Alternance de l échange restreint et de l échange généralisé dans le système matrimonial orokaiva - article ; n°4 ; vol.10, pg 5-34
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Alternance de l'échange restreint et de l'échange généralisé dans le système matrimonial orokaiva - article ; n°4 ; vol.10, pg 5-34

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Description

L'Homme - Année 1970 - Volume 10 - Numéro 4 - Pages 5-34
30 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié par
Publié le 01 janvier 1970
Nombre de lectures 26
Langue Français
Poids de l'ouvrage 2 Mo

Extrait

Eric Schwimmer
Alternance de l'échange restreint et de l'échange généralisé
dans le système matrimonial orokaiva
In: L'Homme, 1970, tome 10 n°4. pp. 5-34.
Citer ce document / Cite this document :
Schwimmer Eric. Alternance de l'échange restreint et de l'échange généralisé dans le système matrimonial orokaiva. In:
L'Homme, 1970, tome 10 n°4. pp. 5-34.
doi : 10.3406/hom.1970.367143
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/hom_0439-4216_1970_num_10_4_367143ALTERNANCE DE L'ÉCHANGE RESTREINT
ET DE L'ÉCHANGE GÉNÉRALISÉ
DANS LE SYSTÈME MATRIMONIAL OROKAIVA
par
ERIC SCHWIMMER
I. — Vers une explication de l'échange matrimonial mélanésien1
Bien que les systèmes de parenté mélanésiens présentent des variations locales
superficielles, la plupart des chercheurs ont senti qu'il y avait entre eux un
certain air de famille et que ces systèmes apparemment si différents devaient
pouvoir être ramenés à un commun modèle de base. Lorsque Claude Lévi-Strauss
rédigeait Les Structures élémentaires de la parenté, les données ethnographiques
à partir desquelles on aurait pu construire avec certitude un modèle général
des systèmes de parenté mélanésiens faisaient défaut. Néanmoins, Lévi-Strauss
écrivit un court passage sur ce sujet et risqua une hypothèse qui semblait d'au
tant plus audacieuse qu'à cette époque elle ne pouvait s'appuyer que sur un seul
compte rendu ethnographique : une description par F. E. Williams du système
de parenté apparemment aberrant des Koiari (1932). Je crois néanmoins que
cette hypothèse constitue un point de départ utile pour l'analyse des systèmes
mélanésiens :
« La Nouvelle-Guinée, et les régions avoisinantes, présentent, à un
d' degré ' affiliation exceptionnel, sexuelle un ', c'est-à-dire phénomène une que différenciation Williams a décrit de statut sous entre le nom le
frère et la sœur, l'un suivant la ligne paternelle et l'autre la ligne matern
elle. Il est impossible d'interpréter ce phénomène en fonction de l'échange
restreint ; mais il devient très clair quand on l'envisage sous l'angle de
l'échange généralisé, puisqu'en mariage matrilatéral comme en mariage
patrilatéral, le frère et la sœur suivent des destins matrimoniaux diffé-
1. Je voudrais remercier le département d'anthropologie de l'Université d'Oregon, le Cons
eil canadien et la fondation Killam pour l'aide financière qu'ils m'ont accordée pour cette
recherche. Je voudrais aussi remercier le Dr. W. P. Carstens qui a lu le manuscrit et m'a
fait des suggestions utiles, particulièrement au sujet des comparaisons africaines. 6 ERIC SCHWIMMER
rents. L'étude des phénomènes d'affiliation sexuelle [...] permet donc de
définir, à travers tout le monde mélanésien, une sorte de faille de l'échange
généralisé [...] Toute l'aire orientale, ' océano-américaine ', comme on peut
la nommer, forme donc une sorte de théâtre, où. se rencontrent échange
restreint et échange généralisé, tantôt pour s'opposer, et tantôt pour se
combiner » (Lévi-Strauss 1949 ; rééd. 1967 : 534-535).
Depuis 1949, Lévi-Strauss a apporté à l'analyse des sociétés mélanésiennes
plusieurs contributions. Dans la deuxième édition des Structures élémentaires
de la parenté, il suggérait que
« ... la ligne de partage entre les sociétés traditionnellement appelées
' primitives ' et les sociétés dites ' civilisées ' ne coïncide pas avec celle entre
élémentaires' et 'structures complexes' » (1967 : 123). 'structures
Il affirmait en particulier que plusieurs structures mélanésiennes « ne relèvent
pas des structures élémentaires » (ibid. : 122). Nous trouvons la signification
précise de cette affirmation dans un autre essai, « The Future of Kinship Studies »,
publié en anglais en 1966. Alors que les structures élémentaires opèrent idéalement
à l'intérieur d'un nombre fixe de classes matrimoniales, les règles des structures
complexes sont telles que le système exige un approvisionnement incessant en
nouveaux groupes d'alliés pour continuer à fonctionner. Le réseau d'alliance
qui en résulte est de type probabiliste. On retrouve des règles semblables dans
les systèmes Crow et Omaha, mais aussi dans plusieurs autres aires culturelles,
y compris en Mélanésie (1966 : 21).
Depuis leur publication, certains anthropologues ont tenté de vérifier empir
iquement ces hypothèses. Pour ne mentionner que deux exemples, Guiart (1968)
a démontré la présence de règles d'échange restreint en Nouvelle-Calédonie et
Kelly (1968) celle de l'échange généralisé à Dobu. Il semble toutefois qu'une
implication décisive des hypothèses lévi-straussiennes reste à explorer. Elle
suggère que l'échange restreint et l'échange généralisé (ou peut-être l'échange
restreint et complexe) se rencontrent dans l'aire culturelle mélanésienne.
Ceci supposerait dans une même société l'existence simultanée et quelque inter
action des deux formes. Si pareille société existait, l'hypothèse impliquerait
que l'échange généralisé tente de s'y installer, mais n'y réussit pas durablement,
tandis que les caractéristiques de l'échange restreint tendent constamment à se
réaffirmer comme le résultat de cet échec.
L'intérêt du cas des Orokaiva, débattu dans cet article, réside dans la coexis
tence des deux systèmes, tant au niveau des normes qu'à celui des faits. Dans
la structure sociale des Orokaiva, on peut observer l'interaction des deux systèmes
et découvrir les facteurs qui les maintiennent en opposition. On obtient ainsi un
modèle d'un niveau d'abstraction plus élevé que ceux de Guiart et de Kelly, mais
qui les englobe tous deux. Dans ce modèle, les systèmes de moitiés sont perpé- ECHANGE RESTREINT ET ECHANGE GENERALISE 7
tuellement brisés par des forces suscitées par la structure elle-même ; néanmoins,
le modèle permet aussi de prédire leur perpétuel rétablissement. Il est, en fait,
celui d'un mouvement cyclique de l'un à l'autre schéma. Aucun des deux pris
à part n'épuise la réalité de la structure mélanésienne, laquelle inclut au contraire
leur alternance nécessaire dans le temps et dans l'espace. Le principal objet de
ce travail est d'étudier la dynamique de cette alternance.
II. — L'arrière-plan ethnographique
Les Orokaiva, population de 25 000 habitants, vivent sur les pentes ou à
proximité du mont Lamington, dans le district nord de Papouasie (fig. 1). Auprès
du volcan la terre est extrêmement fertile, bien arrosée, bien drainée, et fort
ement peuplée, mais densité de peuplement et fertilité décroissent vers le nord
et l'ouest. Le territoire est entouré d'une brousse où la population est clairsemée.
La langue, qui appartient à la famille Binandere, est tout à fait papouasienne.
Physiquement, les Orokaiva sont du type montagnard papouasien avec un apport
mélangé polyno-mélanésien. Divers éléments de la culture matérielle — arts,
danses, chansons, technologie — viennent de la côte, laquelle est culturellement
plus riche que la région montagneuse et où l'on trouve des indications nettes
d'un établissement malayo-polynésien (Dupeyrat 1965). Le taro constitue le
principal produit agricole des Orokaiva, mais on cultivait aussi de nombreux
petits jardins d'ignames.
Le contact intensif avec l'homme blanc commença dans les années 1890 à la
suite des découvertes de dépôts d'or le long de la rivière Kumusi et dans la région
de Kokoda. Une route fut construite à travers le territoire Orokaiva vers 1904.
En 1905, la Papouasie passa du contrôle anglais au contrôle australien. Les
Orokaiva furent parmi les premières tribus de Nouvelle-Guinée où se développèrent
des mouvements de type millénariste : le culte Baigona (19 12) et le culte Taro
(1914). La région

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