Tome 94 N°4. pp. 111-118.
doi : 10.3406/rga.2006.5596
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/rga_0035-1121_2006_num_94_4_5596Du projet de zonage aux mesures T.
Conceptions divergentes de gestion territoriale
des loups dans Tare alpin
Sophie Bobbé
INRA— Centre d'Études Transdisciphnaires Sociologie, Anthropologie, Histoire
sbobbe@gmail.com
Résumé : Concomitamment à l'arrivée de incluant la sélection des territoires d'exclusion
pour les loups. La « mesure T » qui lui a récemloups italiens en France, un projet de zonage est
lancé. Nous examinerons la logique inhérente à ment succédé relève plutôt d'une vision socio-
ce projet, les enjeux qui le sous-tendent et les po centrée : loin de mettre uniquement l'accent sur
sitions des différents acteurs concernés. A quelle un découpage territorial par ailleurs existant, elle
conception de l'occupation territoriale ce projet tend à inscrire les modalités de protection et de
de zonage (dans ses différentes versions) répond- gestion des troupeaux dans une politique de re
il ? Ces différentes versions du projet relèvent sponsabilisation des professionnels de l'élevage.
d'une vision écocentrée, fondée sur des notions Mots-clés : Biodiversité, loups, ours, pasto-
écologiques (seuil de viabilité, capacité d'accueil) ralisme, politiques publiques, zonage.
La bibliographie est présentée en page 127
L:
officialisation de l'arrivée de loups italiens sur le territoire français fut accompagnée
de nombreux questionnements et de nombreux débats sur les modalités de protection et
de gestion de ces prédateurs protégés par les réglementations européennes, tant au niveau
des gestionnaires que des professionnels du pastoralisme et des associations de défense de
la Cause animale. Quels peuvent être les critères d'intervention pour limiter, prévenir les
dommages causés par ces colonisateurs de territoires ? Est-il opportun d'envisager un
découpage territorial, un zonage, à partir duquel seront définies des actions différentes
selon les territoires circonscrits ? Doit-on écarter les loups de toutes les aires pastorales ou
souhaite-t-on plutôt encourager leur résidence sur celles riches en ressources alimentaires ?
Autant de questions qui furent débattues et qui donnèrent lieu à des réponses administrat
ives, autrement dit à un ensemble de projets, de décisions et d'actions publiques que nous
nous proposons ici d'examiner en nous centrant sur le projet de zonage des loups dans l'arc
alpin auquel succédera la « mesure T ». À partir de cette étude de cas, nous tenterons
de saisir la conception de l'organisation territoriale qui a sous-tendu le projet de zonage.
Circulation problématique dans un espace anthropisé
Dans la tradition occidentale, selon la typologie proposée par les historiens des systèmes
agraires, l'espace anthropisé se structure selon une succession de cercles concentriques
(hortus, ager, saltus, sylvd) gradués du plus domestique au plus sauvage. Le cercle le plus
proche du « domestique » regroupe la communauté domestique (les hommes et leurs
animaux) ainsi que les lieux de conservation des récoltes. Il inclut également les potagers et
111
La revue de géographie alpine 2006 N°4 CESTION TERRITORIALE DES LOUPS DANS L'ARC ALPIN
vergers {hortus), contigus à la maison. Opposé au précédent, le cercle le plus éloigné (le
« sauvage ») est celui des territoires1 non cultivés (estives) et de la forêt (sylva). Entre ces
deux pôles, un espace intermédiaire (que l'on pourrait qualifier d'« entre-deux » ou de
« familier ») rassemble les terrains cultivés (ager) et les prés pâturés par le bétail à la mi-
saison (saltus). Selon ce modèle, un espace intermédiaire sépare les terres de la faune sauvage
et les domaines des hommes.
C'est à cette conception de la répartition spatiale des êtres vivants que renvoie l'idée, la
rgement partagée, selon laquelle la sylva est la juste place de la faune sauvage. Mais ce
découpage des territoires en tranches cloisonnées occulte un élément essentiel : leur caractère
perméable et la réciprocité des visites des occupants - ces passeurs de frontières faisant fi de
nos classifications comme des espaces que l'homme leur concède (la sylva) et dans lesquels il
voudrait les cantonner. Bien qu'ils leur déplaisent d'y penser, les éleveurs espagnols, qui
n'ont jamais cessé de cohabiter avec les grands mammifères, le savent bien. Les observations
d'ours sur les décharges municipales de villages de montagne sont fréquentes.
S'il est concevable que le loup sorte du bois et que les ours se nourrissent aux abords des
habitations, dans les vergers et prés pâturés des zones de montagne, il est dérangeant de
les savoir aux portes des agglomérations comme ce fut le cas, en France, ces dernières
semaines : «... un loup errant dans le jardin d'une villa de Vence... »2 et un ours « ... à
Auribaila une trentaine de kilometres au sud de Toulouse. . . ». Dans nos esprits de citadins,
la frontière rural/urbain (y compris avec la zone tampon rurbaine) reste opératoire (dans
son imperméabilité) lorsqu'il s'agit de penser de tels déplacements, il en va tout autrement
pour les petits mammifères et pour la microfaune. Mais, face à cette circulation jugée
extravagante par le néophyte, le scientifique a sa réponse. En témoigne un écologue en
charge du programme Life Ours (P. -Y. Quenette), interrogé sur la présence d'un ours
(récemment lâché en Pyrénées) aux confins de Toulouse : « sa présence en plaine n'est pas
anormale ». Une réponse identique est apportée par G. Palomero, chargé d'étudier
l'emplacement des tanières d'ours dans la cordillère Cantabrique, situées à 800 mètres en
moyenne des villages et d'où s'entendent clairement les bruits des humains. Commentant
les allers-retours de loups traversant une nationale, J.-C. Blanco rappelait lui aussi
l'opportunisme de ce canidé.
La typologie des historiens du système agraire vaut pour les professionnels de l'agropasto-
ralisme qui, dans leur grande majorité, refusent à la grande faune ses déplacements hors de
la sylva . Il semble bien qu'il n'en soit pas de même pour les écologues chargés du suivi des
espèces sauvages. Comment le scientifique définit-il le territoire de l'animal et ses limites ?
Quels sont les critères d'ordre écologique qui servent à l'identification des territoires et qui
fondent les mesures de protection et de gestion de ces espèces ?
1 • Par « territoire » nous entendons plutôt « un maillage historique, forgé à des fins de gestion et d'administra
tion locales... que des formes de rapport à l'espace que les individus et les groupes sociaux ne cessent de pro
duire et de transformer dans le cadre de leurs relations sociales » (P. Alphandéry, 2004, p. 5).
2 • Journal La Provence, 26 avril 2006.
3 • « Un témoignage fait état d'

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