Agro-systèmes paysans en crise. Un projet de vidéo-communication en Haïti. Un entretien avec Gérald Belkin - article ; n°98 ; vol.25, pg 359-369
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Agro-systèmes paysans en crise. Un projet de vidéo-communication en Haïti. Un entretien avec Gérald Belkin - article ; n°98 ; vol.25, pg 359-369

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Description

Tiers-Monde - Année 1984 - Volume 25 - Numéro 98 - Pages 359-369
11 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié par
Publié le 01 janvier 1984
Nombre de lectures 23
Langue Français

Extrait

Yvonne Mignot-Lefebvre
Agro-systèmes paysans en crise. Un projet de vidéo-
communication en Haïti. Un entretien avec Gérald Belkin
In: Tiers-Monde. 1984, tome 25 n°98. pp. 359-369.
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Mignot-Lefebvre Yvonne. Agro-systèmes paysans en crise. Un projet de vidéo-communication en Haïti. Un entretien avec
Gérald Belkin. In: Tiers-Monde. 1984, tome 25 n°98. pp. 359-369.
doi : 10.3406/tiers.1984.3386
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/tiers_0040-7356_1984_num_25_98_3386AGRO-SYSTÈMES PAYSANS EN CRISE
UN PROJET DE VIDÉO-COMMUNICATION
EN HAITI
Un entretien avec Gérald Belkin*
propos recueillis par Yvonne Mignot-Lefebvre
Gérald Belkin compte parmi les pionniers de rapproche des processus de
communication sociale par la vidéo. Son parcours, depuis les années 1970, Га
conduit des villages du socialisme Ujamaa en Tanzanie aux paysans haïtiens.
Sa démarche nécessite une rigueur qui ne s'est jamais démentie : préparer
longuement un projet, apprendre ainsi que son équipe la langue parlée dans
le pays, rester un à deux ans dans deux ou trois villages, vivre avec les paysans,
les écouter et parler avec eux.
Au cours ae ces rencontres sont enregistrées des bandes vidéo d'une rare
densité qui prennent à revers beaucoup d'idées reçues, notamment sur le faible
niveau des pratiques agricoles de paysans réputés analphabètes. Or ce qui
apparaît, au contraire, c'est l'extrême compétence que développent ces paysans
dans des situations économiques proches de la survie et une manière originale
de relier l'économique et le politique.
Ces films vidéo circulent dans les universités, les organisations interna
tionales, les associations d'aide au développement, les centres de formation
du Nord comme du Sud et contribuent à une approche plus ouverte aboutiss
ant, par-delà les stéréotypes, à une conception plus nuancée des problèmes de
développement.
A une époque où les produits audio-visuels tendent à se plier dans leur
construction et leur thématique aux supposées exigences d'un public inter
national, Belkin apporte les éléments d'une alternative. Ses interlocuteurs loin
d'être traités sur le mode folklorique retrouvent leur densité d'acteurs sociaux.
L'exotique redevient quotidien et le micro-local sert à étayer une réflexion à
caractère général sur le devenir de nombreuses sociétés agraires du Tiers
Monde aujourd'hui en crise ouverte.
L'équipe de I'icad a été invitée par l'Association « Développement et
* Institut d'Action culturelle pour le Développement. Ferme du marais, 89790 Guerchy.
Gérald Belkin, de nationalité canadienne, est le chef du projet de vidéo-communication en
Haïti.
Revue Tiers Monde, t. XXV, n° 98, Avril-Juin 1984 360 YVONNE MIGNOT-LEFEBVRE
Progrès » à présenter ses travaux en mars 1984 dans le cadre de l'atelier de
recherches audio-visuelles de I'iedes. Nous avons retenu pour présenter cette
démarche la recherche menée au sud de Haïti :
Une collaboration étroite entre chercheurs, vidêastes et paysans
Question : Sous quelle forme se présente le travail que vous avez effectué
en Haïti qui — rappelons-le — est l'un des pays les plus pauvres de l'Amérique
latine ?
Réponse : Paysans... Silences à voix basses est le premier volume d'une col
lection de vingt vidéo-cassettes sur une situation rurale de crise assez typique
dans les zones tropicales, le cas traité ici étant celui du sud de Haïti. Nous
cherchons à valoriser les travaux scientifiques, et les activités de recherches
participatives et de formation du Centre de Madian-Salagnac qui fut pendant
un temps, à mon avis, l'un des projets les plus intéressants du genre effectué
avec la Coopération française. Les travaux accomplis dans le cadre de ce projet,
son insertion dans le milieu, combinés avec notre apport, permettent de faire
entendre la voix des paysans.
Paysans... Silences à voix basses est distribué avec un livret de référence de
400 pages. Un autre livre en trois tomes, et ciblé sur le public spécialisé, sera
publié sous la direction de Georges Anglade en 1984 et reprendra les diverses
études scientifiques menées par le centre de Madian-Salagnac lors de sa période
de forte activité.
Q. — Le Centre agronomique de existait donc avant
l'intervention de I'icad (Institut d'Action culturelle pour le Développement) ?
R. — Oui, depuis quatre ans en tant que projet de recherche multi-disci-
plinaire qui étudiait le milieu avec les paysans, leur agriculture, leur société
et leurs stratégies socio-économiques. Les coopérants et leurs collègues
haïtiens vivaient dans le milieu, enseignaient dans les Facultés, menaient des
stages avec des étudiants et des paysans sur le terrain.
Pour illustrer certains systèmes de cultures et l'adaptation des paysans aux
divers milieux, les agronomes avaient même fait un film en 16 mm — Jadin
Kompèmx — comme de plus en plus de gens de professions diverses qui réalisent
eux-mêmes les films et vidéos dont ils ont besoin. Mais dans ce cas précis, le
seul film des agronomes ne suffisait pas à porter un message qu'ils savaient
complexe et controversé.
Q. — Pourquoi controversé ?
R. — Les préjugés contre les paysans et contre les systèmes agraires
paysans sont forts. Ils ne sont pas toujours innocents et sont constamment
nourris par une littérature technique voire technocratique. En Haïti, il est
fréquent d'entendre Haïtiens et techniciens étrangers expliquer le tragique
sous-développement par l'inconscience écologique du paysan haïtien, son
immobilisme traditionaliste, ses bas rendements, son analphabétisme, son
individualisme, etc., autant de notions relatives et qui ne sont basées sur aucune
étude scientique.
Les résultats de Salagnac vont à l'encontre de ces idées. Par exemple, les
agronomes relèvent des rendements de 50 q à l'hectare en matières sèches
1. Le jardin de mon copain. VIDÉO-COMMUNICATION EN HAÏTI 361
consommables — sans irrigation ni intrants industriels — à Moneyron, qui a
été un de nos lieux de travail. Ce sont des très bons rendements qui démontrent,
si besoin en était, une connaissance du milieu, une rigueur dans le travail, et la
présence d'agriculteurs aptes à s'approprier des techniques d'amélioration si
les moyens le permettent. Le problème est là. Ces parcelles à haut rendement
ne représentent qu'une partie d'un système de culture qui, lui, est en déséquil
ibre grave et « non reproductible » sans apports et changements, ce qui
dépasse les moyens économiques et politiques des agriculteurs.
Les contraintes majeures au développement rural en Haïti sont davantage
le manque d'investissements, d'aménagement du territoire et de recherche;
l'insécurité économique et foncière ; la mauvaise santé des familles ; le manque
de représentation démocratique pour corriger des politiques inappropriées ; la
décapitalisation des exploitations, etc.
La mise en évidence d'un potentiel général d'adaptation chez les petits
agriculteurs va à l'encontre des idées reçues.
Sur la démarche propre à la vidéo-communication
Q. — Quelle est la différence entre le film qu'avait fait l'équipe d'agro
nomes de Salagnac et ce que vous avez proposé de faire ensemble ?
R. — Jadin Kompèm est un film unique de quarante minutes, qui juxtapose
des images et du commentaire faits par les agronomes dans un montage
traditionnel. Il illustre la synthèse des auteurs. Les agronomes qui savaient
bien la richesse d'expériences et d'expression des paysans ont voulu faire faire
quelque chose qui rendrait davantage la mesure des faits et des gens.
Ce qui les intéressait, je crois, dans notre façon de travailler était l'impor
tance attachée au récit — • à la parole in situ. Ils n'ont eu aucun mal à com
prendre que nous travaillions au jour le jour, dans la foulée de la vie des gens,
sans imposer les sujets. Cette approche — qui n'a pas que des avantages év
idemment — permet de rendre compte de la relativité de chaque chose en
elle-même et de l'interdépendance des éléments. Un cochon, par exemple,
n'existe pas en soi, pas

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