Amérique latine : l « impossibilité » du développement - article ; n°38 ; vol.10, pg 251-271
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Amérique latine : l'« impossibilité » du développement - article ; n°38 ; vol.10, pg 251-271

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Description

Tiers-Monde - Année 1969 - Volume 10 - Numéro 38 - Pages 251-271
21 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié par
Publié le 01 janvier 1969
Nombre de lectures 11
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

Pablo González Casanova
Amérique latine : l'« impossibilité » du développement
In: Tiers-Monde. 1969, tome 10 n°38. pp. 251-271.
Citer ce document / Cite this document :
Casanova Pablo González. Amérique latine : l'« impossibilité » du développement. In: Tiers-Monde. 1969, tome 10 n°38. pp.
251-271.
doi : 10.3406/tiers.1969.2493
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/tiers_0040-7356_1969_num_10_38_2493AMÉRIQUE LATINE :
L' « IMPOSSIBILITÉ »
DU DÉVELOPPEMENT
par Pablo Gonzalez Casanova*
LE PROBLEME
L'après-guerre a été particulièrement prodigue en études du déve
loppement économique en tant que processus pacifique. Des groupes
et des écoles d'idéologies très diverses sont partis d'un accord minimum
qui leur a permis d'étudier la reconstruction européenne et le déve
loppement du Tiers Monde comme un phénomène politiquement viable.
Le développement économique est devenu un thème étroitement lié
aux idées de coexistence pacifique, d'échanges pacifiques et de réformes.
Des idéologues conservateurs et libéraux, des idéologues nationalistes
des pays pauvres, y compris des idéologues communistes, sont arrivés
à envisager la possibilité de « révolutions pacifiques » et jusqu'à « des
modifications pacifiques au socialisme » sous une forme si fréquente
et optimiste qu'il ne sera pas facile de se libérer de cette image agréable
de l'évolution du Tiers Monde pour accepter les évidences historiques
qui ruinent les hypothèses.
La reconstruction européenne s'est opérée, dans une large mesure,
conformément aux prévisions. L'espoir que la coexistence pacifique se
maintiendra et qu'il ne sera pas fait usage des armes thermonucléaires
a même des bases sérieuses. Mais le Tiers Monde n'a fait que péricliter
* Professeur à l'Université de Mexico.
251 PABLO GONZALEZ CASANOVA
en tant que puissance politique internationale et intérieure, écrasé qu'il
était par les problèmes économiques et les coups d'Etat.
La crise des nouvelles nations, la fin politique ou physique des
pères de l'indépendance sont venues à bout du leadership éphémère que
ces derniers avaient exercé pendant un moment. Il ne serait pas exagéré
maintenant de dire que le Tiers Monde est un phénomène historique.
La pauvreté et le sous-développement subsistent toujours en tant que
processus dynamique qui accélère l'écart entre les pays riches et les
pays pauvres ; la croissance continue en tant que phénomène particuli
èrement déséquilibré. Mais chaque fois devient plus évidente l'impossib
ilité d'une politique de développement avec les réformes pacifiques de
structure qui exigent : réformes agraires, fiscales, de redistribution plus
équitable du revenu national et international, d'augmentation du taux
de l'épargne et des investissements dans les pays sous-développés, de
planification des économies de marché des pays sous-développés.
Il ne s'agit pas de l'impossibilité de mettre en pratique une politique
déterminée de développement, ni de l'impossibilité de mettre en pra
tique certaines mesures qui manquent et laissent l'espoir d'en trouver
d'autres qui se sont montrées valables, mais d'un problème particulièr
ement « ennuyeux » et difficile à résoudre : l'impossibilité politique, le
vide politique du développement. La découverte de ce fait ne supprime
pas la possibilité de concevoir et d'appliquer un autre genre de poli
tique et de faire une politique en fonction d'objectifs du développement.
Il n'existe pas de « vide politique » total, mais le vide d'un certain type
de politique pacifique en rapport avec un certain type d'objectifs de
développement. Et ce vide est comblé par d'autres politiques qui rem
placent la thématique du développement par celle du conflit.
Mais le phénomène n'est pas facile à admettre. Les politiques nouv
elles du conflit coïncident avec les résidus théoriques de la politique
de développement, avec les attitudes mentales et les « habitudes sociales »
des spécialistes du développement, avec « des projets inefficaces » de
développement — de l'efficacité possible de laquelle on ne désespère
pas totalement ou dont tous ne désespèrent pas et qui sont remplacés
par d'autres — efficaces ou non — dans lesquels apparaît une conscience
nette de l'avenir, une « conscience de l'avenir » en tant que révolution
et contre-révolution et non en tant que développement (i).
(i) Les idées de François Perroux « des freins et des blocages » au développement qui
se « manifestent précisément au niveau des attitudes mentales et des habitudes sociales »
252 LATINE : L' « IMPOSSIBILITÉ » DU DÉVELOPPEMENT AMÉRIQUE
Mais les affirmations qui précèdent s'exposent à certains doutes
légitimes. Il faudrait examiner au premier abord s'il s'agit de simples
différences idéologiques d'interprétation des faits et si ce genre d'idées
n'obéit pas à des préjugés d'école ou de parti. Il faudrait considérer,
d'autre part, s'il existe une substitution véritable dans la thématique,
un changement réel de politiques, d'accent politique dans lequel on a
passé du développement à la révolution ou à la contre-révolution, ou
s'il s'agit d'une erreur d'appréciation dans ce changement étant donné
que l'on a toujours présenté la politique du développement et la poli
tique du conflit comme des phénomènes concomitants et simultanés
qui se poursuivent aujourd'hui. L'objectif serait de voir si une politique
de développement économique pacifique est réellement impossible telle
qu'elle a été conçue dans l'après-guerre et si cette impossibilité est un
phénomène empiriquement verifiable.
A cet effet, nous voudrions étudier ici, à titre de préliminaire, le
problème en Amérique latine où les difficultés rencontrées pour défendre
les idées anciennes sont peut-être plus grandes parce que le développe
ment est particulièrement critique. Le problème peut être abordé sous
la forme suivante :
i° En prenant deux modèles théoriques correspondant aux courants
contemporains politiquement plus significatifs et antagonistes, et en
étudiant la forme que revêtent les faits en relations avec le développe
ment économico-social et le développement du « conflit » : un modèle
de Г « instabilité » et un modèle de la « révolution ».
2° En étudiant l'efficacité ou la fréquence des mesures politiques du
développement et ou la des de
la révolution et de la contre-révolution.
A l'aide de ces éléments, nous essaierons de cerner le problème de
l'impossibilité d'une politique de développement économique de l'Amér
ique latine dans les conditions historiques actuelles.
s'appliquent aux spécialistes mêmes de la science économique, de la science politique et
de la sociologie. Cf. François Perroux, Les blocages de la croissance et du développement,
dans Kevista de Economia, n° 93, Madrid, 1966, et dans Tiers Monde (avril-juin 1966), et du
même auteur : L'idée de progrès devant la science économique de ce temps, dans Encyclopédie
française, vol. IX. Les mesures des progrès économiques et l'idée d'économie progressive. Cahiers
de l'I.S.E.A., série I.
253 PABLO GONZALEZ CASANOVA
UN MODELE D'INSTABILITÉ
Les hypothèses de Karl Deutsch sur l'instabilité (i) se ramènent à
postuler que celle-ci est due à un développement déséquilibré entre
deux groupes de variables qui évoluent à un rythme différent. Dans le
premier groupe qui évolue plus rapidement que le second, on trouve :
a) la population exposée à la modernisation;
b) l'audience des moyens de communication de masse;
c) la qui vote;
d) les alphabétisés;
e) les personnes qui changent de lieu de résidence après leur naissance;

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